26 septembre 2018

L'autre problème avec Macron l'androïde

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L'autre problème avec Macron l'androïde est qu'il n'a rien à perdre. 

A l'inverse de nos hommes et femmes politiques traditionnels qui ont une trajectoire de terrain et une carrière ancrée dans le "sérail" (on le leur a assez reproché) et dont la moindre décision est influencée par le coup d'après et leur futur personnel, Macron est hors-sol politique. C'est une boutique éphémère construite autour d'une opportunité (la médiocrité ambiante) à l'aide d'un plan com' efficace. Avant d'être président : il n'a pas été élu, il ne sera pas plus après. L'imagine-t-on se contenter d'un strapontin au Conseil Constitutionnel ?  A l'instant où il ne sera plus président il traversera la rue du faubourg St-Honoré et on lui trouvera un siège confortable de consultant en optimisation de rienabranling (avec Golden welcome inclus pour service rendu à la finance) dans une banque planétaire quelconque. Pour la gloriole, il continuera aux quatre coins de la planète des messes TedX à la sauce Ron Hubbard sur les techniques d'abrutissement de masse.

Pour ces mêmes raisons, Macron n'intègre pas les conséquences personnelles de son impopularité croissante. En d'autres termes, votre avis c'est comme nos vies : il s'en branle. Nous sommes son stock. Ajoutons à cela que Macron est le genre de pragmatique radicalisé qui serait capable de rajouter son nom en bas de la liste du grand plan social national histoire de faire quelques économies de plus.

La politique de restriction budgétaire, de libéralisation générale et d’annihilation du service public se joue sur 30 ou 40 ans et pas un quinquennat. Chaque président y va depuis deux décennies de sa réforme et de son recul, mais tous vont rigoureusement dans la même direction. Le reste n'est que cosmétique, une question de style personnel. Avec Macron vous avez juste élu la continuité en plus extrême, la ligne dure, la version No Future, en marche rapide vers le mur.

24 septembre 2018

Prince et la leçon de piano

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On peut mettre à part l'édition Purple Rain Deluxe de l'an passé, le 21 septembre 2018 est distribué le premier réel album posthume de Prince, Piano and a Microphone. C’est en apparence un choix déconcertant de la Warner que d’avoir exploité le contenu d’une cassette audio d’une session au piano de Prince dans son home studio en 1983 pour en faire un album. Après tout, c’est le genre de choix improbable que Prince aurait pu faire.

A l’écoute c’est la claque. On y est. Force du toucher, précision de la voix et justesse dans la dinguerie, malgré le packaging l’album est tout sauf lugubre, c’est un brillant aperçu de la créativité et de la maîtrise du jeune Prince. Dur de ce dire que ce mec n’avait que 25 ans quand il balance sans une fausse note 30 minutes d’improvisation au piano en mêlant chant traditionnel, titres inédits, reprise de Joni Mitchell ou ébauches de futurs hits. 


Ce type a passé sa vie à travailler la musique et ça s’entend déjà à 25 ans. Le contenu était certes connu d'un grand nombre de fan, l'enregistrement pirate de cette session circulant depuis une vingtaine d'années mais pas dans une aussi bonne qualité. Le titre de l'album reprend le nom de l'ultime tournée (également au piano) de Prince où pour la première fois il revenait sur ses jeunes et cette année charnière de 1983. Il était alors à la veille de devenir une star planétaire.

Le plus dingue c’est de se dire que des milliers d’heures de la sorte nous attendent et qu’il n’y aura pas assez d’une vie pour les apprécier.


20 septembre 2018

Pourquoi Macron s'attaque-t-il aux retraités ?

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"A l’augmentation de la CSG, entrée en vigueur le 1er janvier et non compensée pour 60 % des retraités, est venu s’ajouter un quasi-gel des pensions pour 2019 et 2020, annoncé fin août par le premier ministre, Edouard Philippe." Le Monde, 19.09.2018

S'attaquer aux retraités est une ligne de code comme une autre de la présidence Macron.

Les aides descendantes des "seniors" vers leurs enfants et petits-enfants compensent en partie, pour certains, jusqu'à tard dans la vie des salaires trop bas ou des aides sociales trop maigres.

Assécher les prestations sociales d'un côté, réduire les aides familiales et inter-générationnelles de l'autre : la ligne de code gouvernementale est d'une cohérence implacable. La conséquence,ou l'objectif, de cette prise en étau : contraindre le quidam, nous, à traverser la rue, pour accepter n'importe quel boulot à n'importe quel prix.

Si cela s'inscrit parfaitement dans sa logique d'austérité comptable, politiquement c'est suicidaire. En s'attaquant aux retraités, la macronie fait peut-être sa plus grosse connerie.
 

17 septembre 2018

Le président logiciel

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Je dois m’incliner. Je voyais Macron  comme un conseiller clientèle d’organisme de crédit avec un peu de bagout, bref un petit con d’HEC, ayant fait option théâtre et un Mooc "scientologie et dynamique de groupe", qui serait balayé comme un papier gras par le vent de la première contestation. Vous avez en fait élu ce qui se fait de plus redoutable en matière d’intelligence artificielle. 

Macron est un androïde avec une gouvernance logicielle (et un petit plug-in cynisme) dont le principe algorithmique est la réduction budgétaire aveugle. Margaret Thatcher dans le corps de Daniel Craig.

On le voit dans la moindre de ses mesures, et désormais le moindre de ses propos :

Peu importe si le nombre d’élèves par classe explose. Virons 1800 profs pour une "meilleure gestion".
Peu importe tes études : tu feras ce qu'on te dit (Parcoursup).
Peu importe ton boulot : tu dois en avoir un.
Tu veux du travail ? Traverse la rue
Peu importe ton métier : ordre t’es donné de te reformer en continu pour t’adapter au marché.
Peu importe la cause commune, le collectif et encore moins l’intérêt du plus grand nombre : dans la start-up nation chacun doit devenir comptable de sa destinée, et tout rapport à l'autre se doit d’être facturé.
Peu importe le citoyen : nous devons être des concurrents.
Peu importe si tu en meurs : il faut rationaliser.
L'humain n'a aucune place dans le système d'exploitation Macron. Tout y est binaire. Une logique de 1 et de 0. Tu dois rentrer dans une case, peu importe ton désir ou ta personnalité.

Vous avez élu Terminator en petit costume de comptable. 

Mais le pire n’est même pas là car, vous savez quoi : Macron n’est pas la cause de nos malheurs.
Il est la conséquence directe de nos renoncements. 

Avec un androïde au pouvoir suprême, un problème majeur se pose à nous autres humains : rien ne sert de discuter avec une machine. Le combat est perdu d'avance.

21 août 2018

S’y retrouver dans les 23 albums Post-Warner de Prince (1995-2010)

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Avec la "libération" de 23 albums de Prince sortis entre 1995 et 2010 et jusque-là inédits sur les plateformes de streaming (et la plupart introuvables dans le commerce), ceux qui ne connaissent pas l'étendue de l’œuvre de Prince après 1995 (après les années de hits, et un divorce laborieux avec sa maison de disques Warner) ont une chance assez dingue : Ils vont pouvoir découvrir des albums aussi riches et différents que The Rainbow Children, The Truth, One Nite Alon" ou Crystal Ball en une journée. J'avoue que je les envie. Devant cette profusion, un petit audio-guidage s'impose. Commençons donc la série avec le premier album de la seconde partie de carrière de Prince : The Gold Experience (1995). 

[1/23] THE GOLD EXPERIENCE ou le retour gâché

« All that glitters ain’t gold… »
 
L'album devait être son "Purple Rain 2" et a été fusillé à la fois par la Warner, sa maison de disques n'ayant pas trop apprécié ses récentes émancipations discographiques sur d'autres labels et sous d'autres noms, et Prince lui-même qui s'est comme souvent lassé du projet (la sortie a été bloquée durant 2 ans). Éclectique, nerveux et inspiré : Gold Experience est le parfait album pour commencer à écouter du Prince, on y retrouve un peu de tout ce qui a fait sa marque audio dans les années 90 : des ballades électriques calibrées sex (Shhh, Eye Hate U), une touche de rap (Pussy Control, Now), de rock (Endorphine Machine), du funk clintonien (Billy Jack Bitch) et des morceaux un peu plus dénudés (Shy)


Titres favoris : Billy Jack Bitch, Eye Hate U, Shhh
Le Sachiez-Tu : On y entend brièvement Ophélie Winter et Lenny Kravitz.


[2/23] COME ou quand Prince se dédouble

"Come. You Should Do That, Baby"

Comme c’est Prince et que « chaos » et « désordre » sont les maitres-mots de sa discographie, cette série Prince Post Warner 1995-2010 n’est déjà plus respectée dès le 2e épisode avec un album sorti en 1994 chez Warner. Mais on ne peut parler de Gold Experience sans évoquer COME, son album jumeau aussi sombre que Gold est lumineux.


Come et Gold étaient pensés par Prince pour sortir le même jour en 1994. Come sous le nom de Prince et Gold signé d’un symbole imprononçable. Sur la pochette de Come sont d’ailleurs indiqués naissance et mort de Prince : 1958-1993. C’est à cette époque que l’on voit Prince arborer un « SLAVE » sur sa joue. Prince cherche alors à reprendre le contrôle de son nom et sortir comme bon lui semble ses albums (c'est-à-dire 1 tous les 3 mois). Mais il est contractuellement lié pour plusieurs années à la Warner qui n’a pas la même vision de la distribution. Les relations entre les deux sont exécrables. Prince va honorer son contrat en « lâchant » pour la major une série d’albums d’apparence bâclés mais qui contiennent chacun leurs pépites. Come est le premier de la série. C’est un de ses albums les plus courts, et hors-formats habituels (un titre a capella, un autre de 11 minutes…), avec peu de possibilité de singles là ou Gold est un album étiré mais très accessible avec 4 ou 5 hits potentiels. Prince avait tout misé sur Gold, Warner sortira Come. Les anciens amis ne s’aiment plus.

Titres Favoris : Papa,  Solo et Let it Go (pas celui de la reine des neiges hein)
LeSachiezTu : On entend des gémissements sur le dernier morceau Orgasm. Sont-ce ceux de Vanity (Denise Matthews), enregistrés dix ans plus tôt ? Si oui, dans quelles conditions ? Et pourquoi les réutiliser à ce moment-là en concluant cette ode à la jouissance sur un "I love You" ? Le débat reste ouvert.  Ils ont emporté leur secret dans l’afterworld, les deux sont décédés à 3 mois d’intervalle en 2016.


[3/23] CHAOS AND DISORDER ou quand Prince claque la porte

"I Rock, Therefore I am !"
Le bien nommé Chaos & Disorder est sorti à l’été 1996. Probablement enregistré en quatrième vitesse, l’album fait partie de ceux que Prince jetait à la Warner pour honorer son contrat. « C & D » est passé inaperçu personne ne daignant en assurer la promotion.  Si la compilation est plutôt cohérente et épurée (c’est probablement le plus « rock » de ses albums avec The Undertaker 1993), la plupart des morceaux comme I like It There ou Zanalee prenaient réellement leur dimension en live. La pochette est symbolique de cette époque ou l'image de Prince (embourbé dans ses litiges juridiques et artistiques sur son nom et ses disques) se brouille complètement dans le public, au point de disparaitre des radars. Avec son côté "Je m'en bats les couilles", Chaos & Disorder est en tout point l’antithèse de l’album que Prince prépare au même moment et qui sortira sous un autre label à l’automne 1996. 1996, une année charnière à plus d’un titre dans la carrière et la vie intime de Prince. Mais ça nous en parlerons demain. 

Titres favoris : The Same December, Zanalee, Had U.
LeSachiezTu : Le dernier titre Had U (au choix « je t’avais » ou « je t’ai eu ») ne parle pas d’une femme, mais bien de ses 15 années chez Warner : « Kissed U, Disappoint U, Fuck U, Had U… »



[4/23] EMANCIPATION ou quand Prince se libère. Vraiment ?

"- Free ! Don’t Think I Ain’t."
On allait voir ce qu’on allait voir. Frustré de ne pas pouvoir distribuer autant de musique qu’il le voulait chez Warner, Prince sort chez EMI 36 chansons sur 3 CD de 1h pile chacun pour célébrer son amour et sa liberté artistique retrouvée. L’épais Emancipation, sorti en novembre 1996, est un tournant dans la production princière. Il y explore plus qu'avant plusieurs genres (Salsa, RnB, Rap, disco même) et, première, s’aventure dans des reprises de standards US (Bonnie Raitt, Joan Osborne, les Stylistics et les Delfonics). Si cette somme est incroyablement riche, la production n’est parfois pas à la hauteur de la créativité de certains titres (l’absence de cuivres sur Face Down reste un mystère) mais on y trouve son lot de bons grooves, de morceaux bien déglingués et un bel enchainement de ballades mélancoliques.


Emancipation fait également parti des opus « intimes » où Prince se livre le plus sur sa vie privée. Le disque 2 est intégralement consacré à son couple (il s’est marié avec Mayté Garcia). Le morceau Sex in The Summer est d’ailleurs rythmé par les battements de cœur de son enfant à naître. Emancipation est donc un album joyeux, résolument optimiste. La joie sera de courte durée. Son enfant, Amir, décèdera au bout de quelques jours, peu avant la sortie du disque dont il assurera quand même une longue promotion (ce qui n’était plus le cas depuis plusieurs années). Dans sa récente interview sur Schkopi-tv, Mayté revient sur l’importance qu’avait pour Prince ce disque. Elle l’a donc accompagné sur cette tournée promo malgré la peine. Prince disait que ses chansons étaient comme « ses enfants ». Pourtant quelque chose est cassé et son couple ne s’en remettra pas. C’est à cette époque, pour notre plus grand bonheur, qu’il s’embarque dans des tournées fleuves aux États-Unis et en Europe pour financer son association caritative « Love 4 one another ». Jusqu’à la fin, Prince ne jouera plus que très rarement des titres d’Emancipation sur scène. Paradoxalement cet album sur la liberté marque le début de son enfermement personnel et musical sur lui-même dans son gigantesque studio-blockhaus de Paisley Park « The White Mansion » à un moment où beaucoup de nouveaux sons et tendances musicales transforment la planète pop-rock. C'est aussi le début du bazar dans la distribution de sa musique, à partir de là il négociera disque par disque avec différents labels, quand il ne distribuera pas lui-même ses albums.


Titres favoris : Emancipation, Saviour, Joint 2 Joint, The Love We Make
LeSachiezTu : On entend Kate Bush sur le titre My Computer dont le thème est l’addiction à internet (10 ans avant la création de Facebook !). 


[5/23] CRYSTAL BALL ou quand Prince se pirate lui-même

"- You never would have drank my coffee if I had nerver served you Cream"

Prince est probablement, encore aujourd’hui, un des artistes les plus piratés : Les enregistrements des concerts bien sûr, le fameux Black Album, mais aussi des centaines de titres inédits ont circulé dès la fin des années 80. Ce marché parallèle atteignait un tel niveau que certaines paroles de chansons supposément inédites étaient parfaitement connues des fans qui les reprenaient durant les concerts. 

Au milieu des années 90, Prince veut reprendre la main sur les "bootleggers" et profiter des possibilités de l' internet naissant pour distribuer lui-même sa compilation de pirates. Crystal Ball est sa première ambitieuse démarche dans ce sens.

Disponible en 1998 uniquement en commande par téléphone ou via son site internet, Crystal Ball est un triple album dont le seul concept est d’offrir dans le désordre des morceaux inédits tirés du fameux "vault" (son coffre-fort à Paisley Park). L’emballage est sommaire avec une vague note rédigée par Prince où il explique le pourquoi et le comment de chaque titre.

A écouter ici : https://www.deezer.com/fr/album/69843042

On ne va pas chipoter, Crystal Ball est une mine d’or. Une mine qui se divise en trois catégories :
- Des morceaux de 1986 (Dream Factory, Last Heart, Sexual Suicide, Crucial ou le mythique Crystal Ball un titre résolument jazz de 11 minutes qui devait introduire un quadruple album refusé par la Warner).
- Des titres plus rock et RnB des années 90 (Aknowledege Me, The Ride, Interactive, Poom Poom, Calhoun Square…) qui auraient pu trouver leur place sur ses plus récents albums.
- Des curiosités : une séance à la batterie avec son comparse Morris Day, un poème  et des versions remixées.

S’il n’a pas vraiment de cohérence sonore, Crystal Ball montre plus que tout autre album la diversité de la production princière entre 1985 et 1995 et contient des classiques incontournables pour les fans.
Même s’il a été furtivement commercialisé en France sous le label Night and Day, ce triple album gâchant un peu son potentiel, autant dans l’assemblage bordélique que par sa distribution confidentielle, est symptomatique du sentiment ambigu que nous ressentions à l’époque. Nous avions d’un côté la satisfaction de pouvoir enfin entendre tout ça avec un bon son tout en déplorant que personne d’autres en dehors du cercle des fans ne le puisse. C’est enfin possible aujourd’hui. Profitez.

Titres favoris : Crystal Ball, Hide The Bone, Crucial, Days O Wild


Le SachiezTu : Crystal Ball est en fait un quintuple album. La version originale contient deux disques supplémentaires : un album instrumental improbable Kamasutra (qui n’est pas disponible dans la liste des 23 albums en streaming) et aussi The Truth un album acoustique à la guitare dont nous parlerons demain.


[6/23] THE TRUTH ou quand Prince est seul à la guitare

"- When the voices you hear command you to entertain the absurd..."

Fin des années 90, Prince est tiraillé entre son désir de revenir sur le devant de la scène comme à l’époque de Purple Rain (tout en sachant pertinemment que ce sera impossible) et sa volonté de faire la musique simplement pour un cercle plus restreint, ses amis ou ses fans de longue date, ou « fams ». Il va donc durant dix ans alterner des albums calibrés visant le grand public et des sorties ultra confidentielles pour son "audience rapprochée".

The Truth c’est 12 titres où Prince est seul à la guitare sèche, savamment accompagné de quelques effets sonores. Sans pochette et distribué en cadeau avec Crystal Ball en 1998, à l’évidence Prince n’avait aucune prétention d’exploser les charts avec cet unplugged. The Truth se glisse discrètement entre plusieurs albums largement surproduits avec, eux, de réelles ambitions commerciales (Emancipation et New Power Soul). Avec le recul on peut voir cette stratégie comme une erreur.
Cette volonté de se rapprocher des fans se poursuivra quelques années encore avec la création d’un « club » en ligne et des « célébrations » avec des concerts plus intimes (et acoustiques) chez lui à Paisley Park


Il faut voir aussi dans The Truth sa première affirmation discographique pour remettre en avant « la vraie musique par de vrais musiciens », un leitmotiv qui ne le quittera plus par la suite. Et preuve est faite avec cet album que Prince est un grand guitariste. De par sa simplicité et son authenticité, The Truth passe très bien l’épreuve du temps et serait probablement un carton s’il sortait aujourd’hui.


Titres favoris : The Truth, Fascination, Comeback, Welcome 2 The Dawn
LeSachiezTu : Animal Kingdom est une chanson pro-vegan offerte à l’association pour la défense des animaux PETA à l’occasion de son vingtième anniversaire.


[7/23] NEW POWER SOUL ou quand les disques de Prince commencent à devenir des prétextes à concerts

"- Freaks On This Side !"
1998 est une année princière faste. En plus de Crystal Ball, The Truth et Kamasutra, Prince sort un autre album sous le nom de son groupe le NPG (New Power Generation). Le NPG est une formation à géométrie variable et membres interchangeables (tous ont d’ailleurs repris la scène ensemble à la mort de Prince). 

Avec un son synthétique dans la continuité d’Emancipation, NewPowerSoul, avec son mélange heavy funk et guimauve, déroute sur certains titres. Une fois encore, c’est un album inégal dont la production laisse parfois dubitatif. L'album fait partie d’un triptyque le « NewPowerPak » composé de deux autres disques produits par Prince mais interprétés par deux de ses idoles de jeunesse : Chaka Khan et Larry Graham le bassiste de Sly and The Family Stone. Si Prince ne signe pas New Power Soul de son nom, il en assure néanmoins la promotion et plusieurs clips sont réalisés (dont The One par son épouse Mayté)

A écouter ici : http://tidal.com/us/store/album/61536195

L’album a été distribué en Europe dans le principal but de servir d’appui à une longue tournée le « Jam Of The Year Tour » qui a ressoudé les rangs des fans qui commençaient à se clairsemer. A Paris, ou il n’avait pas joué depuis quatre ans, l’année de ses 40 ans, Prince remet les pendules à l’heure et nous offre 2h30 de concert fabuleux et prouve avec force solo et grand écart qu’il est au sommet de son art. NewPowerSoul est l’exemple type de l’album dont on aime se souvenir pour les concerts et les longs jams qui y sont associés.

Titres Favoris : Push it Up, Come On, Mad Sex


Le SachiezTu : Il existe deux autres albums où Prince se cache derrière le groupe NPG : Goldnigga (1993) et Exodus (1995). A la différence de NewPowerSoul où il est en avant sur la pochette, il n’y est fait aucune mention de Prince ou alors via des messages cachés. Mais c’est bien lui aux commandes et qu'on entend sur la majeure partie des titres.


[8/23] THE VAULT : OLD FRIENDS 4 SALE ou quand Prince déstocke à prix cassé des pièces de collection

"- And they'll show you the friends that they're not"

Sorti à la fin de l’été 1999 The Vault : Old Friends 4 Sale est la dernière livraison contractuelle et à contrecœur (comme le montre la pochette) de Prince à la Warner. C'est un album à l’exact opposé du précédent NewPowerSoul. Selon le même schéma que Chaos And Disorder ou Come, Old Friends 
est très court, mais cette fois orienté smooth jazz et très accessible.

A écouter ici : https://www.deezer.com/fr/album/90953

Cette collection de morceaux enregistrés entre 1986 et 1994 et d’extraits d’une musique de film jamais sortie (I’ll do Anything) s’avère une excellente surprise. Alternant les titres enlevés et plus sombres, on y retrouve enfin un Prince musicien au milieu d’autres musiciens, sans artifices électroniques et avec une vraie cohérence entre chaque titre. On regrette juste l’absence des autres titres de la BO d’I’ll Do Anything qui y auraient parfaitement trouvé leur place. Il n’y aura aucune promotion ni vidéo pour cet album.

On se met à rêver alors qu’il poursuive dans cette direction jazzy et intimiste sur scène mais, au tournant du millénaire, c’est dans un registre totalement différent que Prince prépare son (troisième) comeback.

Titres favoris : It’s about that walk, When the lights go down
LeSachiezTu : 5 Women est un titre à l’origine écrit pour Joe Cocker et figure dans son album Nightcalls en 1991.

[9/23] RAVE UNTO/INTO THE JOY FANTASTIC ou quand Prince rêvasse.

"- Don't hate me 'cause I'm beautiful !"
 Rave UNto The Joy Fantastic sort sur le label Arista en novembre 1999. L’album est symptomatique d’un travers qu’aura Prince durant 10 ans : il délaisse ce qui a fait sa marque de fabrique, des albums concepts et transgressifs, pour chercher à tout prix artistique à distribuer un album "catalogue" brassant différents genres avec pour chaque genre un titre formaté. Quand on cherche à plaire à tout le monde, il y a de grandes chances qu’on ne séduise vraiment personne. C’est le cas avec Rave Unto pourtant adossé à une impressionnante tournée promotionnelle en Europe (Prince ira jusque sur le plateau de Jean-Pierre Foucault !). 

Rap, ballade, clin d’œil à James Brown, solo au piano, rock fm… l’album part dans tous les sens et sonne comme une prétentieuse tentative de prouver qu’il maitrise tout mieux que tout le monde « I don’t follow trends, they just follow me ». Comme il s’agit de Prince les collaborations annoncées, que ce soit avec Gwen Stefani ou Sheryl Crow, n’en sont pas réellement et, cerise sur le pudding, le packaging n’a aucune âme (en un sens c’est raccord avec le contenu). Malgré tout, comme souvent avec Prince, on pioche deux ou trois titres magnifiques dans la bouillabaisse des 2 versions de l’album.

A écouter ici : https://www.deezer.com/fr/album/69842702

Car, ce serait trop simple, un an plus tard une nouvelle version de l’album, nommée Rave INto The Joy Fantastic, est distribuée en CD via son site internet. Elle comprend des versions longues ou remixées, plus ou moins heureuses et un nouveau titre envoutant qu’on écoute alors en boucle : Beautiful Strange

A écouter ici (version 2) : https://www.deezer.com/fr/album/69843052

Bref, on sent à cette époque que Prince
1 / ne s’intéresse plus à ses albums en tant que tel (il mise de plus en plus sur la distribution en ligne, titre par titre, et le futur prouvera qu’il a raison)
2 / est clairement préoccupé par autre chose (on apprendra avec son prochain album qu’il s’agit de religion).

Pour les fans, plus que jamais, c’est désormais sur scène que ça se passe.


(reprise de Jimi Hendrix en décembre 1999. Extrait du DVD "Rave Unto the year 2000"

Titres favoris : Eye Love U But Eye Don’t Trust U Anymore, Beautiful Strange, Wherever U Go Whatever U Do.
Le SachiezTu : Le titre Rave Unto The Joy Fantastic a été enregistré en 1988 (à l’époque de Batman), soit 11 ans avant la sortie de l’album.


 [10/23] THE RAINBOW CHILDREN ou quand Prince prie en musique

"- I'm willing to do The Work Tell me now what about you ?"

Prince aura eu jusqu'à la fin la faculté de nous cueillir là où on ne l’attendait pas. Après quelques déceptions discographiques, à l'été 2001 il nous percute avec un album radicalement différent de tout ce qu'il a fait jusque-là sur le fond, la forme et la distribution.

Sur la forme, avec The Rainbow Children Prince assume enfin son penchant jazz d’un bout à l’autre d’un album. Il renoue également avec « l'album concept ». John Blackwell son nouveau batteur a précisé que l'album avait entièrement été réalisé avec seulement eux deux dans le studio. L’album peut déconcerter à la première écoute, mais c’est un classique et pour certains fans son dernier grand album.

A écouter ici : https://www.deezer.com/fr/album/69842772

Sur le fond, fini l'équivoque ou la dualité sexe et spiritualité, The Rainbow Children gravite entièrement autour de la religion (même si tout reste cryptique). Jamais des psaumes n’ont sonné aussi funky. Ce disque est l’aboutissement artistique du travail spirituel que Prince entreprend sous l'influence de Larry Graham qu'il a rencontré peu après la mort de son enfant. Le bassiste de Sly and the Family Stone, très « investi » dans la religion, inspirera son « baby brother » à rejoindre les témoins de Jehovah. Certains en veulent à Graham pour cette « dérive ». Je pense, mais ça ne tient qu’à moi, qu’aussi déroutante qu’elle puisse nous paraitre ce détour a probablement rallongé d’au moins quinze ans la vie de Prince. La religion a par ailleurs toujours été présente dans ses disques à des degrés divers sous un axe plus profane ou blasphématoire.

Au début du siècle sur scène Prince est donc moins « dirty » et plus « mind », les « explicit lyrics » sont édulcorés, la chanson Sexuality est rebaptisée Spirituality et d’autres morceaux comme Sexy Mother Fucker ou Irresistible Bitch disparaissent de son répertoire. Côté promo, Prince ne fait plus une interview sans parler de la bible au milieu d’un charabia difficile à suivre.

Malgré son coup sur la cafetière, nous allons entrer avec cet album, et ceux qui vont suivre autour de son nouvel assemblage du NPG, dans une de ses meilleures périodes en concert.

Alors que l’industrie du disque dans sa quasi-totalité se méfie d’internet comme de la peste, l’album est disponible en téléchargement gratuit (nous sommes en 2001 !) sur le NPG Music Club, un site que Prince vient d’ouvrir et sur lequel il distribuera désormais sa musique. L’album sortira par la suite en CD et vinyle en France où il aura joli succès d’estime. Dix-sept ans après The Rainbow Children reste un album intemporel, et on entend toujours chaque soir ses premières notes au milieu d’autres standards dans le générique du Club JazzaFip. 


Titres Favoris : Rainbow Children, Mellow, 1+1+1=3, Everywhere
LeSachiezTu : Dans le cadre de la promotion de l’album et du NPG Music Club, Prince est le premier artiste de renommé à avoir donné l'exclusivité d'un titre (The Work) à Napster, le site d’échange de fichiers mp3 qui était dans le collimateur de l’industrie musicale.


[11/23] ONE NITE ALONE… ou quand Prince jouait du piano assis


Début des années 2000, Prince s’investit énormément dans le développement de son site internet, le NPG Music Club. Pour un abonnement annuel de 100$ les fans y ont accès à son blog, une émission mensuelle (précurseur des podcasts) et surtout des chansons et des vidéos inédites chaque mois, voire des albums (The Rainbow Children). Il y distribuait aussi des CD physiques comme Rave Into The Joy Fantastic ou ce One Nite Alone, son 25e album.

Après The Truth, One Nite Alone est le second album « unplugged » de Prince. Alors que depuis une dizaine d’années, l’autodidacte de la musique délaisse le piano sur ses disques et sur scène (nous avions tous en mémoire les longs passages de la tournée Lovesexy où il retournait un stade en quelques notes), il nous livre avec One Nite Alone 33 minutes émouvantes où il est seul face à l'instrument. Conséquence de ce qu’il vit à l’époque ? Son père, pianiste de jazz, est mort quelques mois plus tôt.

A écouter ici : https://www.deezer.com/fr/album/69842782

One Nite Alone est son album le plus épuré, le plus triste, celui où on a le sentiment d’être le plus proche de lui (on l’entend quitter la pièce à la fin). L’album, bien que confidentiellement distribué, donne son nom à une tournée mondiale où nous retrouvons un Prince sur scène au piano à queue mais pas que. Et ça nous en parlerons demain.

Titres favoris : One Nite Alone, Avalanche, Arboretum
LeSachiezTu : Prince admirait Joni Mitchell. One Nite Alone contient une reprise de A Case of U. Une autre version est présente dans l’album Piano and a Microphone 1983 qui sortira le 25 septembre prochain chez... Warner.


[12/23] Le coffret ONE NITE ALONE LIVE ou quand Prince est en concert dans ton salon

"- If you came to put your purple rain coat on, you're in the wrong house

Même s’il vendait moins de disques dans la seconde partie de sa carrière Prince a toujours rempli les salles, du petit club réservé à l’arrache à 1h du matin au Stade de France booké seulement un mois avant le show. Et, soyons un peu objectifs, même un concert éventuellement « moins bon » de Prince dépassait de loin à peu près tout le reste de ce que j’ai vu avant, pendant et depuis. Si les fans le sont restés aussi longtemps malgré la difficulté à le suivre sans nom dans sa croisade anti-major et le labyrinthe mystico-bulshitesque de son bon-vouloir, c’est avant tout grâce à ses concerts et aux enregistrements de ses concerts, enfin les enregistrements pirates de ses concerts.

Car en déjà 25 ans de carrière, mis à part quelques programmes vidéo et le film Sign of the Times, Prince n’a jamais officiellement sorti de « live ». Il devait donc être sacrément fier de la tournée One Nite Alone pour en faire un triple-album. Le coffret One Nite Alone Live est distribué à la fin 2002 alors que Prince termine la tournée en Europe. Cette tournée, avec Prince et son groupe en costards, est exceptionnelle pour sa set-list sortant des hits attendus. L’album a été enregistré lors de la partie américaine autour d’une formation « jazz » (avec John Blackwell et Maceo Parker) et l’on y retrouve le son et les titres de The Rainbow Children et des morceaux moins connus (Extraordinary, Anna Stesia…) revisités sur le même mode.

Le second disque reprend le concept de son album précédent et on l’entend longuement seul au piano. Malheureusement l’enchainement des titres au piano est trop rapide pour vraiment créer une émotion. Le tout est même presque trop « lisse » par rapport à ce que nous avons expérimenté sur cette tournée.

A écouter ici : https://www.deezer.com/fr/album/69842722

Le troisième disque ONE NITE ALONE LIVE… THE AFTERSHOW : IT AIN’T OVER ! est un collage de titres enregistrés lors d’aftershows dans des petits clubs sur cette même tournée. Car un concert de Prince c’était souvent l’angoisse d’un second concert surprise de Prince ailleurs dans la nuit. On ne compte plus ceux qui ont raté un premier concert dans l’espoir d’une bonne place au second qui n’aura finalement pas lieu (ou ailleurs) et ceux qui, à l’inverse, par le plus grand des hasards se sont retrouvés aux premières loges d’un concert surprise de Prince dans une boite de nuit alors qu’ils étaient venus pour une soirée mousse. Le son de ce troisième disque est donc différent, plus électrique, plus funk, plus décousu aussi, on y croise George Clinton, Larry Graham ou Musiq Soulchild, et une longue version à la guitare saturée d’une de ses plus belles chansons : Joy In Repetition. Tout cela est très bien mais il manque le principal : y être.

A écouter ici : https://www.deezer.com/fr/album/69842892

Titres Favoris : Xenophobia, Strange Relationship, Anna Stesia, 2 Nigs United 4 West Compton, Dorothy Parker
LeSachiezTu : Il existe un DVD officiel de cette tournée, à regarder d’un œil seulement. One Nite Alone Live in Las Vegas est filmé avec les pieds (c’est l’époque où Prince filme tout lui-même au camescope parce que ça coute moins cher). Le DVD dure une heure et ne rend pas hommage ni à ce concert (qui en faisait trois) ni à cette tournée.




[13 et 14/23] XPECTATION et NEWS… ou quand Prince est à la croisée des chemins



Pas de répit, ce n'est jamais fini. La tournée One Nite Alone s’achève en décembre 2002 et le coffret Live vient tout juste de sortir et, pour les abonnés du NPG Music Club, l’année 2003 commence par un cadeau. Le matin du 1er janvier Prince offre un nouvel album en téléchargement : XPECTATION.
C’est une double révolution. C’est le premier album de Prince entièrement dématérialisé (il n’y aura jamais de version CD) et, si l’on met à part les 2 albums du groupe Madhouse (un de ses nombreux alias) sortis cher Warner dans les années 80 et 90, XPectation est le premier album entièrement instrumental qu’il signe de son nom. 

A écouter ici : https://www.deezer.com/fr/album/69842762

Entouré des musiciens de la tournée (John Blackwell, Candy Dulfer, Rhonda Smith) auxquels est invitée à se joindre la violoniste Vanessa Mae, Xpectation est une prolongation plus radicale du son jazz qu’il a initié deux ans plus tôt avec Rainbow Children. Il ne cherche ni le consensus ni à atteindre le grand public. Le sous-titre de l’album est explicite : New Directions in Music From Prince. L’album est une « expérience », inspirée dans la démarche par les disques de Miles Davis que Prince admirait. Le résultat est une succession de morceaux plus ou moins réussis aux allures de « jams » en studio. La distribution ultra confidentielle indique que Prince n’était, pour une fois, pas trop sûr de son coup et qu’il attendait des réactions de ses fans. Ceux-ci sont mitigés.

Il va poursuivre l’expérience avec un autre album instrumental NEWS qui sort dans la foulée en mai 2003 en version CD commercialisée à grande échelle. Cette fois c’est le saxophoniste Eric Leeds qui rejoint la formation. L’album a été enregistré en une prise et une journée. Il est composé de 4 morceaux (North, East, West, South) de 14 minutes chacun et sont pensés pour être écoutés en une seule fois à la suite.

A écouter ici : https://www.deezer.com/fr/album/69842902

Malgré son joli packaging où Prince n’apparait pas (son nom est écrit en petit, perdu dans la pochette), News est encore moins commercial qu’Expectation, mais il est aussi plus intéressant et plus envoutant. News sera la plus mauvaise vente de disque de Prince.

Sa période jazz aura duré près de trois ans. Si Prince l’a incontestablement appréciée et qu’il a voulu donner des « preuves » à on ne sait qui qu’il était d’abord un musicien (ce que nous savions), on sent aussi qu’il se cherche musicalement, qu'il doit se réaffirmer commercialement et que nous sommes donc, en toute logique princière, à la veille de quelque chose de nouveau…

Something big is coming.


[15 et 16/23] THE CHOCOLATE INVASION et THE SLAUGHTERHOUSE ou quand Prince solde les comptes

- The chocolate invasion strats here !

 Début 2004. L’aventure NPG Music Club touche à sa fin. Les fans ont parfois eu la dent dure avec le club, mais avec le recul c’était une expérience fabuleuse. Durant 3 ans nous avons eu un contact plus « direct » avec la musique de Prince au fur et à mesure qu’il l’enregistrait.

Alors qu’un grand projet discographique et scénique pour le grand public se dessine (l’album et la tournée Musicology), un nouveau site est ouvert. Plusieurs albums sont mis en ligne sur le Musicology Download Store. A commencer par ces deux volumes regroupant les NPG TRAX, les chansons que Prince distillait chaque mois de 2000 à 2002 sur internet.

Il faut donc voir ces 2 volumes comme des compilations, jouables en mode shuffle à destination première de ses fans, pour marquer de façon plus officielle un moment de sa carrière où il a privilégié la musique en ligne, et non des albums « pensés ». La plupart des morceaux sont des chutes d’albums abandonnés. S’il y a une dominante funk-electro cohérente sur Chocolate Invasion, on y trouve des morceaux plus doux comme When I Lay My Hands on U ou U Make My Sunshine, un duo avec Angie Stone.

A écouter ici : https://www.deezer.com/fr/album/69842442

"- How can a non-musician discuss the future of music from anything other a consumer point of view ?"

La recette est la même pour le volume 2, The SlaughterHouse, qui a peut-être un meilleur niveau global et sonne un peu plus techno. Le son y est de nouveau surproduit et la tonalité se veut futuriste.
Ces deux compilations ne sont jamais sorties en CD et, à quelques notables exceptions près, la plupart des titres des deux volumes n’ont pas été joués sur scène. Pourtant les clips de plusieurs chansons ont été tournés.

A écouter ici : https://www.deezer.com/fr/album/69842402

Titres favoris : 2045 Radical man, Northside, Judas Smile, SexMeSexMeNot
LeSachiezTu : sur cette compilation figurent deux titres inspirés/écrits par/pour un film de Spike Lee, Bamboozled (Judas Smile et Radical Man). Ce n’est pas la première fois que Prince travaillait avec Spike Lee. Il avait déjà signé la BO de son film Girl 6 et avait participé au financement du biopic sur Malcolm X. Au générique de fin du récent Blackkklansman on peut également entendre un classique de la musique noire américaine repris au piano en 1983 : Mary Don’t U Weep. Spike Lee a également réalisé plusieurs vidéos pour Prince.


[17/23] C-NOTE ou quand Prince improvise

"- Now how am I gonna fill this empty room?"


Mars 2004, le troisième album distribué en téléchargement sur le Musicology Download Store est une perle. Pour la décoder, il faut revenir en arrière à l’automne 2002 sur la tournée One Nite Alone. En plus des titres et des podcasts, les abonnés du NPG Music Club avaient alors accès à la billetterie des concerts et des aftershows en avant-première mais aussi le privilège d’assister aux répétitions des concerts. Et, avec Prince, répétition équivaut parfois concert et souvent un concert différent de celui qui va suivre. C’est ainsi qu’à Paris, en amont des deux heures de concert puis des deux heures d’aftershow au Bataclan, 200 fans français ont assisté à un concert privé d’une heure dans un Zénith vide. Le summum est atteint au sportpaleis d’Anvers avec un soundcheck de 2h qui reste un de mes meilleurs souvenirs de cette époque et la seule fois où j'ai vu prince habillé en type lambda, dans une posture totalement décontractée, jouant les titres qu’on lui demandait.

C-Note revisite, trop brièvement, ces moments magiques. C’est une compilation de 5 morceaux dont 4 instrumentaux improvisés enregistrés à Copenhague et au Japon. Le disque est court (33 minutes) mais c’est un sans-faute. Les milliers d’heures d’enregistrements pirates qui circulent le prouvent : Prince était particulièrement doué pour ces exercices d’improvisation. La majeure partie de ses chansons sont nées sur scène, construites au fil de ces jams d’avant concert puis améliorées de preshow en show.

C-NOTE contient également la première version officielle d’une émouvante chanson « inédite » bien connue des fans depuis dix ans, Empty Room, dont on s’est toujours demandé pourquoi il ne l’avait pas sortie sur un album avant. Peut-être est-ce tout bêtement par ce que le titre (« salle vide ») prend sur cet album toute sa signification.
Il n’a jamais réitéré cette expérience « planifiée » de réelle proximité avec les fans, mis à part pour quelques «Celebrations» à Paisley Park et quelques chanceux au fil des tournées, pourtant il semblait l’apprécier.

Une pièce rare dans tous les sens du terme.

A écouter ici : https://www.deezer.com/fr/album/69842552


[18/23]  MUSICOLOGY ...ou quand Prince fait le tour de la révolution

"- Kick the old school joint, for the true funk soldiers !"

Prince a multiplié les comeback plus ou moins réussis entre 1995 et 2003. En avril 2004, il se donne enfin les moyens commerciaux de ses ambitions.
Prince annonce à la fois la sortie de l'album Musicology et une très longues tournée américaine durant l'été. Première mondiale, le CD de Musicology est inclus dans le prix de vente du billet et sera distribué physiquement à l'entrée des concerts.
Cette fois, tout ceci est appuyé à un vrai plan média : superbe prestation avec Béyoncé aux Grammy Awards où ils reprennent Let's Go Crazy et Purple Rain, tournage d'un vrai vidéo-clip, une emission-concert à New York diffusée sur MTV et une prestation légendaire au Rock n'Roll Hall Of Fame avec Tom Petty. Il sera également le premier artiste à organiser une retransmission live du concert de lancement dans les salles de cinéma américaines.



Le Musicology Tour est une de ses tournées « greatest hits » la plus formatée avec, toujours (c'est Prince quoi), de grands moments et un long set acoustique à la guitare au milieu du public. C'est également une tournée sans effets où une grande place (scène centrale) est donnée aux musiciens : "real music by real musicians"



A l'exception du titre phare (hommage funky à James Brown et à la musique de son enfance) qui débute le concert, l'album Musicology a peu de rapport avec le concert du même nom. Peu ancré dans les sons du moments, l'album est un portfolio de genre divers (funk, pop, balades, rock...). Si l'ensemble montre proprement l'aisance et la diversité du musicien, Musicology laisse à l'époque une impression d'éparpillement. Plusieurs titres tiennent pourtant très bien les années et sont des merveilles de production.

A écouter ici : https://www.deezer.com/fr/album/69842532

Si Musicology n'est pas un summum de créativité, ce sera en revanche un très gros succès commercial. Grâce à son coup de génie marketing (un cd vendu d'office dans une tournée à guichet fermé), Prince renoue avec les sommets des ventes de disques aux États-Unis. Il est enfin de retour sur les écrans et dans les esprits. L'aventure Musicology est la preuve que Prince comprend avant les autres que le rapport scène/vente de disque s'inverse à l'heure de la musique en ligne et du piratage. De surcroît, la recette lui permet de s’émanciper, avec une pointe de fierté, des "majors" du disque. Il fera désormais plus d'argent en concert qu'en cherchant à vendre des CD. Chaque album sera le pivot d'une tournée offrant l'opportunité d'une distribution ingénieuse de l'album qui, en retour, fera parler de la tournée.
 
La boucle est bouclée entre le petit Prince qui, pour s'entrainer à la guitare, achète un vinyle dans un "record store" au début de la vidéo de Musicology, et la dévalorisation du support CD symbolisée par la distribution gratuite de l'album à l'entrée du concert d'un Prince devenu grand... La musique n'est pas une question de formats mais d'émotions.



Titres favoris : Musicology, Call My Name, Dear Mr Man
LeSachiezTu :Dear My Man est une des rares chansons "politiques" de Prince (Other Titles In This Category Include : Baltimore, America et Sign Of The Times).


[19/23] 3121 ou quand Prince va en vacances

- You can come if you want to, but you can never leave"

Après sa longue tournée américaine de 2004 et une exposition médiatique comme il n’en avait pas bénéficié depuis une bonne dizaine d’années, pour la première fois de sa carrière, Prince souffle un peu. Pas de disque, pas de tournée en 2005.

L’indépendance retrouvée, Prince suit enfin le rythme que lui a dicté en vain la Warner pendant des années (une forte exposition pendant six mois pour le nouvel album et la tournée, puis un silence radio d’un ou deux ans avant le prochain album).
Celui qui est pourtant attaché à son Minnesota natal passe l’essentiel de cette année à Los Angeles dans la grande maison du 3121 Antelo Road. Il y organise des soirées où se pressent les people d’Hollywood. On retrouve quelques traces de ces nuits et concerts privés dans le livre photo de Afshin Shahidi : Prince A Private View… 

C’est le même Afshin qui réalise la pochette du 31e album de Prince : 3121. L’album sort en mars 2006 chez Universal, accompagné d’un beau plan marketing et de plusieurs prestations télé aux États-Unis et en Angleterre.

A écouter ici : https://www.deezer.com/fr/album/69842852

L’album est, une fois encore, un collage de morceaux divers et légers dans l’esprit de Rave Unto The Joy Fantastic. Et, comme souvent depuis quelques années, on n’en ressort pas convaincu sur le moment, avant de lui trouver des qualités au fil des années.

La tournée à venir sera immobile, Prince décide de s’établir à Las Vegas sur la scène de l’Hôtel Casino Rio pour une série de shows durant toute l’année 2006. Il rode ici un concept qui traversera l’Atlantique l’année suivante.

Titres Favoris : 3121, Black Sweat, Get On The Boat

LeSachiezTu : Sur le CD de 3121 est sous-titré « The Music ». 3121 est aussi un film que Prince voulait distribuer en DVD avec l’album avec le sous-titre « The Movie ». Devant l’indigence narrative et formelle de la chose à côté de laquelle Grafitti Bridge ressemble à Citizen Kane, Universal a dû juger bon de brûler les copies. Le film restera inédit. Ce n’est pas une première expérience cinématographique pour Prince. Dans la foulée de Purple Rain, Prince a réalisé trois longs métrages, et durant vingt ans il a tourné (ou fait tourner) des centaines de clips et de programmes musicaux à Paisley Park. Si certains ont été diffusés (Sacrifice of Victor, Love 4 One Another, Beautiful Experience…), la plupart n’ont jamais été distribués, ni même vus.


[20/23] Planet Earth ou quand Prince occupe Londres

"- I love you baby, but not like I love my guitar"
Été 2007. Définitivement remis sur orbite marketing avec sa prestation historique à la mi-temps du Superbowl, Prince revient conquérir l'Europe qu'il avait délaissé pendant près de cinq ans. Il va allier le modèle de distribution expérimenté sur Musicology avec le principe de la tournée en résidence inauguré avec 3121. Inclus dans le prix du billet, l’album Planet Earth sera distribué à l’entrée du concert de la tournée européenne Earth Tour. 21 dates dans un lieu unique : l’O2 à Londres. Durant l’été tous les fans européens convergent donc en pèlerinage à Londres, certains pour une date, d’autres pour douze.



Même s'il est plutôt bien accueilli, on garde de meilleurs souvenirs de ces concerts que de l’album. Des disques kaléidoscopiques et sans concept, prétextes à tournée, égrainés par Prince de 2000 à 2010, Planet Earth est le moins inspiré (Oui, Guitar ressemble quand même BEAU-COUP au Back In USSR des Beatles). 2 ou 3 titres surnagent d’un ensemble très, trop, facile d’écoute et donc pas désagréable mais qui s’oublie très vite.

Mais, avec ces deux mois invraisemblables de concerts à l’O2, un main show modifié chaque soir et une douzaine d’aftershows, tout lui était pardonné à la fin de l’été.

A écouter ici : https://www.deezer.com/fr/album/69843302

Titres Favoris : Planet Earth, Chelsea Rodgers, Resolution



LeSachiezTu : Pour le lancement de la tournée, l’album sera distribué en Angleterre avec le journal Mail-On-Sunday. C’est une première pour un artiste de cette renommée.


[21/23] INDIGO NIGHTS ou quand, à l’heure du mp3, Prince sort le cd au boitier le plus encombrant du monde

« - Inside I’m still the same, but something else has changed »

Terminée l’époque de la course aux aftershows, la tournée Earth tour de l’été 2007 offre la possibilité de réserver des tickets pour l’aftershow qui aura lieu à 50 mètres du premier concert au Club Indigo. Sa présence n’est pas garantie, mais au final cet été londonien sera riche en concerts princiers d’anthologie autour de formations variables du NPG (des formations rock avec le couple Dunham, d’autres plus funk, latino ou encore plus jazz avec Renato Neto et Maceo Parker).
En 2008, le disque Indigo Nights est une sélection d’extraits de ces soirées, reflétant plusieurs de ces tendances.

A écouter : https://www.deezer.com/fr/album/69842942

Après avoir sorti un parfum pour l’album 3121, Prince décide d’accompagner le CD d'un livre de photos, ou plutôt l'inverse. Pour avoir le disque, il fallait acheter par correspondance le coffee table book de 5 kilos (pas très Planet Earth comme initiative).

Pour les habitués des enregistrements pirates et, plus encore pour ceux qui ont assisté aux concerts, une impression bizarre d’un mix trop propre se dégage de cet enregistrement. On regrette aussi ce choix de titres lorsqu’on connait le contenu des autres concerts. Mais tel est le fan de Prince : jamais content spécialement lorsqu’il est gâté.

Ce disque reste pourtant intéressant à plus d’un titre. Déjà pour les quelques morceaux rarement joués, pour ses reprises (Led Zeppelin, Aretha Franklin, Mother’s Finest) ainsi que pour le monologue central de Prince (qui s’étend sur 4 morceaux de Girls and Boys à Just Like U) où il évoque son rapport à la célébrité, sa jeunesse, des aveux à la fois drôle et pointant de réelles angoisses.

D’ailleurs, si le livre Indigo Nights est une succession de photos à sa gloire, cliché après cliché, l’artiste enfermé dans son hôtel y étale d’abord, consciemment ou non, son extrême solitude.


Titres Favoris : Indigo Nights/Get on The Boat, Misty Blue/Baby love, The One/Question Of U

LeSachiezTu : Plusieurs guests sont montées sur scène à l’Indigo, notamment Amy Winehouse et Will I Am. Ce n’est que le second live officiel de Prince en 30 ans de carrière. Ce sera le dernier de son vivant.


[22/23] LOTUS FLOW3R + MPLS SoUND ou quand Prince est plus incontrôlable que jamais

"-Donwload a future full of isolated boys and girls..."

Au fil de la première décennie des années 2000 Prince propose des albums « faciles » pour tenter de conquérir une autre audience que celle de ses fans, des albums « formatés » pour les radios … radios qui ne les diffusent pas. Les albums un peu plus pointus, eux, sont distribués sous d’autres modes. Le disque n’est plus qu’un support dans lequel il ne se projette plus vraiment. C’est n’est vraiment plus que sur scène qu’on l’apprécie, et qu’il s’améliore. Alors que sa production (officielle tout du moins) décontenance les fans, Prince multiplie dans la même période des prestations scéniques fabuleuses à un rythme toujours plus soutenu.

Chaque album est un coup marketing et le théâtre d’un évènement scénique que Prince gère en artisan, certains diront en amateur. Force est de constater qu’il est plutôt doué pour faire parler de lui. En 2009, pour son lancement, le triple album Lotus Flow3r est l’objet de trois concerts consécutifs le même soir à Los Angeles dans trois salles différentes. En parallèle, LotusFLow3r est vendu en exclusivité à prix cassé aux États-Unis dans une chaine de supermarché, Target (un peu comme si Johnny avait donné l’exclu de son album à Monoprix).

En Europe, la stratégie commerciale (s’il y en a une) est basée sur le plaisir de Prince de créer des évènements uniques. En juillet 2009, Prince s’invite au dernier moment au festival de Montreux pour deux concerts différents le même soir. La tournée promotionnelle d’octobre 2009 (le triple album est distribué en France par le label Because) sera l’occasion d’une des semaines de concerts princiers les plus intenses survenues sur le sol français. En assistant à la fashion-week, Prince décide de jouer sous la nef du Grand Palais. Organisés en quelques jours, et complets en une heure, ces deux concerts du 11 octobre 2009 sont un sommet de magie princière, à la fois pour le bordel général de l’entreprise (il n’y a quasiment eu aucunes répétions et la balance est faite en direct lors du premier concert), et la beauté du moment (pour le premier concert entre chiens et loups et les allers retours des pigeons d’un bout à l’autre de la verrière). Il remettra le couvert dès le lendemain à la Cigale avec un set plus funk à destination des abonnés de son nouveau site (succédant au NPGMC, puis au Musicology, puis au 3121). On sent pourtant lors de cette tournée quelques signes de faiblesse physique.


Si on a l’impression depuis quelques temps que non seulement le contenu des albums de Prince peut-être écouté dans n’importe quel ordre et que les titres sont également interchangeables d’un album à l’autre, LotusFlow3r échappe un peu à la règle. Déjà, il prend le temps d’offrir trois visions musicales. Le premier disque, « organique » est un condensé des dernières années musicales de Prince, un peu de jazz instrumental, une pointe de rock. Le tout est plutôt réussi.

A écouter ici : https://www.deezer.com/fr/album/69842742


Le second disque MPLS Sound se veut un retour au son de ses débuts, plus électronique, le son de Minneapolis qu’il a contribué (avec d’autres) a lancé au début des années 80. Là à l’exception d’un Old Skool Company, particulièrement efficace, c’est moins concluant.

A écouter ici : https://www.deezer.com/fr/album/69843262

Le troisième album, Elixer (He Licks Her), met en avant sa protégée du moment, Bria Valente. Ce troisième album n’est mystérieusement pas disponible en streaming. C’est dommage c’est le plus intéressant du package. Il en interprétera des passages sur la scène du festival de jazz de Montreux.
Prince va bientôt entrer dans une nouvelle période, la dernière. Dans ce qui apparait avec le recul comme une fuite en avant, il multipliera les concerts comme jamais, tout en s’isolant humainement et musicalement.

Titres Favoris : Boom, Colonized Mind, Elixer, Old Skool Company

LeSachiezTu : Inspirée de ses tournées statiques à Londres et Las Vegas, Prince était en discussion à l’époque pour faire une nouvelle résidence à Paris. Elle se serait limitée à sept jours dans sept salles différentes parmi elles l’Olympia et Bercy … Entre le New Morning, la Cigale, le Grand Palais et le Stade de France, ce projet se sera finalement à moitié réalisé de 2009 à 2011.


[23/23] 20TEN ou Quand Prince renait en Europe

" I love everybody and everybody loves me"
2010 sera une année européenne pour Prince. Désormais l’artiste tourne dans les gros festivals d’été et pour l’occasion il distribuera son nouvel album 20TEN gratuitement via des magazines dans chaque pays visité, la veille même ou le jour même du concert.

Opération de la hanche ou painkillers ? Ce qui surprend lors de son passage au Main Square Festival d’Arras, neuf mois après le Grand Palais, c’est sa vitalité retrouvée. Si la set-list n’évolue guère depuis quelques temps (majorité de hits d’avant les années 2000), l’énergie et l’optimisme sont de retour.


L’album 20ten, probablement sorti des mêmes sessions d’enregistrements dans lesquelles il a puisé pour Planet Earth, 3121 et LotusFlow3r, est le plus abouti de la série. Sans prétention, plus inspiré, avec un peu plus de groove que les albums précédents et une bonne humeur communicative sur fond d'électronique, 20Ten est un « MPLS sound » réussi. Certains titres pourraient même figurer sur Controversy ou Dirty Mind. Le tout est une pop festive ne trahissant pas ce qu’il a fait il y a vingt ans, sans pour autant verser dans la nostalgie, et au contraire en donnant envie d’avoir la suite. Si le disque a un concept, c’est bien celui éphémère d’être écouté pour la première fois sur le chemin du concert, histoire de s’échauffer.

A écouter ici : https://www.deezer.com/fr/album/69842972

Nous n’avons pourtant pas perçu à l’époque que nous changions de paradigme princier. Celui qui s’était toujours battu pour faire vivre ses albums, s’en désintéressait désormais totalement. Une preuve parmi d’autres : après s’être battu dix ans pour reprendre possession ses masters et les réenregistrer, il n’en a rien fait une fois les avoir récupérés. C’est aussi une époque où Prince s’englue à nouveau dans une communication opaque, multiplie des prises de position clivantes (anti-internet par exemple, alors qu’il a été précurseur dans le domaine) et produit des contenus web de plus en plus amateurs et déroutants (à voir comme une nouvelle preuve du système autarcique dans lequel il se complaisait). De même, la profusion de tournées et de concerts (toujours complets) qui se sont enchainés par la suite à travers le monde (principalement aux États-Unis) contribuera à mettre sous le tapis une inquiétante anomalie dans ses bientôt 40 ans de carrière : il ne s'est jamais passé plus d'une année entre la sortie de deux albums de Prince.

Son album suivant, Art Official Age, qui déjà de son vivant a des vibrations testamentaires, ne sortira que 4 ans après en 2014 (O ironie et boucle bouclée) chez Warner.

De son propre aveu, dans les derniers mois de sa vie, celui qui ne dormait jamais et avait déjà vécu deux ou trois vie de plus que le commun des mortels, commençait à retrouver le sommeil. Il l’envisageait peut-être comme le signe de la fin de sa carrière. Alors que nombre de fans le pensait assagi, prêt pour entamer un nouveau pan de sa carrière plus « cool » dans des clubs de jazz ou des salles prestigieuses, il surprendra jusque dans sa sortie. Entre deux réclusions dans son bunker blanc où il n’échangeait plus qu’en mode « cryptique » avec une poignée de fans sur Instagram, Prince s’est livré sur scène jusqu’à la fin dans un récital au piano où il revisitait dans la joie et surtout la peine les souvenirs d’une jeunesse qu’il n’a au fond jamais quittée.

« …and there’s always a rainbow at the end of every rain »

Titres favoris : Future Soul Song, Lavaux, Laydown
LeSachiezTu : 20ten n’est sorti que dans la presse européenne (en France, dans le Courrier International). C’est un album inédit dans le reste du monde.

La play-liste de l'article (5h40 tout de même)



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