22 janvier 2023

Retour sur le film : Sibériade (Andreï Konchalovsky, 1979)

Un plan. 

Il fait en dessous de zéro dans cette foret au bout du monde. Un jour de boulot comme un autre en Sibérie, le « grand-père éternel » travaille à la hache un conifère de 30 mètres de haut en tapant la discute avec un gamin. Arbre après arbre, il creuse son chemin vers la civilisation. À ce rythme, il en aura bien pour deux ou trois générations. À côté des deux, en toute simplicité, un lynx attaché par les pattes à un bout de bois. Chassé quelques minutes avant, le majestueux animal est groggy mais bien vivant, voire un peu vénère. L’arbre tombe et se fracasse dans un nuage de poudreuse. La caméra, les acteurs et le lynx ne tremblent pas. La discussion continue. 

Un plan simple qui serait, sans effets spéciaux, irréalisable en occident aujourd’hui : trop dangereux, trop d’enfant, trop d’acteurs frileux et puis un animal sauvage entravé et un arbre ravagé. Bonjour les procès et le bad buzz sur les réseaux. 

Un plan plus efficace que toutes les expertises géopipolitiques des roboches de LCI au sujet de la lassitude supposée du peuple russe. Les Russes ont une carapace et une endurance dont pour la plupart de nous n’avons pas le début de la moitié d’une appréhension de l’épaisseur.


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