20 juin 2025

JTPA 4 : Crier au racisme lave-t-il plus blanc ?

par
4ème numéro du podcast Jamais Trop Pas Assez. Dans la fournaise du studio, Seb Musset et Louis Marie ont bravé les incidents techniques et les démarchages téléphoniques en plein enregistrement pour débriefer la revue de presse de l'actualité politique et sociale de la semaine. 

📟 Dans ses chroniques, Louis Marie nous parlera de l'union improbable des catholiques et des protestants en Irlande du Nord (pour lutter contre les OQTF) et se demandera pourquoi diable les Français sont dingues des tatouages ? 

🕵️‍♂️ Seb Musset, lui, tentera de savoir si Jean-Luc Mélenchon est vraiment "un salopard antisémite" comme le prétend le député Jérôme Guedj ? (la réponse 4 va vous surprendre). 

Il s'interrogera aussi sur cette étrange volonté du "camp du bien" de voir en chaque Français un sale "raciste". 

🎬 En fin d'émission, le duo revient sur la carrière du cinéaste Yves Boisset, récemment disparu, à travers l'évocation de cinq de ses plus grands films. 

Il sera également question d'orques, de Gandhi, de Douarnenez, de la buvette de l'Assemblée nationale et de Gilets jaunes.

Bref de l'éclectisme (à peu près) éclairé


Livres cités : 
La société ingouvernable, Grégoire Chamayou, ed. La fabrique 
Le front national des villes, le front national des champs, Octave Nitkowski, ed.jacob Duvernet 
A la ligne, Joseph Ponthus, ed. Table ronde 

Films cités : 
7 morts sur ordonnance, Jacques Rouffio (1974) 
Braveheart, Mel Gibson (1995) 
Gandhi, Richard Attenborough (1982) 
Bloody Sunday, Paul Greengrass (2003) 
71, Yann Domange (2014) 
RAS, Yves Boisset (1970) 
Dupont Lajoie, Yves Boisset (1975) 
Le juge Fayard, Yves Boisset (1977) 
La femme flic, Yves Boisset (1979) 
Le prix du danger, Yves Boisset (1983) 

Podcast cité : Dis-cor-dia

16 juin 2025

Vers une société "vigilante" à la française ?

par
Ce texte est la reprise de ma chronique dans l'épisode 3 du podcast Jamais Trop Pas Assez, à l'écoute ici.

 -> Introduction de la chronique avec la musique de fanfare du film Rocky

Je sais ce que cette musique t’évoque Louis Marie ! Les bras musclés de notre leader suprême tapant dans son sac de training, cliché en noir et blanc magnifié sous l’œil de Soazig de La Moissonnière, la Leni Riefenstahl de l’Élysée. Une photo garantie sans hormones, sans drogue, sans recours au trucage par intelligence artificielle !

Mais c’est un piège. Non, il ne s’agit pas de notre Jupiter en séance de CrossFit. Il s’agit simplement de la fanfare musicale du film Rocky, signée Bill Conti. 

Tu te souviens de Rocky ? L’histoire de ce fils d’immigré italien, ouvrier au chômage, qui poursuit son rêve américain et, à la force des poings, trouve sa dignité sur le ring, mais aussi l’amour et la célébrité. Ne sois pas impatient Louis Marie, tu verras qu’à la fin de cette chronique, on peut tout de même établir un lien entre Rocky Balboa et Emmanuel Macron. 

Revenons à Rocky
Né sous les années de gauche de Carter, Rocky (1976) est le premier film d’une franchise qui rendra célèbre son interprète principal, Sylvester Stallone, lequel prendra son envol sous les années Reagan. C’est aussi le seul film de la série signé John G. Avildsen. Ce que tu ne sais peut-être pas, c’est qu’Avildsen concluait avec Rocky sa trilogie sociale sur l’Amérique du début des années 70. Les deux autres films, plus sombres, sont Save the Tiger (1972), avec Jack Lemmon — variation en temps réel sur un cadre lambda qui s’interroge sur le sens de la vie dans un New York déshumanisé —, et un premier film choc nommé Joe, c'est aussi l'amérique (1970). C’est ce dernier qui m’intéresse ici. 

Joe est un film d’auteur passé inaperçu en France, mais qui connut un large succès aux États-Unis, où il est aujourd’hui élevé au rang de film générationnel, aux côtés de Easy Rider ou de La Fièvre du samedi soir entre lesquels il s’intercale. Le film raconte l’histoire d’un cadre dans la publicité, Bill, un Mad Men un peu terne, centriste. Bill veut venger sa fille, hospitalisée après une overdose provoquée par la came dégueulasse de son amant-dealer. (On vous le rappelle : dites merde aux dealers)
.
Par colère, et presque par accident, Bill tue ce jeune dealer, ce sale peunke. Il culpabilise un peu, puis se rend compte que personne ne pleure ce déchet.
Et là, il rencontre un autre paumé, Joe, un ouvrier bien à droite, enragé contre tout : les politiques, son salaire de merde, son déclassement. Rien ne les rapproche, a priori, sauf un secret : Joe devine tout de suite le meurtre. Les deux partent alors dans une virée d’épuration de la racaille beatnik dans les rues d’un New York qui, à l’orée des années 1970, ressemblait à ce qu’est devenue la Porte de la Chapelle en 2025. Je ne vous raconte pas la fin (il y a un twist délicieux dans le dernier plan).
 

Ce film est à l’origine d’un genre : le Vigilante movie

Les vigilante movies ont pour point commun de mettre en scène des personnages simples — hommes du peuple, ouvriers ou cadres (dans Joe, on a les deux) — qui, confrontés à des agressions violentes, face au laxisme de la justice et à l’inaction de l’État, décident de faire justice eux-mêmes. Le plus connu est Le Justicier dans la ville (Death Wish) avec Charles Bronson, sorti en 1974.
 Mais on peut citer aussi Justice sauvage de Phil Karlson (1975), Rolling Thunder de John Flynn (1977), Cobra de George Cosmatos avec Stallone (1986), ou encore Taxi Driver de Martin Scorsese (1976), avec Robert De Niro.
Sans oublier le dépouillé Vigilante de William Lustig (1982), mon petit favori. 

On peut voir dans le Vigilante movie la transposition urbaine d’un genre alors en déclin : le western.
Mais ici, les enjeux de conquête de territoire sont renouvelés : il ne s’agit plus de conquérir un territoire, mais de le défendre, ainsi que les siens, face aux « barbares ». Comme l’écrit Quentin Tarantino dans son livre Cinema Speculations, le genre des vigilantes s’adressait à une certaine Amérique — celle de « la majorité silencieuse » chère à Richard Nixon —, ces Américains qui, en regardant par la vitre de leur voiture, en lisant les journaux, ou en regardant les infos du soir, ne reconnaissaient plus leur pays.
 Ils cherchaient leur Amérique, mais ne la trouvaient plus nulle part. 

Le Vigilante movie, c’est aussi un contrecoup à la vague hippie et aux idéaux pacifistes de la fin des années 60.
 Dans une Amérique des années 70 où les crimes impunis se multiplient, où la délinquance liée à la drogue explose, où la désindustrialisation s’accélère et la confiance dans les institutions s’effondre, ces films traduisent un besoin de justice directe, brutale, instinctive. 

Bref, un climat qui, par certains aspects, ressemble à celui que nous vivons aujourd’hui en France. 

Car, tu l’auras noté, il y a depuis quelques temps une montée du climat anxiogène dans les rues de notre beau pays
Moi même, pourtant homme bien bâti et formé aux techniques de combat par dissimulation derrière mon exemplaire des Inrockuptibles (spécial vasectomie), je ne m’aventure plus dans certains quartiers de ce trou à merde géant qu’est devenu Paris. J’ai renoncé à prendre ses transports en commun du tiers-monde où tu peux faire pousser sur les voies parce qu’un sans papier vit mal son burn-out sociétal, ou prendre un coup de canif pour refus de don de cigarette ou, comme ça, juste parce que t’es blanc (et non, personne n’est parfait). 
Ce n’est pas mieux en surface, pas loin d’ici, un gang de gentils garçons pourtant bien identifiés par la mairie comme « individus à problème » (en langage municipal ça veut dire : dont il faut subventionner les familles), ces charmants individus donc ont tué à la machette Elias, adolescent de 15 ans, pour récupérer son smartphone. 
Plus haut, dans le onzième, arrondissement pas siècle, c’est une tentative d’enlèvement de la fille d’un ponte de la crypto monnaie par un gang de racailles qui a été filmé sous tous les angles. La tentative succédait à un autre enlèvement quelques jours plus tôt, lui suivi de mutilations et d’actes de barbarie. 
Ailleurs en France ce sont ces écoliers, ces joggeuses qui sont tuées, ces enseignants décapités, cette surveillante récemment, poignardée dans un collège. Il y a évidemment les incivilités quotidiennes, là c’est un festival où que tu ailles. Rodéos urbains, trottinettes dans les trains, crachats… 

Cette montée en flèche des incivilités et de la violence survient dans une apathie générale médiatique et politique, assez curieuse. Exemple récent, la déclaration de Macron dans le Parisien au sujet de cette épidémie de morts violentes. Je cite notre héros, dans son globish déconnecté : « Certains préfèrent, pendant ce temps-là, brainwasher (lavage de cerveau) sur l’invasion du pays et les derniers faits-divers ». Cette déclaration survient quelques heures après le bouleversant témoignage du père de Benoit, adolescent poignardé à Dax pour une simple histoire de casquette volée à la suite de la victoire du PSG. 

D’un côté la colère et la réaction logique d’un père dont je n’ose même pas imaginer la douleur, de l’autre la froideur et le cynisme d’un Macron dont on rappelle qu’il n’a pas d’enfant, vu qu’il en est un lui même un et qu’il évolue dans un environnement sous cloche et hyper sécurisé. 

On peut citer aussi Elisabeth Borne dans une interview au Parisien. Pour celle qui passe d’un portefeuille de ministre à l’autre au gré des revers électoraux de Macron, il est important de « privilégier la réflexion » par rapport à la « surenchère de mesures éculées », après « chaque actualité dramatique ». « On ne doit ni légiférer à chaud, ni dans l’émotion ». C’est bien Elizabeth, toute la rédaction du Bondy Blog t’applaudit. Maintenant tu n’as plus qu’aller dire ça aux familles de Samuel Paty et Dominique Bernard. 

Pour ces gens, c’est simple. Il n’y a pas de violence, pas de danger, pas d’insécurité. Pour eux même l’insécurité est une abstraction, c’est un concept populacier. Alors c’est vrai, l’insécurité n’est pas une réalité : c’est un sentiment. Comme le sentiment amoureux. Il n’en est pas moins vrai que quand tu es amoureux, tu es amoureux et que cela colore ta vie. Un sentiment est une déduction des sens. La montée de la violence est une perception, le manque de réaction des autorités face à ce qui est ta réalité est une autre perception. C’est ce décalage entre deux perceptions qui crée de la colère chez l’individu. La sentiment qu’il a que la prochaine fois ce sera lui ou ses enfants, ce sentiment jamais Macron ne l’aura. Il n’est ni parent ni du peuple. 

Face à ce déni, les gens rationnels disposant de deux yeux et d’un pragmatisme standard sont poussés à réagir. Si cette montée de la sauvagerie française se poursuit, l’auto défense se généralisera. Note que dans les deux affaires d’enlèvement liés à la crypto monnaie, l’une a été résolue grâce à la vigilance des riverains, l’autre a été déjouée par l’intervention de quelques riverains qui ont physiquement, au risque de leur vie, pris les choses en main. 
Pour l’instant, vue l’exponentielle des crimes et délits, je vais être honnête je trouve les Français étonnement passifs. D’ailleurs ils sont incités à ne rien faire. Regardons ce tweet éloquent du Ministère de l’Intérieur au sujet de la montée des homejacking : 

Le homejacking désigne un vol commis au sein du domicile en présence des habitants. En cas d'intrusion dans votre domicile : Contactez immédiatement le 17
Ne prenez aucun risque. 5 ans d’emprisonnement 75000 euros d’amande.  

Sans que l'on sache si c’est toi ou le voyou que le Ministère cherche à intimider. En vérité : si l'on s’introduit chez toi pour t’agresser et te torturer toi et tes enfants, et que tu saisis l’arme de ton agresseur pour l'éliminer, tu risques concrètement plus de prison que lui. Si l’Etat veut bien que tu t’euthanasies faute de soin, il ne ne veut pas que tu te mêles de défendre ta vie. L’ordre c’est lui. Si tu commences à gérer les agresseurs par les armes, il sait qu’il sera vite dans le viseur. Le pouvoir garde en mémoire nos épisodes révolutionnaires. 

De la violence il y en a toujours eu, mais une comme cela, larvée, faisant partie du décor, et niée, même moquée, au plus haut sommet de l’Etat, jamais. Il n’y a aucune volonté de régler ce problème majeur, parce qu’il a tout simplement un refus même d’admettre cette réalité

Regarde la sécurité routière : Au début des années 70, on tournait à 15000 morts par an sur les routes. On était dans un laxisme total par rapport à la sécurité en voiture. Fallait par froisser notre industrie. Et pourtant, après une le fois le problème identifié et surtout traité, le pays a chuté à moins de 2000 morts aujourd’hui. Cela reste énorme mais la baisse est sensible. Quand le pouvoir veut, il peut. 

Mais quelles sont les raisons de cette violence au quotidien ?

Qui a dit l’immigration massive récente ? Je t’arrête Louis Marie, les statistiques ethniques étant interdites nous ne pouvons en débattre. Rien de mieux pour s’empêcher de trouver une solution que de casser les outils pour évaluer objectivement la situation. 

Non, je pointe en premier, le laxisme judiciaire. La plupart des crimes ont des auteurs qui étaient déjà fichés, condamnés sans peine. On a des mecs qui ont des casiers longs comme le bras et qui n’ont pas fait l’ombre d’une journée de prison. De l’incivilité au crime, il n’y a qu’une succession de renoncement à punir de la part d’une justice comme dire… globalement de gauche et hors sol, pardon pour le pléonasme. Dans cet esprit, on citera le premier président de la Cour de cassation, l’un des plus hauts magistrats de France, qui alerte dans Mediapart, sur l’inquiétant développement d’un « populisme anti-judiciaire ». Ah oui ça c’est vraiment le grand danger du moment dis donc… 

Je pointe ensuite la responsabilité des parents. L’abandon parental c’est à peu près le peu commun des raclures qui pourrissent notre quotidien. Et qu’on arrête de lancer l’excuse de pauvreté, de discrimination, de parent isolé ou de relégation sociale. Etre pauvre n’est pas un sauf conduit pour avoir le droit d’agir comme une pourriture. 

Je pointe enfin l’aveuglement du politique. Evidemment pour le « pouvoir », reconnaitre une montée hors de contrôle, c’est reconnaitre son impuissance. On parle de régalien. Si l’Etat ne peut pas assurer l’ordre, c’en est fini de l’Etat en fait. 

Alors que faire ? 

Malheureusement tant qu’il n’y aura pas des enfants d’élus ou de célébrités largement impactés, il n’y aura rien pas réellement de fortes mesures prises en haut. En attendant cet hypothétique sursaut républicain, et les prochaines victimes, je ne veux pas faire mon Joe, mais ne restez pas les bras croisés. Apprenez à vous défendre, apprenez à vos enfants à se défendre ou à l’inverse à esquiver, adopter les parades sémantiques pour désamorcer les situations ou à l’inverse assommer le premier… 
C’est un peu plus urgent que les cours d’initiation à l’écriture inclusive. 

Ce n’est pas du pessimisme, c’est du pragmatisme. Je pensais l’inverse il y a 10 ans, mais depuis ce pays a fait une dégringolade de 150 ans en terme de civilisation. 

 Et qui a t-on à la tête de l’état depuis 10 ans ? 

 Rocky, bien évidemment. 

 -> Reprise en sortie de la musique de fanfare de Rocky.

(illustration : Joe, John G.Avildsen 1970)


13 juin 2025

JTPA épisode 3 : Combien de fois par semaine faut-il se laver le cerveau ?

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Dans ce troisième épisode de C'est Jamais Trop Pas Assez, Seb Musset et Louis Marie font le tour de l'actualité hebdomadaire de ce beau pays de France : des propos lunaires d'Emmanuel Macron, qui méprise les inquiétudes populaires, aux dérives sémantiques de LFI. 

Il sera aussi question, entre autres sujets, du cinéma d'hier et d'aujourd'hui, de l’arnaque du lundi de Pentecôte, de la fin de croisière de Rima et Greta, de la montée de l'auto-défense, du déremboursement annoncé de traitements pour les maladies de longue durée, de la future censure de X, mais également de Sylvester Stalonne et de Sylvester Stewart dit Sly Stone !

Un épisode bien chargé où l'on arrive à faire le lien entre tout ça et même à y trouver du sens #JTPA 

 
Tous les épisodes sont à écouter, aimer ou détester, mais toujours à partager, sur les plateformes : 
Ausha / Apple Podcast / Deezer / Spotify ....et sur You Tube 

Films cités : 
Rocky de John Avilsen, 
Rambo de Ted Kotcheff, 
Woodstock de Michael Wadleigh, 
Joe de John Avilsen,
Love and Mercy de Bill Polhad, 
Aurore de Blandine Lenoir

6 juin 2025

JTPA épisode 2 : France, l'autre pays de la barbarie

par

Ils ont bravé les éléments, les pannes d'internet, les émeutes urbaines et un déménagement, mais Seb Musset et Louis Marie sont au rendez-vous pour débriefer la victoire du PSG, le 31 mai dernier. 

Dans ce 2eme épisode du podcast "Jamais Trop Pas Assez", il sera également question de TVA sociale, de Rima et Greta en bateau, d'une analyse marxiste du foot, de Salman Rushdie, mais aussi de slips et de barbarie. 

Bref, un épisode qui plaide pour la délocalisation des supporters du PSG au Qatar ✈ #JTPA

A écouter sur les plateformes : Ausha / Apple Podcast / Deezer / Spotify 

...et à suivre sur You Tube (Abonnez-vous, activez la cloche, partages et toussa)


Ouvrages et articles évoqués : 

Jean-Claude Michéa, Le plus beau but était une passe, Flammarion
Christopher Lasch, La révolte des élites, Champs essais
Salman Rushdie, Le couteau, Gallimard
Ronan Planchon, Derrière la désertification de Paris, le grand déclassement des cadres, article Figaro Vox


31 mars 2025

La nuit des juges vs. Marine Le Pen

par
En un trimestre, sur le front de la démocratie – un domaine dans lequel la France aime donner des leçons et se targuer d’être un modèle – nous aurons assisté à : 

L'éradication d’un média non aligné (l’affaire C8). 

L’interdiction de fait d’un opposant politique qui, à force de tutoyer les sommets dans les intentions de vote et face à la confondante nullité du paysage actuel, pouvait cette fois-ci remporter la présidentielle de 2027.

Dans l’affaire des assistants parlementaires du RN, l’étonnant, c’est que l’on s’étonne de la condamnation par le tribunal de Paris de la représentante du premier parti d’opposition français à une peine de non-éligibilité de cinq ans, avec application immédiate. 

Sur le détournements de fonds reproché, cette farce démocratique qu’est le Parlement européen a pour principal intérêt, pour tous ses  élus, de leur offrir une gigantesque machine à cash afin de faire fonctionner leurs partis politiques au niveau national. L'impétrante est surtout coupable de naïveté et d'avoir pensé qu’elle pouvait s’affranchir, elle particulièrement, d’exemplarité. 

La stupeur, suite au verdict, va de Marine Le Pen elle-même (comme quoi, ne pas censurer l’ectoplasme alzheimérisé Bayrou et ne pas s’opposer à la nomination d’un fidèle de Macron au Conseil constitutionnel n’était peut-être pas la plus judicieuse des stratégies pour le RN) jusqu’à Jean-Luc Mélenchon (il a compris qu’il pouvait être le prochain sur la liste des bannis), en passant par Jacques Attali, sans oublier le silence gêné d’une partie de la macronie. Ils ne peuvent ignorer l’effet indésirable que peut provoquer ce genre de sanction "à la carte" sur l’opinion publique, alors que s’accumulent au quotidien des faits divers sanglants, au sujet desquels on retrouve souvent, en amont et en aval, un laxisme judiciaire difficilement compréhensible. Quant à « l’atteinte aux règles du jeu démocratique » évoquée par la juge dans son verdict contre Marine Le Pen, on laissera le lecteur juger du niveau réel d’atteinte à la démocratie que représente l’élimination préventive, dans un timing parfait, du candidat le mieux placé dans les sondages. 

Derrière le pare-feu irréprochable de la justice indépendante et souveraine, et après avoir encore méprisé 13 millions d’électeurs, on attend avec impatience le prochain piétinement démocratique. Et dans ce domaine, il ne faut pas sous-estimer les efforts des apôtres dévoués de l’extrême-centre. Ils ne se cachent même plus, tant ils sont terrorisés à l’idée de perdre la partie. Thierry Breton l’avait d’ailleurs annoncé le 9 janvier 2025 sur RMC

« Faisons appliquer nos lois en Europe lorsque celles-ci risquent d'être contournées et qu'elles peuvent conduire
à des interférences. 
On l'a fait en Roumanie, il faudra évidemment le faire si c'est nécessaire en Allemagne. » 

La décision du tribunal de Paris a au moins le mérite de clarifier les choses. La juge en question vient peut-être de réaliser un magistral "contre son camp", livrant, clé en main pour 2027, une dramaturgie, une martyre et la trame d’un feuilleton de reconquête passionnant. Ce sera notre version du « comeback de Trump » (la comparaison s’arrête là, les deux ayant peu de points communs, si ce n’est une diabolisation obsessionnelle par leurs adversaires). Si Marine Le Pen a peu de chances de revenir dans la course, rien ne l’empêche d’être un jour dans un futur gouvernement, ministre de la Justice qui sait ? Après tout, on a bien un ancien Garde des Sceaux  qui fait aujourd'hui le comédien à 100 mètres de l'Élysée. On point de n'importe quoi où on en est rendu...

On manquait d’un récit pour la prochaine présidentielle. Les justiciers viennent d’en initier un de toute beauté.
illustration : Justice est faite, d'André Cayatte (1960)

Retour à Cantat

par
À l’occasion de la diffusion de la série documentaire de Netflix, nous avons droit à une nouvelle vague de réactions épidermiques au sujet de Bertrand Cantat, chanteur du groupe Noir Désir, idole absolue du rock français dans les années 1990, tombé en disgrâce après la mort, sous ses coups en 2003, de sa compagne, l’actrice Marie Trintignant. 

Cela reste toujours étrange pour moi de voir tous ces gens cracher sur Bertrand Cantat plus de vingt ans après des faits dont on (Ici, Netflix) parle encore puisque coupable et victime portent l’étiquette « people ». 

Avant la mort de Marie, le mec était aveuglément adulé par le public de gauche et la presse de gauche, ce qui, déjà à l’époque, avait tendance à m’exaspérer. Je trouvais Noir Désir, bien que sympathique sur scène, largement surestimé. Et je me rappelle des prises de position politiques de Bertrand Cantat, collectivement élevé au rang de penseur et porte-drapeau de la nouvelle génération, dignes du niveau « OK Podium / Jeune et Jolie » (en résumé : « À bas les méchants fascistes et Jean-Marie Messier ! » – l’ancien patron de Canal+, qui occupait alors dans l’imaginaire gaucho-LFIste la place qu’occupe aujourd’hui Bolloré, également patron de Canal). 

Puis, le drame : la mort de Marie une nuit d’été à Vilnius. Après un temps de stupeur (« Non, ce n’est pas possible, on nous ment, ce n’est pas lui »), Cantat est devenu, en 2015/2025, pour ces mêmes personnes, l’incarnation absolue du mal (ou du mâle, ce qui revient aujourd’hui à peu près au même). Le temps que la nouvelle génération ne connaisse Cantat que comme un meurtrier et que l’ancienne oublie à quel point elle l’avait déifié. 

Au-delà du drame pour lequel le chanteur a payé devant la justice (on peut considérer que ce n’est pas assez, comme tant d’autres jugements dans tant d’autres domaines) et continuera de payer jusqu’à la fin de ses jours, ce qui me fascine ici c’est l’opinion publique et les mouvements de croyance : du culte aveugle à la condamnation tout aussi aveugle. Cette persistance dans les jugements définitifs que l’on croit intimes et éclairés par notre grandeur d’âme, mais qui ne sont, au fond, que le prix d’entrée minimal à la grande pensée sectaire, sans nuance aucune, le plus souvent basée sur un fantasme rassurant. J’espère que le documentaire de Netflix en parle au moins un peu. Vous me raconterez. Je goute peu leurs pratiques en matière de documentaires en général.


10 mars 2025

La Troisième Guerre mondiale pour les nuls

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Le JDD a titré sur la seule synthèse raisonnable à tirer des récentes sorties de Macron quant à son  prolongement souhaité du conflit ukrainien : La surenchère de la peur

Sur X, j’apprends par un communiqué que La Présidence de la République dément avoir employé les termes "faire peur" qui lui sont prêtés dans l’édition du jour du JDD et qu’il ne s’agit ni de son expression ni de son intention

Rassurez-vous, la « menace existentielle de la Russie » et tout le vocabulaire de l’angoisse et de la dramatisation ne sont pas employés par le Président dans le cadre d’un énième chantage à la peur. On reconnaît bien là les méthodes perverses déjà à l’œuvre dans la gestion du Covid et de ses suites vaccinales. Il faut être sous substance pour ne pas percevoir que le grand barnum guerrier annoncé par Macron, n’a que peu avoir avec le bien être des Ukrainiens (qui tournent à 1000 morts par jours depuis trois ans), mais répond avant tout à une triple ambition : 

- La reconquête de légitimité intérieure pour un président détesté,
- La tentative de redorer le blason de l’Union européenne mal aimée, 
- La mise en place d’un gigantesque hold-up financier, sous couvert d’unité nationale. 

Macron, l’opportunité d’une guerre :

Macron est le quatrième président le plus détesté des démocraties développées. Il a beau être déconnecté de la réalité, ce chiffre-là, il l’a bien en tête. Comment se refaire une crédibilité sur un tel lit de haine ? Trouver plus détestable que lui à l’étranger.  Et ça tombe plutôt bien. Depuis des années, Poutine et Trump sont traités comme des parias par l’ensemble des médias français et leurs journalistes de palais (dont la circonférence des couilles s’accroit magiquement à mesure qu’ils s’éloignent de la rue du Faubourg St Honoré). 

Si chaque Français peut percevoir au quotidien les effets désastreux de la politique de Macron, ils seront bien peu nombreux à aller vérifier sur place, aux États-Unis ou en Russie, la réalité du quotidien de ces peuples et leur degré de soutien à leur dirigeant respectif. (SPOILER : Trump et Poutine ont été confortablement réélus et sont bien plus appréciés chez eux que Macron ne l'est chez lui) 

Ici, les journalistes enchaînent les tribunes, sans le moindre recul historique ou social, pour insulter des chefs d’État élus. Ils ont ainsi contribué à ancrer dans l’inconscient collectif une vision binaire du monde, où toute nuance est reléguée à une marginalité suspecte, taxée de complotisme ou, maintenant, d’« intelligence avec l’ennemi ». 

Dénigrer Trump et Poutine étant une rente médiatique, Macron peut rafler à court terme la mise sur l’opinion publique : la cause (irrationnelle) semblant supérieure à sa propre détestation. 

L’UE en quête d’un second souffle :

L’UE a été construite sur le traumatisme de la Seconde Guerre mondiale, avec la promesse d’empêcher tout nouveau conflit sur le continent. Aujourd’hui, ce conclave de technocrates non élus en vient à engager la remilitarisation de l’Allemagne, pour traverser la Pologne et aller combattre les Russes. 

Le prétexte ?
  « Trump, c’est Hitler, il faut sauver la démocratie ». Mesure-t-on le délire ? 

L’UE, ce service de livraison de populations aux marchés, générateur de décisions absurdes et déconnectées, est au bout du rouleau. Pays après pays, elle peine à s’imposer comme l’évidence qu’elle prétendait être. Elle n’a plus d’autre justification que la poursuite acharnée de ses propres échecs. Cette guerre est sa carte joker. 

Dans le même temps, ces mêmes élites annulent les résultats électoraux qui ne leur plaisent pas (comme en Roumanie ce week-end ou comme ils s’apprêtaient à le faire en Allemagne en cas de victoire de l’AfD). Elles ignorent les référendums et les votes (comme en France en 2005 ou encore l’an dernier) et applaudissent carrément l’annulation d’élections (comme en Ukraine, tiens, justement). 


Le hold-up sur le dos des peuples :

Nonobstant les pertes humaines (une broutille), le premier effet d’une guerre c'est de relancer une économie. Mais ici, avec le « Tous anti-Poutine », on est carrément dans le détournement de fonds. 

- Détourner l’argent public vers des entreprises privées (chaque euro injecté dans l’effort de guerre se fait au détriment du bon fonctionnement interne des pays.)

- Détourner l’épargne des particuliers vers l’État, qui redistribuera ensuite cet argent… à des entreprises privées. 

Pillage ultime de nos économies et de nos derniers acquis qui, au passage, permet d'excuser des dépassements de seuil d’endettement en totale contradiction avec les discours sur la dette publique culpabilisant les citoyens depuis des années. 

Sur ces trois caps, le contrôle du cadre médiatique est primordial. Il est plus probable que jamais qu’au nom de la lutte "contre la désinformation", toute publication déviant du narratif officiel soit minimisée, raillée et plus simplement interdite ou criminalisée. Au nom de la liberté bien sûr, comme au moment du Covid. 

L’heure du dépôt de bilan approche 

Mais L'Histoire avance bien plus vite que Macron et que la vieille machinerie de l’UE. Tout cela sent l’heure du dépôt de bilan pour leurs vieux fantasmes. Il existe une science exacte qui remet toujours en place les discours pompeux, les fantasmes irrationnels et les postures excessives : La réalité. 

La classe médiatico-politique française en a perdu l’habitude. Régulièrement, cette réalité s’impose, et nos experts infatués, nos journalistes de cour et nos politiques médiocres viennent s’y écraser. Je donne  quelques mois pour que le soutien des Français à l’« effort de guerre », que nous vendent certains sondages, s’effondre. 

Pourquoi ? 

Parce qu’il n’y aura peut-être plus de guerre à mener.
 (Les affreux Hitler de Moscou et Washington ayant négocié la paix.) 

Parce que si guerre il y avait encore, vu l’état de nos armées, nous ne serions pas en mesure de la mener ni de la gagner avant… une bonne quinzaine d’années. 

Et que sera l’UE dans quinze ans ?

Un mauvais souvenir.




6 mars 2025

Quoi qu’il en coûte 2 : le retour de la peur qui tue

par
Vous vouliez des hôpitaux où l’on ne vous laisse pas mourir dans les couloirs, des écoles à proximité où vos gamins ne se font pas poignarder sous le regard d’auxiliaires de sécurité payés un demi-SMIC, ou plus simplement des augmentations de salaire ? Niet. Vous aurez la peur et la guerre. Il faut combattre le nouvel Hitler.  C’est, en substance, l’allocution télévisée d’Emmanuel Macron hier, justifiant la version 2 du « quoi qu’il en coûte », sous-titrée : « cette fois, c’est la lutte finale contre l’Empire du Mal ». 

Pas besoin de regarder cette prise de parole exceptionnelle de notre chef de la résistance contre les moulins à vent pour comprendre que le guignolo nous refait le coup du Covid. Tel Colin Powell agitant sa fausse fiole d’anthrax devant le Conseil de sécurité de l’ONU en 2003 pour justifier l’intervention militaire américaine  en Irak, Macron fait trembler les boomers : 

« La Russie est devenue une menace pour la France et l’Europe, et son agressivité ne semble pas connaître de frontières (...) Face à ce monde de dangers, rester spectateur serait une folie  » 

Alors que, après son petit coup de calgon de vendredi dernier, Zelensky publie sa lettre d’excuses à Donald Trump pour négocier un deal à l’amiable qui permettrait la paix pour son pays (un détail sans importance), la coalition des autocrates européens en déliquescence trouve dans la figure du méchant Poutine l’opportunité de regagner quelques galons de légitimité. Rien de tel qu’une cause va-t-en-guerre pour étouffer, sous un patriotisme de pacotille, les bisbilles locales, qu’elles concernent l’économie, la précarité grandissante des peuples ou, plus vulgairement, quelques considérations démocratiques. Le tout est acclamé à l’unisson par la presse de Palais, qui déploie son génie de la propagande et du suce-boulisme contorsionniste dans ce genre d’épisodes de délire collectif. Un délire qui a le mérite d'insuffler à une nation, au moral et à l'économie à zéro, de nostalgiques réminiscences d’empire colonial planétaire. 

Sortons du fantasme. 

Avons-nous des problèmes à régler chez nous avant tout ? Oui. 
Que nous apporte la résolution ou pas de ce conflit ? Rien.

Avons-nous les moyens de nos ambitions ? Évidemment non. 

Trois bonnes raisons, donc, pour Macron de s’y engouffrer, la fleur au fusil. 
Juste au niveau français, on approche les 4 000 milliards de dettes, et déjà, on nous annonce 100 milliards d’euros supplémentaires par an pour notre « réarmement », destiné à compenser le désengagement américain en Ukraine. Pas grave : en puisant dans l’épargne des Français et en détruisant encore un peu plus le service public, on pourra acheter de nouvelles armes (américaines, c’est ça qui est rigolo) afin de soutenir un pays classé 104e sur 180 en matière de corruption. Le tout, bien sûr, en arrosant les intermédiaires les plus obscurs à coups de « fonds européens » et de rétro-commissions opaques (une spécialité bien française). Résultat : un appauvrissement supplémentaire pour les peuples d’Europe, au nom de la Grande Cause, tandis que les États-Unis et la Russie, déjà passés à autre chose, se partageront l’Ukraine et ses ressources. 

Pendant que nous financerons ce rêve d’Europe militaire par une dégradation sans précédent des conditions de vie des pays endettés et la séquestration de notre épargne, n’espérez pas que cet « effort de guerre » s’applique à nos menaces locales : islamistes, terroristes, ou encore le « simple » OQTF de proximité qui poignarde des enfants à l’école ou roule au camion sur des familles entières, désormais sur une base quasi quotidienne. Non ce n’est pas une priorité. D'ailleurs ça n'existe pas.

C’est toujours fascinant de constater à quel point le biais d’investissement (à savoir la détestation, à ce stade irrationnelle, de Trump et de Poutine), combiné à une propagande à l'enclume (comme pour le Covid : si les médias ne rabâchaient pas cette histoire ukrainienne H24, alors qu’elle a commencé bien avant 2022, on ne s'en apercevrait même pas), peut modeler l’opinion publique

Aujourd’hui, presque toutes les informations sont accessibles, les angles d'analyse aussi. Peut-on même seulement en vouloir aux dirigeants de manipuler les masses, ou faut-il plutôt questionner l’aptitude des masses à se faire manipuler à répétition ? Un seul ennemi, c'est plus simple. Poutine, c’est l'unique méchant, Volodymyr, c’est le seul résistant. Le vaccin, c’est la santé et Macron, la sécurité. Dormez bien et préparez le porte-monnaie.



2 mars 2025

Trump, Zelensky et les dindons

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Zelensky, c’est le genre de mec à ne pas inviter en soirée. Il arrive en survêtement, te vide le frigo, reste trois ans, les rangers sur la table, et finit par te traiter de « sale fils de pute » parce que tu ne lui remontes pas ses courses et que tu ne l'appelles plus « mon amour ». 

Vendredi dernier, comme à son habitude, le pique-assiette de Kiev est venu quémander encore quelques milliards à la Maison Blanche. Mais cette fois, le taulier a demandé des comptes : un petit retour sur investissement pour les brouettes de thune déversées depuis trois ans. Le ton est monté, des noms d’oiseaux ont fusé et Zelensky est reparti en slip de camouflage, remis à sa place (c'est pas en position de négocier) sous les caméras du monde entier par Trump et son vice-président, JD Vance (sur qui, au passage, je mets un billet pour la future présidence US en 2029). 

L'humiliation ! titre-t-on en Europe. Aussitôt branle-bas de combat à la tête de nos irréprochables démocraties du vieux continent pour prendre la tête de la contre-attaque des résistants (de la part de mecs qui ont imposé le pass sanitaire, annulent les élections quand les résultats ne leur plaisent pas, réduisent une à une toutes les libertés fondamentales, ça ne manque pas de paprika). Bref, opération câlino-thérapie expresse pour Volodymyr, dès sa descente d’avion à Londres, par nos parodies de leaders européens. 
Et on repart en fanfare sur les ondes comme il y a trois ans, sous les clameurs des journalistes de palais, dans un de ces vortex de débilité dont notre Europe à l’agonie, et sa cour consanguine d'élites autoproclamées de la pensée éclairé, ont le secret. Une partie du peuple n’est pas en reste : alors que le moindre soupçon de patriotisme français vous catalogue immédiatement à la droite radicale de l'extrême-droite, voilà qu’on ressort sur Facebook les drapeaux ukrainiens et que l’on se félicite à la TV des milliardaires (mais les gentils milliardaires hein, pas Bolloré) que la guerre puisse continuer encore un peu. Purée, on l'a échappé belle, avec Trump on n'est passé pas loin du cessez-le-feu dis donc ! L'Europe assure qu’elle ne laissera pas tomber « mon amour » face au méchant Poutine… Peu importe que ça coute des centaines de milliards, ces larves ataviques, aussi appelées « peuple », sont là pour payer.  

Bref, aucune leçon tirée des trois dernières années. 

Je ne vais prétendre à aucune analyse géopolitique autre que celle du pragmatisme le plus élémentaire. Ma position sur le soutien à l'Ukraine est rigoureusement la même qu’en février 2022 : soit on a les moyens de faire la guerre, soit on ne les a pas. Et là c'est simple on ne les a pas. L’Europe n’a pas d’armée, la France est couverte de dettes et ni l’un pas plus que l’autre ne sont foutus de sécuriser leurs propres frontières. Pourquoi diable irions-nous nous mêler de celles de l’Ukraine ?  

N’importe qui d’un peu sensé devrait tenir, en gros ou en raffiné, ce discours. 

Seulement voilà, en Europe, on a depuis longtemps quitté le terrain du rationnel. En France, c'est même devenu un mode de gouvernance, et d'opposition. Comprenez bien : en France, on n’a pas de pognon, mais on a des « valeurs » – quitte à ce qu’elles occultent totalement la réalité ou les mathématiques. Ici, on assurait fièrement au plus haut sommet de l'Etat en mars 2002 qu'on ferait « plier l’économie russe » en deux mois, comme on était certain en octobre dernier que Trump, l’autre grand méchant (attention Guignol : un nazi!), ne serait jamais réélu – alors que tout l’annonçait pour celui qui se donnait juste la peine de sortir de ses fantasmes et ses phobies pour observer les faits et écouter les gens. L’Europe a eu faux sur toute la ligne dans son soutien inconditionnel à l'Ukraine, mais (comme pour le Covid), son biais d’investissement est tel qu’elle passera désormais tout son temps, pour prouver qu'elle n'a pas eu tort, à poursuivre sa chimère mortifère de guerre au lieu de résoudre un problème dont la solution est aujourd’hui, comme hier : ce n’est pas notre putain de problème ! 

Trump fait du business, l’Europe fait de la morale. Chacun son domaine de compétences. Maintenant que Trump a officialisé en live la rupture avec l’Ukraine, l’Europe va se retrouver seule en charge du boulet qui pille le frigo d'un côté et rempli les morgues de l'autre. Et un tel entêtement à désirer la guerre, sous les yeux de BRICS goguenards, ça peut vite tourner en grosse couillonnade, du genre de celles dont on met des décennies à se relever. On a déjà assez de problèmes chez nous : faillites d’entreprises, services publics à la ramasse, déserts médicaux, dette abyssale, sans parler des meurtres à chaque coin de rue … Quant à l’humanisme qu’on nous sommes d’avoir à grandes tartines de moraline : que nos politiques en pantoufles à 10K mensuels depuis la nuit des temps, et autres journalistes parisiens qui veulent cette guerre, la payent avec leurs petites économies. Qu’ils enfilent leurs treillis et, encore mieux : qu’ils envoient leurs enfants au front. 

On pourra commencer à parler de « nos valeurs ». 






20 janvier 2025

L'exode de la police de la pensée

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C’est donc le jour de la fin du monde. À l’approche de l’accession au pouvoir du satanique Donald Trump et de son acolyte, le grand méchant Musk, la secte des éclairés du Boulevard Saint-Germain déclare, à grand renfort de tribunes, quitter X-Twitter pour s'embarquer dans un grand exode de la bien-pensance vers la Terre promise du grand capital "gentil", à savoir un autre réseau social américain (qui aura le privilège de publier leur prochain appel à voter Macron). 

Bien leur en fasse, je ne vais pas me plaindre de ne plus être inondé de posts de Sandrine Rousseau ou Marine Tondelier, geignant toutes les demi-heures qu’on bâillonne leur expression (alors que je ne suis même pas abonné à leurs comptes). Je noterai toutefois que le camp du bien a placé toutes ses forces dans cette bataille médiatique : des soldats de la droite aux humoristes de France Inter, ils ont bien occupé les plateaux télé (sans contradiction, ça leur plaît) pour cracher sur Trump (c’est moins risqué que sur Macron), Musk, et surtout son réseau X. 

Cette panique morale franco-française d’une large partie de la gauche (qui n’est en fait que la variation "culture et divertissement" d’une bourgeoisie réactionnaire, tout ce qu’il y a de plus classique) est révélatrice de sa terreur de se retrouver en minorité idéologique. Il ne faut pas leur dire (ils ne le supportent pas, visiblement), mais ils le sont déjà. Jusque-là, ils pouvaient maintenir l’illusion dans des médias verrouillés, à l’accès par cooptation, où toute contradiction est écartée, stigmatisée ou moquée. Ce qui n’est plus le cas sur la majeure partie des réseaux sociaux et particulièrement sur X (où, via l’entremise du shadowban et de fact-checkeurs rémunérés par les rédactions et des organisations opaques, la censure leur bénéficiait jusqu’en 2024). 

La campagne anti-X à laquelle nous avons eu droit dans les médias mainstream cette semaine est une préparation idéologique à la suppression totale de certains réseaux sociaux dans les plus brefs délais par nos défenseurs européens de la liberté d’expression et autres "nous sommes tous Charlie" locaux. (Insolite : la rédaction de Charlie Hebdo, toutes balles oubliées, fait partie de cette campagne de diabolisation). 

Intéressons-nous à un aspect de cette campagne médiatique : l'application HelloQuitteX, qui propose d’assurer la transition des abonnés de la plateforme X vers d’autres réseaux tout en conservant leurs contacts. HelloQuitteX est estampillée CNRS (donc financée par l’argent public). Mais le CNRS en question vient de démentir que cela venait de lui, alors que le service est bien hébergé par le CNRS et développé par certains de ses chercheurs. (Hmm… ça commence à puer).

Coup de com’ a priori inoffensif et autogéré, sous haut patronage de la LDH, l’application en question a bénéficié d’une couverture médiatique dithyrambique ces six derniers jours, représentant ce qui équivaudrait à plusieurs millions d'euros s’il avait fallu la payer sous forme de campagne publicitaire. (Aucune campagne de gauche sur la misère sociale ou le mal-logement n’a eu autant d’exposition en si peu de temps…) 

Plusieurs Xnautes ont remarqué que l’hébergeur de HelloQuitteX est proche de Mediapart, des Verts et de l’association de défense des libertés numériques La Quadrature du Net (dont j’apprends qu’à l’instar de multiples organes de presse, elle est subventionnée en partie par George Soros à hauteur de 130 000 $/an – soit deux salariés à temps plein). Bon, là ça pue clairement l’opération politique sous-traitée par la branche geek des black blocs, mais rien de tout cela n’est illégal. 

Là où ça se complique, c’est que l’application, dans un flou juridique total, aspire les données de tous les abonnés et abonnements des utilisateurs pour leur transfert d’une plateforme à l’autre… avec, au passage, les adresses email, voire les numéros de téléphone (coucou la CNIL). 

Décodons : c’est une arme marketing politique inespérée, un fichier clients de millions de personnes sensibilisées, un fichier totalement exploitable dans le cadre de campagnes de mailing ou d’appels à l’action pour les prochaines échéances électorales (les municipales de 2026, voire les présidentielles anticipées qui nous pendent au nez). Exploitable par qui ? Cela mériterait au minimum une enquête et une suspension temporaire du service, le temps d’y voir plus clair. 

Mais c’est "le camp du bien", alors ça va. 

Sinon, l’exil de X de Marine Tondelier n’aura duré qu’une nuit. Le 20 janvier à 10 h, elle était déjà revenue sur X pour "continuer le combat", écrit-elle. Lequel ? Celui des selfies et des OP de com’ véreuses pour maintenir son taux de clics ?



15 janvier 2025

Les intolérants contre X

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Dans la catégorie « on ne se cache plus pour vous cracher à la gueule », ce début d’année est grandiose. 

La tragi-comédie que nous joue « le camp du bien », réunissant dans les mêmes éléments de langage une large partie de la classe politique allant des socialistes et des écolos (Jérôme Guedj, Sandrine Rousseau, Marine Tondelier) jusqu’à LR (Nathalie Loiseau, Valerie Pecresse), en passant par des types sans aucun mandat (Thierry Breton), à l’unisson du gouvernement Macron (Jean-Noel Barrot, Clara Chappaz) et de la farandole corporatiste des journalistes parisiens, de plateaux télés cossus en tribunes de presse, sur des médias appartenant quasiment tous à des milliardaires (mais les gentils milliardaires ceux qui se disent progressistes), pour nous rabâcher que (attention à la cascade), au nom de la protection de la liberté d’expression, il faudrait supprimer le réseau social X racheté par Elon Musk... cette tragi-comédie donc est un régal. 

Tragique. On le sent tous, cette petite classe déconnectée et consanguine qui ne représente plus qu’elle même, est terrorisée à l’idée que son privilège de professer la bonne parole soit définitivement remis en cause, non pas par Elon Musk (qui sert d'épouvantail dans cette histoire), mais par les citoyens lambdas. Musk l'a suffisamment répété : « You are the media now! ».

Comique. Entre aveux, lapsus révélateurs et omniprésence d'un plateau TV à l'autre pour ânonner des énormités, sur fond de totale méconnaissance des pratiques, de la technologie et même de la légalité, on assiste à ce genre de feu d'artifice de conneries, servies sur leur lit d’ego boursoufflé, qui va nous fournir un stock de bonnes phrases et d’extraits video pour plusieurs années. 

Tout s’est accéléré début janvier avec la volte-face surprise du patron de Meta (Facebook, Instagram, Threads) qui, invité chez Joe Rogan (podcaster qui fait désormais plus d’audience que les chaines infos US), a avoué ce qu’on savait tous : Facebook a bien censuré des contenus vaccino-sceptiques sous ordre direct de l’administration Biden. Zuckerberg promet cette fois qu’il n y aura plus de modération laissée entre les mains de « fact checkers » autorisés (en France, des sbires politiques cooptés et employés par les plus grosses rédactions). Les motivations de Zuckerberg  sont moins éthiques qu’opportunistes (et surtout juridiques), mais saluons le geste qui a le mérite de prendre un peu plus à la gorge les ayatollahs de la liberté d'expression verrouillée, plus connus sous le nom de « les intolérants » ou encore : une bonne partie de la pseudo-gauche française, grisée par la mise à mort de C8 qu'elle a récemment obtenue (avec 200 licenciements au passage). 

En France donc, où l'on a la collaboration administrative dans le sang, ça balise sec : des fameux et fumistes fact-checkers qui se retrouvent au chômage en passant par les journalistes courtisans (les mêmes qui ont bien accompagné la propagande d'état durant la période covid) jusqu’aux bataillons de politiciens inutiles (le point commun de ces gens étant d’être plus ou moins totalement subventionnés par l’état et plus ou moins dépendants de celui-ci). 

Ces gens n'ont évidemment aucune intention de défendre votre liberté d'expression. Ils se battent pour conserver le monopole de la leur. Pour ce petit club, le débat contradictoire est un péril immédiat. La pensée contraire est systématiquement évincée des plateaux, des articles. Et, si elle y figure c'est pour mieux être stigmatisée au bulldozer, moquée ou criminalisée (« fantaisiste », « complotiste », et si ça ne suffit pas : « fasciste »).  Depuis longtemps, les faits n'en sont plus vraiment ; il s'agit d'abord d'idéologie et de modelage de l'opinion publique. Soit (nouvelle cascade) ce qu'ils reprochent à Elon Musk.

Quant à la supposée ingérence d'un milliardaire dans nos affaires politiques. C'est pas notre genre.  Personne ne s’offusque de l’ingérence d’un Xavier Niel (qui a son rond de serviette à l’Elysée) ou d’un Matthieu Pigasse, qui déclare, dans Libération, qu'il veut mettre les médias qu'il contrôle dans le combat contre l'extrême-droite (on reconnaitra son honnêteté). En France, les milliardaires achètent tout simplement les rédactions depuis des décennies, c'est plus simple comme ça. Nous n'évoquerons pas non plus le parcours magique  d’Emmanuel Macron, propulsé d'inconnu à président en moins de 3 ans, suite au concours appuyé de 95% de la presse française. 

Pour ma part, j’attends avec impatience que Sandrine Rousseau respecte pour une fois ses engagements et quitte définitivement de X, en emmenant avec elle sa poignée de neuneus wokistes dans les limbes de la pensée qui tourne en rond, pour d’obscurs autres réseaux (qu’à leur tour elle voudra censurer un jour parce que la tête du patron ne lui reviendra pas). Malheureusement, comme pour ses quatre précédentes annonces de départ du réseau en 2 ans, elle ne tiendra pas parole. Plus que toute autre Sandrine Rousseau est une enfant de Twitter, elle a construit sa notoriété sur ce réseau (avec talent et une aptitude au trolling à nulle autre pareille).

Bref, tout ceci pour réaffirmer qu'à choisir entre le réseau social d'un milliardaire américain de droite, où chacun y compris Sandrine Rousseau peut s'exprimer, et les plaintes de nos petits commissaires préfectoraux de la pensée correcte (on n'a pas entendu ce petit monde pour défendre la liberté de ceux qui ne voulaient pas être vaccinés en 2021/2022), grands démocrates devants et nervis zélés de la censure estimant que pour un débat sain et apaisé il est important d'exclure ceux qui ne sont pas d'accord aux eux, mon choix est vite fait : Poubelle verte pour les intolérants. 

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9 janvier 2025

Ah ça IA, ça IA... les humains on les vaincra !

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Il y a 2 ans à peine je publiais un article naïf sur l'arrivée de l'IA et ChatGPT. Comme tout le monde je sentais le potentiel à la Black Mirror du bazar. Mais, dans les faits, après avoir essayé deux ou trois trucs je n’étais pas convaincu des performances et j’estimais qu’on avait dix années devant nous. 

18 mois après, je dialogue au quotidien avec la machine pour la composition de mon prochain livre. Elle me fait des suggestions plus pertinentes que celles d'un éditeur et je suis à deux doigts de la prendre pour un humain (elle a déjà plus d’esprit critique et de second degré que la plupart des parisiens je croise au quotidien). Mes enfants maîtrisent plusieurs IA pour leur travail, l'organisation de leur planning, de leur loisirs. Je connais des enseignants qui s’en servent pour l’organisation de leurs cours, et développent des IA pour détecter les IA dans le travail de leurs élèves tandis que ceux-là en développent d’autres pour réadapter ces mêmes cours dans des langages leur convenant mieux. Mon boulot, lui, est directement impacté (paf, licenciement économique). 

Je pensais qu'on en arriverait là mais je n'imaginais pas une telle rapidité et une telle fluidité des IA, et ce n’est que le début. C'est l’ équivalent de la révolution du web sur le monde du travail et de la consommation mais en a accéléré (on a bien eu 15 ans pour que notre paysage quotidien soit globalement changé par Internet (avec tous les vices cachés : la dématérialisation des services publics étant devenu un prérequis "écologique" de nombreuses administrations justifiant des coupes budgétaires, et paradoxalement une dégradation des services). Ce qui se passe avec l'IA est du même ordre mais s'étend bien plus vite. 

Quand je vois nos piteux et incompétents politiques se réjouir de l’instauration d’un temps de travail gratuit conditionnant le maintien du RSA (on appelle ça l’esclavagisme en ancien français), je me dis qu’ils n’ont clairement pas la conscience de la grosse baffe qui nous arrive dans la gueule. Ca va être un cataclysme, spécialement en France où l'on a clairement opté pour une société de services, de jobs du tertiaire derrière un ordinateur, de longs cursus universitaires aux utilités réduites à zéro en un prompt. Tout ça va exploser dans les 5 ans, même pas le temps d'une génération. De l’architecture au codage, en passant par l’expert comptable ou la secrétaire de direction : des millions de gens vont se retrouver sur le carreau avec un déclassement supplémentaire de la France déjà en slip (on ne fabrique plus rien, on vit technologiquement au crochet des autres et on croule sous des dettes dont on ne sait d'ailleurs même à qui elles appartiennent). 

C’est une révolution industrielle inversée : 1 / nous n'avons déjà plus d'industrie 2 / nous ne pourrons même plus faire semblant de servir à quelque chose. Heureusement il nous reste la Tour Eiffel, le souvenir des JO et la Côte d'azur, hein ? 

Je n’ai pas de conclusion à ce petit billet d’humeur, c’est inéluctable. Ca va être un massacre social (et donc l’opportunité d’une renaissance …parce qu’on va se retrouver avec beaucoup, beaucoup, de temps libre). Dans ce bordel, celui qui sait faire quelque chose de ses dix doigts pour subvenir aux besoins basiques de l’espèce va prendre de l’avance sur les autres.


8 janvier 2025

C'est facile d'être détesté par des cons

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La nouvelle qu'on n'attendait plus tombe en fin de journée : Jean-Marie Le Pen est mort à 96 ans. 
Mélancolie manager par essence, son nom ayant tellement marqué mon enfance, égoïstement c'est à un passé qui s'estompe un peu plus auquel j'ai pensé et dont l'épouvantail Le Pen aura été un des marqueurs au même titre que Bernard Tapie, le paquet de Marlboro à 6 francs et Michael Jackson.

Sur les réseaux sociaux, c'est la fête à Gaucho Park. A Paris, plusieurs milliers de personnes se rassemblent place de la République pour fêter au champagne la mort du vieillard, comme s'ils avaient fait tomber de leurs propres mains Saddam Hussein. 

Je resterai toujours fasciné par la haine. Ici envers un homme du quatrième âge qui, en soixante-dix ans de carrière politique, n'a jamais atteint le pouvoir suprême, n'a jamais été ne serait-ce qu'à proximité de celui-ci. Qui ne l'a d'ailleurs jamais voulu (il n'aurait pas agi de la sorte, à répétition, dans les médias). Qui n'a plus aucune influence concrète depuis quinze ans et qui n'en aurait jamais eu aucune si les socialistes, en naufrage programmatique, n'en avaient pas fait leur méchant favori depuis les années 80 (feignants, ils n'ont fait aucune mise à jour depuis). 

On lui reproche des mots, des phrases de merde, soit l'équivalent de la routine quotidienne de la plupart des élus LFI aujourd'hui (s'il y a un héritier direct dans la forme outrancière de Le Pen, c'est Mélenchon, et je méprise Mélenchon aujourd'hui pour les mêmes raisons que je méprisais Le Pen hier).

Par une facétie de l'histoire, ce décès tombe le jour de l'anniversaire (et l'escamotage opportun pour certains, ils se reconnaîtront) des dix ans de l'attentat contre Charlie Hebdo et de ses victimes… assassinées pour des mots (et des dessins). Comme quoi, on a beau être rigoureusement au même endroit à dix ans d'écart, les appels à la liberté d'expression et les « vous n'aurez pas ma haine » restent plus que jamais à géographie variable, selon de quel côté du front républicain tu te trouves. 
Étrangement, cet apéro de la mort en plein air avec appels festifs au meurtre dans l'impunité générale (« Marine, t'es la prochaine ! »), alors que la veille, sur ordre de Bruno Retailleau, des centaines de CRS ont mis la pression sur trois pauvres tracteurs de la Coordination rurale qui tentaient de rallier Paris pour alerter sur le drame des agriculteurs, convoque d'autres images du passé, et cette anecdote que je vous livre ici. Peut-être le point de départ de mon expérience politique. 

1988, école de graphisme, Paris. Un des profs de dessin organise un scrutin entre élèves juste avant les élections présidentielles. Mitterrand fait un carton chez les étudiants : quelque chose comme 300 voix sur 301. Et le dépouillement terminé, on découvre qu'il y a un vote pour Le Pen. Juste un. Une bonne partie des élèves ont alors plongé dans une colère irrationnelle et ont cherché à savoir qui avait pu, quel raciste avait osé, voter Le Pen, prenant à partie tout le monde dans une ambiance de tribunal, en appelant à la délation du fasciste caché dans nos rangs.
Je précise : 1/ que ce n'était pas moi (mais que limite ça m'aurait donné envie). 2/ qu'il n'y avait strictement aucune diversité dans les élèves. Nous n'étions que des blancs urbains privilégiés, avec des parents à revenus confortables, qualifiables de CSP+. Je n'ai pas compris à ce moment-là de quoi était fait Le Pen ni qui il était vraiment (je me contrefichais du cirque politique à l'époque), mais j'ai saisi de quelle étoffe étaient faits certains de ses nobles opposants. 

Le futur n'a pas infirmé cette intuition. 

Dans ce n'importe quoi aux effluves de shit et de 8.6, certains de mon ancienne classe dansent probablement ce soir Place de la République. Comprennent-ils qu'avec la fin du grand méchant loup c'est aussi leur petit monde de probabilité morale et de supériorité intellectuelle, sur fond d'intolérance et de bêtise crasse, qui s'efface encore un peu plus ? 

Probablement pas, mais bonne fête quand même les gars.  




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