Silence et beau temps sur la quartier, le climat est trompeur sur Paris. Je reconnais presque mon ciel perdu de la côte charentaise. Un nouvel ami à la maison : un escargot me tient désormais compagnie sur le mur de la cuisine. Par où est-il rentré, comment a-t-il grimpé aussi haut ? J'y vois le signe d'un changement positif du climat sur Paris à l'air purifié.
L’événement people de la journée, c’est la descente au ravitaillement. Tel un héros de Prison Break, je me suis tatoué sur l'avant bras le plan du SuperBouffe Market. Mon but : accumuler des vivres, ne croiser personne, ne pas me gratter le nez, survivre quoi. Mes passages ici sont assez rares pour que je constate une légère flambée des prix 5 à 10% sur pas mal de produits en deux semaines.
Plusieurs commerçants du quartier n’acceptent plus les clients physiques, il faut commander sur internet. D’autres s’auto placent en couvre-feu. Horaires de guerre : 7h-17h. Je n’aime pas du tout l’ambiance dans laquelle on glisse très tranquillement, les mains propres, surlavées au gel hydro-alcoolique. Il parait que dans les campagnes, faute de main d'oeuvre, les légumes partent à la benne. Paradoxalement, et alors que les frontières (comme les marchés ouverts) sont fermées, je trouve encore des tomates espagnoles au supermarché. Le ministre de l’agriculture appelle les neo-chômeurs pour cause de confinement à travailler dans les champs, en totale contradiction avec les mesures annoncées au même moment par le premier Ministre. On marche collectivement cul par dessus tête (sans masque) sur une base désormais horaire.
La rumeur table sur six semaines d’enfermement. Certains parlent de deux ou trois mois, les demandent même. Je n’en reviens pas d’un tel renoncement volontaire à nos libertés fondamentales sans fondement scientifique autre que ceux "vus à la télé". Notre soumission, à laquelle je contribue bien volontiers, m'effraye encore plus que cette contagion. L’esprit est court-circuité, tétanisé. Macron n'en espérait surement pas autant. Je suis prêt à parier que cette improbable histoire de confinement ne lui plaisait pas (d'où les atermoiements du début) et qu’il ne sait plus à désormais plus à quel saint scientifique ou économique se vouer.
Le bilan de son quinquennat sera exactement l’inverse de ce que pourquoi il a été élu : il renationalisera à tour de bras, le pays va se prendre une gamelle de PIB historique, il aura défoncé tous les pactes de stabilité et aura été le premier président à payer des semaines les gens à rester chez eux. La cause est grande c’est entendu, mais il aura été le premier président à foutre l’intégralité du pays à l’arrêt. D’autant que c’est sans fin, il n’y aura pas d’issue heureuse. Il y aura des morts de ce virus, on ne sait juste pas combien ni sur combien de temps puisqu’on ne sait pas les compter. Comment conclure un tel cycle ? Comment redémarrer comme avant ?
Même si nous sommes copieusement mis à contribution et que nous sommes tous concernés (les Français sont inquiets à 87%, et 73% à considérer, malgré les mesures, que La France n’est pas prête à faire face au virus*), Macron sait que la patience aura des limites, (le barnum autour du professeur marseillais en est le premier révélateur) et que le peuple va progressivement y laisser sa peau mentale. Pour l’instant nous dansons, en intérieur, sur une bombe qui tôt ou tard lui explosera à la gueule quand on sera las d’applaudir chaque soir à 20h comme seule activité physique de la journée.
Il sait aussi que quoi qu’il arrive son quinquennat sera marqué par ce premier semestre 2020 (qui tombe au milieu de son mandat) et qu’il est cramé. Quelle meilleure solution de ne pas perdre les élections que de simplement ne plus les organiser ? Nous n’en sommes pas là. Et pourtant. Qui aurait seulement pu imaginer, il y a encore trois semaines, cette assignation nationale à bouffer des chipsters sur canapé pour combattre un ennemi invisible ? Qui aurait pu imaginer que l’on observerait, à la place des publicités sur les abris bus parisiens, des affiches à slogan unique (sur fond de couleurs douces) nous ordonnants de nous laver les mains et de rester à la maison ? Il y a l’épaisseur d’une feuille de cigarette entre notre peur légitime et la totale perte de contrôle collective, planétaire. L’évaporation de la démocratie nous attend au tournant et le pire c’est qu’on ne sait même plus voir où se situe ce tournant tant chaque jour nous plaque un peu plus la gueule par décret dans les eaux visqueuses du non-retour.
"Il est plus facile de faire sortir le dentifrice du tube que de le remettre dedans".
Il faut vite sortir de cycle sanitaire qui nous fait glisser dans un autre monde confiné. Le durcissement ou le prolongement est un faux débat. Une quarantaine c’est quarante jours. Au-delà, c’est que l’on à d’autres intentions et/ou que l’on obtiendra d’autres résultats.
*sondage Elabe/BFM du jour
25 mars 2020
a la une, confinement, paris, vie quotidienne
Par
Seb Musset
3/25/2020
Ecrit par
Seb Musset
#confinement jour 12
Né en 1972 à Paris. Filme, écrit, communique, parle de lui à la troisième personne, fait du vélo et blogue ici parfois aussi. Il n'appartient à aucun parti, organisation politique ou site reprenant les textes des blogueurs sans les rémunérer. Ce blog est la continuité aléatoire de ses livres, ou l'inverse.
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3 comments:
Ca y est le "si c'est pour notre bien, pourquoi contester ?" est quasi-universellement admis.
On nous offre le spectacle de ministres qui se contredisent, le tout expliqué par un ahurie-porte-parole qui rend l'ensemble absurde.
On ne sait même pas avec quoi être d'accord ou pas puisque rien n'a de sens
Lentement, on glisse dans le "de toutes façons on n'y peut rien c'est comme ça" et disparaissent toutes les armes intellectuelles pour comprendre et réagir.
Ici en province non urbaine il n'y a plus aucun bruit autre que celui des oiseaux, les voisins qui se disaient bonjour par dessus les haies au début ont lâché l'affaire, ils font la sieste devant BFM ou bronzent à poil dans leur jardin dans lequel plus personne ne s'aventure désormais.
Le chien du voisin déprime, il n'a plus aucun passant après lequel aboyer le long du grillage.
On sait notre chance de le faire dehors au soleil. Alors on ne donne pas trop signe de vie à nos amis urbains pour ne pas trop faire les privilégiés.
Alors on s'efface.....
Tiens... j’aurais dû te citer dans mon dernier billet du soir...
mon commentaire n’a aucun intérêt sinon celui de te dire que je suis passée te lire.
Bises avec le genou.
Toujours perplexe du climat de panique d'épidémie de peste noire, alors qu'on en est à 1300 morts en France ( en majorité des vieux comme moi, ce qui pourrait rendre inutile la réforme des retraites: évidemment, il faudra faire les comptes à la fin) alors que chaque épidémie de grippe saisonnière annuelle y fait dans les 13 000 morts (10 fois plus, alors que la plupart des sujets à risque sont vaccinés...) Il y a un truc qui m'échappe.
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