Captivante enquête télévisée* sur la France des classes moyennes. De ses revenus les plus bas - les ouvriers à mille cinq cent euros / mois - à ceux les plus élevés - fonctionnaires et employés du tertiaire à deux mille deux cent euros / mois - tous ont des traits communs, un air de famille, le poids de la soumission. Autant de petits couples qui sont de véritables petites PME. Ils sont propriétaires de leurs pavillons achetés à crédit sur vingt ans minimum, cumulent plusieurs autres crédits, sont parents de deux enfants qu’ils ont eu vers vingt-cinq ans, disposent de tout le confort domestique et de toute la gamme de produits high-tech encore inaccessibles, voire non inventés, il y a dix ans. Ils sont fiers de jongler avec les crédits car ce n’est plus tabou. On les reconnaît également à cette faculté d’appréhender les problèmes sociaux selon leur seul point de vue étriqué, reportant leur manque de pouvoir d’achat sur les autres, les riches et les pauvres, les toujours plus riches et ces assistés qui ne foutent rien alors qu’eux triment toute la journée. Ne remettant à aucun moment le système de valeur basé sur l’acquisition grâce à la soumission - via le travail et l’emprunt - auquel ils se rangent euphorique et qui est la cause évidente de leur mal-être.
Car, entre être et avoir, ils ont clairement fait le choix. Ils sont prêts à toutes les brimades professionnelles, les interminables heures de transport et toutes les vilenies électorales pour préserver leur niveau de vie, généralement calqué sur celui de leurs parents, ce barnum d’apparences qui les relie au monde des autres, celui de leurs voisins clones auxquels ils n’adressent pas la parole et qui les entourent dans ces pavillons bétonnés à la chaîne en périphérie toujours plus éloignée des centres urbains. Des cocons à l’abri de la misère du monde qui sont, à l’évidence, les cités sensibles de demain mais qu’importe, la réflexion n’est pas la qualité principale des primos-accédants. Fuyant l’injustice du marché de l’immobilier toujours plus élevé, ils se sont décidés à emprunter pour acheter cette maison individuelle, le Graal français. Ils caracolent devant les fondations du pavillon en construction pas loin de la zone commerciale. Ils vont éviter ainsi de payer un loyer. Et peu importe s’ils s’assurent ainsi trente ans de résignation tout en contribuant à faire grimper les prix de l’immobilier pour accroître davantage l’injustice pour les autres : Ils sont proprios !
Tout le pari économique de la France d’aujourd’hui est de soumettre au travail et à l’emprunt toujours plus de ces classes moyennes, de les mettre au pas dès le plus jeune âge et de faire payer aux pauvres d’esprit leurs rêves d’émancipation au prix d’une soumission totale au dogme du capitalisme, et ce jusqu’à leur pierre tombale payable en douze fois.
Quel pouvoir d'achat ? Celui d’avoir plus ? Maison, confort, famille nombreuse : ils n'ont jamais eu autant. Les économistes considèrent que le modèle capitaliste sera préservé tant que les classes moyennes prospéreront comme autant de victimes et de bourreaux réunis dans le même corps social. En plus de reproduire à sa minime échelle les injustices du capitalisme, la classe moyenne, conservatrice par essence, est le ventre mou de nos démocraties. J'en parle autant décomplexé qu'avec désormais sept cent euros par mois, je n'en fais plus partie !
Pour mémoire : Le taux de progression de cette classe moyenne et la propagation au niveau collectif de son rêve standard est inversement proportionnel à celui de la probabilité d’une révolution.
* complément d’enquête, France 2, lundi 29 janvier 2007
Car, entre être et avoir, ils ont clairement fait le choix. Ils sont prêts à toutes les brimades professionnelles, les interminables heures de transport et toutes les vilenies électorales pour préserver leur niveau de vie, généralement calqué sur celui de leurs parents, ce barnum d’apparences qui les relie au monde des autres, celui de leurs voisins clones auxquels ils n’adressent pas la parole et qui les entourent dans ces pavillons bétonnés à la chaîne en périphérie toujours plus éloignée des centres urbains. Des cocons à l’abri de la misère du monde qui sont, à l’évidence, les cités sensibles de demain mais qu’importe, la réflexion n’est pas la qualité principale des primos-accédants. Fuyant l’injustice du marché de l’immobilier toujours plus élevé, ils se sont décidés à emprunter pour acheter cette maison individuelle, le Graal français. Ils caracolent devant les fondations du pavillon en construction pas loin de la zone commerciale. Ils vont éviter ainsi de payer un loyer. Et peu importe s’ils s’assurent ainsi trente ans de résignation tout en contribuant à faire grimper les prix de l’immobilier pour accroître davantage l’injustice pour les autres : Ils sont proprios !
Tout le pari économique de la France d’aujourd’hui est de soumettre au travail et à l’emprunt toujours plus de ces classes moyennes, de les mettre au pas dès le plus jeune âge et de faire payer aux pauvres d’esprit leurs rêves d’émancipation au prix d’une soumission totale au dogme du capitalisme, et ce jusqu’à leur pierre tombale payable en douze fois.
Quel pouvoir d'achat ? Celui d’avoir plus ? Maison, confort, famille nombreuse : ils n'ont jamais eu autant. Les économistes considèrent que le modèle capitaliste sera préservé tant que les classes moyennes prospéreront comme autant de victimes et de bourreaux réunis dans le même corps social. En plus de reproduire à sa minime échelle les injustices du capitalisme, la classe moyenne, conservatrice par essence, est le ventre mou de nos démocraties. J'en parle autant décomplexé qu'avec désormais sept cent euros par mois, je n'en fais plus partie !
Pour mémoire : Le taux de progression de cette classe moyenne et la propagation au niveau collectif de son rêve standard est inversement proportionnel à celui de la probabilité d’une révolution.
* complément d’enquête, France 2, lundi 29 janvier 2007