7 mai 2009

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Payer ou payer, il faut choisir.


Pauvre piéton. Pas de clémence pour moi sur ce coin de grande rue permettant toutes les accélérations : Aucune présence policière en vue pour faire peur à l'automobiliste.

Ce matin sur le chemin de la crèche, immobilisé avec la poussette sur mon bout de trottoir à attendre devant le passage balisé pour les bipèdes de mon espèce qu’un des bolides daigne s’arrêter pour me laisser passer, j’entends dans l’Heil-pod que sera discutée aujourd'hui à l'Assemblée Nationale un projet de loi visant à la levée des sanctions pour les "micros excès" de moins de 5 kilomètre/heure. Comprendre : Le relèvement de toutes les limitations de vitesse de 5 km/h puisqu'il existe déjà une marge technique d'erreur équivalente sur les radars.

Poignant plaidoyer social du sénateur UMP : "La crise frappe les travailleurs, il faut éviter que les plus fragiles soient encore plus pénalisés en perdant leur permis."

C'est sympa d'y penser maintenant.

Cela me laisse songeur d'autant que j'en suis facile à la trentième voiture me passant à fond sous le nez alors que je me dresse bien en vue accompagné d'un enfant qui habituellement, et c'est un fait maintes fois constaté qui n'en finit pas de m'étonner, n'a pas son pareil pour adoucir les passants. Mais là, rien à faire. Par dépit et sécurité, devant la vitesse ambiante constatée, je recule sur le trottoir. Monsieur le sénateur, si la voiture frappe le piéton, il lui faut à tout prix éviter d'être encore plus pénalisé en perdant la vie.

J'ai encore en mémoire le blitzkrieg médiatique made-in-UMP d'il y a sept ans, préalable à l'installation massive de machines à sous radars, qui me rentrait dans le crâne au marteau que la majorité des accidents survenaient sur des petits trajets réguliers (de type le matin en allant au turbin), à cause de banales fautes d’inattention résultant d'un sentiment d'extrême confiance et d'impunité.

Mais, comme disait le regretté Sacha Distel : Y a un moment faut savoir s’arrêter. Le business de la bagnole c’est du sérieux ! Le secteur n'en finit pas de décrocher. Alors, oublions ces années sombres de répression du conducteur. Même si, l'on constate que l'on meurt nettement moins aujourd'hui sur les routes de France, une fois certaines réalités comptables atteintes, les beaux discours républicains on les met en veilleuse quitte à classer les futures victimes dans la rubrique TPT, taux de perte toléré.

Faut pas dégoûter l’électeur consommateur. C’est bien joli les rentrées fiscales mais à force de sucrer le permis à tout le monde et de pruner à tout va, dans ce contexte économique cradingue où les constructeurs nationaux accumulent les invendus à 13.000 euros l'unité, ça décourage le candidat à l'acquisition et ça fait du manque à gagner en terme de TVA.

Sans compter la part à palper par l'état sur les frais annexes (crédit pour la chignole à renouveler tous les deux ans sous peine de passer pour un pauvre, carburant taxé à 80%, assurance, contrôle-technique, réparations, contre-visite, frais de stationnement dans les parcs Vinci, contraventions pour ceux qui ne stationnent pas dans les parcs Vinci, frais de péage et sapin senteur Norauto au rétroviseur central à changer chaque mois). Et qu'espérer de cette inquiétante tendance chez les jeunes qui, dégoûtés par les tarifs du permis au bout du cinquième ratage et effrayés par toutes ces perspectives financières liées à la voiture, abandonnent le projet d'en posséder une ?

Peut-être que le Sénateur Jarlier imagine que le message est passé, que les conducteurs ont saisi. Coincé dans mon sanctuaire en bordure de cette rue métamorphosée en voie rapide, fixant dubitatif un panneau publicitaire pour les journées d'exception Mercedes, je n'ai pas ce sentiment.

Finalement, je force mon destin. Je fais un truc dingue, je traverse la rue. J'évite une Punto thunée jaune poussin en plein remake de Fast and Furious et, au prix d'une bonne montée d'adrénaline, j'atteins enfin le trottoir d'en face.

Tout de même, quelle conquête pour les libertés individuelles que de pouvoir rouler à 56 kilomètres heure en ville au lieu de 50 sans le stress du coup de bâton ! D'ailleurs 71% des français sont pour ! Un tel engouement pour une loi UMP ça se refuse difficilement, surtout à quelques semaines d’un scrutin.

18 comments:

Anonyme a dit…

La machine a fabriquer le consentement a fonctionné à merveille.

Pas une fois (sans exagérer) je n'ai discuté de ce sujet avec des automobilistes, homme ou femme et toute classe sociale confondues, qui ne s'insurgeaient pas lorsque tombait l'amende pour leur petit exces de vitesse (phrase type : et ma liberté ?!).


Tant que les gens ne comprendront pas que la liberté n'est pas dans le plaisir égoïste (qui se caractérise ici par rouler vite, et par conséquent de risquer de décimer un père et enfant mal réveillé..), mais le fait d'avoir le temps de prendre son temps, tout débat restera inutile.

Michel a dit…

2 fois par jours.
1 à 2 heure de trajet selon encombrement.
200 à 300 jours par ans.
Je pose le cul dans ma casserole roulante pour quitter mon petit paradis sur terre dans la montagne et rejoindre comme des centaines de cons qui ont la même idée que moi au même moment mon bureau. Bureau dans lequel j'effectue des tâches que je pourrais effectuer de chez moi sans problème (je suis développeur et je me m'excuserai pas).
Jour après jours, les précieuses minutes de ma vie s'écoulent, alors que je suis coincé dans cette putain de bagnole.
Alors je sais que c'est "mal", mais lorsqu'enfin j'ai un peu de champ libre, passe devant moi et je t'écrase ! La bave aux lèvres et un sourire sadique déformant mon visage.
Voilà à quoi ressemble la vie d'un travailleur auto-mobile.
En fait en ce qui me concerne, c'est pire : je suis motard. Et après avoir accepté toutes les frustrations (en gros paye et ferme ta gueule) que m'impose cette société d'eunuques pro-sécuritaires, je n'ai plus qu'une envie : battre des records de vitesse entre les files de voitures en arrachant les rétroviseurs à grand coup de latte.
Et ne venez pas me parler de transports en commun, c'est pire. J'y passerais presque 2 heures par jour.
Alors je conchie tous ceux qui le cul vissé dans leur fauteuil avec leur intellect de jeune mère de famille soudainement conscience de sa prouesse de pondeuse, viennent me faire des leçon de morale à trois francs. Je n'ai pas inventé cette connerie de société, et que je sache les routes n'ont pas précisément été goudronnées pour que les piétons aient la joie de les traverser avec une poussette.
Alors virez vos culs de là, la route est dangereuse, prenez en conscience, restez sur vos gardes et laissez-moi passer merde !

Constantin a dit…

Une PLACE en CRECHE à Paris ? Comment t'as trouvé ? T'es UMP ??? (joke, hein)

Seb Musset a dit…

a Vincent > L'attitude de l'automobiliste par rapport au piéton est une de ses rares spécificités locales qui font instantanément dire au touriste effrayé : La vache je suis en France !

Dans la plupart des autres pays, on m'aurait laissé passé sans même que je n'insiste.

D'où la nécessité d'avoir des lois dans le domaine (comme quoi je ne suis pas qu'un anarchiste.)

Michel > No future ! A défaut de te croiser sur la route, j'aime l'attitude ! Il faut aller au bout de ses passions, tant pis pour le sang sur les jantes.

a Constantin > Merde grillé.

Anonyme a dit…

bah c est juste pour les elections
Un petit coup sur l insecurite, un petit coup sur les radars.
Faut les comprendre les pauvres UMP, ils ne peuvent pas communiquer sur le bilan economique ...
Quand au racket des automobilistes, il faut etre un bobo parisien pour trouver ca normal. Quand tu as traversé, aucune voiture roulait a 50 (ou tu serais mort).
Donc ou va mettre un radar la ou ca va chiffrer, sortie de patelin desert, si possible le soir quand il n y a personne sur la route
Mais vu ce que rapporte les PV c est pas pres de changer. l etat n a plus un rond et doit donc faire les poches de ses citoyens.
Autrement dit, mesure pour faire voter UMP aux elections et faire oublier que ce sont ces meme elus qui ont institué ce systeme pourri

Anonyme a dit…

@SM,

bin fallait pas habiter Paris, 10 kms de diamétre et plus d'1 heure pour effectuer cette traversée en voiture, légérement un peu moins en transport en commun, géniale, bienvenue au XXIé siècle, tout ça pour déposer sa fille dans une étable (où elle sera en premiére loge pour choper la moindre infection). A la campagne je marche sur la route (de toute façon il n'y a pas tjrs de trottoir:) et les quelques voitures qui circulent nous les entendons arriver et quand je vais à l'étable avec mes enfants c'est pour leur faire découvrir la nature.

Solution, isoler Paris (à partir du périphérique) de tous les véhicules on verra combien de temps vous tiendrez :) Le grand Pari(s) la rigolade vous m'expliquerez comment vous compter vous ravitailler et si vous donnerez un laissé passer aux plombiers, électriciens, chauffagistes, couvreurs, livraisons et déménagements en tout genre, etc...

Seb Musset a dit…

a anonyme > J'ai aussi de bons souvenirs de méchantes accélérations au ras de mon VTT sur les routes de Vendée ;)

Anonyme a dit…

VTT, Vélo Tout Terrain, autant dire le 4x4 des villes :) et je parlais de campagne (les endroits ou il fait bon vive quand la sté de consommation n'a pas encore fait déserter les quelques commerces), pas de station balnéaire attrappe touristes ou citadins :)

Anonyme a dit…

Otez moi d'un doute, ce "Michel", c'est le héros des chroniques comico-tragiques de Séb Musset?

Séb

Vince a dit…

@ Michel...

J'adhère au raisonnement, pour l'avoir en tête suffisamment souvent par moi-même.
Seulement la saine colère peut se diriger contre d'autres que ceux et celles qui ont (et sans doute à juste titre d'ailleurs) la même ou une très approchante.

Comme en physique, deux colères opposées s'annulent (en l'occurence avec du sang sur les jantes ;-)), mais deux colères dans le même sens sont ce qu'on appellerait un bon début.

Michel a dit…

@Vince
T'inquiète je garde ma colère bien au chaud et elle n'est pas dirigée contre les piétons. J'ai grossi un peu le trait, j'aime la provoque. D'ailleurs tu as vu j'ai attrapé un beau poisson anonyme aujourd'hui à 3h41...
Pour devenir chiant je vais plutôt dire que vouloir la liberté et la sécurité est contradictoire. Seb Musset a fait un peu dans la caricature (comme moi). Je comprends son texte comme une façon de réfléchir publiquement, une invitation au débat. Mais il faut se méfier des bigotes qui veulent vraiment imposer leur vision de la bonne morale sur la route. Et pas seulement sur la route. On connait, ou on devrait connaitre (sous ce gouvernement particulièrement) le grand pouvoir de la manipulation émotionnelle de masse en jouant sur l'affliction que l'on ressent pour les victimes. Un enfant se fait écraser par un chauffard => les automobilistes sont tous des salauds qui roulent trop vite... Le Nain lui même ne s'est fait élire qu'à grand coup de raccourcis identiques.
La vie est dangereuse, vous n'empêcherez pas des gens de mourir par accident (particulièrement ceux qui, par accident, n'ont rien à manger...)
J'attends de personnes un peu intelligentes et donc particulièrement de SM, qu'elles fassent place à la rationalité pour constater qu'il existe un juste équilibre entre sécurité et liberté, et que fondamentalement pour se rendre quelque part en un temps raisonnable il faut faire prendre de la vitesse à son véhicule...

Seb Musset a dit…

a Michel > Reconnaissons, et je ne fais pas exception, qu'il suffit de se retrouver derrière le volant, de quelques feux rouges, d'un ralentissement prolongé et de quelques "putain y peut faire attention ce gros con en Twingo !" pour réveiller l'animal qui est en chacun de nous.

Michel a dit…

@Seb
Mais il faut bien laisser sortir la bête de temps en temps, ça ou bruler des voitures, il faut choisir ! ;)

Anonyme a dit…

De toutes façons, les radars n'ont jamais empêché les automobilistes de rouler vite.
Les GPS signalent tous les radars fixes.
Les gens ralentissement bien docilement devant le radar... puis une fois que la boîte grise est loin derrière, ils se lachent.
Et les "bien nés" à grosse cylindrée arrivent à faire sauter les prunes avec une facilité déconcertante.
Et comme le montant de l'amende est le même qu'on soit riche ou misérable, et bien le système de ponctionnement par radar pénalise prioritairement les plus pauvres qui n'ont pas le bras assez long pour faire annuler la contravention.

Cette loi c'est du "tu votes pour moi et peut être que j'arrêterai de te faire les poches".
Si ça suffit à certains électeurs, alors autant donner aussi le droit de vote aux animaux de compagnie.

En tout cas, comme le dit Vincent dans le premier post, beaucoup de gens se méprennent à propos de la définition de la liberté. Quand j'en vois certains aujourd'hui dire que la discrimination est une liberté, j'en viens à me dire que les carottes sont cuites : on ne peut malheureusement plus imaginer une marche arrière sécuritaire sans envisager le pire, tellement les gens sont enclins à se défouler sur plus faibles qu'eux dès qu'ils en ont l'occasion.

Anonyme a dit…

Que l'on soit piéton, automobiliste, parent, célibataire, chômeur, travailleur..., la violence dans nos sociétés techno-industrielles est tjrs la même : systémique. Depuis la révolution industrielle et l'urbanisme nous avons perdu nos libertés fondamentales, inutile de pleurer pour des broutilles, le ciel sous lequel on se pavane est noirci chaque jour de millions d'innocents.

Rafo a dit…

Entendu à la radio il y a quelques jours "Quiconque sacrifie sa liberté pour plus de sécurité ni mérite ni l'une ni l'autre, et n'aura aucune des deux". Benjamin Franklin.
Je découvre les petites phrases de ce Monsieur, Mon Dieu comme elles sont actuelles. Un visionnaire. plus de 200 ans d'avance dans la lucidité... et la continuité (car nul doute que les travers qu'il décrit existaient déjà à l'époque). On ne refait pas le monde.

Seb Musset a dit…

Update 12.05.09 > +5.6% de morts sur les routes en Avril 2009.

Anonyme a dit…

La liberté et la voiture ?
Pardon ?

- Et les multiples atteintes aux libertés pour que le carburant arrive jusque dans ton moteur ?
- Liberté de polluer ?
- Liberté de phagocyter une bonne partie des espaces communs d'une ville (en voie de circulation et en parking) ?

La vraie liberté que je devrai avoir en tant que citoyen, c'est de choisir, si oui ou non je veux financer les infrastructures routières sur ma fiche d’impôt.

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