On m'a demandé une fois "
Pourquoi faudrait-il être fier d'être français ?", je ne savais que dire, considérant que la question contenait déjà la réponse.
Mais, il faut bien avouer que, jour après jour depuis mai 2007 constatant la politique, les propos et les méthodes du Monarque et de son gouvernement de compagnie, leur suffisance et leur mépris du peuple, chacun pourra éprouver au sujet de la nationalité figurant sur sa carte d'identité une certaine...
...honte.
Une énième étape a été franchie le 21 octobre
avec le discours monarchique de Bonneval, à l'architecture directement pompée sur "
la libre-antenne" d'
RMC, réduisant la lutte sociale des derniers mois à quelques
casseurs des dernières heures - au sujet desquels quelques
doutes commencent à poindre - et le manque d'essence à la veille des vacances
(enfin pour ceux qui peuvent s'en offrir).
(UMP: un programme profond et visionnaire directement puisé à la source des plus grands intellectuels hexagonaux.) A court d'éléments de langage, le Monarque a même donne dans le sempiternel et poignant "
prise d'otages" des français
(curieusement renommés pour l'occasion des "gens qui n'y sont pour rien") par les syndicalistes
(qu'il finira bien par assimiler à Al-Qaida).
Pour son information,
voilà des otages :Le Monarque osa même un
"et c'est encore une fois les petits qui vont trinquer pour les autres!" (définissant ainsi par la même occasion les effets à escompter de sa réforme des retraites).Avec l'entrée dans la danse de
"casseurs" providentiels et la multiplication des
blocages sur fond du
soutien populaire de la mobilisation
, le discours de l'autocrate suit la ligne éditoriale des émissions de radios périphériques
(caressant dans le sens du poil le "golden retraité" à fort pouvoir d'achat, se trouvant souvent être un électeur UMP) qui, entre deux spots pour
Carmignac Gestion ou Malakoff-Méderic, cantonnent la question de la réforme des retraites et le massif mouvement s'y opposant à "
La France peut-elle se permettre un tel mouvement social ?" (avec invité unique : Michel Godet. Jacques Marseille n'ayant pas pu lui donner la réplique pour cause de décès) ou encore "
Que pensez de la désastreuse image que La France donne à l'étranger?"
A ces deux questions, répondons par deux autres:- Doit-on attendre, comme en 1945,
la destruction complète de l'économie et du pays pour assurer la défense des intérêts du peuple ? Ce à quoi, pour la déconne, on peut ajouter : en plein budget de rigueur, Le Monarque peut-il se permettre un avion à 140 millions d'euros ?
(Mais attention dans ce cas, je pourrais être traité d'irresponsable ou de populiste.)-
Qui, excepté les nigauds de service,
s'interrogeait sur "l'image de La France dans le monde" lorsqu'en 2004 elle s'opposait à l'invasion de l'Irak ? Si je me rappelle bien, même à droite, les tee-shirts "
fuck Bush !" étaient
" so trendy" à Paris ce Printemps-là.
J'ai croisé plusieurs américains cette semaine, jeunes et moins jeunes: ils
soutiennent ce mouvement qu'ils regardent les yeux ronds en lâchant un : "
si seulement les gens étaient aussi réveillés chez nous !" suivi d'un "
ne lâchez pas, tout le monde vous regarde !".
[mode mixbeat on] On a même aperçu un
David Lynch à la terrasse d'une crêperie parnassienne réjoui par les cortèges et leur étrange alchimie de colère et de bonne humeur !
[mode mixbeat off]A cette honte républicaine,
système d'exploitation de classe qui tourne en tâche de fond avec ses mises à jour de plus en plus buguées, répond pour ma part depuis quelques semaines un sentiment auquel j'étais moins habitué au sujet des français :
...la fierté d'en être.
Ce pays n'a pas renoncé. Cette succession de manifestations hétéroclites partout en France et l'accélération des derniers jours me redonnent
de l'espoir dans nos capacités de résistance. Cette jonction entre plusieurs couches de la société, redoutée par tout gouvernement dès lors qu'il représente la convergence des animosités, est en passe de s'accomplir.
Syndiqués ou non, militants ou pas, familles, jeunes qui reparlent politique, partis de gauche mêlés, métallos et secrétaires, mômes bardés de stickers de tous les partis et décryptant les prospectus de propositions de sauvetage des retraites[1] en demandant "c'est quoi la démocratie?", retraités, infirmières, pompiers, personnel de crèche, éducateurs, même Gérard Depardieu qui ne s'est pas fait casser la gueule[2] (preuve qu'on n'est que des gentils) et surtout, les bataillons de nouveaux venus de la contestation qui, il y a juste un an, regardaient les cortèges d'un œil distrait chez Pujadas avant de zapper sur plus belle la vie : ils défendent la survie des retraites par répartition et, à travers ce combat contre une réforme au débat escamoté symbolisant à la perfection sa façon de gérer le pays,
contestent l'action de destruction généralisée du Monarque[3].
Chaque manifestant, quel que soit son milieu social, sa profession, son âge,
sait désormais que les vautours visent en coulisses
le cadavre de la solidarité intergénérationnelle que ce gouvernement d'entre-menteurs leur a promis.[4]Nous vivons un moment exceptionnel, difficile d'analyser à chaud, dont le mutisme, puis leur précipitation à le minimiser et à le conspuer, des spadassins à mono-neurone du Palais et leur néo-libérateur en chef,
prouve la puissance.Et les manifestations ne sont que les flammes les plus visibles du brasier. Partout, en France, les piquets, les grèves et
les blocages s'intensifient
(le gouvernement pédalant dans sa communication à ce sujet depuis une semaine, assurant qu'il va débloquer ce qu'il refuse de considérer bloqué). C'est ainsi qu'au moment où la réforme est votée dans un espace capitonné où la contradiction est anti démocratiquement réduite à peau de chagrin,
les poubelles s'entassent contre le mur du Sénat suite à une "légère" grève ! (vendredi 22 octobre 2010 : devant le Sénat au moment du "vote bloqué" sur la réforme des retraites)
On comprends aisément pour un gouvernement
(qui, étrangement, ne s'appuie sur les sondages d'opinion[5] comme il le fait traditionnellement pour passer une loi après n'importe quel fait-divers) l'intérêt de passer en force quitte à s'essuyer les pieds sur la procédure, en humiliant les contestataires et les décourager.
Son crédo est simple : tuer l'espoir des français avant la Toussaint pour satisfaire les marchés. (dans l'espoir qu'une femme voilée en mini-moto ou un rom conduisant sans permis lui permette de passer à autre chose.)(le trône de Napoléon, dans le Sénat)
Pour notre Monarque, ce mauvais rêve collectif d'"
une autre société" auquel il ne comprend rien
(le pauvre, il a déjà raté Mai 68) doit s'estomper au plus vite.
Il souhaitait son peuple docile et stupide, nous lui prouvons l'inverse.Ne lâchons pas la bataille. Ne nous laissons pas impressionner par une machine médiatique dans le sillage d'un gouvernement autiste prouvant par le plus raide des exemples, sa vision du progrès (travailler jusqu'à la mort) et de la démocratie (fermer sa gueule).
Oui,
le monde nous regarde nous opposer à la politique des néo-cons[6] afin de préserver le meilleur d'un modèle français
. Il ne fut pas conquis en restant les bras croisésCet automne 2010, les français
ont compris que chaque "progrès", chacune des "avancées" de ce gouvernement, les ramènent un peu plus vers le moyen-âge.
Il n'est jamais trop tard pour bien défaire. Être mobilisé contre la politique inique de ce gouvernement est, ce jour,
le premier facteur d'identité nationale.(pièce rare, Sénat.) * * *
[1] Bizarrement, ils sont de plus en plus nombreux, partis, associations et syndicats, à proposer des plans chiffrés de financement de la réforme. Bientôt, seul le gouvernement n'aura pas de plan de réforme sans déficit.
[2] Alors que son interprétation d'Obélix, à elle seule, méritait au minimum une baffe.
[3] Rappelons-nous que Le Monarque est l'enfant de nos basses aspirations et de la réduction de la pensée collective au "chacun pour soi". Crédo qu'il reprend à son compte dans la gestion de la "bataille des retraites". Il se concocte une image de marque pour ses années post-présidence (celles où il fera de l'argent). Il vise à incarner "l'homme ayant réussi à ramener les français dans le camp de la raison du plus riche".[4] A défaut de repenser son modèle et d'appliquer une vraie taxation sur le capital et les flux financiers, le gouvernement se paye sur la bête en assénant aux français les français les moins fortunés (mais avec encore un peu de rentrées) à coups de matraque démocratique (modèle télescopique : un coup le pays, un coup l'Europe) une violente cure de rigueur dont les seules vues sont celles d'un enrichissement à court-terme des courtisans. François Fillon l'a encore répété dimanche soir sur TF1 : la taxation du capital est "une escroquerie". les choses sont claires. On ne pouvait mieux remettre au grand jour la guerre des classes.[5] Lire la page 3 du sondage BVA / Canal+ du 22 octobre et l'analyse de Gael Sliman en page 3 :"le soutien aux grèves ne faiblit pas malgré la pénurie d'essence et les débordements des casseurs".
[6] Les médias étrangers qui ridiculisent le mouvement français sont les mêmes types de média qu'ici. Ils vont juste encore un peu plus à fond puisqu'il n'y a plus de répondant en face.Illustrations : C.Platiau, RSF, France-soir, S.Musset.