Après la présentation en mai du sondage sur les Français et le protectionnisme avec Emmanuel Todd, l'association "manifeste pour un débat sur le libre-échange" organisait un second colloque mercredi dernier. Des économistes et des politiques (F.Loos, A.Montebourg, JP Chevenement, N.Dupont-Aignan) étaient invités à exposer leurs pistes pour "protéger les intérêts économiques de La France".
Durant 90 minutes, des économistes de l'association y vont de leur exposé. Jean-Claude Werrebrouck plaide pour un retour sur la loi du 3 janvier 1973, la privatisation de l'emprunt public qui a conduit à l'enkystement de l'Etat dans la finance. Antérieurement, le pays engageait de grands travaux dont nous bénéficions encore, développait une politique d'éducation ambitieuse et même une politique spatiale sans pour autant que nous nous angoissions pour la dette. Jean-Luc Gréau, qui a claqué la porte du Medef, axe son intervention sur la réindustrialisation de la France. Il déplore le discours dominant des élites faisant une croix sur l'industrie depuis trente ans. Mais, comme l'ironise un peu plus tard Jean-Pierre Chevènement : "Jamais les élites ne confessent leurs erreurs." JL.Gréau propose 5 pistes : Le retour à un euro faible, favoriser l'essor des PME, une distribution sélective (brider le monopole de la grande distribution), des barrières douanières (branche par branche, renégociables) sur les marchandises et des mesures de rétorsion envers la contrefaçon dans les Etats voyous.
Hervé Juvin, préconise une nationalisation de la dette publique détenue aux deux-tiers l'extérieur de nos frontières. Il déplore la complexité actuelle pour le particulier d'acheter de la dette nationale via sa banque (qui ne se gène pas pour cramer son assurance-vie sur de la dette grecque) et plaide pour un autre modèle de gestion des entreprises d’intérêt public : que les Français en deviennent copropriétaires au lieu de les laisser au marché. Il souhaite aussi un étiquetage de localisation régionale (et de la part nationale entrant dans la composition) des articles : "il faut refaire société par ses achats".
Deuxième partie. Les trois présidentiables, Jean-Pierre Chevènement, Arnaud Montebourg et Nicolas Dupont-Aignan, réagissent sur le protectionnisme, la mondialisation financière, la crise des dettes souveraines et le futur de l'Euro.
Sceptique sur l'application d'un protectionnisme européen entre des pays hétérogènes, Jean-Pierre Chevènement privilégie la "mutation" de l'euro en monnaie commune sur son éclatement (pour des raisons "psychologiques"). L'ancien ministre sous Mitterrand revient sur l'erreur de l'Acte unique (qu'il a voté) ayant joué "L'Europe des nations contre les nations". [vidéo intégrale, 19.00]
*
Extrait #1 : J-P.Chevènement > "Jamais la solidarité européenne ne remplacera la solidarité nationale" (6.30)
"Les démocraties qui sont faibles devant la finance s'effondrent. Les démocraties qui sont intraitables avec les marchés financiers se sauvent". Arnaud Montebourg veut le retour du pouvoir politique sur la violence des marchés, avec des mesures radicales "à prendre sans concertation avec nos voisins" : mise sous tutelle politique du secteur bancaire, Glass-Seagall act, Taxe Tobin, Transfert de l'AMF au gouvernement, sortie de l'OMC, inévitable concertation avec l'Allemagne une fois Merkel démocratiquement éjectée (ce dont le candidat à la primaire PS n'a pas l'air de douter). [vidéo intégrale 22.00]
Extrait #2 : A.Montebourg > "La fin de l'OMC n'est pas l'anarchie" (4.20)
Nicolas Dupont-Aignan pose comme préalable à toute action efficace la sortie de l'étau de l'Union européenne et de l'OMC. Pour NDA, la dette publique est d'abord liée à l'effondrement des recettes, elles-mêmes liées à l'effondrement de l'économie productive (1 million d'emplois industriels ont disparu en 10 ans, 1 emploi sur 2 dans la filière automobile délocalisé ces 5 dernières années). Il décline une "stratégie économique et sociale" pour relocaliser (encouragement des PME par une réforme fiscale, nécessité d'un rapport d'égal à égal avec l'Allemagne) ainsi qu'une réforme bancaire et un retour sur la loi de 1973 pour "sortir du contrôle de l'oligarchie bancaire". [vidéo intégrale 21.00].
En fin de réunion, le président de Debout la République ! se lâche sur la confiscation politique et médiatique du débat. Joli coup de gueule. Je ne suis pas d'accord sur tout, mais il conclut parfaitement le colloque :
Extrait #3 : N.Dupont-Aignan > "En 2005, ils ont compris qu'ils étaient minoritaires dans ce pays et sont devenus plus agressifs." (5.20)
La croissance des trente glorieuses s'est appuyée sur l'essor de l'industrie qui a généré une classe-moyenne consommant cash. Avec une industrie française en déliquescence depuis 30 ans, la société se fracture entre riches et pauvres : les esclaves du précariat piégés dans le crédit d'un côté, de l'autre les rentiers issus de la vague d'avant dont les intérêts sont aujourd'hui défendus au plus haut sommet de l'Etat.
Le système ne paye plus. Le modèle s’effondre sous nous yeux, les conditions de vie et l'espoir des peuples avec (et nous y avons contribué, acteurs joyeux depuis 30 ans d'une consommation détruisant nos emplois, salariés se pliant à l'argumentaire puis au management Medef), mais il ne se réinvente pas. Logique, les bénéficiaires du chaos secondés par une classe dirigeante sans imagination s'évertuent à tenter de le sauver.
Tous l'ont souligné ici, le protectionnisme économique est loin d'être le seul remède, mais ce rééquilibrage de l'injustice de l'échange, souhaité par une majorité de français et méprisé à dessein par les apôtres fanatisés du tout marché en échec, doit s'imposer dans le débat politique. Sinon, pour le meilleur ou le pire : le désespoir deviendra colère.
Synthèse du nouveau sondage IFOP : Les européens, le protectionnisme et le libre-échange
Illustration et vidéos : @sebmusset @vogelsong
Sceptique sur l'application d'un protectionnisme européen entre des pays hétérogènes, Jean-Pierre Chevènement privilégie la "mutation" de l'euro en monnaie commune sur son éclatement (pour des raisons "psychologiques"). L'ancien ministre sous Mitterrand revient sur l'erreur de l'Acte unique (qu'il a voté) ayant joué "L'Europe des nations contre les nations". [vidéo intégrale, 19.00]
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Extrait #1 : J-P.Chevènement > "Jamais la solidarité européenne ne remplacera la solidarité nationale" (6.30)
"Les démocraties qui sont faibles devant la finance s'effondrent. Les démocraties qui sont intraitables avec les marchés financiers se sauvent". Arnaud Montebourg veut le retour du pouvoir politique sur la violence des marchés, avec des mesures radicales "à prendre sans concertation avec nos voisins" : mise sous tutelle politique du secteur bancaire, Glass-Seagall act, Taxe Tobin, Transfert de l'AMF au gouvernement, sortie de l'OMC, inévitable concertation avec l'Allemagne une fois Merkel démocratiquement éjectée (ce dont le candidat à la primaire PS n'a pas l'air de douter). [vidéo intégrale 22.00]
Extrait #2 : A.Montebourg > "La fin de l'OMC n'est pas l'anarchie" (4.20)
Nicolas Dupont-Aignan pose comme préalable à toute action efficace la sortie de l'étau de l'Union européenne et de l'OMC. Pour NDA, la dette publique est d'abord liée à l'effondrement des recettes, elles-mêmes liées à l'effondrement de l'économie productive (1 million d'emplois industriels ont disparu en 10 ans, 1 emploi sur 2 dans la filière automobile délocalisé ces 5 dernières années). Il décline une "stratégie économique et sociale" pour relocaliser (encouragement des PME par une réforme fiscale, nécessité d'un rapport d'égal à égal avec l'Allemagne) ainsi qu'une réforme bancaire et un retour sur la loi de 1973 pour "sortir du contrôle de l'oligarchie bancaire". [vidéo intégrale 21.00].
En fin de réunion, le président de Debout la République ! se lâche sur la confiscation politique et médiatique du débat. Joli coup de gueule. Je ne suis pas d'accord sur tout, mais il conclut parfaitement le colloque :
Extrait #3 : N.Dupont-Aignan > "En 2005, ils ont compris qu'ils étaient minoritaires dans ce pays et sont devenus plus agressifs." (5.20)
La croissance des trente glorieuses s'est appuyée sur l'essor de l'industrie qui a généré une classe-moyenne consommant cash. Avec une industrie française en déliquescence depuis 30 ans, la société se fracture entre riches et pauvres : les esclaves du précariat piégés dans le crédit d'un côté, de l'autre les rentiers issus de la vague d'avant dont les intérêts sont aujourd'hui défendus au plus haut sommet de l'Etat.
Le système ne paye plus. Le modèle s’effondre sous nous yeux, les conditions de vie et l'espoir des peuples avec (et nous y avons contribué, acteurs joyeux depuis 30 ans d'une consommation détruisant nos emplois, salariés se pliant à l'argumentaire puis au management Medef), mais il ne se réinvente pas. Logique, les bénéficiaires du chaos secondés par une classe dirigeante sans imagination s'évertuent à tenter de le sauver.
Tous l'ont souligné ici, le protectionnisme économique est loin d'être le seul remède, mais ce rééquilibrage de l'injustice de l'échange, souhaité par une majorité de français et méprisé à dessein par les apôtres fanatisés du tout marché en échec, doit s'imposer dans le débat politique. Sinon, pour le meilleur ou le pire : le désespoir deviendra colère.
Synthèse du nouveau sondage IFOP : Les européens, le protectionnisme et le libre-échange
Illustration et vidéos : @sebmusset @vogelsong
16 comments:
Eh bien, on dirait que ça bouge doucement mais surement sur ce thème!
Quand je pense qu'il y a encore 3 ou 4 ans quand je parlais de protectionnisme on me prenait pour un fou dangereux! Même quand je rajoutais que le protectionnisme n'est pas LA solution mais le préalable à l'instauration de toute mesure progressiste.
Un bout du chemin a déjà été parcouru. C'est bon signe.
Beau compte-rendu.
Grace à vous, nous avons également les vidéos !
Au plaisir de vous croiser lors d'une éventuelle prochaine fois.
Bonjour,
auriez-vous également les vidéos des interventions de JUVIN et GREAU ?
Je n'ai pas noté toutes leurs propositions.
@Tassin > La route est longue, mais ne serait-ce que le retour de la thématique chez un candidat PS est révélateur d'un changement.
@CoralieDelaume > Merci.
@Trubli > Non malheureusement, je n'ai pas filmé les 3h de réunion, mais il y avait 2 autres caméras. Je pense que le site de l'association, diffusera tout à un moment ou à un autre.
Excellente conférence : pourquoi c'est pas ça qu'on a eu sur France 2 hier soir ? C'est d'une autre hauteur que ce à quoi on a assisté.
Dupont-Aignan, j'avais déjà vu son intervention sur la Radio Ici et Maintenant, il m'avait déjà bien scotché. Clairement une voix qui mérite d'être entendue.
Il est claire que le vrai débat, le vrai conflit idéologique contemporain, est entre libéraux et démocrates (les deux termes sont antinomiques...).
Si la possibilité lointaine (mais pas impossible, on vit une époque troublée) d'être contraint à choisir entre un(e) antilibéral(e) de droite (Dupont-Aignant ou autres) et un(e) libéral(e) de gauche (il y en a une palanquée!) apparaissait, mon vote irait où vous savez.
Je préférerai quand même (nettement) un antilibéral de gauche. Mélenchon ou Montebourg. Mais le fait d'être contraint de voter pour un(e) libéral(e) de gauche pour éviter un Sarkome ou une Pen, me ferait plus ch... que de voter pour Dupont-Aignant.
Le boulot étant de rétablir la démocratie dans notre pays.
Lorsque ce but aura été atteint, entre démocrates (et donc antilibéraux) de droite et de gauche, on pourra continuer à s'étriper comme au bon vieux temps. Mais le préalable est de virer les libéraux de toutes les positions de pouvoir : politiques, économiques, médiatiques, univesritaires (un économiste libéral n'a pas à être rémunéré par l’État. Qu'il fonde sa boîte ou cherche du boulot dans le système économique qu'il a contribué à créer...).
Puisque le fait est qu'ils ont toutes les positions de pouvoir... alors qu'une immense majorité les conchie. Depuis longtemps. Ce qui implique que l'on a un vrai problème démocratique, depuis longtemps.
Super boulot Seb,
Voilà des réunions qui font avancer les choses.
Ces idées sont défendues par d'autres personnes qu'il est bien de connaître : il y a Paul Jorion (blog économique le plus consulté de France).
Pour le Royaume-Uni, il y a Nigel Farrage ( un peu extrême, je le concède mais au moins il défend ses idées).
De toute façon, le seul moyen de s'en sortir est de diffuser ces idées et de soutenir ceux qui les défendent. D'abord la survie, on fera le trie après.
Cordialement
Ben
le tri
Nigel Farage
Désolé pour ces deux fautes.
Seb, peux-tu les corriger en tant qu'administrateur ?
Merci
Bon Article. Protectionnisme continental oui, mais il faut conserver l'économie de marché à l'échelle européenne sans quoi on retombera dans les aberration du siècle passé.
@dan > J'y retourne, j'y retourne. J'ai eu un mois particulièrement chargé ;)
La mondialisation est liee a des regles (faites par des etats) mais surtout elle est rendue possible par l evolution des techniques. S il n y a pas eu de capitalisme au moyen age, c est pas a cause des lois mais parce qu on n avait pas beoin de masse de capitaux pour faire des mines, des lignes de chemin de fer ...
La mondialisation est rendue possible par le transport maritime pas cher (les containers) et surtout l informatique/telecom. Vous croyez que apple aurait pu produire en chine s ils devaient envoyer des plans sur papier par la poste ?
Comme nos politiciens ignorent tout (voire meprisent) la technologie, ils peuvent continuer leur delire. Retablir le protectionnisme par simplement ajouter des lois ne fera qu activer une contrebande (comme pour les cigarettes voir le shit)
Seb, la tirade sur l euro faible ne te rappelle rien ?
A chaque devaluation du franc on nous expliquait a la TV que ca serait bien pour la france et mauvais pour ceux qui reevaluaient (allemagne et hollande en general). IL n y a qu a voir le resultat. l industrie de ses 2 pays nous surclassent completement!
Pour info, a la creation du Deutsch Mark 1 DM=1 FF.
On a finit a 1DM=3.4 FF et ca n a pas empeche l industrie allemande de nous tailler des croupieres.
Si on veut une industrie puissante en France il faut commencer par eviter que le fiston herite de l usine a papa meme s il est incompetent (comme Arnaud Lagarder) ou que les francais investissent tout dans l immobilier (je serai curieux de voir le policien assez suicidaire pour proner un ecroulement des prix de l immobilier)
Sinon un glass stell act serait deja un grand pas en avant, on pourrait laisser couler les banques
Chapeau pour la censure.
Beau travail !
Merci Seb pour ce superbe boulot.
Je ne me lasse jamais de passer ici.
Bon support.
Continue.
Xion
Vous oubliez un personnage important dans cette bataille du protectionnisme cher "Seb" ,
très cordialement.
http://www.u-p-r.fr/videos/conferences-en-ligne/qui-gouverne-la-france
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