Dimanche, le président-candidat-mais-pas-candidat a fait son show multicanal en direct de la sale défaite de l'Elysée[1]. Devant ses laquais à pellicules, chausse-pied en extase et autre passeur de plats à brushing, il a profité de son impopularité pour aligner en toute décontraction, à 85 jours du scrutin, une poignée propositions bricolées in extremis parmi les plus antisociales de son quinquennat:
- Hausse de TVA de 19,6 à 21,2%. Diminuer le pouvoir d'achat favoriserait la relocalisation. Allons bon. Faudrait déjà que cela favorise la consommation tout court.
- Des accords d'entreprise "compétitivité-emploi". En décodé: une baisse des salaires et une hausse des heures à la carte pour le patronat. Les petits salaires et les 5 millions de chômeurs apprécieront.
1 / Bien qu'il nous assure ne pas voir de clivage entre la gauche et la droite, l'homme de droite table sur le fait que le mot gauche suscite un rejet encore plus profond dans l’opinion que son propre nom.
2 / Avec son million de chômeurs en plus (par humilité il réduit le score à 500.000) et son trou de caisse de 500 milliards en 5 ans, c’est le moment où jamais. Si jamais il repasse, le gros du boulot argumentaire sacrificiel sera fait. Il appelle ça du "courage", nous qualifions ça de "coup de bluff" dans une partie de poker sans jeu. Perdu, il n'a rien à perdre. Je doute de l'effet. Plus que de l' antipathie à son égard, c'est désormais d'un déficit de crédibilité dont souffre notre président-candidat-mais-pas-candidat.
Je laisse à d'autres le soin de décrypter ce qui restera comme un moment fort de sa stratégie de l'échec, avec courbettes poussées (plus ce serait érotique) à Angela Merkel, quelques passages lacrymaux, la dose minimale de suffisance et un hommage final à Margaret Thatcher.
En revanche, revenons sur ces puissantes mesures sur le logement. Ses dévots nous assuraient qu'elles casseraient la baraque.
En fait de mesures puissantes, il n'y en au final qu'une seule, et bien déconnectée de l'urgence de la situation.D'ailleurs, elle ne concerne pas le logement pour tous mais, une fois encore, l'immobilier pour une poignée:
- Augmenter de 30% le COS. C'est-à-dire le droit à construire sur terrains ou maisons et immeubles déjà construits.
Hormis le fait que cette libéralisation par le haut et par-dessus la jambe du bâtiment (là où il faudrait un encadrement rigoureux) provoquera un boxon pas possible au niveau local (elle sera problématique pour les maires, sans parler des diverses normes locales d'urbanisation), qu'on m'informe qu'elle a déjà été testée en 2009 dans le cadre de la loi Boutin pour un résultat nul, on s'étonnera d'un telle montagne en amont pour accoucher d'un simple droit à l'extension de son jardin d'hiver bénéficiant exclusivement à ceux qui ont de quoi s'offrir des travaux d'agrandissement.
Notons que cette mesure, la seule vaguement positive de la soirée pour le quotidien des propriétaires de pavillons à 4X4 nippon et nains de jardin (la cible), a été la première annoncée moins de 2 minutes après la prise d'antenne.
Ce n'est pas un hasard. La mesure vise l'électorat démobilisé de la France des propriétaires. La promesse d'une pièce supplémentaire, d'un élargissement de balcon ou de la construction d'un jacuzzi à vagues sans avoir à déposer un permis de construire, c'est petit niveau ambition, mais ça peut parler aux seigneurs du cocooning M6isé dont le home staging occupe les deux tiers des conversations.
Evidemment, au bout de quelques années d'application, une telle mesure n'apaisera en rien l'hystérie des loyers, ne résoudra pas le mal-logement massif des jeunes ni celui des 5.154.000 personnes en situation de réelle fragilité à court ou moyen terme, pas plus qu'elle n'arrangera les bidons des 2.778.000 qui vivent dans des conditions très difficiles et ne procurera pas un seul toit à l'un des 685.115 français qui n'en ont aucun[2].
Entre-temps, on peut en revanche tabler sur une explosion des chantiers individuels à la con un peu partout sur le territoire, avec coups de masse du soir au matin dans son immeuble ou scie circulaire en trois-huit le week-end dans le jardin du voisin: le chantier décoratif, dont personne ne profite, mais dont tout le monde subit les nuisances, étant un sport national.
Les gagnants potentiels? Les auto-entrepreneurs (aka auto-esclaves) du bâtiment, les organismes de crédit et surtout Leroy-Merlin où l'essentiel du pognon sera dépensé.[3]
En même temps, tu me diras, c'est raccord avec la hausse de TVA.
[2] source. Fondation Abbé-Pierre 2011.
[2] Les promoteurs? Je n'en suis même pas sûr à moins de construire des logements discount dans des ghettos de 3e périphérie: les capacités d'endettement des ménages français plafonnent déjà.