Le Monarque avait raison. 2011 sera une année utile. Janvier n'est pas fini et voilà déjà la seconde révolution près de chez nous. Après la Tunisie, la rue égyptienne est le théâtre de la passion populaire pour le catapultage artisanal de pouvoir autiste.
Avec toute cette agitation, tu trépignes et t'interroges : les mouvements auxquels nous assistons sur écran sont-ils exportables chez nous ?
Rappelons d'entrée que les révolutions en question ne sont ni de coton, ni de twits, ni de jasmin. Elles font des morts.
Ensuite.
Rappelons d'entrée que les révolutions en question ne sont ni de coton, ni de twits, ni de jasmin. Elles font des morts.
Ensuite.
Malgré nos constats accablés sur La France qui va mal, nombreux sont ceux aujourd'hui à vivre mieux qu'il y a quatre ans. Bonne santé, bonne retraite, placements immobiliers, avec un petit héritage sans frais de succession là-dessus : ils ont des cheveux blancs, peur de l'autre et on les croise souvent en 4X4. Les situations de rentes sont plus florissantes pour la partie haute de la société (nous ne parlons pas ici des très riches) depuis l'élection du Monarque et sa cascade de cadeaux fiscaux (alibis pour passer la pilule des grosses défiscalisations pour les très riches).
Nos bienheureux alimentent malgré eux le sentiment de "déclassement" chez leurs grands enfants (en gros de 30 à 50 ans) qui ragent en silence de ne pas pouvoir surconsommer avec la même insouciance, et tempèrent cette colère par le crédit.
Le jeune insurgé, lui se fait rare. Pas le temps, il cherche un stage.
Quant à la priorité du type vraiment dans la galère : survivre.
Hors des registres publicitaire ou commémoratif, le mot "révolution" et le concept lié ont également mauvaise presse, méprisés par les politiques, conspués dans les tribunes "sans tabou" des insoumis du "politiquement incorrect" dont on se demande en quoi ils sont insoumis et incorrects dans la mesure où ils vont toujours dans le sens du pouvoir en l'encourageant à aller encore plus loin : la pensée réactionnaire remue du ressentiment populaire, appelle au respect du 14 juillet, mais surtout, surtout, détourne le citoyen de la contestation pour mieux le modeler aux doctrines libérales. Mais je m'emporte. Revenons à la question :
Pour contrer la funeste destinée que sa classe dirigeante lui bétonne, de telles mobilisations sont-elles possibles dans notre pays où les vieux dominent, où les jeunes ont des rêves de vieux, où politiques et médias entretiennent ce climat ?
Oui.
Mais il faudrait...
1 / Une prise de conscience de tous les autres.
Préalable à tout mouvement, la "révolution" doit d'abord être intime. Dans la société du consentement, où la corruption se décline dans nos actes quotidiens, chacun peut, doit, agir à son niveau pour freiner, déjouer, ralentir ou carrément contrer la machine à opprimer.
Les sermons des présidents européens, avocats zélés du néolibéralisme, sur l'inexorabilité des politiques de rigueur nous en rapprochent chaque jour un peu plus. Mais cela ne suffira pas. Le suivi médiatique (là, internet a un rôle à jouer) des conflits sociaux, des mouvements de contestations (comme, par exemple, cette grève de la faim des CRS contre les réductions d'effectifs !) est décisif. Là-dessus, une bonne grosse gaffe présidentielle peut foutre le feu (même que cette option est la plus probable de toutes).
Cumul des révolutions intimes, prise de conscience de nos intérêts communs, jonction : ce jour-là, oui, les salariés du privé défileront aux côtés des fonctionnaires, les jeunes aux côtés des quinquas licenciés, les chômeurs avec les retraités aux petites pensions, pour renverser l'ordre "sans alternative" qui les malmène tous. Même que ça fera un carton sur internet ! Nous sommes le pouvoir, la force et le nombre. Par paresse et confort, nous l'avons juste oublié. Merci aux tunisiens et aux égyptiens de nous rafraîchir les idées.
Mais il faudrait...
1 / Une prise de conscience de tous les autres.
Préalable à tout mouvement, la "révolution" doit d'abord être intime. Dans la société du consentement, où la corruption se décline dans nos actes quotidiens, chacun peut, doit, agir à son niveau pour freiner, déjouer, ralentir ou carrément contrer la machine à opprimer.
2 / Une jonction des mécontentements.
Pas de mouvement non plus sans un rapprochement entre la jeunesse, cherchant à s'insérer, et "les insérés", plus âgés et mal traités. Leur incapacité à se fédérer en classe réactive et l'entêtement d'une majorité à rester scotchés aux standards d'avant, sont les deux drames de l'époque parachevant tous les autres. A ce sujet, l'analyse du "déclassement" doit sortir de la seule thématique du "manque de pouvoir d'achat".[1]
3 / L'indispensable étincelle.Pas de mouvement non plus sans un rapprochement entre la jeunesse, cherchant à s'insérer, et "les insérés", plus âgés et mal traités. Leur incapacité à se fédérer en classe réactive et l'entêtement d'une majorité à rester scotchés aux standards d'avant, sont les deux drames de l'époque parachevant tous les autres. A ce sujet, l'analyse du "déclassement" doit sortir de la seule thématique du "manque de pouvoir d'achat".[1]
Les sermons des présidents européens, avocats zélés du néolibéralisme, sur l'inexorabilité des politiques de rigueur nous en rapprochent chaque jour un peu plus. Mais cela ne suffira pas. Le suivi médiatique (là, internet a un rôle à jouer) des conflits sociaux, des mouvements de contestations (comme, par exemple, cette grève de la faim des CRS contre les réductions d'effectifs !) est décisif. Là-dessus, une bonne grosse gaffe présidentielle peut foutre le feu (même que cette option est la plus probable de toutes).
Cumul des révolutions intimes, prise de conscience de nos intérêts communs, jonction : ce jour-là, oui, les salariés du privé défileront aux côtés des fonctionnaires, les jeunes aux côtés des quinquas licenciés, les chômeurs avec les retraités aux petites pensions, pour renverser l'ordre "sans alternative" qui les malmène tous. Même que ça fera un carton sur internet ! Nous sommes le pouvoir, la force et le nombre. Par paresse et confort, nous l'avons juste oublié. Merci aux tunisiens et aux égyptiens de nous rafraîchir les idées.
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[1] Le déclassement c'est également : la casse continue des acquis sociaux, le piétinement des valeurs républicaines, la dégradation des conditions de travail, mais aussi la dégradation programmée des services publics pour les faire basculer dans le privé, l'alimentation au rabais, la prégnante rengaine de la résignation et la contamination de nos consciences à la rentabilisation du moindre aspect de nos vies, aux mécaniques d’isolement et de défiance des uns envers les autres que nous propageons en pilote automatique.