27 janvier 2023

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Retour sur le film : Cry Macho (Clint Eastwood, 2021)

A bien y regarder, on peut dater le début des films testamentaires de Clint Eastwood à L’Homme Des Hautes Plaines… en 1974. 

Un testament cinématographique. Ça fait presque cinquante ans, soit quasiment la période où on l’a pour la plupart connu, qu’on peut ainsi lire une large partie de ses films en tant que réalisateur. C’est le cas de Bronco Billy, Impitoyable, Gran Torino, Honky Tonk Man ou même Les Pleins Pouvoirs qui sont des variations sur le personnage et l'icône Eastwood, son rapport à la violence, son passé et la filiation. 

Son dernier film à ce jour, Cry Macho, s’inscrit dans cette liste mais en plus surprenant, car plus maladroit, réellement marqué par l'âge de son héros. Cry Macho est peut-être le dernier tour de piste du réalisateur Eastwood (je ne dis plus "probablement" le mec ayant la faculté de remettre le couvert là où on ne l'attend jamais depuis 25 ans). 

Ce road movie fauché aussi fragile que son héros principal arrive dans le sillage de The Mule, son film précédent qu'Eastwood signait à près de 90 ans. La Mule clôturait, on le croyait alors, avec style et cohérence sa carrière. Dans le dernier plan, il y mettait en scène une fin de vie amère, mais choisie, à cultiver son potager dans une prison aménagée. Cry Macho propose une autre piste, une alternative hors des sentiers battus, littéralement hors des Etats-Unis (ce n'est pas anodin pour lui) : au Mexique. 

Scénario passé de main en main et tourné en dépit du bon sens en plein Covid, on se demande dans la première demi-heure ce qu’Eastwood a cherché à faire. On a même mal pour lui : voix chevrotante, démarche hésitante, intrigue tirée par les cheveux, j’ai presque eu envie d’abandonner un film me faisant de la peine… jusqu’à la scène dans la chapelle où son personnage, le vieux champion de rodéo Mike Milo, s’allonge dans la nuit pour se confesser au bord des larmes sur sa famille perdue il y a des années dans un accident. Difficile de ne pas être ému par ce plan sombre, au sens premier, où Eastwood, figé, met en image la mort du cavalier fantôme de Pale Rider. C’est le point de bascule d’un récit, brodant jusque-là sans conviction autour du passage de flambeau entre générations. 

A partir de là, le film devient plus léger, le road movie prend ses aises et s'installe dans un village mexicain Le vieux cowboy revient parmi les vivants, reprend de la force, à la source imprévue d'une jeunesse inespérée il débute même une romance à 90 ans. Le film trouve son sens dans le dernier plan. Là où The Mule s'achevait sur un Eastwood isolé, le réalisateur fait ici le choix d’y croire encore un peu et le cowboy entame une dernière danse avec sa compagne dans un saloon abandonné. J’ai lu dans la presse que c’était un film "mineur" d’Eastwood. Je ne sais pas ce que ça veut dire, le truc aurait été réalisé par un jeune cinéaste indépendant argentin : les mêmes auraient trouvé ça génial. Cry Macho est en revanche un de ses films les plus tristes... peut-être parce qu'un de ses plus sincères


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