L'autre problème avec Macron l'androïde est qu'il n'a rien à perdre.
A
l'inverse de nos hommes et femmes politiques traditionnels qui ont une
trajectoire de terrain et une carrière ancrée dans le "sérail" (on le
leur a assez reproché) et dont la moindre décision est influencée par le
coup d'après et leur futur personnel, Macron est hors-sol politique.
C'est une boutique éphémère construite autour d'une opportunité (la
médiocrité ambiante) à l'aide d'un plan com' efficace. Avant
d'être président : il n'a pas été élu, il ne sera pas plus après.
L'imagine-t-on se contenter d'un strapontin au Conseil Constitutionnel ? A l'instant où il ne sera
plus président il traversera la rue du faubourg St-Honoré et on lui
trouvera un siège confortable de consultant en optimisation de
rienabranling (avec Golden welcome inclus pour service rendu à la
finance) dans une banque planétaire quelconque. Pour la gloriole, il
continuera aux quatre coins de la planète des messes TedX à la sauce Ron
Hubbard sur les techniques d'abrutissement de masse.
Pour ces
mêmes raisons, Macron n'intègre pas les conséquences personnelles de son
impopularité croissante. En d'autres termes, votre avis c'est comme nos
vies : il s'en branle. Nous sommes son stock. Ajoutons à cela
que Macron est le genre de pragmatique radicalisé qui serait capable de
rajouter son nom en bas de la liste du grand plan social national
histoire de faire quelques économies de plus.
La politique de
restriction budgétaire, de libéralisation générale et d’annihilation du
service public se joue sur 30 ou 40 ans et pas un quinquennat. Chaque
président y va depuis deux décennies de sa réforme et de son recul, mais
tous vont rigoureusement dans la même direction. Le reste n'est que
cosmétique, une question de style personnel. Avec Macron vous avez juste
élu la continuité en plus extrême, la ligne dure, la version No Future,
en marche rapide vers le mur.
On peut mettre à part l'édition Purple Rain Deluxe de l'an passé, le 21 septembre 2018 est distribué le premier réel album posthume de Prince, Piano and a Microphone. C’est en apparence un
choix déconcertant de la Warnerque d’avoir exploité le contenu d’une
cassette audio d’une session au piano de Prince dans son home studio en
1983 pour en faire un album. Après tout, c’est le genre de choix
improbable que Prince aurait pu faire.
A l’écoute c’est la
claque. On y est. Force du toucher, précision de la voix et justesse
dans la dinguerie, malgré le packaging l’album est tout sauf lugubre,
c’est un brillant aperçu de la
créativité et de la maîtrise du jeune Prince. Dur de ce dire que ce mec
n’avait que 25 ans quand il balance sans une fausse note 30 minutes
d’improvisation au piano en mêlant chant traditionnel, titres inédits,
reprise de Joni Mitchell ou ébauches de futurs hits.
Ce type a passé sa
vie à travailler la musique et ça s’entend déjà à 25 ans. Le contenu était certes connu d'un grand nombre de fan, l'enregistrement pirate de cette session circulant depuis une vingtaine d'années mais pas dans une aussi bonne qualité. Le titre de l'album reprend le nom de l'ultime tournée (également au piano) de Prince où pour la première fois il revenait sur ses jeunes et cette année charnière de 1983. Il était alors à la veille de devenir une star planétaire.
Le plus dingue c’est de se dire que des milliers d’heures de la sorte
nous attendent et qu’il n’y aura pas assez d’une vie pour les apprécier.
"A l’augmentation de la CSG, entrée en vigueur le 1er janvier
et non compensée pour 60 % des retraités, est venu s’ajouter un
quasi-gel des pensions pour 2019 et 2020, annoncé fin août par le
premier ministre, Edouard Philippe." Le Monde, 19.09.2018
S'attaquer aux retraités est une ligne de code comme une autre de la présidence Macron.
Les aides descendantes des "seniors" vers leurs
enfants et petits-enfants compensent en partie, pour certains, jusqu'à tard
dans la vie des salaires trop bas ou des aides sociales trop maigres.
Assécher les prestations sociales d'un côté, réduire les aides
familiales et inter-générationnelles de l'autre : la ligne de code
gouvernementale est d'une cohérence implacable. La conséquence,ou l'objectif, de
cette prise en étau : contraindre le quidam, nous, à traverser la rue,
pour accepter n'importe quel boulot à n'importe quel prix.
Si cela s'inscrit parfaitement dans sa logique d'austérité comptable, politiquement c'est suicidaire. En s'attaquant aux retraités, la macronie fait peut-être sa plus grosse connerie.
Je dois m’incliner. Je voyais Macron comme un
conseiller clientèle d’organisme de crédit avec un peu de bagout, bref un petit
con d’HEC, ayant fait option théâtre et un Mooc "scientologie et dynamique de groupe", qui serait balayé comme un papier gras par le vent de la première contestation. Vous avez en fait élu ce qui se fait de plus redoutable en
matière d’intelligence artificielle.
Macron est un androïde avec une gouvernance logicielle (et
un petit plug-in cynisme) dont le principe algorithmique est la réduction
budgétaire aveugle. Margaret Thatcher dans le corps de Daniel Craig.
On le voit dans la moindre de ses mesures, et désormais le
moindre de ses propos :
Peu importe si le nombre d’élèves par classe explose. Virons 1800 profs pour une "meilleure gestion".
Peu importe tes études : tu feras ce qu'on te dit (Parcoursup).
Peu importe ton métier : ordre t’es donné de te
reformer en continu pour t’adapter au marché.
Peu importe la cause commune, le
collectif et encore moins l’intérêt du plus grand nombre : dans la start-up nation chacun doit devenir comptable de sa destinée, et tout rapport à l'autre se doit d’être facturé.
Peu importe si tu en meurs : il faut rationaliser.
L'humain n'a aucune place dans le système d'exploitation
Macron. Tout y est binaire. Une logique de 1 et de 0. Tu dois rentrer
dans une case, peu importe ton désir ou ta personnalité.
Vous avez élu Terminator en
petit costume de comptable.
Mais le pire n’est même pas là car, vous savez quoi : Macron n’est pas la cause de nos malheurs.
Il est la conséquence directe de
nos renoncements.
Avec un androïde au pouvoir suprême, un problème majeur se pose à nous
autres humains : rien ne sert de discuter avec une machine. Le combat est perdu d'avance.
Avec la "libération" de
23 albums de Prince sortis entre 1995 et 2010 et jusque-là inédits sur les plateformes de streaming (et la plupart introuvables dans le commerce), ceux qui ne connaissent
pas l'étendue de l’œuvre de Prince après 1995 (après les années de hits, et un
divorce laborieux avec sa maison de disques Warner) ont une chance assez
dingue : Ils vont pouvoir découvrir des albums aussi riches et différents que The Rainbow Children, The Truth, One Nite
Alon" ou Crystal Ball en une journée. J'avoue que je les
envie. Devant cette profusion, un petit audio-guidage s'impose. Commençons donc
la série avec le premier album de la seconde partie
de carrière de Prince : The Gold Experience (1995).
[1/23] THE GOLD EXPERIENCE
ou le retour gâché
« All that glitters ain’t
gold… »
L'album devait être son "Purple Rain 2" et a été fusillé à la fois par la Warner, sa maison de
disques n'ayant pas trop apprécié ses récentes émancipations discographiques
sur d'autres labels et sous d'autres noms, et Prince lui-même qui s'est comme
souvent lassé du projet (la sortie a été bloquée durant 2 ans). Éclectique,
nerveux et inspiré : Gold Experience est le parfait album pour commencer à
écouter du Prince, on y retrouve un peu de tout ce qui a fait sa marque audio
dans les années 90 : des ballades électriques calibrées sex (Shhh, Eye Hate U), une touche de rap (Pussy Control, Now),
de rock (Endorphine Machine), du funk clintonien (Billy Jack
Bitch) et des morceaux un peu plus dénudés (Shy)
Titres favoris : Billy Jack
Bitch, Eye Hate U, Shhh Le Sachiez-Tu : On y entend brièvement Ophélie Winter et Lenny Kravitz.
[2/23] COME ou
quand Prince se dédouble
"Come. You Should Do That, Baby"
Comme c’est Prince et que « chaos
» et « désordre » sont les maitres-mots de sa discographie, cette
série Prince Post Warner 1995-2010 n’est déjà plus respectée dès le 2e
épisode avec un album sorti en 1994 chez Warner. Mais on ne peut parler de Gold Experience sans évoquer COME, son album jumeau aussi sombre que Gold est
lumineux.
Come et Gold étaient pensés par
Prince pour sortir le même jour en 1994. Come sous le nom de Prince et Gold
signé d’un symbole imprononçable. Sur la pochette de Come sont d’ailleurs
indiqués naissance et mort de Prince : 1958-1993. C’est à cette
époqueque l’on voit Prince arborer un
« SLAVE » sur sa joue. Prince cherche alors à reprendre le contrôle
de son nom et sortir comme bon lui semble ses albums (c'est-à-dire 1 tous les 3
mois). Mais il est contractuellement lié pour plusieurs années à la Warner qui
n’a pas la même vision de la distribution. Les relations
entre les deux sont exécrables. Prince va honorer son contrat en « lâchant »
pour la major une série d’albums d’apparence bâclés mais qui contiennent chacun
leurs pépites. Come est le premier de la série. C’est un de ses
albums les plus courts, et hors-formats habituels (un titre a capella, un autre
de 11 minutes…), avec peu de possibilité de singles là ou Gold
est un album étiré mais très accessible avec 4 ou 5 hits potentiels. Prince
avait tout misé sur Gold, Warner sortira Come. Les
anciens amis ne s’aiment plus.
Titres Favoris :Papa, Solo et Let it Go (pas celui de la reine des
neiges hein)
LeSachiezTu : On entend des
gémissements sur le dernier morceau Orgasm. Sont-ce ceux de Vanity
(Denise Matthews), enregistrés dix ans plus tôt ? Si oui, dans quelles conditions ?
Et pourquoi les réutiliser à ce moment-là en concluant cette ode à la jouissance sur un "I love You" ? Le débat reste ouvert.Ils ont emporté
leur secret dans l’afterworld, les deux sont décédés à 3 mois d’intervalle en
2016.
[3/23] CHAOS AND DISORDER ou quand Prince claque la porte
"I Rock, Therefore I am !"
Le bien nommé Chaos & Disorder est
sorti à l’été 1996. Probablement enregistré en quatrième vitesse, l’album fait
partie de ceux que Prince jetait à la Warner pour honorer son
contrat. « C & D » est passé inaperçu personne ne daignant en
assurer la promotion.Si la compilation
est plutôt cohérente et épurée (c’est probablement le plus « rock »
de ses albums avec The Undertaker 1993), la plupart des morceaux comme I like It There ou Zanalee
prenaient réellement leur dimension en live. La pochette est symbolique de cette
époque ou l'image de Prince (embourbé dans ses litiges juridiques et
artistiques sur son nom et ses disques) se brouille complètement dans le
public, au point de disparaitre des radars. Avec son côté "Je m'en bats les couilles", Chaos & Disorder est en tout point l’antithèse de l’album que Prince prépare
au même moment et qui sortira sous un autre label à l’automne 1996. 1996, une
année charnière à plus d’un titre dans la carrière et la vie intime de Prince.
Mais ça nous en parlerons demain.
Titres favoris :The Same
December, Zanalee, Had U.
LeSachiezTu : Le dernier
titre Had U (au choix « je t’avais » ou « je t’ai
eu ») ne parle pas d’une femme, mais bien de ses 15 années chez Warner : « Kissed U, Disappoint U,
Fuck U, Had U… »
[4/23] EMANCIPATION ou quand Prince se
libère. Vraiment ?
"- Free ! Don’t Think I
Ain’t."
On allait voir ce qu’on allait
voir. Frustré de ne pas pouvoir distribuer autant de musique qu’il le voulait chez
Warner, Prince sort chez EMI 36 chansons sur 3 CD de 1h pile chacun pour
célébrer son amour et sa liberté artistique retrouvée. L’épais Emancipation,
sorti en novembre 1996, est un tournant dans la production princière. Il y explore plus qu'avant plusieurs genres (Salsa, RnB, Rap, disco même) et, première, s’aventure
dans des reprises de standards US (Bonnie Raitt, Joan Osborne, les Stylistics et les Delfonics). Si
cette somme est incroyablement riche, la production n’est parfois pas à la
hauteur de la créativité de certains titres (l’absence de cuivres sur Face Down
reste un mystère) mais on y trouve son lot de bons grooves, de morceaux bien déglingués
et un bel enchainement de ballades mélancoliques.
Emancipation fait
également parti des opus « intimes » où Prince se livre le plus sur
sa vie privée. Le disque 2 est intégralement consacré à son couple (il s’est
marié avec Mayté Garcia). Le morceau Sex in The Summer est d’ailleurs
rythmé par les battements de cœur de son enfant à naître. Emancipation
est donc un album joyeux, résolument optimiste. La joie sera de courte durée.
Son enfant, Amir, décèdera au bout de quelques jours, peu avant la sortie du
disque dont il assurera quand même une longue promotion (ce qui n’était plus le
cas depuis plusieurs années). Dans sa récente interview sur Schkopi-tv, Mayté revient sur l’importance qu’avait pour Prince ce disque.
Elle l’a donc accompagné sur cette tournée promo malgré la peine. Prince disait
que ses chansons étaient comme « ses enfants ». Pourtant quelque
chose est cassé et son couple ne s’en remettra pas. C’est à cette époque, pour
notre plus grand bonheur, qu’il s’embarque dans des tournées fleuves aux États-Unis et en Europe pour financer son association caritative « Love 4 one
another ». Jusqu’à la fin, Prince ne jouera plus que très rarement des
titres d’Emancipation sur scène. Paradoxalement cet album sur la liberté marque
le début de son enfermement personnel et musical sur lui-même dans son gigantesque
studio-blockhaus de Paisley Park « The White Mansion » à un moment où
beaucoup de nouveaux sons et tendances musicales transforment la planète pop-rock. C'est aussi le début du bazar dans la distribution de sa musique, à partir de là il négociera disque par disque avec différents labels, quand il ne distribuera pas lui-même ses albums.
Titres favoris : Emancipation,
Saviour, Joint 2 Joint, The Love We Make
LeSachiezTu : On entend Kate
Bush sur le titre My Computer dont le thème est l’addiction à
internet (10 ans avant la création de Facebook !).
[5/23] CRYSTAL BALL ou quand Prince se pirate lui-même
"- You never would have drank my coffee if I had nerver served you Cream"
Prince est probablement, encore aujourd’hui, un des artistes les plus
piratés : Les enregistrements des concerts bien sûr, le fameux Black
Album, mais aussi des centaines de titres inédits ont circulé dès la
fin des années 80. Ce marché parallèle atteignait un tel niveau que
certaines paroles de chansons supposément inédites étaient parfaitement connues des fans qui les reprenaient durant les concerts.
Au milieu des années 90, Prince veut reprendre la main sur les
"bootleggers" et profiter des possibilités de l' internet naissant pour
distribuer lui-même sa compilation de pirates. Crystal Ball est sa
première ambitieuse démarche dans ce sens.
Disponible en 1998
uniquement en commande par téléphone ou via son site internet, Crystal
Ball est un triple album dont le seul concept est d’offrir dans le
désordre des morceaux inédits tirés du fameux "vault" (son coffre-fort à
Paisley Park). L’emballage est sommaire avec une vague note rédigée par
Prince où il explique le pourquoi et le comment de chaque titre.
On ne va pas chipoter, Crystal Ball est une mine d’or. Une mine qui se divise en trois catégories :
- Des morceaux de 1986 (Dream Factory, Last Heart, Sexual Suicide,
Crucial ou le mythique Crystal Ball un titre résolument jazz de 11
minutes qui devait introduire un quadruple album refusé par la Warner).
- Des titres plus rock et RnB des années 90 (Aknowledege Me, The Ride,
Interactive, Poom Poom, Calhoun Square…) qui auraient pu trouver leur
place sur ses plus récents albums.
- Des curiosités : une séance à la batterie avec son comparse Morris Day, un poème et des versions remixées.
S’il n’a pas vraiment de cohérence sonore, Crystal Ball montre plus que
tout autre album la diversité de la production princière entre 1985 et
1995 et contient des classiques incontournables pour les fans.
Même s’il a été furtivement commercialisé en France sous le label Night
and Day, ce triple album gâchant un peu son potentiel, autant dans
l’assemblage bordélique que par sa distribution confidentielle, est
symptomatique du sentiment ambigu que nous ressentions à l’époque. Nous
avions d’un côté la satisfaction de pouvoir enfin entendre tout ça avec
un bon son tout en déplorant que personne d’autres en dehors du cercle
des fans ne le puisse. C’est enfin possible aujourd’hui. Profitez.
Titres favoris : Crystal Ball, Hide The Bone, Crucial, Days O Wild
Le SachiezTu :Crystal Ball est en fait un quintuple album. La version
originale contient deux disques supplémentaires : un album instrumental
improbable Kamasutra (qui n’est pas disponible dans la liste des 23
albums en streaming) et aussi The Truth un album acoustique à la
guitare dont nous parlerons demain.
[6/23] THE TRUTH ou quand Prince est seul à la guitare
"- When the voices you hear command you to entertain the absurd..."
Fin des années 90, Prince est tiraillé entre son désir de revenir sur
le devant de la scène comme à l’époque de Purple Rain (tout en sachant
pertinemment que ce sera impossible) et sa volonté de faire la musique
simplement pour un cercle plus restreint, ses amis ou ses fans de longue
date, ou « fams ». Il va donc durant dix ans alterner des albums calibrés visant le grand public et des sorties ultra confidentielles pour son "audience rapprochée".
The Truth c’est 12 titres où Prince est seul à la guitare sèche,
savamment accompagné de quelques effets sonores. Sans pochette et
distribué en cadeau avec Crystal Ball en 1998, à l’évidence Prince
n’avait aucune prétention d’exploser les charts avec cet unplugged. The
Truth se glisse discrètement entre plusieurs albums largement
surproduits avec, eux, de réelles ambitions commerciales (Emancipation
et New Power Soul). Avec le recul on peut voir cette stratégie comme une
erreur.
Cette volonté de se rapprocher des fans se poursuivra
quelques années encore avec la création d’un « club » en ligne et des «
célébrations » avec des concerts plus intimes (et acoustiques) chez lui à
Paisley Park.
Il faut voir aussi dans The Truth sa première affirmation
discographique pour remettre en avant « la vraie musique par de vrais
musiciens », un leitmotiv qui ne le quittera plus par la suite. Et
preuve est faite avec cet album que Prince est un grand guitariste. De
par sa simplicité et son authenticité, The Truth passe très bien
l’épreuve du temps et serait probablement un carton s’il sortait
aujourd’hui.
Titres favoris : The Truth, Fascination, Comeback, Welcome 2 The Dawn
LeSachiezTu :Animal Kingdom est une chanson pro-vegan offerte à
l’association pour la défense des animaux PETA à l’occasion de son
vingtième anniversaire.
[7/23] NEW POWER SOUL ou quand les disques de Prince commencent à devenir des prétextes à concerts
"- Freaks On This Side !"
1998 est une année princière faste. En plus de Crystal Ball, The Truth
et Kamasutra, Prince sort un autre album sous le nom de son groupe le
NPG (New Power Generation). Le NPG est une formation à géométrie
variable et membres interchangeables (tous ont d’ailleurs repris la
scène ensemble à la mort de Prince).
Avec un son synthétique dans la continuité d’Emancipation,
NewPowerSoul, avec son mélange heavy funk et guimauve, déroute sur
certains titres. Une fois encore, c’est un album inégal dont la
production laisse parfois dubitatif. L'album fait partie d’un triptyque
le « NewPowerPak » composé de deux autres disques produits par Prince
mais interprétés par deux de ses idoles de jeunesse : Chaka Khan et
Larry Graham le bassiste de Sly and The Family Stone. Si Prince ne signe
pas New Power Soul de son nom, il en assure néanmoins la promotion et
plusieurs clips sont réalisés (dont The One par son épouse Mayté)
L’album a été distribué en Europe dans le principal but de servir
d’appui à une longue tournée le « Jam Of The Year Tour » qui a ressoudé
les rangs des fans qui commençaient à se clairsemer. A Paris, ou il
n’avait pas joué depuis quatre ans, l’année de ses 40 ans, Prince remet
les pendules à l’heure et nous offre 2h30 de concert fabuleux et prouve
avec force solo et grand écart qu’il est au sommet de son art.
NewPowerSoul est l’exemple type de l’album dont on aime se souvenir pour
les concerts et les longs jams qui y sont associés.
Titres Favoris : Push it Up, Come On, Mad Sex
Le SachiezTu : Il existe deux autres albums où Prince se cache derrière
le groupe NPG : Goldnigga (1993) et Exodus (1995). A la différence de
NewPowerSoul où il est en avant sur la pochette, il n’y est fait aucune
mention de Prince ou alors via des messages cachés. Mais c’est bien lui
aux commandes et qu'on entend sur la majeure partie des titres.
[8/23] THE VAULT : OLD FRIENDS 4 SALE ou quand Prince déstocke à prix cassé des pièces de collection
"- And they'll show you the friends that they're not"
Sorti à la fin de l’été 1999The Vault : Old Friends 4 Sale est la
dernière livraison contractuelle et à contrecœur (comme le montre la
pochette) de Prince à la Warner. C'est un album à l’exact opposé du
précédent NewPowerSoul. Selon le même schéma que Chaos And Disorder ou
Come, Old Friends est très court, mais cette fois orienté smooth jazz et très accessible.
Cette collection de morceaux enregistrés entre 1986 et 1994 et
d’extraits d’une musique de film jamais sortie (I’ll do Anything)
s’avère une excellente surprise. Alternant les titres enlevés et plus
sombres, on y retrouve enfin un Prince musicien au milieu d’autres
musiciens, sans artifices électroniques et avec une vraie cohérence
entre chaque titre. On regrette juste l’absence des autres titres de la
BO d’I’ll Do Anything qui y auraient parfaitement trouvé leur place. Il
n’y aura aucune promotion ni vidéo pour cet album.
On se met à
rêver alors qu’il poursuive dans cette direction jazzy et intimiste sur
scène mais, au tournant du millénaire, c’est dans un registre totalement
différent que Prince prépare son (troisième) comeback.
Titres favoris : It’s about that walk, When the lights go down LeSachiezTu : 5 Women est un titre à l’origine écrit pour Joe Cocker et figure dans son album Nightcalls en 1991.
[9/23] RAVE UNTO/INTO THE JOY FANTASTIC ou quand Prince rêvasse.
"- Don't hate me 'cause I'm beautiful !"
Rave UNto The Joy Fantastic sort sur le label Arista en novembre 1999.
L’album est symptomatique d’un travers qu’aura Prince durant 10 ans : il
délaisse ce qui a fait sa marque de fabrique, des albums concepts et
transgressifs, pour chercher à tout prix artistique à distribuer un
album "catalogue" brassant différents genres avec
pour chaque genre un titre formaté. Quand on cherche à plaire à tout le
monde, il y a de grandes chances qu’on ne séduise vraiment personne.
C’est le cas avec Rave Unto pourtant adossé à une impressionnante
tournée promotionnelle en Europe (Prince ira jusque sur le plateau de
Jean-Pierre Foucault !).
Rap, ballade, clin d’œil à James Brown, solo au piano, rock fm… l’album
part dans tous les sens et sonne comme une prétentieuse tentative de
prouver qu’il maitrise tout mieux que tout le monde « I don’t follow
trends, they just follow me ». Comme il s’agit de Prince les
collaborations annoncées, que ce soit avec Gwen Stefani ou Sheryl Crow,
n’en sont pas réellement et, cerise sur le pudding, le packaging n’a
aucune âme (en un sens c’est raccord avec le contenu). Malgré tout,
comme souvent avec Prince, on pioche deux ou trois titres magnifiques
dans la bouillabaisse des 2 versions de l’album.
Car, ce serait trop simple, un an plus tard une nouvelle version de
l’album, nommée Rave INto The Joy Fantastic, est distribuée en CD via
son site internet. Elle comprend des versions longues ou remixées, plus
ou moins heureuses et un nouveau titre envoutant qu’on écoute alors en
boucle : Beautiful Strange
Bref, on sent à cette époque que Prince
1 / ne s’intéresse plus à ses albums en tant que tel (il mise de plus
en plus sur la distribution en ligne, titre par titre, et le futur
prouvera qu’il a raison)
2 / est clairement préoccupé par autre chose (on apprendra avec son prochain album qu’il s’agit de religion).
Pour les fans, plus que jamais, c’est désormais sur scène que ça se passe.
(reprise de Jimi Hendrix en décembre 1999. Extrait du DVD "Rave Unto the year 2000"
Titres favoris :Eye Love U But Eye Don’t Trust U Anymore, Beautiful Strange, Wherever U Go Whatever U Do. Le SachiezTu : Le titre Rave Unto The Joy Fantastic a été enregistré en
1988 (à l’époque de Batman), soit 11 ans avant la sortie de l’album.
[10/23] THE RAINBOW CHILDREN ou quand Prince prie en musique
"- I'm willing to do The Work
Tell me now what about you ?"
Prince aura eu jusqu'à la fin la faculté de nous cueillir là où on ne
l’attendait pas. Après quelques déceptions discographiques, à l'été 2001
il nous percute avec un album radicalement différent de tout ce qu'il a
fait jusque-là sur le fond, la forme et la distribution.
Sur la
forme, avec The Rainbow Children Prince assume enfin son penchant jazz
d’un bout à l’autre d’un album. Il renoue également avec « l'album
concept ». John Blackwell son nouveau batteur a précisé que l'album
avait entièrement été réalisé avec seulement eux deux dans le studio.
L’album peut déconcerter à la première écoute, mais c’est un classique
et pour certains fans son dernier grand album.
Sur le fond, fini l'équivoque ou la dualité sexe et spiritualité, The
Rainbow Children gravite entièrement autour de la religion (même si tout
reste cryptique). Jamais des psaumes n’ont sonné aussi funky. Ce disque
est l’aboutissement artistique du travail spirituel que Prince
entreprend sous l'influence de Larry Graham qu'il a rencontré peu après
la mort de son enfant. Le bassiste de Sly and the Family Stone, très «
investi » dans la religion, inspirera son « baby brother » à rejoindre
les témoins de Jehovah. Certains en veulent à Graham pour cette « dérive
». Je pense, mais ça ne tient qu’à moi, qu’aussi déroutante qu’elle
puisse nous paraitre ce détour a probablement rallongé d’au moins
quinze ans la vie de Prince. La religion a par ailleurs toujours été
présente dans ses disques à des degrés divers sous un axe plus profane
ou blasphématoire.
Au début du siècle sur scène Prince est donc
moins « dirty » et plus « mind », les « explicit lyrics » sont
édulcorés, la chanson Sexuality est rebaptisée Spirituality et d’autres
morceaux comme Sexy Mother Fucker ou Irresistible Bitch disparaissent de
son répertoire. Côté promo, Prince ne fait plus une interview sans
parler de la bible au milieu d’un charabia difficile à suivre.
Malgré son coup sur la cafetière, nous allons entrer avec cet album, et
ceux qui vont suivre autour de son nouvel assemblage du NPG, dans une de
ses meilleures périodes en concert.
Alors que l’industrie du
disque dans sa quasi-totalité se méfie d’internet comme de la peste,
l’album est disponible en téléchargement gratuit (nous sommes en 2001 !)
sur le NPG Music Club, un site que Prince vient d’ouvrir et sur lequel
il distribuera désormais sa musique. L’album sortira par la suite en CD
et vinyle en France où il aura joli succès d’estime. Dix-sept ans après The
Rainbow Children reste un album intemporel, et on entend toujours chaque
soir ses premières notes au milieu d’autres standards dans le générique
du Club JazzaFip.
Titres Favoris :Rainbow Children, Mellow, 1+1+1=3, Everywhere LeSachiezTu : Dans le cadre de la promotion de l’album et du NPG Music
Club, Prince est le premier artiste de renommé à avoir donné
l'exclusivité d'un titre (The Work) à Napster, le site d’échange de
fichiers mp3 qui était dans le collimateur de l’industrie musicale.
[11/23] ONE NITE ALONE… ou quand Prince jouait du piano assis
Début des années 2000, Prince s’investit énormément dans le
développement de son site internet, le NPG Music Club. Pour un
abonnement annuel de 100$ les fans y ont accès à son blog, une émission
mensuelle (précurseur des podcasts) et surtout des chansons et des
vidéos inédites chaque mois, voire des albums (The Rainbow Children). Il y distribuait aussi des CD physiques comme Rave Into The Joy Fantastic ou ce One Nite Alone, son 25e album.
Après The Truth, One Nite Alone est le second album « unplugged » de
Prince. Alors que depuis une dizaine d’années, l’autodidacte de la
musique délaisse le piano sur ses disques et sur scène (nous avions tous
en mémoire les longs passages de la tournée Lovesexy où il retournait
un stade en quelques notes), il nous livre avec One Nite Alone 33
minutes émouvantes où il est seul face à l'instrument. Conséquence de ce
qu’il vit à l’époque ? Son père, pianiste de jazz, est mort quelques
mois plus tôt.
One Nite Alone est son album le plus épuré, le plus triste, celui où on
a le sentiment d’être le plus proche de lui (on l’entend quitter la
pièce à la fin). L’album, bien que confidentiellement distribué, donne
son nom à une tournée mondiale où nous retrouvons un Prince sur scène au
piano à queue mais pas que. Et ça nous en parlerons demain.
Titres favoris : One Nite Alone, Avalanche, Arboretum LeSachiezTu : Prince admirait Joni Mitchell. One Nite Alone contient
une reprise de A Case of U. Une autre version est présente dans l’album
Piano and a Microphone 1983 qui sortira le 25 septembre prochain chez...
Warner.
[12/23] Le coffret ONE NITE ALONE LIVE ou quand Prince est en concert dans ton salon
"- If you came to put your purple rain coat on, you're in the wrong house"
Même s’il vendait moins de disques dans la seconde partie de sa
carrière Prince a toujours rempli les salles, du petit club réservé à
l’arrache à 1h du matin au Stade de France booké seulement un mois avant
le show. Et, soyons un peu objectifs, même un concert éventuellement «
moins bon » de Prince dépassait de loin à peu près tout le reste de ce
que j’ai vu avant, pendant et depuis. Si les fans le sont restés aussi
longtemps malgré la difficulté à le suivre sans nom dans sa croisade
anti-major et le labyrinthe mystico-bulshitesque de son bon-vouloir,
c’est avant tout grâce à ses concerts et aux enregistrements de ses
concerts, enfin les enregistrements pirates de ses concerts.
Car
en déjà 25 ans de carrière, mis à part quelques programmes vidéo et le
film Sign of the Times, Prince n’a jamais officiellement sorti de « live
». Il devait donc être sacrément fier de la tournée One Nite Alone pour
en faire un triple-album. Le coffret One Nite Alone Live est distribué
à la fin 2002 alors que Prince termine la tournée en Europe. Cette
tournée, avec Prince et son groupe en costards, est exceptionnelle pour
sa set-list sortant des hits attendus. L’album a été enregistré lors de
la partie américaine autour d’une formation « jazz » (avec John
Blackwell et Maceo Parker) et l’on y retrouve le son et les titres de
The Rainbow Children et des morceaux moins connus (Extraordinary, Anna
Stesia…) revisités sur le même mode.
Le second disque reprend le
concept de son album précédent et on l’entend longuement seul au piano.
Malheureusement l’enchainement des titres au piano est trop rapide pour
vraiment créer une émotion. Le tout est même presque trop « lisse » par
rapport à ce que nous avons expérimenté sur cette tournée.
Le troisième disque ONE NITE ALONE LIVE… THE AFTERSHOW : IT AIN’T OVER !
est un collage de titres enregistrés lors d’aftershows dans des petits
clubs sur cette même tournée. Car un concert de Prince c’était souvent
l’angoisse d’un second concert surprise de Prince ailleurs dans la nuit.
On ne compte plus ceux qui ont raté un premier concert dans l’espoir
d’une bonne place au second qui n’aura finalement pas lieu (ou ailleurs)
et ceux qui, à l’inverse, par le plus grand des hasards se sont
retrouvés aux premières loges d’un concert surprise de Prince dans une
boite de nuit alors qu’ils étaient venus pour une soirée mousse. Le son
de ce troisième disque est donc différent, plus électrique, plus funk,
plus décousu aussi, on y croise George Clinton, Larry Graham ou Musiq
Soulchild, et une longue version à la guitare saturée d’une de ses plus
belles chansons : Joy In Repetition. Tout cela est très bien mais il
manque le principal : y être.
Titres Favoris :Xenophobia, Strange Relationship, Anna Stesia, 2 Nigs United 4 West Compton, Dorothy Parker LeSachiezTu : Il existe un DVD officiel de cette tournée, à regarder
d’un œil seulement. One Nite Alone Live in Las Vegas est filmé avec les
pieds (c’est l’époque où Prince filme tout lui-même au camescope parce
que ça coute moins cher). Le DVD dure une heure et ne rend pas hommage
ni à ce concert (qui en faisait trois) ni à cette tournée.
[13 et 14/23] XPECTATION et NEWS… ou quand Prince est à la croisée des chemins
Pas de répit, ce n'est jamais fini. La tournée One Nite Alone s’achève
en décembre 2002 et le coffret Live vient tout juste de sortir et, pour
les abonnés du NPG Music Club, l’année 2003 commence par un cadeau. Le
matin du 1er janvier Prince offre un nouvel album en téléchargement :
XPECTATION.
C’est une double
révolution. C’est le premier album de Prince entièrement dématérialisé
(il n’y aura jamais de version CD) et, si l’on met à part les 2 albums
du groupe Madhouse (un de ses nombreux alias) sortis cher Warner dans
les années 80 et 90, XPectation est le premier album entièrement
instrumental qu’il signe de son nom.
Entouré des musiciens de la tournée (John Blackwell, Candy Dulfer,
Rhonda Smith) auxquels est invitée à se joindre la violoniste Vanessa
Mae, Xpectation est une prolongation plus radicale du son jazz qu’il a
initié deux ans plus tôt avec Rainbow Children. Il ne cherche ni le
consensus ni à atteindre le grand public. Le sous-titre de l’album est
explicite : New Directions in Music From Prince. L’album est une «
expérience », inspirée dans la démarche par les disques de Miles Davis
que Prince admirait. Le résultat est une succession de morceaux plus ou
moins réussis aux allures de « jams » en studio. La distribution ultra
confidentielle indique que Prince n’était, pour une fois, pas trop sûr
de son coup et qu’il attendait des réactions de ses fans. Ceux-ci sont
mitigés.
Il va poursuivre l’expérience avec un autre album
instrumental NEWS qui sort dans la foulée en mai 2003 en version CD
commercialisée à grande échelle. Cette fois c’est le saxophoniste Eric
Leeds qui rejoint la formation. L’album a été enregistré en une prise et
une journée. Il est composé de 4 morceaux (North, East, West, South) de
14 minutes chacun et sont pensés pour être écoutés en une seule fois à
la suite.
Malgré son joli packaging où Prince n’apparait pas (son nom est écrit
en petit, perdu dans la pochette), News est encore moins commercial
qu’Expectation, mais il est aussi plus intéressant et plus envoutant. News sera la plus mauvaise vente de disque de Prince.
Sa période jazz aura duré près de trois ans. Si Prince l’a
incontestablement appréciée et qu’il a voulu donner des « preuves » à on
ne sait qui qu’il était d’abord un musicien (ce que nous savions), on
sent aussi qu’il se cherche musicalement, qu'il doit se réaffirmer
commercialement et que nous sommes donc, en toute logique princière, à
la veille de quelque chose de nouveau…
Something big is coming.
[15 et 16/23] THE CHOCOLATE INVASION et THE SLAUGHTERHOUSE ou quand Prince solde les comptes
- The chocolate invasion strats here !
Début 2004. L’aventure NPG Music Club touche à sa fin. Les fans ont
parfois eu la dent dure avec le club, mais avec le recul c’était une
expérience fabuleuse. Durant 3 ans nous avons eu un contact plus «
direct » avec la musique de Prince au fur et à mesure qu’il
l’enregistrait.
Alors qu’un grand
projet discographique et scénique pour le grand public se dessine
(l’album et la tournée Musicology), un nouveau site est ouvert.
Plusieurs albums sont mis en ligne sur le Musicology Download Store. A
commencer par ces deux volumes regroupant les NPG TRAX, les chansons que
Prince distillait chaque mois de 2000 à 2002 sur internet.
Il
faut donc voir ces 2 volumes comme des compilations, jouables en mode
shuffle à destination première de ses fans, pour marquer de façon plus
officielle un moment de sa carrière où il a privilégié la musique en
ligne, et non des albums « pensés ». La plupart des morceaux sont des
chutes d’albums abandonnés. S’il y a une dominante funk-electro
cohérente sur Chocolate Invasion, on y trouve des morceaux plus doux
comme When I Lay My Hands on U ou U Make My Sunshine, un duo avec Angie
Stone.
"- How can a non-musician discuss the future of music from anything other a consumer point of view ?"
La recette est la même pour le volume 2, The SlaughterHouse, qui a
peut-être un meilleur niveau global et sonne un peu plus techno. Le
son y est de nouveau surproduit et la tonalité se veut futuriste.
Ces deux compilations ne sont jamais sorties en CD et, à quelques
notables exceptions près, la plupart des titres des deux volumes n’ont
pas été joués sur scène. Pourtant les clips de plusieurs chansons ont
été tournés.
Titres favoris :2045 Radical man, Northside, Judas Smile, SexMeSexMeNot LeSachiezTu : sur cette compilation figurent deux titres
inspirés/écrits par/pour un film de Spike Lee, Bamboozled (Judas Smile
et Radical Man). Ce n’est pas la première fois que Prince travaillait
avec Spike Lee. Il avait déjà signé la BO de son film Girl 6 et avait
participé au financement du biopic sur Malcolm X. Au générique de fin du
récent Blackkklansman on peut également entendre un classique de la
musique noire américaine repris au piano en 1983 : Mary Don’t U Weep.
Spike Lee a également réalisé plusieurs vidéos pour Prince.
[17/23] C-NOTE ou quand Prince improvise
"- Now how am I gonna fill this empty room?"
Mars 2004, le
troisième album distribué en téléchargement sur le Musicology Download
Store est une perle. Pour la décoder, il faut revenir en arrière à
l’automne 2002 sur la tournée One Nite Alone. En plus des titres et des
podcasts, les abonnés du NPG Music Club avaient alors accès à la
billetterie des concerts et des aftershows en avant-première mais
aussi le privilège d’assister aux répétitions des concerts. Et, avec
Prince, répétition équivaut parfois concert et souvent un concert
différent de celui qui va suivre. C’est ainsi qu’à Paris, en amont des
deux heures de concert puis des deux heures d’aftershow au Bataclan, 200
fans français ont assisté à un concert privé d’une heure dans un Zénith
vide. Le summum est atteint au sportpaleis d’Anvers avec un soundcheck
de 2h qui reste un de mes meilleurs souvenirs de cette époque et la
seule fois où j'ai vu prince habillé en type lambda, dans une posture
totalement décontractée, jouant les titres qu’on lui demandait.
C-Note revisite, trop brièvement, ces moments magiques. C’est une
compilation de 5 morceaux dont 4 instrumentaux improvisés enregistrés à
Copenhague et au Japon. Le disque est court (33 minutes) mais c’est un
sans-faute. Les milliers d’heures d’enregistrements pirates qui
circulent le prouvent : Prince était particulièrement doué pour ces
exercices d’improvisation. La majeure partie de ses chansons sont nées
sur scène, construites au fil de ces jams d’avant concert puis
améliorées de preshow en show.
C-NOTE contient également la
première version officielle d’une émouvante chanson « inédite » bien
connue des fans depuis dix ans, Empty Room, dont on s’est toujours
demandé pourquoi il ne l’avait pas sortie sur un album avant. Peut-être
est-ce tout bêtement par ce que le titre (« salle vide ») prend sur cet
album toute sa signification.
Il n’a jamais réitéré cette
expérience « planifiée » de réelle proximité avec les fans, mis à part
pour quelques «Celebrations» à Paisley Park et quelques chanceux au fil
des tournées, pourtant il semblait l’apprécier.
[18/23] MUSICOLOGY ...ou quand Prince fait le tour de la révolution
"- Kick the old school joint, for the true funk soldiers !"
Prince a multiplié les comeback plus ou moins réussis entre 1995 et
2003. En avril 2004, il se donne enfin les moyens commerciaux de ses
ambitions.
Prince annonce à la fois la sortie de l'album
Musicology et une très longues tournée américaine durant l'été. Première
mondiale, le CD de Musicology est inclus dans le prix de vente du
billet et sera distribué physiquement à l'entrée des concerts.
Cette fois, tout ceci est appuyé à un vrai plan média : superbe
prestation avec Béyoncé aux Grammy Awards où ils reprennent Let's Go
Crazy et Purple Rain, tournage d'un vrai vidéo-clip, une
emission-concert à New York diffusée sur MTV et une prestation
légendaire au Rock n'Roll Hall Of Fame avec Tom Petty. Il sera également
le premier artiste à organiser une retransmission live du concert de
lancement dans les salles de cinéma américaines.
Le Musicology
Tour est une de ses tournées « greatest hits » la plus formatée avec,
toujours (c'est Prince quoi), de grands moments et un long set
acoustique à la guitare au milieu du public. C'est également une tournée
sans effets où une grande place (scène centrale) est donnée aux
musiciens : "real music by real musicians"
A l'exception du titre
phare (hommage funky à James Brown et à la musique de son enfance) qui
débute le concert, l'album Musicology a peu de rapport avec le concert
du même nom. Peu ancré dans les sons du moments, l'album est un
portfolio de genre divers (funk, pop, balades, rock...). Si l'ensemble
montre proprement l'aisance et la diversité du musicien, Musicology
laisse à l'époque une impression d'éparpillement. Plusieurs titres
tiennent pourtant très bien les années et sont des merveilles de
production.
Si Musicology n'est pas un summum de créativité, ce sera en revanche un
très gros succès commercial. Grâce à son coup de génie marketing (un cd
vendu d'office dans une tournée à guichet fermé), Prince renoue avec
les sommets des ventes de disques aux États-Unis. Il est enfin de retour
sur les écrans et dans les esprits. L'aventure Musicology est la preuve
que Prince comprend avant les autres que le rapport scène/vente de
disque s'inverse à l'heure de la musique en ligne et du piratage. De
surcroît, la recette lui permet de s’émanciper, avec une pointe de
fierté, des "majors" du disque. Il fera désormais plus d'argent en
concert qu'en cherchant à vendre des CD. Chaque album sera le pivot
d'une tournée offrant l'opportunité d'une distribution ingénieuse de
l'album qui, en retour, fera parler de la tournée.
La boucle est
bouclée entre le petit Prince qui, pour s'entrainer à la guitare, achète
un vinyle dans un "record store" au début de la vidéo de Musicology, et
la dévalorisation du support CD symbolisée par la distribution gratuite
de l'album à l'entrée du concert d'un Prince devenu grand... La musique
n'est pas une question de formats mais d'émotions.
Titres favoris :Musicology, Call My Name, Dear Mr Man LeSachiezTu :Dear My Man est une des rares chansons "politiques" de
Prince (Other Titles In This Category Include : Baltimore, America et Sign Of The Times).
[19/23] 3121 ou quand Prince va en vacances
- You can come if you want to, but you can never leave"
Après sa
longue tournée américaine de 2004 et une exposition médiatique comme il
n’en avait pas bénéficié depuis une bonne dizaine d’années, pour la
première fois de sa carrière, Prince souffle un peu. Pas de disque, pas
de tournée en 2005.
L’indépendance retrouvée, Prince suit enfin le rythme que lui a dicté en
vain la Warner pendant des années (une forte exposition pendant six
mois pour le nouvel album et la tournée, puis un silence radio d’un ou
deux ans avant le prochain album).
Celui qui est pourtant attaché
à son Minnesota natal passe l’essentiel de cette année à Los Angeles
dans la grande maison du 3121 Antelo Road. Il y organise des soirées où
se pressent les people d’Hollywood. On retrouve quelques traces de ces
nuits et concerts privés dans le livre photo de Afshin Shahidi : Prince A
Private View…
C’est le même Afshin qui réalise la pochette du
31e album de Prince : 3121. L’album sort en mars 2006 chez Universal,
accompagné d’un beau plan marketing et de plusieurs prestations télé aux
États-Unis et en Angleterre.
L’album est, une fois encore, un collage de morceaux divers et légers
dans l’esprit de Rave Unto The Joy Fantastic. Et, comme souvent depuis
quelques années, on n’en ressort pas convaincu sur le moment, avant de
lui trouver des qualités au fil des années.
La tournée à venir
sera immobile, Prince décide de s’établir à Las Vegas sur la scène de
l’Hôtel Casino Rio pour une série de shows durant toute l’année 2006.
Il rode ici un concept qui traversera l’Atlantique l’année suivante.
Titres Favoris : 3121, Black Sweat, Get On The Boat
LeSachiezTu : Sur le CD de 3121 est sous-titré « The Music ». 3121 est
aussi un film que Prince voulait distribuer en DVD avec l’album avec le
sous-titre « The Movie ». Devant l’indigence narrative et formelle de
la chose à côté de laquelle Grafitti Bridge ressemble à Citizen Kane,
Universal a dû juger bon de brûler les copies. Le film restera inédit.
Ce n’est pas une première expérience cinématographique pour Prince. Dans
la foulée de Purple Rain, Prince a réalisé trois longs métrages, et
durant vingt ans il a tourné (ou fait tourner) des centaines de clips et
de programmes musicaux à Paisley Park. Si certains ont été diffusés
(Sacrifice of Victor, Love 4 One Another, Beautiful Experience…), la
plupart n’ont jamais été distribués, ni même vus.
[20/23] Planet Earth ou quand Prince occupe Londres
"- I love you baby, but not like I love my guitar"
Été 2007. Définitivement remis sur orbite marketing avec sa prestation historique à la mi-temps du Superbowl, Prince revient conquérir l'Europe qu'il avait délaissé pendant près de cinq ans. Il va allier le modèle de distribution
expérimenté sur Musicology avec le principe de la tournée en résidence
inauguré avec 3121. Inclus dans le prix du billet, l’album Planet Earth
sera distribué à l’entrée du concert de la tournée européenne Earth Tour.
21 dates dans un lieu unique : l’O2 à Londres. Durant l’été tous les
fans européens convergent donc en pèlerinage à Londres, certains pour
une date, d’autres pour douze.
Même s'il est plutôt bien accueilli, on garde de meilleurs souvenirs de
ces concerts que de l’album. Des disques kaléidoscopiques et sans
concept, prétextes à tournée, égrainés par Prince de 2000 à 2010, Planet
Earth est le moins inspiré (Oui, Guitar ressemble quand même BEAU-COUP
au Back In USSR des Beatles). 2 ou 3 titres surnagent d’un ensemble
très, trop, facile d’écoute et donc pas désagréable mais qui s’oublie
très vite.
Mais, avec ces deux mois invraisemblables de concerts
à l’O2, un main show modifié chaque soir et une douzaine d’aftershows,
tout lui était pardonné à la fin de l’été.
Titres Favoris :Planet Earth, Chelsea Rodgers, Resolution
LeSachiezTu : Pour le lancement de la tournée, l’album sera distribué
en Angleterre avec le journal Mail-On-Sunday. C’est une première pour un
artiste de cette renommée.
[21/23] INDIGO NIGHTS ou quand, à l’heure du mp3, Prince sort le cd au boitier le plus encombrant du monde
« - Inside I’m still the same, but something else has changed »
Terminée l’époque de la course aux aftershows, la tournée Earth tour de
l’été 2007 offre la possibilité de réserver des tickets pour
l’aftershow qui aura lieu à 50 mètres du premier concert au Club Indigo.
Sa présence n’est pas garantie, mais au final cet été londonien sera
riche en concerts princiers d’anthologie
autour de formations variables du NPG (des formations rock avec le
couple Dunham, d’autres plus funk, latino ou encore plus jazz avec
Renato Neto et Maceo Parker).
En 2008, le disque Indigo Nights est une sélection d’extraits de ces soirées, reflétant plusieurs de ces tendances.
Après avoir sorti un parfum pour l’album 3121, Prince décide
d’accompagner le CD d'un livre de photos, ou plutôt l'inverse. Pour
avoir le disque, il fallait acheter par correspondance le coffee table
book de 5 kilos (pas très Planet Earth comme initiative).
Pour
les habitués des enregistrements pirates et, plus encore pour ceux qui
ont assisté aux concerts, une impression bizarre d’un mix trop propre se
dégage de cet enregistrement. On regrette aussi ce choix de titres
lorsqu’on connait le contenu des autres concerts. Mais tel est le fan
de Prince : jamais content spécialement lorsqu’il est gâté.
Ce
disque reste pourtant intéressant à plus d’un titre. Déjà pour les
quelques morceaux rarement joués, pour ses reprises (Led Zeppelin,
Aretha Franklin, Mother’s Finest) ainsi que pour le monologue central de
Prince (qui s’étend sur 4 morceaux de Girls and Boys à Just Like U) où
il évoque son rapport à la célébrité, sa jeunesse, des aveux à la fois
drôle et pointant de réelles angoisses.
D’ailleurs, si le livre
Indigo Nights est une succession de photos à sa gloire, cliché après
cliché, l’artiste enfermé dans son hôtel y étale d’abord, consciemment
ou non, son extrême solitude.
Titres Favoris :Indigo Nights/Get on The Boat, Misty Blue/Baby love, The One/Question Of U
LeSachiezTu : Plusieurs guests sont montées sur scène à l’Indigo,
notamment Amy Winehouse et Will I Am. Ce n’est que le second live
officiel de Prince en 30 ans de carrière. Ce sera le dernier de son
vivant.
[22/23] LOTUS FLOW3R + MPLS SoUND ou quand Prince est plus incontrôlable que jamais
"-Donwload a future full of isolated boys and girls..."
Au fil de la première décennie des années 2000 Prince propose des
albums « faciles » pour tenter de conquérir une autre audience que celle
de ses fans, des albums « formatés » pour les radios … radios qui ne
les diffusent pas. Les albums un peu plus pointus, eux, sont distribués
sous d’autres modes. Le disque n’est plus qu’un support dans lequel il
ne se projette plus vraiment. C’est n’est vraiment plus que sur scène
qu’on l’apprécie, et qu’il s’améliore. Alors que sa production
(officielle tout du moins) décontenance les fans, Prince multiplie dans
la même période des prestations scéniques fabuleuses à un rythme
toujours plus soutenu.
Chaque album est un coup marketing et le
théâtre d’un évènement scénique que Prince gère en artisan, certains
diront en amateur. Force est de constater qu’il est plutôt doué pour
faire parler de lui. En 2009, pour son lancement, le triple album Lotus
Flow3r est l’objet de trois concerts consécutifs le même soir à Los
Angeles dans trois salles différentes. En parallèle, LotusFLow3r est
vendu en exclusivité à prix cassé aux États-Unis dans une chaine de
supermarché, Target (un peu comme si Johnny avait donné l’exclu de son
album à Monoprix).
En Europe, la stratégie commerciale (s’il y
en a une) est basée sur le plaisir de Prince de créer des évènements
uniques. En juillet 2009, Prince s’invite au dernier moment au festival
de Montreux pour deux concerts différents le même soir. La tournée
promotionnelle d’octobre 2009 (le triple album est distribué en France
par le label Because) sera l’occasion d’une des semaines de concerts
princiers les plus intenses survenues sur le sol français. En assistant à
la fashion-week, Prince décide de jouer sous la nef du Grand Palais.
Organisés en quelques jours, et complets en une heure, ces deux concerts
du 11 octobre 2009 sont un sommet de magie princière, à la fois pour le
bordel général de l’entreprise (il n’y a quasiment eu aucunes répétions
et la balance est faite en direct lors du premier concert), et la
beauté du moment (pour le premier concert entre chiens et loups et les
allers retours des pigeons d’un bout à l’autre de la verrière). Il
remettra le couvert dès le lendemain à la Cigale avec un set plus funk à
destination des abonnés de son nouveau site (succédant au NPGMC, puis
au Musicology, puis au 3121). On sent pourtant lors de cette tournée
quelques signes de faiblesse physique.
Si on a l’impression
depuis quelques temps que non seulement le contenu des albums de Prince
peut-être écouté dans n’importe quel ordre et que les titres sont
également interchangeables d’un album à l’autre, LotusFlow3r échappe un
peu à la règle. Déjà, il prend le temps d’offrir trois visions
musicales. Le premier disque, « organique » est un condensé des
dernières années musicales de Prince, un peu de jazz instrumental, une
pointe de rock. Le tout est plutôt réussi.
Le second disque MPLS Sound se veut un retour au son de ses débuts,
plus électronique, le son de Minneapolis qu’il a contribué (avec
d’autres) a lancé au début des années 80. Là à l’exception d’un Old
Skool Company, particulièrement efficace, c’est moins concluant.
Le troisième album, Elixer (He Licks Her), met en avant sa protégée du
moment, Bria Valente. Ce troisième album n’est mystérieusement pas
disponible en streaming. C’est dommage c’est le plus intéressant du
package. Il en interprétera des passages sur la scène du festival de
jazz de Montreux.
Prince va bientôt entrer dans une nouvelle
période, la dernière. Dans ce qui apparait avec le recul comme une fuite
en avant, il multipliera les concerts comme jamais, tout en s’isolant
humainement et musicalement.
Titres Favoris : Boom, Colonized Mind, Elixer, Old Skool Company
LeSachiezTu : Inspirée de ses tournées statiques à Londres et Las
Vegas, Prince était en discussion à l’époque pour faire une nouvelle
résidence à Paris. Elle se serait limitée à sept jours dans sept salles
différentes parmi elles l’Olympia et Bercy … Entre le New Morning, la
Cigale, le Grand Palais et le Stade de France, ce projet se sera
finalement à moitié réalisé de 2009 à 2011.
[23/23] 20TEN ou Quand Prince renait en Europe
" I love everybody and everybody loves me"
2010 sera
une année européenne pour Prince. Désormais l’artiste tourne dans les
gros festivals d’été et pour l’occasion il distribuera son nouvel album
20TEN gratuitement via des magazines dans chaque pays visité, la veille
même ou le jour même du concert.
Opération de la hanche ou
painkillers ? Ce qui surprend lors de son passage au Main Square
Festival d’Arras, neuf mois après le Grand Palais, c’est sa vitalité
retrouvée. Si la set-list n’évolue guère depuis quelques temps (majorité
de hits d’avant les années 2000), l’énergie et l’optimisme sont de
retour.
L’album 20ten, probablement sorti des mêmes sessions
d’enregistrements dans lesquelles il a puisé pour Planet Earth, 3121 et
LotusFlow3r, est le plus abouti de la série. Sans prétention, plus
inspiré, avec un peu plus de groove que les albums précédents et une
bonne humeur communicative sur fond d'électronique, 20Ten est un « MPLS
sound » réussi. Certains titres pourraient même figurer sur Controversy
ou Dirty Mind. Le tout est une pop festive ne trahissant pas ce qu’il a
fait il y a vingt ans, sans pour autant verser dans la nostalgie, et au
contraire en donnant envie d’avoir la suite. Si le disque a un concept,
c’est bien celui éphémère d’être écouté pour la première fois sur le
chemin du concert, histoire de s’échauffer.
Nous n’avons pourtant pas perçu à l’époque que nous changions de
paradigme princier. Celui qui s’était toujours battu pour faire vivre
ses albums, s’en désintéressait désormais totalement. Une preuve parmi
d’autres : après s’être battu dix ans pour reprendre possession ses
masters et les réenregistrer, il n’en a rien fait une fois les avoir
récupérés. C’est aussi une époque où Prince s’englue à nouveau dans une
communication opaque, multiplie des prises de position clivantes
(anti-internet par exemple, alors qu’il a été précurseur dans le
domaine) et produit des contenus web de plus en plus amateurs et
déroutants (à voir comme une nouvelle preuve du système autarcique dans
lequel il se complaisait). De même, la profusion de tournées et de
concerts (toujours complets) qui se sont enchainés par la suite à
travers le monde (principalement aux États-Unis) contribuera à mettre
sous le tapis une inquiétante anomalie dans ses bientôt 40 ans de
carrière : il ne s'est jamais passé plus d'une année entre la sortie de
deux albums de Prince.
Son album suivant, Art Official Age, qui
déjà de son vivant a des vibrations testamentaires, ne sortira que 4 ans
après en 2014 (O ironie et boucle bouclée) chez Warner.
De son
propre aveu, dans les derniers mois de sa vie, celui qui ne dormait
jamais et avait déjà vécu deux ou trois vie de plus que le commun des
mortels, commençait à retrouver le sommeil. Il l’envisageait peut-être
comme le signe de la fin de sa carrière. Alors que nombre de fans
le pensait assagi, prêt pour entamer un nouveau pan de sa carrière plus «
cool » dans des clubs de jazz ou des salles prestigieuses, il
surprendra jusque dans sa sortie. Entre deux réclusions dans son bunker
blanc où il n’échangeait plus qu’en mode « cryptique » avec une poignée
de fans sur Instagram, Prince s’est livré sur scène jusqu’à la fin dans
un récital au piano où il revisitait dans la joie et surtout la peine
les souvenirs d’une jeunesse qu’il n’a au fond jamais quittée.
« …and there’s always a rainbow at the end of every rain »
Titres favoris :Future Soul Song, Lavaux, Laydown LeSachiezTu : 20ten n’est sorti que dans la presse européenne (en
France, dans le Courrier International). C’est un album inédit dans le
reste du monde.