2 avril 2012

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Faites la guerre, pas l'amour !


Dans la série les jeunes et leur avenir. Aujourd'hui: la guerre.

Curieux mélange qu'un meeting UMP "pour la jeunesse". On y retrouve côte à côte prépubères et postgériatrie à l'engouement variable selon l'âge et la médication. Pour donner un peu plus de dynamisme à la célébration scout quelques icônes pop sont parfois conviées: Bernadette Chirac, Michèle Alliot-Marie ou David Douillet. 

Passé l’inévitablement amusement provoqué par le "printemps des jeunes de la France forte" samedi dernier à la Porte de Versailles, thé dansant antihollande à la sauce pognon entre consanguins et fils-à-papa rehaussée de Marie-Chantal et autres croûtons déconnectés, nous fûmes intrigués par le discours du candidat-président à destination de la jeunesse.

Dans la droite ligne d'un Jean-Paul II exhortant la jeunesse a "ne pas avoir peur"[1], on aura rarement entendu autant de fois l’occurrence "guerre" dans un discours à destination des jeunes et dont le fil rouge était d'une fracassante modernité: la France de 1940. 

Il ne fait pourtant mystère pour personne que le candidat-président mise sur la peur, seul article en magasin en période électoral à droite depuis 10 ans. Réélu, il continuerait à ne pas bouger le petit doigt face aux puissances de l’argent. Il sait ainsi que les 5 prochaines années de rigueur seront bien plus chahutées, à la sauce greco-ibère, que les cinq dernières. Il se prépare donc (au cas où), et nous prépare, à la guerre et c'est particulièrement flagrant dans ce discours vide de proposition[2].

Préparer la guerre à l’avance, c’est choisir les termes du conflit et l’ennemi. 

L’ennemi du moment, comme dans une bonne vieille série télé qui nous a fait tourner en rond 5 ans, ce sont, en creux, "les autres" (au choix: chômeurs, fonctionnaires ou musulmans). Les évènements récents permettent à notre Monarque de recalibrer sur l'Islam, ce qui a l'avantage de ne pas le faire  revenir sur "le chômeur" donc "le chômage" donc son échec, et de ne pas trop froisser les fonctionnaires qui ont une fâcheuse tendance à voter (il faudra un jour penser à leur interdire). 

Notre candidat-président tente encore une fois de recalibrer la colère (tout au moins l’incompréhension et l'impuissance) du peuple face aux mécanismes de domination (travail, pouvoir financier, précarisation des parcours, suprématies commerciales...) dont il paye la note au quotidien  sur une communauté, un ensemble culturel ou religieux censé 1 / être en partie responsable des désordres. 2 / l'attaquer sur le dernier sanctuaire restant: sa tradition, son histoire, bref le passé.

Les contours de la menace sont flous ? On s’en fout. Nous ne sommes pas dans le rationnel, mais  dans le monde de l'angoisse, avec sa part fantasme et ses ivresses suffisant à définir le flacon. Dans ce monde de la terreur, tiré à l'extrême, le citoyen est réductible a une communauté, la communauté à la religion, la religion à l'apparence. In fine, dans ce monde des peurs cultivées dans les discours et sur la TNT, tout converge vers une idée simple: il y’a eux et nous, le bien et le mal. 

Définir plus ou moins ouvertement l'ennemi. Provoquer du conflit pour pousser au clivage et forcer chacun à se positionner.  

Porte de Versailles, faute de bilan brillant, de programme et d'espoir, le candidat-président a préparé ses jeunes starship troopers à la guerre. Il aurait pu attaquer sur du concret, parler travail, éducation ou santé (secteurs qu’il s’active depuis 5 ans à atomiser, spécialement pour les jeunes générations et celles à venir). Non. Le candidat-président a souligné que ce pays avait "un besoin de civilisation". Ah. Pour la jeunesse et son taux de chômage à 23%, il se prononce pour "l’autonomie". En décodé: "démerdez-vous". 

Si l'on comprend que les rentiers, de moins en moins nombreux, s’apprêtent à revoter pour le candidat-président dans 3 semaines. Si l'on comprend que les travailleurs, de moins en moins nombreux également, s’apprêtent à ne pas le faire. On s'interroge encore sur ce vote de droite des "moins de 30 ans".  

N'ont-ils pas compris ces jeunes-là que la guerre néo-libérale nécessitera à la fin des fins qu'ils soient physiquement sacrifiés pour que les empires subsistent et que les rentes des planqués perdurent ? 

Dans un éclair de vérité, le candidat-président le leur a pourtant clairement avoué: "c’est la jeunesse qui meurt pour la liberté"

Il a juste omis de préciser qui seront les premiers à tirer profit de cette liberté

P.S: Toute ressemblance du titre avec un récent sondage expliquant qu'on baise à moins à droite qu'à gauche serait fortuite ou involontaire.

Illustration: Starship troopers. Paul Verhoeven, (1997).

[1] on se rappelle du succès qu'avait eu la même formule utilisée par un Chirac face à la jeunesse à quelques semaines du référendum de 2005.

[2] Autre qu'une énième faribole marketing de "banque pour la jeunesse" qui tournera au mieux en crédit revolving pour financer tes études afin que tu partes dans la vie avec une dette carabinée.

7 comments:

t0pol a dit…

Je m'insurge ! Starship Troopers est bien plus sérieux qu'un discours de sarkozy !

Sinon sur la banque pour les djeunez , euh je crois que j'ai un début de billet : tu devrait regarder de plus près, c'est du 9% annoncé au lieu du 4% pour les nantis.
Par ce que les jeunes sont un "risque" bien sûr. Au lieu d'être un péril, la jeunesse est un risque pour les banques.

Seb Musset a dit…

@intox2007 > Exact. Starship Troopers est l'exemple même du film "d'apparence bourrine" qui se révèle un pure pamphlet anti-interventionniste.

A l'inverse d'un Apocalypse Now sur lequel tout le monde se paluche depuis 30 ans et qui n'est qu'une talentueuse mise en clip de la guerre.

korama a dit…

Il faut voir le dvd de Starship Troopers, et écouter le commentaire audio de Verhoeven. Du grand art !

sivergues a dit…

Si la France a, comme on le dit, la droite la plus bête du monde, c'est qu'en réalité sa droite intelligente affirme être de gauche - et s'est baptisée parti socialiste. Froide et géniale fourberie, qui va gagner.

Anonyme a dit…

Faut vraiment avoir du temps à perdre pour s’intéresser autant à celui qui sera (hélas) réélu, avec ou sans des articles sur lui...

BA a dit…

Mercredi 4 avril 2012 :

Affaire Bettencourt : le procureur Courroye savait dès 2010 que des espèces arrivaient de Suisse.

http://www.lepoint.fr/societe/exclusif-bettencourt-courroye-savait-des-2010-que-des-especes-arrivaient-de-suisse-04-04-2012-1448293_23.php?google_editors_picks=true

BA a dit…

Le Point : Parti pris un peu spécial ce matin. Vous revenez sur les informations que vous publiez dans Le Point sur l'affaire Bettencourt. Alors qu'on soupçonne un financement illicite de la campagne de Nicolas Sarkozy en 2007, vous révélez que la justice a beaucoup tardé à explorer cette piste...

Hervé Gattegno : On peut parler d'un retard à l'allumage troublant. Ce qui alimente le soupçon sur la campagne de Nicolas Sarkozy, c'est la découverte que Liliane Bettencourt s'est fait livrer d'énormes sommes d'argent liquide en 2007, puis encore en 2008 et en 2009. Comme les versements de 2007 ont eu lieu au moment de la présidentielle et que des témoignages évoquent des entrevues entre Nicolas Sarkozy et les Bettencourt, c'est une hypothèse qui n'est pas invraisemblable. Or ce qui apparaît maintenant, c'est qu'en fait cette filière de fonds occultes avait été révélée au procureur Philippe Courroye dès l'automne 2010. C'est l'avocat suisse des Bettencourt qui avait livré cette information. Et, bizarrement, rien ne s'était passé. Mais peut-être qu'en fait ce n'était pas si bizarre que ça...

http://www.lepoint.fr/politique/parti-pris/b-comme-bettencourt-b-comme-boomerang-05-04-2012-1448586_222.php

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