Ça y est c’est la bamboche ! Du monde partout dans Paris, les guirlandes de noël pendent au dessus des rues aux trottoirs bondés de badauds à Tote bag qui papillonnent d'une échoppe réouverte à l'autre au gré des protocoles sanitaires et des jauges réduites. Le client est roi dans un rayon de vingt kilomètres autour de chez lui. Après un mois de fermeture forcée, les commerçants les accueillent comme s'ils étaient les princes fortunés de quelques contrées d'Arabie. C'est l'heure du déconfinement pour consommer. "Grâce au confinement", les français ont épargné 100 milliards d’euros. La consommation des ménages représente habituellement 55% du PIB français. Autant dire qu'en cette fin d'année, le peuple a le pouvoir économique du pays entre les mains. C'est plus que jamais le moment de consommer intelligent -> local et en cash.
Place de la République à Paris, comme partout en France, les indignés de tous horizons se rassemblent contre le projet de loi de sécurité globale (adoptée en première lecture au parlement) et son fameux article 24 modifiant la loi de 1881 sur la liberté de la presse. L'article prévoit un an de prison et 45 000 euros d'amende la diffusion de "l'image du visage ou tout autre élément d'identification" d'un policier ou d'un gendarme en intervention, lorsque celle-ci a pour but de porter "atteinte à son intégrité physique ou psychique".
Cet article est la pièce à conviction supplémentaire du dépassement total du pouvoir face à son époque. Déjà, il ne tient pas la route :
Flous sémantique et juridique : Il ne serait pas interdit de filmer, mais de diffuser avec une intention malveillante. Qui juge d’une intention malveillante ? Admettons que cette loi passe, je ne lui donne pas une manifestation pour conduire à 50 procès tant elle est mal ficelée et ouverte à toutes les interprétations. D'autant que la police n'a pas attendu l'article en question pour se conforter dans un sentiment d'impunité qui lui autorise déjà de molester les journalistes, les citoyens à smart-phone ou toute autre gueule qui ne lui revient pas dans les manifestations.
Flou contreproductif : Loi bourrine mal ficelée par incompétents paniqués, dépassés par la technologie, elle permet de réunir les oppositions contre elle (sauf le RN) et ouvre la voie à un effet Streisand. Je ne donne pas deux semaines pour qu'une application gratuite pour smartphone permette à chaque videaste d’instantanément transformer la tête d'un policier entrain de matraquer un manifestant, en SS ou en chaton mignon. La représentation graphique de la censure sur les vidéos de violence serait encore plus désastreuse pour l'image de la police dans son ensemble. De la contrainte naît la création, si la loi passait je suis prêt à parier que la police se reprendrait dans les dents un effet boomerang artistique et symbolique qu’elle est loin d’anticiper.
Flou inutile : Cacher quoi exactement ? Les policiers encadrant les manifestations sont désormais masqués de la tête au pied, sous une carapace de protection digne d'un film de Marvel et un casque à visière. Ils cachent déjà bien souvent leur numéro d’identification (ce qui est interdit). C'est donc bien une volonté du pouvoir d'encourager la police à faire régner l'ordre "quoi qu'il en coute" humainement.
Au-delà de ces flous, cette loi et le contexte dans lequel elle survient (le passage a tabac filmé par une caméra de surveillance - puis un smartphone - d’un producteur de musique par 3 policiers (sous le regard impassible d’une vingtaine d’autres) est limpide : chacun voit ou devine que la Police de ce pays a quelque chose à se reprocher. Les violences policières sont légion depuis 2016 et le passage en force de la Loi Travail (sous François Hollande qui joue désormais les vierges effarouchées), le rythme s'est démultiplié sous le règne d'un Jupiter 1er (tétanisé) lors des mobilisations des Gilets Jaunes il y a déjà deux ans. Combien de morts, de visages délibérément défigurés au flashball, de gens volontairement humiliés par des forces dites de l'ordre ?
Pour justifier de l’installation massive des caméras de surveillance et autres drones les syndicats policiers utilisaient la bonne réthorique moraliste : Vous n’avez pas à avoir peur d’être filmés si vous n’aviez rien à vous reprocher, vous n'avez rien à craindre de la surveillance.
On peut leur retourner l'argument aujourd'hui : Qu'avez-vous donc à cacher ? Y a-t-il de quoi avoir honte d'être policier en 2020 ?
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