18 novembre 2014

La colère de Gattazounet l'assisté

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C'est-y pas de l'énervement ça ! Gattazounet Junior veut en finir avec l'Impôt sur la Fortune (juste un gadget fiscal plus symbolique qu'autre chose). Reconnaissons au fils à papa une constante dans la défense des intérêts de son club fermé.

Un article de La Voix Du Nord m'apprend aujourd'hui que Radiall, la florissante entreprise du patron du MEDEF  "n’a payé que 202 000 euros d’impôt l’an dernier, alors qu’elle en recevait 876 000 au titre du crédit impôt compétitivité emploi" (Rappel : Le CICE est un truc magique ciblé avec les pieds qui devait tout résoudre. Comme prévu par tous, sauf par notre secte de croyants de la croissance par subvention du capital, autrement nommée "gouvernement", ces cadeaux aux entreprises n'ont pas rapporté un seul job à la collectivité. A elle désormais de régler une ardoise (entre autres) de 20 Milliards sous forme d'austérité dans sa gueule.

Résumons. Gattaz verse 2, il touche 9. Ça c'est de la compétitivité française ! C'est clairement plus avantageux que les cotisations salariales et ta mutuelle complémentaire. De quoi laisser du temps à mon Pierrot pour chialer dans les médias que le chômeur n'est pas assez salarié et que le salarié, cette dispendieuse sangsue, doit être éradiqué. Ce ne serait pas si grave (si l'on fait abstraction de l'argent qui aurait pu servir à construire des hôpitaux ou payer des enseignants) si notre assisté à l'ISF ne donnait pas le tempo de l'incessant tango du Je t'aime moi non plus avec un gouvernement "pro-business" qui  lui léche les pieds un jour et fait semblant de le sermonner le lendemain.

Pour éviter que l'on me taxe encore d'anti-entreprise : Gattaz est autant une insulte aux travailleurs qu'aux patrons dont la majorité, comme le reste des Français, ne sont pas soumis à l'ISF et dont Pierrot n'a absolument rien à carrer. Rappelons son équation personnelle que nos chercheurs bénévoles ont eu loisir de déchiffrer dans la file d'attente au guichet Pole Emploi :

Pognon public + propagande morale avec violons au JT + salariés pas payés sur optimisation fiscale au cube  = dans la poche à Gattaz.

T'en veux du vrai gros scandale mon Pierrot ? 1% des Français les plus riches possèdent autant que 70% des Français les plus pauvres (en gros nous tous, Étude OXFAM 2014). Et ça, quelque chose me dit que c'est TRÈS mauvais pour "la croissance". La notre évidemment, pas la tienne puisque jamais dans l'histoire de ce pays, les riches moralisateurs du travail des pauvres ne sont aussi bien portés.

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3 novembre 2014

Osez Gone Girl

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Et pan ! Osez le féminisme démonte le dernier film de David Fincher : Gone Girl (lui offrant un beau repêchage publicitaire au passage).

L'histoire : Le jour de son cinquième anniversaire de mariage, l'épouse d'un gaillard un peu mou mais sympa disparaît. Elle est belle, un peu connue, très vite l'histoire est médiatisée. Tout accuse le mari (dont on découvre qu'il n'est pas si mou ni sympa que ça)... Mais bon ce n'est pas si simple, c'est pas celui qui dit qui est, mon père n'est pas vitrier mais je vois quand même à trois cent bornes une odieuse machination de la madame (c'est que j'ai des années de Faites entrer l'accusé derrière moi).

Il ne reste plus qu'à espérer que Zemmour, vouant déjà aux gémonies le sulfureux soap pour pré-pubères Hélène et les Garçons, ne tombe pas dessus avant 2040 : il aurait là de quoi écrire un pamphlet dithyrambique sur le renouveau vengeur du pop-corn cinéma de la middle-class dévirilisée,  trop longtemps sous la coupe du complot feminoburné à la solde de l'homodomination hollywoodienne (ou à peu près).

Il faut dire que le dernier thriller de Fincher est un cas rare de film raté, mais réussi

Raté : reboot conjugal de Liaison fatale, le film est lourdingue, pas crédible deux secondes et, victime de ce complexe de ne pas être une série télé, il s’enfonce dans la surenchère des rebondissements en s’évertuant à compacter en près de trois heures ce qu’il aurait gagné à diluer en six sur HBO

Réussi : Fincher embrasse avec talent les sujets latéraux : la part de secret dans le couple (on notera d’ailleurs que l’on ne progresse pas d’un iota sur le sujet du début à la fin), la dissolution de la personnalité dans le rapport amoureux (la grande terreur du moment), l'auto-peopolisation de nos vies et la contamination totale du cynisme : des institutions jusqu’à la sphère intime en passant par la famille.

On en sort perturbé, pas tant par ce que l’on a vu mais par ce que l’on est amené à en projeter sur notre propre vie. Malgré ses grosses ficelles de film de genre, il faut croire que le récit est encore trop dans la nuance pour certains parlant d'"apologie de la violence masculine" et d'"illustration parfaite des thèses masculinistes". Bof. A la rigueur, c'est un film pro-célibat.

Malgré son registre de polar et le léger pet-au-casque du personnage féminin (je ne spoile rien du tout, ça se devine à la première image et l’autre traduction possible de Gone Girl est « fille timbrée, irrécupérable »), le film pointe en les caricaturant comme il faut (plus ce serait de la farce) les névroses de notre société : du culte de la performance généralisé et de l’esprit selfie qui nous carbonise la raison. 

Au fond, Gone Girl est un film miroir qui informe d'abord sur la qualité de celui qui regarde. Moi j'y ai vu une fille dingue et une société qui ne va pas beaucoup mieux. 

Mais je suis très basique. Normal, je suis un homme.

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30 septembre 2014

[Notre époque] BCE, Selfie et Ipad

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Ami pauvre, sois rassuré. La Banque Centrale Européenne pense à toi : 


Un Ipad à gagner pour 350 millions de personnes, c'est ce qu'on appelle une politique de jeu responsable, limite austère, voire un foutage de gueule.

15 septembre 2014

Vers le ras-le-bol social ?

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On a trop malmené François Rebsamen. Et s’il avait, avec son ball-trap sur chômeurs capté l’humeur du pays ?, comme Moscovici l’année d’avant avec son ras-le-bol fiscal partagés même par des non-imposables.

De plus en plus, j'entends cette rengaine (hier encore au hasard de deux conversations avec des gens totalement dépolitisés, bref anti-socialistes) : "Les chômeurs sont trop payés et ça ne les incite pas à reprendre un boulot". Ça ne vient pas de patrons geignant pour que le gouvernement leur oigne encore le corps de quelques ors, mais bien de simples salariés qui ont souvent (mais quelle famille n'en a pas) des chômeurs dans leur entourage proche.

La connerie crasse serait-elle en train de triompher ?

Une récente étude du Crédoc tendrait à le prouver. 

Attention ça raye le cerveau :

- 37 % des Français pensent que les personnes qui vivent dans la pauvreté n'ont pas fait d'effort pour s'en sortir. (25 % en 2009). (L'argument génétique n'est pas encore invoqué, mais c'est pour bientôt).

- 53 % considèrent que le RSA n'incite pas les gens à travailler (31 % en 2009). (Et là je proteste : 509 euros par mois, ça ne te permet même pas d'acheter une moitié d'Iphone6 te permettant d'accéder au statut d'être humain)

- 63% pensent que l'aide apporte aux familles très modestes est suffisante (31% en 2009).  (Et si on pouvait en lapider quelques-uns en place publique, ce serait bon pour le moral de la collectivité).

- 64 % pensent que, s'ils le voulaient, les chômeurs pourraient retrouver un emploi. (Et gagner au Millionnaire).

Avec des scores pareils, ce n'est plus seulement l'expression des riches. Au lieu de renforcer les solidarités, la baisse du niveau de vie renforcerait la haine de l'autre, et la recherche de boucs-émissaires. 

La-dessus le discours du Medef servi en trois-huit télévisé imbibe les esprits : la pauvreté, c'est la faute aux pauvres, comme le chômage est la faute des chômeurs, patron = dieu à qui faire quotidiennement des offrandes. Nous ne sommes même plus au niveau de la réduction des idées, mais du court-circuit de neurones via la boite de dérivation du sens critique TNT-TF1-CdansLair. 

Face à cet océan de connerie due à un arrosage médiatique massif de la doxa libérale conduisant les  victimes à épouser la logique de leurs bourreaux, répétons quelques évidences :

1 / Ne sont indemnisés que les chômeurs qui ont assez cotisé (en langage libéral, on appelle ça une assurance). Ce qui nous en dégage une bonne moitié déjà.

2 / Les aides sociales perçues par les familles en difficulté sont, par définition, quasi intégralement reversées dans la consommation de survie (boire-manger-rester propre). A ce titre, on pourrait presque affirmer (allez on l'affirme) que des boites comme Carrefour ou Auchan vivent en grande partie grâce à ce transfert d'argent public via la poche des pauvres. (L'autre partie étant le fruit de leur  optimisation fiscale performante).

3 / Admettons même que certains chômeurs ne soient pas incités à retravailler. N’est-ce pas en raison des salaires de merde qui leur sont proposés ? (Quand il y en a un d’ailleurs, souvent il faut sortir de sa poche pour bosser, c'est sûr que suivant l'équation temps pour soi = richesse, ça calme sec). Le problème n'est pas celui de l’indemnisation trop haute (la supprimer accélérait la paupérisation française donc la chute de consommation, donc la chute de l’emploi, donc le chômage) mais la trop faible rémunération du travail ! (Rappel : ne pas confondre avec la rémunération du capital qui elle augmente). Note : Quand je sors cet argument face à un salarié "outré" par les chômeurs feignants, il m'oppose souvent un : « - Oh bah euh…mais…euh…mais c’est vrai t’as peut-être raison » alors que je perçois sur son visage sa difficulté à rechercher une réplique efficace parmi les milliers d'heures de programmes télés qu'il a bouffés. 

Ça devient (presque) comique quand, en grattant un peu, je découvre que ces salariés moralisateurs sont déprimés par un boulot qu'ils n'aiment pas, où leur salaire s'est transformé en remboursement de crédits, quand il ne sont pas harcelés. Certains chérissent le fantasme de se faire virer pour monter leur entreprise, partir en Angleterre ou en Australie (parce qu'ailleurs ils ont tout compris eux) ou encore de devenir fermier macrobio avec maison d'hôtes à la campagne (une fois leurs indemnités empochées bien sûr, 99% de moi-même pensant que ce scandaleux salaire, même faible, ne les incite pas à avoir le courage de quitter leur boulot).

Bien sur, on attendrait d'un gouvernement socialiste même et surtout impopulaire, qu'il profite au moins de cette défiance pour réaffirmer quelques principes de solidarité et œuvrer pour les plus démunis, et non surfer sur cette vague de rejet des solidarités. Ce ne serait même pas du courage, juste le respect de son programme.

Mais ceci est désormais une utopie.  


12 septembre 2014

#Socialimze : Tu seras un #SansDents mon fils

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OK, le bouquin de l'autre pathétique a bien amusé la galerie fusillant la rentrée sociale et littéraire en une passe par occupation totale du temps d'antenne. Notre président a cru bon de rajouter un épisode à ces Feux de l'Amour de la République en précisant face à son hagiographe qu'il aimait quand mêmes les pauvres. Ouais +1 et pouce en l'air les gueux !

Le vrai problème de la polémique des "sans-dents" engendrée par les confessions de la Cosette névropathe de L'Elysée n'est pas de savoir si oui ou non Notre Président appelle les pauvres ainsi sur le ton de la blague, mais bien que la politique qu'il mène depuis quelques temps est diablement raccord avec ce mépris des moins favorisés. Une phrase pareille parait ainsi crédible, et c'est absolument tout sauf une blague pour ceux qui vivent au quotidien ce mépris dans leur chair.

Dernier épisode en date, diablement maladroit mais on n'est plus à ça près : l'annonce de la suppression immédiate, par la CNAM et l'Etat, du programme de prévention bucco-dentaire M'T DENTS, et ce dès aujourd'hui (malgré les centaines de milliers de courriers envoyés cette année).

Et là, comme dirait Valérie, je me sens un peu trahi et vénère.

Oui parce que je viens de recevoir le coupon pour ma fille.



Le programme M'T Dents offre, enfin offrait, une consultation chez le dentiste pour votre enfant aux âges à risque entre 6 et 18 ans. Objectif : dépistage et soins éventuels. 

L'UFSBD precise que "les politiques de santé bucco-dentaire à l’école inspirées par l’UFSBD ont permis de diviser par 3 le nombre de caries par enfant depuis 1987 puisque chez les 12 ans, il est passé de 4,2 à 1,2" lit-on sur Doctissimo. En résumé, ce genre d'opérations marche.

Et c'est un type qui a dû dépenser le prix de deux bagnoles en frais dentaires non remboursés qui vous le certifie : le suivi précoce de votre enfant peut lui sauver la mise, lui économisera de la douleur et beaucoup de pognon dans sa vie adulte. Une carie soignée à treize ans (60 euros, remboursé spresque intégralement) peut vous éviter l'implant à trente (entre 1000 et 3000 euros remboursés au tarif : ton cul en selfie sur la commode si t'as pas une mutuelle de nabab qatari).

Et je ne parle pas évidemment des la thune ainsi économisée pour la collectivité. Ah oui, mais on s'en brosse le dentier, l'Etat a d'abord des banquiers à rembourser et des patrons à arroser.

Gel des petites retraites, réduction du congé parental, caries pour tous : grattons encore quelques millions sur le dos des plus fragiles. Et que chacun se démerde. This is the new socialimze !

Illustration : The late Richard Kiel.

2 septembre 2014

#Socialimze : Le chômeur fumiste

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C'est du déjà vu. A mi-quinquennat, quand sa politique se révèle pire que sans effet, qu'il distribue joyeusement, les yeux embués de confiance, des milliards par dizaines à l'élite ébahie du patronat qui dans deux semaines en demandera le double, le pouvoir qui ne doute de rien cherche des boucs-émissaires : roms, voleurs de mobylette ou chômeur.

Aujourd'hui dans Plus beau le socialisme : C'est François Rebsamen, ministre du Travail, digne héritier de Nadine Morano, Laurent Wauquiez, Marc-Philippe Daubresse ou du plus communiste d'entre eux, Nicolas Sarkozy, qui s'y colle. Et c'est le chômeur qui gagne le gros lot à la kermesse des boulets :


On ne peut rien faire pour l'emploi, éliminons le demandeur.

Rappelons ce qu'est un chômeur. 

Le chômeur est un salaud de privilégié qui n'a plus le malheur d'avoir un travail, ou n'en a même jamais eu de rémunéré. Selon la rumeur, il y aurait d'autres chômeurs, cumulards (ça Rebsamen connait) et supérieurement gâtés qui, en plus de faire le tour du monde en RER, touchent des indemnités pour lesquelles ils ont cotisé. La paresse du chômeur est le ferment de notre croissance atone. Ils sont presque aussi pires que les salariés (Salarié : Le salarié est un enfant gâté ne travaillant pas assez et coûtant trop cher). D'ailleurs les salariés deviennent souvent chômeurs : preuve évidente que nous sommes face à un complot de la vermine assistée contre la grande libéralisation du capital, euh du pays, entreprise par notre gouvernement socialiste. Ajoutons à cela que le chômeur sans visibilité (poste en or dont honnêtement tout le monde rêve) a parfois la chance d'être débarrassé de ces gesticulations administratives qui l'obligeraient à faire de la défiscalisation foncière avec ses multiples acquisitions immobilières.

Si toi aussi, tu sais qui sont les méchants qui plombent notre moral. Soutiens avec moi François Rebsamen, Emmanuel Macron et Manuel Valls, et en avant pour l'avènement d'un pays moderne débarrassé des chômeurs et des salariés, un pays social-libéré où il ne restera plus que des patrons et des retraités multi-propriétaires, avec des esclaves pour les servir et un gouvernement de drauche pour les fliquer. 


Articles connexes : 
Culpabilisons les pauvres
Faites entrer l'assisté
La Dolce Vita des travailleurs

28 août 2014

Gang-Bang à l'Université d'été du Medef

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Chaque année l’université du Medef est ce moment magique où l’on peut voir batifoler dans son biotope, avec macarons sous tente, la fine fleur du fantasme libéral.

Et entre deux tirs sur fonctionnaire, la gueule pleine de petits fours, ça postillonne gras sur le travail trop cher tant qu’il n’est pas gratuit, la fin des 35 heures, la retraite à 102 ans et que le travail des enfants ça serait quand même sympa dans cet environnement concurrentiel mondialisé qui doit pousser ces feignants de français à prendre un peu sur eux. Et le patron repu (oui, le patron de PME est là pour la déco) pleurniche des larmes de champagne sur notre régime communiste tortionnaire n'ayant versé que quarante milliards de cadeaux fiscaux à ce martyr des temps modernes à qui, en plus, il a osé suggérer d'embaucher. (La présence où non d'un salaire assorti à cette embauche n'a heureusement pas été précisée lors de la signature sur un bout de nappe en papier à la fin d'un repas fortement alcoolisé).

Cette année Pierre Gattaz avait donc arboré son pin’s 1 million d’emploi (édition spéciale "dans ton cul, je l'ai fabriqué aux Etats-Unis"), seule contrepartie visible du pacte de responsabilité (subvention pure et simple, et sans retour, de l’entreprise financée sur le dos de la collectivité) concocté sur un plateau doré par notre gouvernement qui, décidément, a le sens du peuple et des mathématiques comme nul autre avant lui.


Fraîchement boosté par la valse de rentrée au gouvernement et l’arrivée du banquier beau gosse qui a gagné des millions Macron à Bercy, ce n’est donc pas un discours social-libéral, ni sociétal-libéral, mais bien libéral-libéral, tendance porno allemand, que le Premier Ministre a livré face à un parterre visiblement satisfait par cette fellation collective.

Le seul avantage de cette confirmation de tendance (au point où nous en sommes, nous reprocherons juste à François Hollande d'avoir mis autant de temps à trahir son programme), c’est qu’elle coince la droite dans les cordes. En effet, elle n’est jamais allée aussi loin (au pouvoir) dans la soumission aux dogmes libéraux. La droite va pouvoir désormais se consacrer à ce qu’elle sait faire le mieux : se palucher sur les pages de Valeurs Actuelles et défiler dans la rue avec des crucifix en appelant à bouter Satan hors de Gaule.

En attendant la merveille sociale et économique qui nous attend (à peine une journée en poste et le loup de Bercy peste déjà contre les 35 heures) nous nous divertirons en lisant les tweets effacés de Manuel Valls.

Illustrations : source, Wolf of Wall Street (M.Scorcese,2013)

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26 août 2014

Ceci n'est pas un exercice

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Quelle rentrée de merde mes enfants !

Après un été pourri sur le front de l’info mondiale et de la météo locale (même la 25e saison de Fort Boyard est vraiment en-dessous de tout), voilà que notre gouvernement réussi à saper encore un peu plus le moral de ce pays. J’étais presque décidé à reprendre la rédaction de ce blog en cherchant à défendre dans l'action gouvernementale (si si, reste des trucs). Et patatras, le lundi même où j’allais m’y mettre, un flash de France Info me stoppe net.

Passée ma fausse joie en entendant sur les ondes nationales et dans la même phrase les mots Valls et démission, je réalisai pas même blasé que le Président suivait en fait à la lettre son Manuel du parfait ratage sociétal-libéral[1], chapitre chantage, en tançant l'intégralité de son gouvernement pour les récents propos de Montebourg contre la ligne politique décidée par le Président. Il faut croire que François Hollande n'avait donc, jusqu'ici, jamais écouté son ministre de l'Economie, et que Montebourg ignorait tout de l'action du gouvernement auquel il participait. Le Président ne supporte plus de traverser en solitaire la tempête des mots de travers et, à défaut de pouvoir faire le beau temps et le beau temps, montre qui est le patron (après Pierre Gattaz bien sûr). Quand les cadres dirigeants s'ennuient, virer quelques subalternes ça détend toujours un peu, ça amuse la galerie et ça ne porte pas préjudice à l'activité.

Il n’en fallait pas plus pour alimenter le grand feuilleton de la rentrée [Mode conspiracy on/l'annonce de la démission collective du gouvernement arrivant le matin même de la rentrée de la majorité des médias/Mode conspiracy off]. Beaucoup de bruit pour rien, de la parlote pas chère, du suspens en balsa avec des jingles à la Gozilla marche sur Hollywood plus une cascade de directs satellites à 1000 boules la minute sur des perrons vides : les chaines d’info adorent les remaniements gouvernementaux. Et Pourquoi Jean-Michel Baylet a mis son costume du dimanche ? Et Bernard Tapie va-t-il revenir ? Selon ses informations Michael Darmon serait ministre de l'Information, est-ce crédible ? Et pourquoi Valls fait sa loi dans le triangle de Matignon-St-Honoré-Beauvau alors qu’il a fait un score minablissime à la primaire socialiste ? [2]. Alors Christophe Barbier, est-ce une crise de régime ? Une crise politique ? Des Chrysanthèmes ? Vous reprendrez bien un Krisproll Christophe ?

J’ai assez critiqué la pratique du sitcom permanent sous Sarkozy pour retomber dedans. Chacun se contre-branle copieusement du remaniement, encore plus aujourd'hui avec un pessimisme social au plus haut et une déflation qui se profile [3]. Et cet énième jeu de chaises musicales (avec de moins en moins de participants) ne va pas arranger ce sentiment de lassitude. Même Montebourg se carbonise au grand jeu du quel ministre ou ex ministre, potentiellement présidentiable, fera le plus de buzz à la rentrée ? alors qu'il était porteur d'une vraie parole (seul domaine où il excelle encore).

Comme vous, tout ceci me fatigue, m’exaspère. De la pitoyable danse du ventre au patronat, aux promesses non tenues en passant par ces personnalités pleines de promesses se fracassant avec plus ou moins de panache sur le mur de leur ego, je n’ai absolument plus envie de commenter l’actualité de ce quinquennat ressemblant dans les grandes lignes économiques, mais en version téléfilm moldave, à celui d’avant. Si je ne les regrette absolument pas, les années Sarko avaient au moins le mérite de recréer de la mobilisation et un vague désir de gauche. Ici, tout est désespérant du sol au plafond. En prime, le socialisme est flingué pour vingt ans. A la sclérose idéologique de ce pouvoir ensuqué dans des recettes économiques d'un autre siècle qui ne marcheront jamais (couvrir de de milliards les grosses entreprises en espérant des millions d'embauche n'est pas une ligne économique viable), va s'ajouter désormais le feuilleton de la prochaine présidentielle. Et le pouvoir là dedans ? L'action politique ? L'amélioration sociale ? L’intérêt collectif ?

Rien. Une petite gueulante de temps en temps et puis c'est marre. Une privatisation rampante de tout. Au mieux, une préparation mentale (avec moins d'hystérie que sous Sarkozy) au grand "démerdez-vous" qui s'installe année après année dans ce pays à force de travail au noir, de petits boulots, de salariat low-cost et de stages gratuits, d'indécences patronales et de self-exploitations auto-entrepreunariales.

Allons, ce n'est rien. Juste le blues de la rentrée. Juste un mauvais moment à passer.

Continuons la lutte camarades. 


[1] sobrement intitulé Comment trahir ses électeurs, tout en faisant une politique ringarde et sans souffle, pour faire l’unanimité contre soi jusque dans ses propres rangs et fièrement gagner 0.2 % de croissance en 5 ans de sacrifices ?  Fiasco éditeurs, 2012. (Réédition actualisée de 2007 et 2002)

[2] Au temps pour moi, celle-ci n’est pas posée.

[3] Rappel. L'inflation à la française, c'est l'augmentation de tout sauf des salaires.
La déflation à la française, c'est la baisse de quelques trucs comme les pastèques, les capotes et les salaires.

Illustration : source

14 août 2014

Des lendemains qui chantent

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Comment est-on passé de l'espoir suscité le soir du 10 mai 1981 au cauchemar du 21 avril 2002 ?

Cette question est la toile de fond de la comédie de Nicolas Castro Des Lendemains Qui Chantent (sortie le 20 août).

Deux frères "montent à Paris" au début des années 80. Olivier (Pio Marmaï) est un jeune homme de gauche attaché à ses convictions. Il croit au Grand Soir avec Mitterrand au pouvoir. Léon (Gaspard Proust) est un trostkyste, tendance ambitieux, qui n'attendra pas le "tournant de la rigueur" pour se reconvertir dans la ´com. Il sera, dans l'ombre, à coups de slogans, un des artisans du vrai "changement" : celui de la conversion joyeuse de la gauche des idées à la gauche de marché.

Le réalisateur, Nicolas Castro, à potassé l'époque. Tout y est : de l'éclosion du Minitel rose, à la starification médiatique de Bernard Tapie en passant par la création de Touche Pas À Mon Pote sur un coin de table, les playmates du Collaro-show et la dérive libérale de la presse de Gauche (Deux scènes d'anthologie avec Serge July et Laurent Joffrin). Se mêlent au rythme d'une comédie sociale italienne (entre Dino Riso et Elio Pietri) petite et grande histoire jusqu'à la fusion via une savoureuse utilisation des images de L'INA où sont intégrés les comédiens. Le film rappelle à la fois Le Nom Des Gens, dont il est en quelque sorte la préface, ou encore Boogie Nights de PT Anderson dont la ligne et le projet sont proches (Anderson narrait la grandeur et la décadence d'une star du porno dans une industrie en pleine mutation technologique dans les années 80, Castro traite des illusions perdues du militant face à un gouvernement entrant joyeusement dans la soumission à l'argent et au marketing.

Des Lendemains Qui Chantent n'est pas un film à message. On y trouvera pourtant de nombreux échos avec la situation presidentielle actuelle, notamment sur la question posée en introduction : comment sommes nous passés de l'utopie de mai 81 au cauchemar d'avril 2002 ?

A ce sujet, le film est aussi limpide que drôle : en trahissant les idées pour lesquelles on a été élu.


[message de service] Une bière offerte à celui qui m'expliquera comment intégrer des vidéos depuis l'application Blogger pour IPhone. 

19 juin 2014

Le selfie c'est fini. Vive le selfie 3D !

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Ils sont partout, téléphone intelligent au bout du bras, à s'autoprendre. 

Validée par Barack Obama, les Oscars, Christine Boutin et ma voisine du troisième, 2014 est l'année de l'explosion décomplexée de l'onanisme photographique. Cette névrose 4G a un nom, contraction de self et abruti : le selfie

Elle est loin l'époque où quelques anonymes trouvaient un poil prétentieux que j'ose afficher ma face [à peine photoshopée. NDLR] au frontispice du blog. Comparé à la débauche actuelle d'autoportraits en ligne, je suis désormais un petit joueur. Chacun aura eu loisir depuis de se rentrer sous tous les angles et à ses frais dans la grande base de données de la reconnaissance faciale planétaire.

Mais revenons aux sources.

Que faut-il pour un bon selfie ?

Un minimum de passion de soi et un besoin de reconnaissance se divisant en deux sous-catégories : 

1 / l'extension numérique de l'éternel besoin de plaire (se rassurer sur son image en la partageant).  

2/ se donner une valeur sur le marché ultraconcurrentiel de la notoriété instantanée en associant sa tronche de cake à un contexte qui la transcende, le selfie de clampin n'ayant au final qu'une valeur marchande limitée). 

Dans les deux cas, ça vire vite au crash artistique. Il faut que les vérités soient bloguées : 99% des selfies sont ridicules, le degré d'humour ou d'autodérision constituant dans de trop rares fois la seule qualité du cliché. Sur une note plus technique, précisons qu'un beau selfie se doit d'être laid (une pixelisation baveuse dans une salle de bain glauque, un cadre raté ou un simple contre-jour flou pastelisé à l'Instagram jaune pisse sont des plus).

Pourtant, la selfisation, dérive de l'antique auto-portrait vers la pratique compulsive, devient la marque ultime de ringarditude rézosociale. L'invasion des selfies à la con sur nos TL touche à sa fin et deux grandes tendances se dessinent :

1 / Le retour à la discrétion et l'échange de selfies (ou photos de soi en situation) en cercle fermé

2 / La radicalisation armée des extrémistes de l'intime, branche autonome. 

Et là, on va passer au dur. Une petite entreprise de Grenoble, Squadrone system propose Hexo+un drone personnel qui vous suit et vous filme, histoire de donner un peu de 3D realtime à votre egotrip. C'est tout simplement la bonne idée qui manquait pour faire de la réalité une prolongation de Facebook et non plus seulement l'inverse. Entre l'animal de compagnie et l'émission de télé permanente dont tu es le héros : le potentiel est énorme.  Le drone vise d'abord les performances sportives, mais un esprit pervers [à peine photoshopé. NDLR] ne pourra que se féliciter des gains de productivité offerts aux services policiers, de renseignement, à votre employeur ou à diverses entreprises, honnêtes ou non, dans le suivi à la trace en temps réel des individus. 

Le projet est présenté en financement participatif ici.

Souriez, vous vous aimez.

Illustration : Gustave Courbet, selfie, 1843.

4 juin 2014

The UMP needs the RPR to win against the UMP

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La Une de Valeurs Actuelles de la semaine se lamente sur la mollesse, disons-le tout net, le gauchisme de la droite d'opposition. Une autocritique, même lointaine, dans le magazine des réacs décontractés est déjà une initiative qui se devait d'être relayée :


Si j'en crois graphiquement Valac, ce qu'il faut donc à l'UMP pour sortir de l'UMP c'est revenir aux bonnes vieilles traditions de droite et renouer avec le RPR, comme le soulignait en 1998 cette affiche du parti (même slogan et la même référence à Astérix)


1 / Le RPR sera renommé UMP quatre ans plus tard pour cause de carton FN au premier tour de la présidentielle.

2 / Le RPR n'avait pas demandé l'autorisation aux ayants droits de Goscinny, ni à Uderzo, pour sa petite opération de com'. 

3 / Je n'ose imaginer la répétition d'un tel procédé de la part d'un magazine aussi innovant que Valeurs Actuelles.

[Update 05-06-2014 14.50]
Selon le service communication des éditions Albert René, il semblerait que celles-ci n'aient pas été sollicitées par le magazine Valeurs Actuelles pour cette reprise d'Astérix en Une. #Oops

26 mai 2014

Europe : Caramba ! Encore raté !

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Regardez donc cette belle carte de lendemain d’élection européenne ! En bleu Copé c'est la France de droite, en bleu Marine celle d'extrême droite. Bon, on se rassurera en se disant qu'il y a plus d'un électeur sur deux n'est pas allé voter, mais ne chipotons pas : vote d'adhésion ou non, une élection a horreur du vide des urnes, le FN est donc ce dimanche le premier parti de France. C'est d'une logique aussi cruelle qu'implacable.

Première impression à chaud en découvrant sans surprise les résultats : quel gros succès cette Europe forcée qui voulait éviter la haine entre les peuples et se retrouve à booster les nationalismes un peu partout !  Les gars, va falloir sérieusement repenser le positionnement marketing parce que là, plus personne ne croit au produit et ça va finir en guerre vos conneries.

Bon. Je vous fais le film de la journée :

L'escadrille des experts en espadrilles sur plateaux télés nous répétera que Les Français ont mal voté, sans l'once d'une autocritique après des semaines de tapis rouge offertes au mépris de toute égalité de temps de parole à Le Pen père, fille et nièce. (Bon, à leur décharge, il n'y a quasiment que le FN et quelques petits partis qui ont réellement fait campagne).

Le gouvernement va pouvoir remballer ces annonces de dernière minute totalement contradictoires avec la politique menée depuis des mois (le décret Montebourg de protectionnisme sur les cessions, l’annonce de la baisse de la fiscalité pour un million de ménages modestes…) et continuer à vouloir "aller encore plus vite", en fonçant tête baissée dans le mur de sa croissance inaccessible et de sa dette impossible à rembourser.

Les Eurobabas péroreront en rond que ce serait pire sans l'Europe (va savoir on aurait peut-être le FN à 50%) et que la monnaie unique c'est important tu vois. ("- Oh mais zut, c'est ballot, on n'a pas harmonisé les cadres sociaux et fiscaux dans chacun des pays en amont ! - Mais t'inquiètes, ce que l'on n'a pas réussi à 6 pays, on le réussira à 28 ! - C'est pas comme si l'Europe avait été pensée pour organiser une délocalisation décontractée et une compétition sociale entre pays. Non, non...").

Les philosophes nous diront qu'il faut multiplier par deux les séjours Erasmus et les films de Cédric Klapisch pour amadouer ces jeunes qui votent majoritairement FN. ("Etudier au soleil, c'est cool l'Europe, je vote pour. LOLILOL ! Ah mais zut, j'ai pas le moyen de me payer des études ailleurs déjà que je peux pas me loger dans mon propre pays. Flutalor !").

Les Eurosceptiques vont pavoiser. Et je n'en suis pas. Je ne me félicite pas de se résultat, mais honnêtement je n'en voyais pas d'autre possible vu la politique intérieure et le contexte économique.

Dans le concerto des analyses post-claque, j'espère que l'on n'oubliera pas la date fondatrice de la rancœur. Ce jour du 29 mai 2005 lors d'un référendum populaire (au "oui" programmé par le haut) où les Français disaient clairement "non" à un traité constitutionnel européen signifiant, à tort ou à raison, la perte de leur souveraineté. J'espère que, au milieu des lamentations, l'on n'oubliera pas non plus deux ans après la ratification à l'identique et en catimini de ce traité par nos gouvernants.

Et depuis quoi de neuf ? Des pays qui s’écroulent économiquement les uns après les autres, des profits colossaux pour les banques et les grosses sociétés toujours plus mal redistribués, une explosion de l'optimisation fiscale et des plans sociaux, une Europe brandie comme un totem non négociable derrière lequel se planquent, couards, nos responsables se débarrassant de leur pouvoir pour n'en garder que la représentation... C'est la non-remise en cause même à minima de ce mécanisme pensé exclusivement pour les marchés, et donc contre les peuples (ressenti en tant que tel en tous les cas), qui propulse aujourd'hui un parti anti-UE comme représentant principal de la France au Parlement européen. Euronique non ?

Je n'aurai de cesse de rappeler cette loi basique, simplement humaine : qu'ils soient jeunes ou vieux, stupides ou non, racistes ou pas, on ne traite pas les hommes comme des chiens[1].

A la fin, ils mordent.


[1]  J'ai conscience des limites de l'analogie, les chiens des européens étant probablement mieux traités que les européens eux-mêmes.

19 mai 2014

Comment DSK va revenir en 2017 ?

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- Mais enfin tu n'y penses pas ! DSK il est cuit, ratatiné, mort politiquement !

- Le temps détruit tout écrivait Ovide.

- Non, c'était Gaspar Noé.

- Ou Bob l’éponge je ne sais plus. Enfin peu importe, il avait raison. Oui. DSK va revenir. Tu doutes ? Il ne faut pas. La seule question est : comment va-t-il revenir ? Le "pourquoi" ne se pose même pas : l'accession au pouvoir est inscrite dans le code génétique de tout homme politique, c'est à la fois son oxygène et sa finalité quel scrutins municipaux à trente-quatre habitants). Un destin politique ne s'achève vraiment qu'avec la mort (et encore quand tu vois comment sont réutilisés à toutes les sauces De Gaulle et Mitterrand, ça questionne sérieusement sur l'influence des "forces de l'esprit" dans la nullité du débat politique). 

- Oui mais DSK, il a un problème avec euh... enfin tu sais quoi, ça passera jamais !

- Tss, tss... T'excites pas. Addiction au sexe, abus de pouvoir et infidélité : DSK en 2011, au pire, il était au diapason de l'époque. Et puis après avoir eu un président élu, puis divorcé, puis remarié en Collissimo 24h avec une mannequin chanteuse après une session à Disneyland, et un autre nous jouant un remake au casque de Vacances romaines dans les rues du 8e arrondissement avec sa besace Brioche Dorée en bandoulière, les embardées avec ou sans peignoir de l'"ex-chef du FMI" (et l'on insistera plus précisément sur ce titre) ne jurent pas tant que ça. Au moins avec lui : pas de mauvaises surprises côté cul, on va pouvoir se concentrer sur l'éco. 

- Mais c'est impossible, les gens ne tomberont jamais dans le panneau !

- Oh tu sais neuf millions de personnes ont encore payé pour subir le dernier Dany Boon. Et regarde, tout se met doucement en place : une apparition dans une émission de télévision en prime-time pour rappeler qui c'est le Raoul de l'expertise, la Une de l'Express à trois ans pile de la présidentielle et, en sus, un petit film cradingue à Cannes (bon là, il n'y est pour rien, mais vu que le film est un nanar racoleur qui "fait polémique", tu vas voir qu'au final, au terme de trente-six talk-shows, ça jouera en sa faveur).

- Hé, vous mé reconnaissé ?

- Mais enfin, DSK il est carbonisé !

- Ah bon ? 56% des Français pensent qu'il ferait mieux que François Hollande aujourd'hui. Deuxièmement, il incarne (ne me demande pas pourquoi) la solidité du diagnostic économique. A une époque où l’on reproche au chef de l'Etat de naviguer à la boussole Kinder surprise, crois-moi ça rassure. Pour la droite, il n'est pas trop à gauche. Et pour la gauche, au bout de cinq ans de social-libéralisme et dix millions de chômeurs, il ne paraîtra plus si de droite que ça. Et puis, il a tout enduré. Il a traversé le Styx. Riker's Island, c'est autre chose que d’être coincé dix minutes dans le RER A sans déo après ta journée de turbin. 

Welcome to New-York d'Abel Ferrara relance la théorie du complot :
"- C'est quoi ce bordel ! J'avais demandé une russe !"

- Mais, c'est trop gros ! 

- C'est pour ça que c'est beau. Y'aura quoi exactement en face de DSK ? Le retour de Joe Dalton et la Walkyrie ? Tu le sens le gros débat d'esthètes en 2017 ? La foire du Trône à côté ce sera le café des philosophes. Tu vois d'un seul coup qui parait un poil plus crédible ? En attendant, il va continuer à la jouer profil bas le Domi. Il n'interviendra que parcimonieusement, et que sur les questions éco. Sa com' sera indirecte. Du billard à trois bandes. 

- Oputainwoué ! T'as raison... Je reste sans voix.

- Ça tombe bien, c'est exactement ce qui est recherché : que tu restes scotché devant BFM à regarder, sidéré et captif, le feuilleton de la reconquête du pouvoir par deux "destins brisés", jusqu'au débat de l'entre-deux tours diffusé en 3D animé par Yves Calvi avec en plan de coupes sur la courageuse Anne Sinclair encourageant depuis les tribunes celui a qui l'on a injustement savonné la planche six ans plus tôt. Plus poignant que le final de Rocky II, la revanche.

- Et la politique dans tout ça ?

- La quoi ? [1]


[1] Vois ça avec Politeeks. (Il est à l'origine de ce billet).

18 avril 2014

[video] Bienvenue à Gattazland

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Paris cet après-midi...

Par le plus grand des hasards, sur mon chemin pour rendre le matériel nécessaire à ma formation payante en dix mois d'insertion professionnelle par le stage gratuit (j'ai obtenu le diplôme avec mention pas mal), je tombais nez à nez avec de vieilles connaissances

Le collectif Sauvons les riches se dirigeait vers le siège du MEDEF (qui tient réunion à 14h), déterminé à montrer son soutien à la dernière proposition de Pierre Gattaz, patron des patrons, concernant l'instauration d'un demi-SMIC pour cette sous créature qu'est le jeune. 

Malheureusement, MEDEF et RG communiquent bien et, arrivés au porc, nous fûmes accueillis par des grilles baissées et un prompt renfort de soldats casqués.

Le collectif, tout à son enthousiasme envers le Général des armées de Gattazland, n'allait pas se laisser apitoyer par les humanistes comme Laurence Parisot et proposa alors d'aller plus loin encore sur le chemin de la réduction des coûts causés par ces cons de salariés.



16 avril 2014

Vivre et laisser Gattaz

par

« Il vaut mieux quelqu’un qui travaille dans une entreprise avec un salaire un peu moins élevé que le SMIC, de façon temporaire et transitoire[1], plutôt que de le laisser au chômage ». 
Pierre Gattaz, président du MEDEF, 15.04.2014

Le fiston à papa est bien parti pour devenir la star du blog. Nous avons déjà parlé de la baisse du SMIC  ici ou . Résumons notre position : "non mais sincèrement, vous croyez deux secondes que l'économie peut décoller en payant moins les gens ? (alors que l'on pourrait ponctionner sur les actionnaires, les fraudeurs du fisc, les rentiers qui, eux, ne se sont jamais aussi bien porté et ne font pas circuler le pognon)". Nous avons d'ailleurs théorisé cette équation complexe et vous la livrons en exclusivité : 

4 = 2 + 2. 

Nous espérons que les économistes "hétérodoxes" (mais pas de gauche) reçus à L'Elysée (le même jour que la sortie de Gattaz, le monde est bien fait) par François Hollande discuteront de mes calculs audacieux


Bon. Reconnaissons à Pierre Gattaz un vrai plus produit : en sus d'expliquer sans détour avec cet air d'enfant de chœur assistant à son premier gang-bang la logique sous-tendant l'époque, sans le vouloir le patron du MEDEF introduit mieux que personne un débat philosophique au cœur de l'information continue (et c'était pas gagné). En partant du principe que le temps est la seule valeur incontournable et commune (limitée pour tous et non récupérable) :

Vaut-il mieux travailler pour rien et, donc, enrichir un autre que de ne pas travailler et s'enrichir soi ?

Il ne s'agit pas d'être pour ou contre le salariat là n'est même pas la question, mais d'être pour ou contre l'esclavagisme, ce que devient peu à peu le monde du travail au SMIC et à sa périphérie. C'est insidieux, tapissé de promesses, de croyance, de morale, de crédits à la consommation, mais ça se dessine : un sous-monde du travail précarisé (va vivre, te loger et te nourrir avec un SMIC mon Pierrot et on en reparle), coincé, écœuré et assommé (ceux que Jean-François Copé qualifiait de "minables"), et un autre monde du travail structurant, enrichissant dans tous les sens du terme, celui des revenus confortables surreprésentés dans le débat public. En gros, tout ce qui est entre 1500 et 4000 euros est programmé pour disparaître (la baisse des cotisations patronales sur le SMIC va renforcer ce mouvement).

Il convient de définir le travail en question, sa pénibilité, ce qu'il a demandé comme sacrifices, le plaisir que l'on peut y trouver et surtout de mettre ces critères face au déterminant principal : que me rapporte vraiment ce travail ? En quoi m'épanouit-il réellement ? Que me laisse-t-il ? (indice : en cas de doute, l'unique "valeur travail" à considérer est celle de la rémunération)

Non parfois, pour ne pas dire tout le temps, il vaut mieux ne pas travailler que travailler pour rien. Pour notre jeune audience, cible des propositions de Gattaz, nous avons mis en karaoké cette relation de cause à effet : 

"Si j'arrête de leur tendre mon fessier, ils arrêteront d'me le fouetter. Oué." 
(à fredonner sur J'me tire de Maître Gims).

La majeure partie de la confusion vient du fait que dès que ces sujets sont abordés dans les médias, l'espace de discussion est squatté par des prédicateurs professionnels de la compétitivité dont les fiches de paye ou les rentes culminent loin au-dessus des réalités sociales de ceux qu'ils accusent de trop coûter en travaillant. Nos érudits ramènent systématiquement le débat à deux notions : celui qui ne travaille pas est mauvais pour la société, mais manque de bol le travailleur, lui, n'est jamais assez performant pour le pays. Nos prédicateurs n'ont évidemment ni les salaires, ni les grilles horaires, ni les angoisses, ni l'espérance de vie de ceux qu'ils s'acharnent à culpabiliser.

Nos économistes devraient y songer lorsqu'ils élaborent des plans sur l'avenir de la France. En quoi est-il encore utile (pour soi) de travailler (pour le profit des autres) quand l'interface qui fait lien social et constitue le moteur de la consommation (le salaire à bibi) est une insulte se doublant d'une absurdité arithmétique ?

[1] jusqu'à ce que le jeune quitte son statut de jeune à l'âge de 30 ans et, de fait, sa place dans l'entreprise.

Illustration : Big Lebowski, Coen bros (1997)

15 avril 2014

Va plus à gauche, tu vas doubler par la droite !

par
Donc voilà...

J'annonçais hier sur les réseaux sociaux, avec cette causticité me caractérisant, qu'à ce point de trahison envers les classes populaires le pouvoir n'avait plus qu'à supprimer les forts coûteux bas salaires (après tout, ça simplifierait vraiment la rédaction manuscrite des fiches de paie pour ces martyrs d'un monde pas assez libéral que sont les chefs d'entreprise à 4X4 climatisé). Et ce midi :


Non rien, c'est nerveux. Je vais de ce pas acheter une grille de loto. Soyons fou, faisons sauter un tabou : nous aussi, les sans le sou, pouvons rêver d'une rémunération. Je me sens en veine. Trop de souffrance, pas assez d'espérance, je tente ma chance ! (parce que vivre correctement grâce à son travail, ça semble foutu).

(source)

10 avril 2014

Vive La Dolce Vita des travailleurs !

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Je ne sais si Lucy Mangan, chroniqueuse au Guardian, est contente pour nous ou un peu jalouse.

Dans un article elle alerte ses compatriotes anglais : syndicats et patronat français ont voté le 1er avril un accord de branche pour une "obligation de déconnexion" de 11 heures par jour et le week-end pour les cadres et managers dans les sociétés d'ingénierie et de conseil. Il s'agit de réguler le temps de travail "en ligne" (ordres par emails, SMS...) jusqu'ici non comptabilisé (gains à court terme pour la boîte, mais source de burn-out pour l'employé et au final, perte pour la boîte). 

Que l'on ne soit pas connecté en 24 / 24 avec son entreprise, déjà que le temps de travail est limité à 35 heures chez nous, cela interpelle l'éditorialiste britannique qui y voit une obligation nationale de "Dolce Vita" (sic, mais euh c'est un film italien madame). Les drogués au travail ne pourront plus s'épanouir dans l'hyperactivité, prendre leur dose d'ordre, et seront forcés d'avoir du temps pour eux, voire une vie privée. Où va-t-on ? Vers un peu plus de bonheur surement. Pas coté en bourse, donc pas au programme. 

Remettons les choses dans l'ordre. Entre les douze pauses clope par jour et les terrasses de pub bondées de salariés dès quatre heures, L'Angleterre a beaucoup à apprendre à La France au niveau glande au bureau. De ma petite expérience, le salarié français est bien plus productif que son collègue en anglais, bien plus déprimé aussi. No shit Sherlock ! N'y aurait-il pas un lien entre les deux ? 

Deuxièmement, cette mesure est un accord (et non une loi) de "riches". Ça ne concerne que certaines sociétés orientées high-tech, des indépendants et des cadres sup. Ça ne touchera pas le manutentionnaire ou la caissière. Eux peuvent continuer à trimer à la demande, à horaires découpés et décalés, et pourront continuer à jouir des progrès de la technologie en apprenant au beau milieu de la nuit et sans avoir à bouger de la banquette arrière de la 307, leur licenciement par SMS.

Reste que cet accord, et c'est rare par les temps qui courent, passe presque pour un progrès social juste parce que n'est pas un recul (alors qu'il s'agit juste de garantir que les journées de boulot ne fassent pas 20 heures). Dans la ligne, c'est même subversif à une époque où le travail se doit d'être considéré comme "une valeur" à laquelle il faudrait tout sacrifier, l’identité première de l'individu, la seule voie pour une vie épanouie.

Illustration : La Dolce Vita, Fellini (1960).

Seb Musset, L'abondance. 
+ d'infos
Disponible ici en papier ou ebook.


9 avril 2014

Hey mec ! Où est mon gouvernement de gauche ?

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Reconnaissons que depuis qu'avoir Euro RSCG au gouvernement, ça a quand même une autre gueule, celle du loup. Fini les atermoiements, les fausses pudeurs et les propos contradictoires Maintenant, avec le gouvernement de com' back ça file droit, enfin droite.

Je ne m’attarderai pas sur le discours de politique générale de notre premier ministre Manuel Valls hier devant les députés laissant le soin à ma gamine de 5 ans de vous le résumer. Voyant Valls sur l'écran lors d'un sujet introduit par le dithyrambique trio Barbier / Thréard / Calvi, la précieuse s'écria :

"- Oh, Nicolas Sarkozy !"

Perso, j'ai décroché au "La reprise économique est là" du chef du gouvernement. Cela me confirmait la crédibilité analytique du gars. 

Je ne garde que les deux lignes fortes d'un discours qui comble, pour au moins douze secondes, toutes les attentes du MEDEF :

1 / La suppression des cotisations patronales (charges en langue de droite) sur les salaires au SMIC au 1er janvier 2015, et la baisse des cotisations familiales sur  les salaires jusqu’à 3 fois et demie le SMIC. L'inévitable effet sera pour la seconde mesure de baisser les prestations familiales, et pour la première de cantonner encore plus de travailleurs au SMIC, c'est-à-dire plus assez pour vivre, et donc consommer, et donc... enfin vous m'avez compris. Abaisser le "coût du travail" est une priorité gouvernementale pour "rassurer les marchés" en période de "crise". Comprendre : quand il y a contraction économique, ceux qui ont le pognon veulent à tout prix continuer à préserver leurs rentes quitte à sacrifier les plus ou moins faibles (on les appelle aussi salariés) que l'on calme à coup de com' et de trémolos patriotiques à la TV en leur faisant miroiter avec punch et gomina une hausse de cinq cents euros annuelle (on en reparle l'année prochaine, rien n’empêchant les entreprises d'empocher la différence). Bien évidemment, dans la manœuvre, on évitera de s'attarder précisément sur les restrictions budgétaires et les reculs sociaux qui vont s’enchaîner derrière.

2 / L'acharnement à rembourser une dette que l'on ne remboursera jamais via un plan de 50 milliards d'économies en 3 ans (là aussi on en reparle l'année prochaine), et ce alors que le même gouvernement se prive de 60 milliards (80 voire 100, suivant les désirs de Monsieur Gattaz) préalablement offerts au patronat via le flou, confus et totalement raté Crédit d'Impôt pour la Compétitivité des Entreprises et le pipeau Pacte de Responsabilité (l'objectif responsable de cette mascarade est toujours fixé ce jour à zéro emploi). Qu'on se le dise une bonne fois pour toutes : ce ne sera jamais assez pour le patronat. Une fois qu'ils seront débarrassés des cotisations sur les salaires, ils demanderont plus de flexibilité, puis le droit de licencier en dix minutes et sans frais, voire aux frais du licencié... Ça ne s’arrêtera jamais, surtout dans un tel rapport de soumission gouvernementale. Ils ont le vent dans le dos comme rarement depuis trente ans, ils ne vont pas s’arrêter en si bon chemin.

Tenez, moi personnellement, vu la météo des subventions, j'attends le pacte de rentabilité avec offre promotionnelle 10 smicards pour le prix de 2 pour lancer ma boite de formation en consulting d'optimisation fiscale, c'est juré.

Bref, il s'agit de poursuivre (en communiquant mieux, donc en se faisant aimer) une politique absurde d’assèchement des services publics, de stagnation des revenus et, conséquemment, de baisse de pouvoir d'achat. Pas un seul instant, Valls n'évoquera un gouvernement de combat pour rapatrier les centaines de milliards d'euros (des entreprises et des particuliers) échappant au fisc chaque année et, à portée de contrôleurs (si seulement ils étaient embauchés), des 80 milliards (estimation moyenne) de fraude fiscale pourtant récupérable en peu de temps pour combler les trous. Que voulez-vous... Cette mesure en plus d'être efficace, rapide et indolore pour les plus pauvres, est probablement trop à gauche. Ça fait désormais désordre dans un gouvernement socialiste, euh pardon : de com'back.

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