27 juin 2013

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Dans l'antre du libéral de l'immo


Libéral est furieux. Contre la ministre du Logement évidemment. Dans l’idée, il n’aime pas l'intervention de l'Etat et que celui-ci puisse renforcer l'encadrement des loyers et lui établisse un loyer de référence. Pourquoi saccager ainsi le fruit de son placement spéculatif lui-même fruit de son travail ! (et d’un avantage fiscal ou d’un héritage éventuellement, libéral insurgé n’étant pas à une contradiction près).

Libéral est en colère, il menace de tout casser : Plus personne d'entre lui ne va vouloir investir, parce que ses rendements vont baisser ! Les mises en vente vont augmenter et les prix de l'immobilier chuter ! Et tous ces logements pas assez chers ça va être la galère !  Terminé les temps de la justice individuelle où Libéral bailleur pouvait faire le bien de tous en multipliant par deux son rendement locatif en dix ans dans les zones tendues !

Mais comment va s'en sortir le pays avec tous ces loyers que libéral n'encaissera plus ? Bah, c'est simple, comme toujours Libéral le moderniste en retournera au cœur de cette révolutionnaire analyse qu'il n'a pas dépassée depuis 30 ans[1] : La France, elle est foutue ! 

Pourtant.

Libéral véhément n’est pas le dernier à gueuler sur le manque de compétitivité du travailleur français. Pas assez productif et ne tirant pas la croissance vers le haut, et pour lequel Libéral conseille un traitement de choc : qu’on le paye moins ce feignant surprotégé et qu’on l’envoie en Chine, et à ses frais, pour voir comment travailler mieux, qu’il y meurt s’il est faible car seuls les forts doivent survivre, et bon de toutes les façons 8 euros de l’heure c’est déjà 15X trop pour celui qui n’est pas entrepreneur !

Pourtant. Le faible prix des loyers (3X moins cher qu'en France) est une composante essentielle dans ce "miracle" de la compétitivité allemande, cet objet de concupiscence des gang-bangs de BFM Business.



C'est vrai que libéral venère, en plus de sa maison secondaire dans le Var, avec ses dix studettes qu'il loue à un SMIC chacune en zone tendue à du touriste japonais ou à de l'étudiant à papa friqué, on ne peut pas vraiment dire qu’il tire la croissance locale.

Même la vidéo-surveillance de sa maison secondaire, il la sous-traite à l’étranger parce que "les tarifs sont plus compétitifs". Et sur le marché du patelin où il a acheté (pardon investi), on est formel : la productivité de la cagette de fraise ou du poulet rôti, Libéral ne la booste que très rarement dans l’année. Comme ses copains se déplacent en meute, ils ont tous acheté au même endroit et désherbé la population locale : "ces péquenauds qui ne comprennent rien au marché". Ou plutôt qui le comprennent très bien, mais trop tard : il n’est plus pour eux.

Mais n’allez pas croire que Libéral hargneux a une dent contre les pauvres. D’ailleurs l’autre jour, sur une route du patelin à l’abri des regards (preuve qu’il ne fait pas ça pour la gloire), il en a autorisé un à venir s'encastrer contre son Cayenne, histoire que le damné goutte lui aussi un peu de son succès. C’est vous dire s’il n’est pas si sectaire, et au fond de lui un peu partageur. Et puis les limitations de vitesse, c'est dépassé. 

Oh, mais attendez. Je découvre aussi dans sa littérature que, dans les cas les plus graves, libéral multiproprio n’a de maison d’aisance que dans ses rêves humides de pouvoir. Que son portefeuille patrimonial en est encore à l'état de fantasmes et le Cayenne à celui de support à branlettes punaisé en poster sur le mur moisi de sa chambre d'ado attardé. Zut. Libéral courroucé a un (petit) salaire minimum garanti et à 27 ans vit encore chez papa et maman, ne disposant pas du capital risque pour se lancer dans la location d'un 15m2 qui boufferait 80% de ses revenus.

Oui, Libéral violent peut aussi être ce neuneu persuadé que vouloir avoir c’est déjà un peu être, et qu’à le regarder pathétiquement singer l’oppresseur chacun en conclura que c’est un vrai winner.


[1] Oui, cette date depuis laquelle le pays a commencé à glisser vers le libéralisme.

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9 comments:

Unknown a dit…

Bonjour,

Je suis ce qu'on appelle un "multi-propriétaire". Entendez par là que je suis propriétaire de mon logement principal, ainsi que de mon ancien appartement à Paris, que j'ai désormais mis à la location au lieu de le revendre, car en tant que freelance je me fais peu d'illusions sur ma future retraite.

Pour autant je ne vois rien de mal à ce projet de loi tel qu'il est annoncé aujourd'hui, au contraire.

Ces achats n'ayant de toute façon jamais vraiment été faits dans l'optique de spéculer (mais plutôt dans celle d'épargner, justement parce que la bourse non merci), je n'impose ni loyer invraisemblable ni dossier de diplomate à mes locataires.

J'ai commencé à faire mes calculs et a priori si la loi passe en l'état, je devrais être dans les clous. Et quand bien-même je dépasserais un peu alors tant pis j'ajusterai, sans me rouler par terre pour autant, parce que j'ai bien conscience que tout le monde doit faire des efforts, et aussi parce que j'ai moi-même longtemps vécu le défi de se loger (à Paris de surcroît) et que je n'ai pas envie d'imposer ça aux autres à mon tour.

Tout ça pour dire qu'on peut être propriétaire, et même "multi-propriétaire", sans être spéculateur de merde ou un marchand de sommeil.

Les loyers dans les grandes villes sont complètement fous, et il est normal qu'on envisage de les réguler (ça aurait dû être fait avant en réalité).
Un autre GROS problème vient aussi selon moi des dossiers qu'on impose aux candidats à la location. J'ai des amis autour de moi avec des revenus parfaitement décents qui ont du franchir de véritables parcours du combattant pour pouvoir louer, c'en était parfois indécent.
S'attaquer à cet aspect des choses (j'entends par là, légiférer ou contrôler plus fermement) aiderait beaucoup l'accès au logement à mon avis.

Des solutions simples (voire simplistes) à de problèmes compliqués évidemment, tout ne peut pas se résumer à ça, mais au moins j'ai le sentiment que ça va dans le bon sens.

Seb Musset a dit…

@Bertrand > J'abonde. J'ai bien connu les dossiers impossibles. Pour les mesures Duflot, effectivement ca va dans le bon sens, pas assez. Mais on part vraiment de loin.

JohnJohn a dit…

Cet article est très confus, pour le moins. "Libéraliser", dans le cas de l'immobilier parisien, ça veut dire densifier massivement pour augmenter l'offre et donc réduire les prix, au bénéfice des acheteurs et des locataires. Ça veut dire supprimer toutes les réglementations inutiles qui poussent les proprio à demander des garanties ridicules aux locataires pour éviter une situation de litige qu'ils sont surs de perdre. Ça veut dire arrêter de décourager les secteurs entrepreneuriaux de l'économie - ce qui pousse le capital vers les secteurs les moins productifs comme l'immobilier. En Allemagne justement, c'est parce qu'il est rentable d'investir dans une usine qu'il n'y a pas de bulle immo. Quel investisseur serait assez fou pour mettre son argent dans une faction de CGTiste ? Alors il mets dans la pierre, parce qu'il ne reste qu'elle. Le problème de l'immobilier, c'est justement la recherche des rentes, l'étatisme clientéliste qui les favorise, et la peur de la concurrence, du marché. Il semble que l'auteur confonde libéralisme et corporatisme ou "rentiérisme", bref ne maîtrise même pas vraiment le sens des mots qu'il emploie, ou bien qu'il ait un agenda politique pas très recommandable derrière justifiant un tel amalgame de concepts antinomiques...

Unknown a dit…

j'ai même entendu , il y a qq années, le cas d'un couple d'enseignants ayant 20 ans de métier (emplois garantis et donc stables et revenus corrects) devoir fournir la caution parentale des deux côtés pour obtenir la location d'un appart
incredible, is'n'it ?

cdg a dit…

@Seb
En allemagne les loyers ne sont pas 3 fois moins cher qu en france (je le sais j y vis). Meme en prenant Paris et Berlin. Par contre c est vrai qu ils sont bien au moins 30-50% moins cher. et qu on ne vous demande pas des tas de papiers pour louer
PS: La courbe que tu met en illustration est le prix au m2 a l achat. c est sur que ca un impact sur le loyer (via le rendement dudit achat) mais c est pas directement lie

Enfin ca fait plaisir que pour une fois tu ne critique pas la RFA ;-))

Anonyme a dit…

Mais il a combien de casquettes, finalement, cette tête de con ?

t0pol a dit…

aaah le libéral qui dit : faut virer plus facilement pour résoudre le chômage, et qui dit : faut virer ses locataires quand on veut et sans réglementation pour réduire le problème du manque de logements.

Tiens moi je vais leur expliquer ma motion du libéralisme tempéréré : dans ma cave !

Anonyme a dit…

Pouvez-vous justifiez les 30 dernières années de libéralisme face à cette courbe ?
http://theoremedubienetre.files.wordpress.com/2013/06/salaires12.png

Pour le fond, à l'instar de 90% de la presse française, vous ne savez pas ce qu'est le libéralisme. Vous avez raison qu'un libéral est (et doit) être contre toute intervention de l'état dans un contrat passé entre deux personnes (le bail dans le cas qui nous occupe). Vous occultez complètement le fait qu'il est également contre toutes les lois qui ont introduit des distorsions dans l'équilibre offre/demande et amené à ces prix délirants.
J'ai toujours été locataire et mes propriétaires ont été en majeur partie des retraités que mon loyer permettait de faire vivre dignement. Imaginez-vous bien que ceux qui ont beaucoup d'argent ont vite compris qu'il ne fallait pas le laisser dans un actif immobilier non délocalisable et taxable à volonté. Ceux-là ont retiré leur bille depuis bien longtemps (2007 au plus tard).

Bien à vous.
Christian

Anonyme a dit…

Peu importent les nouvelles mesurettes en vue, dont on peut penser qu'elles ne seront jamais appliquées. Les faits sont là. Dans ma région PACA (j'ai vécu dans le 06, je suis dans le 04), on loue aujourd'hui une "studette" au prix d'un T3 il y a dix ans. Les "studettes" se multiplient, meublées ou non, les T2 deviennent inaccessibles à un salaire médian, en gros l'accès au "vrai" logement est à l'image de l'accès à un "véritable" emploi : on ne s'installe plus, on passe sa vie le cul entre deux chaises, et on voit ce qu'il en est, lorsqu'on vit dans une petite ville comme la mienne, de l'impact économique de cette précarité "entrée dans les moeurs" : les enseignes d'électro-ménager ferment, on n'achète plus ni aspis ni cuisinières ni laves-linge, on n'achète plus ni fringues ni déco faute de place, on ne va plus au restau et on limite les sorties. Les trois-quarts du peu qu'on gagne, quand on a encore un travail, passent direct dans la poche du taulier, dans l'eau surtaxée et l'EDF. De surcroît, personne n'est là pour faire respecter les mises aux normes, les apparts sont souvent vétustes et mal chauffés (ici on est en montagne et la facture fait mal alors qu'on se pèle tout l'hiver!), les tauliers savent pertinemment que les procédures sont interminables et coûteuses et les locataires aussi. Donc on se casse souvent sans payer le dernier mois après des tonnes de lettres recommandées laissées sans suite pour des travaux qui ne seront jamais faits, et à chaque retour sur le marché des gourbis, les apparts prennent dix à vingt euros de mieux, charges non comprises. Mon ex était dans le secteur hospitalier, et elle me disait souvent que son CH et les cliniques voisines peinaient à recruter des personnels infirmiers qui zappaient la région PACA en raison précisément du coût forcené du logement et de sa qualité lamentable. Les tauliers contribuent plus à la casse du pouvoir d'achat et à la destruction d'une économie locale que n'importe quelle augmentation de taxe. Les tauliers sont intouchables, ils font ce qu'ils veulent, le marché est pipé, ce sont les bases mêmes de la société qui sont minées par ces gens-là, car on ne peut pas concevoir de vie normale sans logements dignes de ce nom où on ne laisse pas plus de la moitié de ce que l'on gagne. On attendait de la Gauche une véritable politique de plafonnement des loyers, on voit qu'il n'en sera rien et que cette petite poignée de nantis continuera à s'en foutre plein les poches sur le dos d'une majorité de pigeons.

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