4 août 2010

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Donner c'est voter, reprendre c'est voler


Reconnaissons une chose à ce gouvernement : Il ne renonce jamais.Rappelons ses deux ordres de mission :

1 / Il s'agit, pour ces défenseurs zélés de la nation, de basculer le secteur public dans le secteur privé, de rendre le "mutualisé", bon marché et universel, en problématiques opaques et individualisées, catégorisées et hors de prix.

2 / Il s'agit également pour ces pourfendeurs de la hausse de l'impôt sur le revenu de faire les poches du gueux par tous les moyens détournés possibles. On ne sait jamais, dès fois que le train de vie des indécentes richesses ralentisse sa course folle.

C'est donc avec une détermination n'ayant d'équivalent que le courage de la date de son annonce, le 4 août, que Sainte-Lagarde ministre du culte de l'économie qui, à moins d'être remaniée, passera probablement l'intégralité du quinquennat à promettre de la croissance) supprime une promesse phare de la campagne du monarque : le crédit d'impôt sur les intérêts des emprunts immobiliers pour les primo-accédants.

Compte-tenu des légions AVER (à velléités d'embourgeoisement rapide) qui ont foncé tête baissée dans la mesure en parpaings dès janvier 2007 (offrant une ribambelle d'articles à peine romancés sur ce blog), le monarque a trouvé ici des arguments de vote bien plus décisifs, auprès d'un électorat jeune classiquement abstentionniste, que les questions de sécurité âprement discutées depuis 2002.

Bon évidemment, comme lui et la loi ça fait deux, une fois l'avocat élu monarque, le conseil constitutionnel retoquait la mesure, la décrétant non-rétroactive.

Combien ai-je rencontré depuis de candides dupés par le candidat, ayant signé dans la précipitation leur acte d'achat, quelques jours avant de donner, euphoriques et confiants, les clefs de la bombe atomique au vendeur de tapis parano ? Beaucoup. Même s'ils l'avouent encore peu, ils s'en mordent les doigts.

Mais le plus merveilleux dans les belles histoires des apparats de la richesse pour tous made in UMP, c'est encore l'argumentaire. D'apparence barbare ou d'allure neuneu, suivant le ministre ou la voiture bélier, il cache surtout une belle dose de cynisme et dans ce cas, si tout cela s'avère suivi d'effet, d'irresponsabilité.

Car, face à cette suppression d'un bout de "paquet fiscal" spécialement dédicacé aux classes moyennes, C.Lagarde propose dans une interview donnée ce jour aux Echos, la mise en place d'un prêt immobilier à taux zéro renforcé, universel et sans condition de ressource réservé aux primo-accédants.

Oui, oui. Tu as bien lu : le crédit immo en open bar.

Comprendre : bon, on a berné une génération de blaireaux en 2007, attaquons-nous à la deuxième pour 2012. Après tout, si on en croit l'expérience américaine : Plus la classe moyenne est pauvre, plus elle aspire à se persuader du contraire en s'endettant encore plus[1].

Passons sur l'exercice de style consistant à promettre du rêve défiscalisé dans trois ans aux aspirants-proprios au moment où on le retire à une catégorie similaire ayant cru à la même chose trois ans plus tôt, et demandons-nous si ce n'est pas là une discrète et estivale réapparition du crédit hypothécaire à la sauce subprime.

Pour peu qu'elle soit coordonnée avec d'autres dispositions bancaires encouragée par le lobby en charge, telle l'apparition de la titrisation à la française évoquée en juin dernier, nous avons là tous les ingrédients d'un beau cocktail au caca éco cataclysmique[2].

Ce ne sont évidemment pas les 2 millions de personnes mal ou pas logées du tout, les centaines de milliers de logement sociaux faisant défaut, ni les multiples infractions à la loi obligeant les communes à réserver 20% de leur parc immobilier au social (j'attends à ce sujet les peines de prison et l'arrestation des parents des maires délinquants) qui importent.

Pas son business à la Christine.

Non ce qui prime c'est que le prolo s'endette et, au passage, maintienne à la hausse la valeur du patrimoine de ceux qui ont terminés de payer depuis bien longtemps et dont on me glisse dans l'oreille qu'ils votent plutôt à droite.

Des pauvres oui, mais des pauvres propriétaires à crédit. Rappel : Pour la droite qui se prétend populaire, un bon pauvre est celui qui doit de l'argent. Les autres sont, ou vont être, des délinquants.

Et oui, autant les conditions du plan Lagardien sont fumeuses, autant son but est clair :

"L'objectif est d'améliorer l'accession à la propriété, sachant qu'il n'y a que 58% de Français propriétaires contre 66% en Europe." Mais que tu dormes dans ta bagnole parce le moindre loyer dans la ville équivaut deux fois ton salaire, ce n'est pas un drame.

Puis, la winneuse nonchalante conclura sur un brillant :

"L'argent redéployé sur le nouveau prêt à taux zéro, avec des plafonds à la hausse, va accroître la solvabilité des ménages."

Le crédit qui t'enrichit ou la perversion totale de la vérité : Voilà les vraies valeurs de la gagne.

Problème vu et vérifié : la carotte fait systématiquement avancer le mal informé.

Que crépite le feu de joie des puissants,
gerbant ses larmes de joie dans les ténèbres, tant qu'il y aura du petit bois à jeter dedans.


[1] renforçant ainsi son état de précarité et favorisant chez elle des pathologies mentales du type schizophrénie. A ce sujet, pour une observation plus profonde, je vous renvoie à l'observation des centres commerciaux le samedi après-midi.
[2] Un beau final lagardien.
Articles connexes :
Monarchie et mensonges#1 : une France de propriétaires
La bulle immobilière revient ?
Qui est propriétaire de qui ?

5 comments:

Anonyme a dit…

La vraie question est bien celle que tu mets en avant : le prix de l'immobilier.
Troquer un loyer contre un crédit, c'est faire travailler deux circuits financiers différents. D'un côté c'est de personne à personne ou de personne à agence à personne, de l'autre c'est de personne à banque.

Sur la solvabilité, Christine fait un raccourci. Mais disons qu'en transformant ton paiement mensuel en patrimoine quand tu achètes, tu peux au moins revendre le bien en cas de gros pépin (impossible si tu loues) et surtout une fois le crédit intégralement payé ou racheté tu deviens plus libre et solvable.

Toyan a dit…

Yes Prince, j'avais lu ta prose sur ta soirée de ouf...

Ce billet dans un autre genre est pas mal non plus...

Kaos a dit…

@ Enikao : On pourrait répondre en un mot : subprimes. Mais bon, crise du crédit privé mise à part :

En cas de gros pépin, t'auras quand même besoin d'un logement donc revendre signifie racheter, je vois pas bien ce que ça résout, surtout que ton crédit continue de courir. Et ton bien n'a pas forcément gagné en valeur (relative au reste du marché) pendant ce temps, voire il en a perdu évidemment.
Mettons qu'à 40 piges, t'aies mis assez côté pour payer au moins la moitié de ton achat, là oui éventuellement, ton crédit pèse carrément moins lourd et tu risques beaucoup moins de te retrouver dans la merde (à moins que tu consommes à crédit à côté, mais là t'es juste con). Mais le mirage des proprios à moins de trente ans, qui s'engagent sur 25 ans sans protection dans un monde du travail ravagé... Faudra pas venir chialer le jour où tu te retrouves au chomedu sans pouvoir payer tes traites avec ta baraque pourrie et invendable dans un quartier moche parce que c'est tout ce qu'on peut se payer sans apport.

Globalement, c'est un très bon article de feu le plan B qui en parle le mieux : solvabiliser la demande, ça ne nourrit que le marché, ses crises, et ses perdants. Socialiser l'offre, c'est déjà moins con, mais c'est de gauche.
Et les nombreuses communes de France qui préfèrent payer les amendes plutôt que de construire les (petits) 20% de logements sociaux règlementaires savent très bien dans quel camp elles jouent.
Et je ne peux que recommander de lire ou relire "qui est propriétaire de qui?" linké en bas de l'article qui était franchement excellent.

Florian a dit…

Je suis en plein dans les crédits en ce moment.

Je suppose que je peux me féliciter de douter de ce genre de mesure et de ne pas les avoir pris en compte dans mes calculs.

L'avantage de remplacer ça par un prêt à taux zéro (qui entre parenthèse n'est utile que si le paiement est différé), c'est qu'on te donne l'argent, en vrai.

Avec ces crédits d'impôts, il faut réclamer tous les ans aux impôts qui ne manqueront pas de te les oublier...

Anonyme a dit…

Quelqu'un peut-il expliquer une notion d'économie de base à Christine Lagarde, à savoir qu'accroître la solvabilité des ménages fait monter les prix et donc exclue encore plus ceux qui l'étaient déjà?

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