20 août 2011

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Trois films de droite ?

C'est samedi. Reprenons la chaine lancée par Sarkofrance, en la pervertissant un peu. Partageons notre avis sur blockbusters de SF récemment découverts (avec un plaisir coupable limite maso sachant que je n'allais au fond pas aimer ces grosses machines) dont deux au moins furent l’objet d'un plébiscite contemporain (générant en recettes plus que le PIB du Sierra Leone).

1 / Avatar
de James Cameron (2009)

Je me suis fait violence mais j'ai enfin vu le "film culte" qu’il fallait voir depuis deux ans. Je n’ai pas ménagé mes efforts tant le baba au rhum (dont la tonalité et les couleurs dominantes ne sont pas sans rappeler les moquettes épaisses kakis-fuchsias à bananes bleues des pires casinos-hotels de Las Vegas) m'était indigeste dès la bande-annonce. (J'ai traité de beaucoup de choses sur ce blog, mais là je vais vraiment me faire des ennemis).

Commençons par souligner la seule qualité du film : sa réalisation. Malgré la débauche d'images de synthèse (après les types qui font du touche-pipi avec les arbres, la deuxième chose qui me rebute le plus dans ce monde ce sont les images artificielles), la réalisation n’abuse pas des effets de cadrage « impossibles » propres à ce genre de technologie, concentrant ses efforts à crédibiliser un environnement imaginaire de BD SF. Voilà c’est tout. Ce qui est déjà énorme et différenciera au final un cinéaste sachant cadrer comme Cameron d’un grossiste en guano comme Besson.

Pour le reste, un gros budget ne rachète pas un script slim fast (en résumé : Pocahontas meets Star Crash avec auto-pompage des précédents Cameron). Dés l'intro, j’ai l’affreux sentiment, non démenti au fil des 140 minutes, d’être englué dans le final du director's cut d’Abyss (no, don't watch it). Surnagent dans ce pataquès au sirop fluo deux bonnes scènes d’action : les GI qui font péter l’arbre magique (je sais : ça sonne foire à dix balles chez Toy's R US mais c’est le scénario, j’y peux rien) et le fight final entre le GI à carcasse métallique avec mitrailleuses et les schtroumpfs sous anabolisants qui vont lui mettre misère à coups de fléchettes en bambou. Je n’évoque pas non plus cet odieux travers de l’ultraellipse (mais je suis un vieux con) voulant que l’on n’ait même plus à expliquer le pourquoi du comment du transfert de conscience d’un corps à l’autre tellement cela coule de source pour une audience liquéfiée par deux décennies de jeux vidéos (alors qu'on n’est pas foutu de trouver un accord européen sur les dettes souveraines).

2 / Inception
de Christopher Nolan (2010)

Déception dès les premières minutes. Je lui donne bêtement un bénéfice du doute qu’au terme de 2h20 de projection (faites court les gars) et d’une migraine carabinée, je regretterai. J’ai du mal avec le cinéma mainstream contemporain fortement influencé dans le montage, les scripts et les prises de vue par Ubisoft, Electronic Arts et Les Experts (avec casting international pour une meilleure pénétration de la promo locale et l'aussi sempiternel qu'inutile passage parisien pour bénéficier d'une énième niche fiscale financée par tes soins). Je rêve d’un film sans rêve dans le rêve, ni monde parallèle en 3D et exempt d'avatar esthétique, un film au ras des scandales et urgences immédiates de notre putain de vie (et à la Ken Loach pas à la Klapisch). Dans le merveilleux monde du mainstream, visant d'abord l'ado générique des centres commerciaux du village-monde, la simple réalité devient l’exception. Comment dès lors, dans cette cécité sur le présent, provoquer un minimum de conscience sociale ou politique, spécialement lorsque le tout est noyé dans un sound design à rendre sourd dès 12 ans ?  On ne peut pas. C’est fait pour ça. On y va pour ça. Calamité supplémentaire : succédant à la bamba triste, la BO d'Hans Zimmer tapisse de son violon stressé la moindre de mes pensées amères.

3 / Repo Men
de Miguel Sapochnik (2010)

Moins bien réalisé que les deux précédents (enfin pas pire que 95% de la production actuelle) mais de loin le plus intéressant. Les 20 premières minutes font craindre le pire. Je me demande alors comment Forest Whitaker et Jude Law ont pu s'embarquer dans cette galère gore ne récoltant qu’un étrange -12 là ou le moindre Gaspar Noé (Bibifoc au niveau du body count) est affublé d’un -16 ? Mais, finalement une bonne surprise : le récit est l'écho, comme tout bon film d’anticipation, de notre présent qui part en torche dans l'inhumanité la plus complète. Le pitch. Dans un futur proche, les humains sont comme les voitures : on ne les répare plus, on change directement les pièces. Avec les ravages de la sédentarité, de la malbouffe et des coupes budgétaires dans la santé, on imagine aisément que d'ici un demi-siècle les organismes pourris à 25 ans seront légion. Et, dans le futur comme maintenant, avec les fauchés fichés, on gagne bien plus à la traite qu'à la vente au détail. Chez Union (traduction anglaise : syndicat), unique marchand d’organes artificiels, on encourage les VRP à fourguer de l'organe vital à crédit revolving. Devant l’insolvabilité croissante des surendettés de la santé, Union se dote d’une armée de Repo Men (récupérateur) chargée de se servir sur la bête en lui arrachant les organes (cœur, foie, oreilles, appareil génital...). Ce qui nous gratifie de belles scènes de boucherie Sanzot. Chez les Repo men, on ne se pose pas plus de cas de conscience que chez les endettés. Un siècle de crédit a modelé les consciences. La loi du créancier est prioritaire. Dernière injonction d’huissier faisant foi (ou poumon), le repo man peut trucider à chaque coin de rue dans l'indifférence générale. La suite, tu la devines : le chasseur va devenir gibier, car personne n’échappe à la carnassière logique du crédit. Personne ni  rien, comme le conclut le récit dans un ultime retournement bien déprimant. La mise en image se cantonne à esthétiser les torrents d'hémoglobine et autres shoot'em up testostéronés ciblant le Kevin à popcorn (n'accablons pas la rea, il s'agit probablement d'une exigence de la production à l'issue du 17e screening-test). Proche d’Artificial Intelligence, mais revue et corrigée façon Verhoeven à l'aune de la crise des subprimes, on n’ose imaginer ce qu’aurait fait Kubrick d'une telle intrigue


Je passe le billet aux autres blogueurs...

16 comments:

Raskolnikov a dit…

j'ai trouvé Avatar disons pas mal (je précise que je n'aime pas les jeux vidéos), ca m'a rappelé (un peu) l'excellent "Princess Mononoke" de Miyazaki..

cela dit, il y a des passages un peu gneu gneu, lents et chiants (ceux à proximité des arbres), il y a beaucoup de naïveté, les rôles des méchants/gentils de service sont trop carrés(là ou les personnages de Miyazaki sont tantôt alliés, tantôt ennemis..).

ce qui ma plu le plus c'est le contraste: fable sur la nature/SF sur fond de prédation énergétique des compagnie tentaculaires.

Politizen a dit…

En fait tout dépend ce que l'on va faire au cinéma.
Car "un film au ras des scandales et urgences immédiates de notre putain de vie", bon, c'est pas terrible pour s'amuser ! Mais a-t-on encore le droit de s'amuser dans ce monde cruel? Bonne dissert, Dans quatre heures on ramasse les copies...

Gildan a dit…

J'ai vu Avatar au Cinéma à sa sortie avec des lunettes de folie, que tu les rends à la sortie !
Les deux autres à la télé ...
Et bien, finalement, j'aurais bien aimé voir Whitaker Et Law au cinéma. C'est tout à fait mon ordre de choix : Devant et bien loin devant : "Repo Men" (excellent...peut être la fin ...)
"Inception" nul de chez nul ... à jeter à la fontaine (Et oui c'est là !)
"Avatar",quand je l'ai vu c'était à Noël, à Marseille ... une bonne ambiance quoi !
Mais quand je vois certains potes qui en font leur film culte !!!????!!!! Je dis non !
Je ferai un billet bientôt ... m'en manque un !
:)

Anonyme a dit…

Mo j'ai trouvé avatar juste un peu trop inspiré d'une bande dessinées appelé "Aquablue".

Sinon Nolan moi j'aime bien ses films en général.

Avatar , ce qui m'a le plus choquer ce n'est pas le film en lui même, ce sont les médias qui ont réussi à faire croire que la révolution du cinéma commence avec lui. En même temps, arrivé à faire payer 3 euros de plus une paire de lunette pour voir trois effet reliefs, faut être bon. Personnellement, ma salle de ciné megaupload m'a pas couté bien cher.

Sinon, à moins d'être un cas exceptionnel, on peut cultiver son esprit, s'interresser à l'économie du monde, ne pas vouloir plus que son voisin, et s'amuser aux jeux vidéo. Même si les débiles y jouent.

au plaisir.

kejadenn a dit…

merci.Merci.Impossible de critiquer ce navet primaire sans risquer la mort (par flèches). Le "regardez sur la photo satellite" m'a tuer !

Zcomme a dit…

pour Inception total agree j'ai trouvé cela gavant, trop lourd, pas crédible bref ennuyeux au bout du compte.
Pour Avatar, cependant je ne te rejoins pas, car à priori j'avais exactement les mêmes réserves que toi, étais assez écoeuré à la vue des photos et teaser, la "bleusaille" n'étant pas très crédible et plutot éceourante. Pour finir je le charge (fuck hadopi!) et au final plutot surpris de me prendre au jeu et d'y croire.
Curieusement j'ai trouvé cela...beau! gluant parfois certes mais bon on sait que c'est un blockbuster US et pas un Wong Kar Waï...Mais surtout j'ai trouvé que s'y glissait l'air de rien un "discours" tout à fait critique sur l'esprit US post 9/11, c'est clairement une sorte de films d'indiens contre les méchants cowboys. Un hymne simpliste à Mère Nature etc... Bref sans se leurrer sur la nature du "produit", je l'ai pris pour ce qu'il est un film pas culte mais pas à chier non plus. Si je l'avais réalisé, aurais-je honte de le revendiquer? je ne crois pas...

ZapPow a dit…

Pharaon, qui s'ennuyait ferme, car on lui avait déjà raconté beaucoup d'histoires, dit à son fidèle scribe : "Scribe, va de par le vaste monde, visite toutes les contrées, et revient me dire combien d'histoires il y a dans l'univers." Le scribe partit, et ne revint que de longues années après. Pharaon le reconnut, car les voyages entretiennent la jeunesse (alors que lui était méconnaissable), et l'accueillit avec joie. "Alors, Scribe", dit-il, "combien d'histoires y a-t-il dans le monde ?" Et le scribe répondit : "Douze, Ô mon roi, il y a douze histoires dans le monde."

Cinéphiles, je ne saurais trop vous recommander le blog d'un odieux connard :
http://odieuxconnard.wordpress.com/

Lire, ici, sa critique d'Avatar :
http://odieuxconnard.wordpress.com/2009/12/18/avatar-un-film-titanesque/

Celle d'Inception :
http://odieuxconnard.wordpress.com/2010/07/28/linception-qui-confirme-la-regle/

Entre autres…

romain blachier a dit…

j'ai fait la chaine aussi mais sans trop omprendre si il fallait mettre films de droite ou daubes. Du coup en zique j'ai fait de droite, en ciné daube. Quoi que Rocky cumule.

Mire Adore a dit…

Je partage absolument ton avis sur Avatar et Inception
(J'aime beaucoup pourtant le Prestige de Nolan)

je n'avais jamais entendu parlé de Repo men, tu m'as donné envie de le voir.
Surement meilleur que les deux autres.

En tout cas, a propos de AVATAR, Merci d'écrire publiquement ce qu'il est "impossible" à dire en société sans se faire lyncher (pas david, hein)

Seb Musset a dit…

@romainblachier > Comme dirait Balboa à Adrienne à la fin du premier Rocky : "Euuhhhaaaaa, l'important c'est de participer."

Pullo a dit…

J'ai aimé Avatar, mais je comprends parfaitement pourquoi Seb l'a détesté.

En revanche, je ne serais pas aussi sévère sur Inception, que je trouve meilleur et plus intéressant (pour son pitch) qu'Avatar. Le seul reproche que je fais au film, comme l'Odieux Connard cité plus haut, c'est le côté très réaliste des rêves, à tel point que c'en est parfois ennuyeux (les personnages ne font jamais de rêves érotiques ?). Certains justifient ça par le fait qu'il ne faut pas bousculer l'inconscient des personnes ciblées par les "incepteurs" quand ils s'introduisent dans leurs rêves. Admettons. Et puis, n'oublions pas que Christopher Nolan n'est pas Terry Gilliam (cf. les Aventures du baron de Münchhausen et l'Imaginarium du Dr Parnassus, qui question délire et fantasmagorie, se posent là).

Quant, à Repo Men, j'avais l'intention de le voir, le billet me donne encore plus envie.

jazzman a dit…

comme le conclut

vincent a dit…

Hehe, d'accord avec Politizen : tout dépend de ce qu'on va faire "au cinéma".

Pour ma part, j'avoue qu'au-delà de l'histoire mise en scène, les prouesses techniques me plaisent aussi (j'suis ingénieur...)

Inception, long et avec une portée bien faible (on en sort pas grandi : mais bon, j'ai même payé pour aller voir Transformers - le 1er, avec Megan Fox - donc j'assume, parmis mes gouts cinématographiques, mon gout pour le divertissement facile voire infantilisant...) Mais la scène du corridor, et connaitre sa réalisation, j'ai bien aimé (http://www.vincentabry.com/inception-la-scene-du-corridor-12608)

Pour avatar, je ne suis pas du tout connaisseur en prises de vue, mais le dispositif créé par Cameron pour ce film peut expliquer le 'pourquoi'. Celui-ci était à la hauteur des ambitions de ce mégalo : le morphing des acteurs, la génération des décors, étaient fait EN TEMPS REEL. Y'a un documentaire qui traine sur le 'making off' sur youtube, où l'on voit les acteurs sur des ptedoractyles de bois, et Cameron qui se déplace avec une tablette pointée vers eux, et ce qu'il voit sur sa tablette (avec l'angle de vue selon où il se place par rapport aux acteurs), c'est les schtroumpfs, le décors de la forêt, les bestioles volantes... Impressionant!
Un très très beau Pocahontas (que je n'avais pas réussi à voir en entier, lui)

Repo Men, une très bonne idée de contexte pour l'histoire, mais réalisation moins bonne, et un peu déprimant effectivement. J'avoue que sous l'oeil d'un Kubrick, ça aurait pu être excellent !

Heureusement que les goûts et les couleurs se disputent ! ça ne m'empêchera pas de repasser sur ton blog, dont j'adore les articles, et dont j'utilise la blogroll tous les jours :)

Mikael le Fou a dit…

Avatar est tellement de droite qu'il a été incendié aux States pour son coté ultra pro indigènes...
Certains blogs Néo-Con ont pété un câble devant le succès de ce film.

On peut clairement voir une critique de l'Empire quand le Bad Ass (caricaturale il est vrai comme tous les personnages du film) fait son speech d'intro.
Les volets et la télé derrière lui formant en ombre chinois la bannière étoilée.

Les débats sur les forums ont été très violents concernant ce film.
Il ne faut pas se baser sur l'avis des médias la dessus.

En ce qui me concerne, je l'ai vu en salle et l'ai trouvé vraiment très réussi... C'est un blockbuster, il ne faut pas lui demander d'être révolutionnaire sur le fond.

Spop a dit…

Avatar ne vaut pas un millième du plus nul des Star Trek, ou Dune ou d'autres
Les cas de conscience du Capitaine Picard, et ses débats philosophique avec The Q font reléguer Avatar à un film des Charlots.
Moi c'est la réplique du chef militaire qui m'a tuer "Tuez-les tous, je veux être rentré avant le dîner", mouah ha ha ha ha !o

Seb Musset a dit…

@spop > Star trek qui, au passage, a eu le droit à un très bon remake. Comme quoi.

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