30 juin 2008

UN CONSEIL

par
Blasé que j’étais. J’avais l’impression de me répéter. Après tout, en face agissaient-ils différemment ?

De gré ou de force, il fallait faire aimer à l’esclave des temps modernes sa servitude. Il fallait le contrôler au bureau, en voiture, dans les cafés, devant sa télé, lui choisir ses disques et comment il devait se les procurer, choisir sa santé, choisir comment il allait vivre, quand et comment il devait mourir.

Le peuple aurait du être réjouit, il avait sa rupture. Coup de massue, il était triste. On lui avait promis Kennedy et des caddies bien remplis, il avait un mini-mussolini et en plus il ne pouvait plus se payer les nouveaux jeux pour la « Wii » du petit.

Le peuple n’était plus composé d’individus mais de sujets que l’on occupait aux rebondissements quotidiens des feuilletons de la communication de crise, entrecoupées d’annonce qui les persuadaient depuis trois générations que la possession garantissait le bonheur et que ce système était non seulement le meilleur mais le seul.

Soudain, sans qu’il ne comprenne pourquoi, le peuple n’avait plus de « pouvoir d’achat ». C’était le moment idéal pour le « grand soir » des possédants et du gouvernement qui les représentait. Celui-ci allait pouvoir y aller franchement, libéraliser le "hard-discount" et contrôler les médias.

Le peuple serait ainsi immobilisé sous le poids d’une nourriture qui le rendrait gras, sa réflexion atrophiée par un gavage continu d’informations inutiles, de polémiques stériles qui le conduirait à la mort par malnutrition et intoxication crétine juste au sortir de sa vie productive.

Au quotidien, le combat permanent du « Club » était de taille : Annihiler chez les sujets toute trace de pensée autre que celle essentielle à la bonne continuité de cet état de fait.

Cela fonctionnait.

Ils s’égosillaient de haut en bas : "Pouvoir d’achat, pouvoir d’achat !" Cette chorale à toute heure de la journée, je n’en pouvais plus ! Elle sonnait à mes oreilles comme la preuve définitive de l’impasse dans laquelle s’était fourvoyé l’occident. C’était l’hymne transnational de la fin d’un monde, le dernier tube de l’eurovision.

Personne ne fait la révolution, les révolutions se font avec des hommes. Qui étais-je pour donner des conseils moi qui ne savais pas différencier le bleu, le blanc et le rouge ? De conseil, ce matin je n’en avais qu’un, préalable à tous les autres, point de départ de tout espoir, condition minimum de tout changement :

28 juin 2008

POURQUOI LE SARKOZYSME A DE BEAUX JOURS DEVANT LUI (sauce barbeccue)

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Je m’attendais à une purge de la plus grande espèce. Il en fut ainsi mais mieux encore. Cette soirée en milieu Bi-Bo (bien bourgeois) aura été riche d’enseignement politique.

J’y allais pourtant à recule-talons, appréhendant cette soirée les bras fermés. Ma moitié m’avait entraîné dans quelque guet-apens nocturne à ciel ouvert entre gens arrivées comme il le fallait. Chaque année, avant leur grande transhumance sud-estivale vers des résidences plus secondaires, les gens du cercle s’encanaillaient entre eux à rôtir sur braise quelques merguez avant de se dire adieu. La sauterie était pour certains d’entre eux, le pic de leur année sexuelle.

Les retraités, et ceux qui l’étaient presque, avaient beau porter la montre qui brillait comme une vraie et descendre de 4X4 rehaussés en plateforme pétrolière, ils portaient beau le costume Celio et la robe à fleurs. Sur le gazon monotone certifié NF, les jeunes "seniors" déblatéraient perte de pouvoir d’achat, verres de kir et dernier Gps portatif portés en bandoulière. J’eux un moment de flottement devant ce parterre de maladroites mondanités sur fond de Marne au crépuscule. La faute sûrement aux effluves mêlés de parfums pour ménopausées.

Au connaromêtre, je notais que ces dernières écrasaient la concurrence.


- Ah non tu es folle ! Répliqua cette épouse. « Picard », j’ai plus les moyens. Maintenant, j’envois mon aide à domicile au supermarché.

- Au supermarché ! s’effarait l’hôtesse de maison dans son ensemble Gerbirama, originellement conçu pour draper le centre Beaubourg.

- Oui au « Casino »*.

- Ouf ça va !

J’errai désenchanté entre les coupettes de mousseux et les macarons pure imitation « Des racines et des ailes » en me morfondant sur le manque d’audace de mon argumentaire anti-sarkozyste.

Pire ici, en milieu pré-gériatrique de moyenne banlieue dont le score classique de n’importe quel parti pourvu qu’il ne fut pas de gauche atteignait 85% au deuxième tour de chaque élection, toute tentative de contre-discours à la bonne pensée gouvernementale me vouait, au moins en idée, à me substituer à la dernière merguez dans l’esprit des satisfaits.

J’en resta à l’alcool et à quelques sourires.

Et puis je dois l’avouer, j’étais assommé par cette semaine de chaleur et d’offensive législative d’un président tirant tout azimut jusqu'au point hallucinogène de choquer Thierry Mariani.
Le stagiaire-dictateur avait enchaîné en quelques jours des rafales de mesures unilatérales, liberticides, anti-humaines en un mot totalitaires, au point que cela en était aberrant pour une partie de ses proches, ce qui avouons-le est un signe inquiétant.
Je m’étonnais donc, dans ce G8 de quartier, de la persistance crasse du soutien de la politique gouvernementale actuelle. Pourquoi, l'aiment-ils encore? Question traditionnelle à laquelle je réponds souvent par la drogue.

Noyant mes convictions dans la boisson, j’assistais hagard à la polémique du soir relative au parasitisme des chômeurs "si habilement disséqué tu verras dans le dernier dossier du Fig mag". Soudain, pour une banale question de taille de Monte-Cristo, la conversation dériva sur le ridicule montant des retraites respectives**.
Il fut vite acquit que, là aussi, c’était la faute aux chômeurs eux-mêmes manipulés par les enseignants à la solde de France 2 et qu’il fallait mettre tout cela en zone de rétention où ils tiendraient compagnie aux sidaïques et que notre argent serait mieux dépenser.

Au travers du graillon, s’esquissaient des réponses.

Je compris que :

1 / Les retraites de ces multi-propriétaires, bailleurs, spéculateurs, assurancés-vie, porteurs de part et gestionnaires avisés, n’étaient parfois que de légers compléments de revenus, type argent de poche.

2 / Eux, si prompt à dénoncer les injustices libérales dont étaient coupables les petites gens, ne se montraient pas peu fier de contourner la loi, eux, « les moyens plutôt supérieurs» qui « bossaient dur et s’étaient construits eux-même un capital » (que dis-je un capital, un royaume merveilleux). Attention, en presque toute légalité.
Ils avaient même le sentiment que leur poulain, le président, les encouragerait personnellement s’il savait. D’ailleurs, il le sait. Et ces électeurs pas à plaindre, cons tout terrain mais garantis pointus question fric, savent qu’il sait. Accord tacite de mutuelle pérennité renouvelé chaque quinquennat par un vote.

Madame Claude 64 ans, profession épouse de patron de PME, me donna malgré elle, en toute décontraction avec une pointe de vantardise, la réponse définitive.

Elle qui avait travaillé en tout et pour tout six ans dans sa vie, à bientôt soixante-cinq et, par un jeu de ruses mesquines dont est friande mon entourage d’un soir, elle allait cumuler une retraite aimable et une rémunération pour emploi fictif grâce aux nouvelles dispositions gouvernementales pour "l’emploi des seniors" qui tombaient à pic.

- A trois mois prés, ça marchait pas ! Pouffa t-elle

- Joli cadeau d’anniversaire. Répondit l’autre.

- Oui et en plus je vais être grand-mère.

Malgré l’avalanche des mesures impopulaires des dix derniers jours, j’avais devant moi une belle brochette d’aficionados requinqués par la politique présidentielle de la semaine. Pas un n’avait moins de soixante ans.

Et pour les autres, qu’ils soient sans papiers, chômeurs, sdf, précaires, stagiaires, jeunes, de gauche, d’extrême gauche, ceux à enfermer sans justification, pequenauds de province, analphabètes ouvriers ou crétins de smicard ? Quels autres ? Des coupables, c’était certain.

Moi aussi, j’étais certain. Finalement grâce à eux, j’avais retrouvé la pèche et des idées bien claires. Quoique que titubant sévère, craignant pour ma crédibilité, je préférais ne pas les exprimer.

Cette génération n’en finira jamais de me foutre la gerbe. Inconsciente de tout sauf de son pré carré, de ses fortifications pavillonnaires et de ses petites habitudes rentières, elle ferme les yeux sur l’infamie pour les autres, en se cramponnant à son confort et ses certitudes. Enfin, j’en aurai bien profité, me pétant le ventre de champagne et de gigot.

Sachez que le combat sera dur et qu’ils sont tenaces. Sachez qu’ils représentent les deux tiers du vote Sarko, qu’ils sont majoritaires dans le corps électoral et encore plus nombreux en 2012.


* Notons quand même que les temps sont durs pour tous. Le « Casino » aux yeux d'un petit- bourgeois c’est comme un petit-bourgeois aux yeux d'un riche : une infamie.

** dont le niveau moyen individuel équivaut à la louche à sept salaires de stagiaires.

27 juin 2008

BREVE DE CAMPAGNE (loin des soldes et pourtant...)

par
Palme du cynisme publicitaire à Castorama dont le gros du chiffre d’affaire fut constitué ces trois dernières années par les primos-accédants soucieux d’optimiser, d’agrandir ou de retaper leurs royaumes à traites.

A l’approche de l’été, face à la baisse du pouvoir d’achat de son cœur de cible, l’enseigne de bricolage titre en une de son catalogue de soldes :

« Cet été, cap sur la maison »

Tu m’étonnes.

Fin de connexion. je m'en retourne au combat à mains nues, en pleine nature, avec le passé simple.

P.S : jamais je n'aurai cru qu'il y eut une connexion wifi ouverte en pleine campagne. Le délire sécuritaire épargne encore quelques campagnes.

25 juin 2008

QUAND LES MOTS REVELENT LES HOMMES

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Bel exemple accidentel de sémantique libérale relevé tel quel et sans plus d'explications dans la colonne faits-divers du Figaro en ligne :

« United Airlines supprime 950 pilotes ».

Encore un génocide ignoré.

24 juin 2008

CETTE FOIS C'EST LA BONNE

par
Carla Bruni, comme si de rien n'était. Le tranquillisant parfait de vos fins de mois difficiles...
La presse est déjà emballée, les auditeurs témoignent :

"Je l'écoute en boucle !" Christine Lagarde

"Même avec un paquet de nouilles ED, c'est vraiment pas cher !" Luc Chatel

"Achetez-le, il faut soutenir l'exception française !" Christine Albanel

GRISE ANATOMIE

par
J’aurais pu écrire qu’aujourd’hui c’était fête, que j’avais sorti la voiture. J’aurais pu ironiser sur le fait que vraiment j’abusais : Déjà j’avais mangé de la viande la semaine dernière ! Malheureusement, je n’en avais pas mangé.

J’aurais pu faire mon matheux populo à la station de service en constatant que merde, y a trois semaines le litre de gasoil était 10% moins cher et que c’était déjà 30% de plus qu’il y a six mois ! J’aurais certainement pu m'attirer la sympathie des pompés et récolter quelques encouragements spontanés. Mais, j’ai ravalé ma rancœur en m’estimant heureux d’avoir encore pu claquer 70 euros, chérissant l'idée que l'essence du bonheur ne réside pas dans le prix des carburants. Tout de même, j’ai gobé un de mes trois abricots me sentant un tantinet découragé, presque écœuré. On me l'avait conseillé, il fallait être constructif. Alors j’ai repris le volant, tout en radio, pensant que l'idée viendrait.

En moins de dix minutes, j’y ai entendu les échos avancés de la fin d’un monde :

- Un fils de milliardaire affirma que les chômeurs étaient des parasites sociaux. Sa diatribe fut suivie d’appels d’auditeurs chômeurs d’accord avec les positions de ce rentier de l’industrie dont au passage le seul client est l’état français.

- Entre l’annonce de deux faits-divers, un gentil attaché de presse glissa imperceptiblement que l'humaniste gouvernement rendait obligatoire dès le 1er juillet et dans chaque voiture le gilet fluo et le triangle de signalisation, parce que "une vie humaine c’est du sérieux" et qu'une bonne récolte de contraventions, c’est encore mieux. A 175 euros le ticket pour défaut de gilet, ça paiera quelques robes de galas à Rachida.

- Pi-wi Chatel et T-Fou Lagarde m’apprirent dans un rigolo duo que j’étais riche, que tout allait bien et que tout irait encore mieux demain. La farce était colossale mais elle passait.

- On m'inquiétait ensuite. Mon président connaissait lui aussi des difficultés, à calmer Carla dans les médias, qu'elle était rebelle la gauchiste. Aujourd’hui ça allait, le couple pipeau avait la pèche, il était en Israël. Sur qu’au moment où tes compatriotes n’en croient plus leurs yeux, faire le péteux à la Knesset c’est essentiel.

- Un roboche polémiste m’informa enfin que le gouvernement, actif et coordonné, planchait « avec responsabilité » sur l’instauration obligatoire des détecteurs de fumée dans chaque domicile. Enfin on y venait : plus le droit de fumer chez soi. Elle était bien cette droite décomplexée, elle pensait à moi. Tout de même de quoi je me plaignais : j’avais encore un chez moi.

- Le tout fut interrompu par un spot publicitaire à 4 million d’euros. C’était encore le gouvernement qui, avec la voix douce de la speakrine d’Arte, justifiait ses décisions passées en terme de pouvoir d’achat. Ah bon, Arte existe encore ? Ca ne vas pas durer.

- Enfin, le roboche attaqua la polémique du matin. Il me souffla que les malades de longue durée coûtaient trop cher à la Sécurité sociale et que le gouvernement songeait à ne plus les rembourser intégralement.

Dans un éclair de radar automatique, l’idée me vint enfin pour renflouer les caisses déficitaires : S'il y avait de grands malades à supprimer, il fallait commencer par ceux qui soutenaient encore ce gouvernement. On ne pouvait décidément plus rien pour eux.

Le spot sympa de l'état à 4 millions :


La version "suédée", rejetée par Thierry Saussez :


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