19 juillet 2010

La martingale méxicaine

Intéressant article du Monde ce matin sur une situation aux allures de dilemme de type "ça passe ou j'me casse" où, une fois de plus, la soumission de la victime est l'invitée d'honneur au bal des dominants :

Un des anciens plus gros sites industriels français General Motors à Strasbourg voit son destin suspendu à l'acceptation par ses salariés d'un plan de sacrifices sociaux (par MLC, gestionnaire en charge de liquider les actifs de GM), dans le cadre d'une reprise par cette-même société (qui s'y connait en optimisation vu qu'elle a déjà viré la moitié des effectifs en dix ans et l'a laissée en déshérence depuis sa chute, GM est depuis nationalisé.)

Dans l'argumentaire, l’entreprise est mise en compétition avec un des sites mexicains de la compagnie.

Le Mexique, arrière-cour tiers-mondesque qui paye rubis sur l'esclave sa proximité avec l'opulence californienne à crédit, est un pays réputé pour la générosité de ses salaires, son respect du travailleur et sa bienveillance patronale en terme de mutuelles, de redistribution et de soins.

Bref, du gode libéral king-size.

Et comme le bonheur ne vaut que s'il est partagé, le plan "salvateur" table sur un large consensus syndical.

"«- Pragmatiques, les élus CFDT de Strasbourg considèrent que le retour de l'usine au sein de GM serait "une bonne nouvelle". Car "si on leur dit non, ils iront voir ailleurs. Et notre avenir sera sérieusement compromis", analyse M. Ruhland, secrétaire général CFDT du comité d'entreprise. En conséquence, la CDFT s'est attelée à "trouver une solution pour faire baisser la masse salariale de manière à ce que ça fasse le moins mal possible aux salariés". »"

Sans déconner ?

Un sou est un sou : ta prochaine cotisation CFDT, envoie-la directement au Medef.

Un porte-parole du site que j’imagine le nez dedans, endetté jusqu'au coup, avec une visibilité à court terme d'une poignée d'euros, le tout dans une région sinistrée, ajoute :

""GM Company ne nous a jamais demandé de travailler comme les Mexicains, mais plutôt de faire un effort pour réduire l'écart avec les coûts pratiqués là-bas" (tu saisis la nuance, moi pas) [...] "En contrepartie, GM a pris certains engagements, en garantissant notamment que, si l'usine devait fermer d'ici à 2013 faute d'activité suffisante, la direction rembourserait aux salariés les efforts consentis", ajoute le porte-parole."

Toute ressemblance avec une histoire de pneus et de promesses dégonflées qui a fini au tribunal pour cause de passage nerveux à la sous-préfecture de Compiègne de quelques salariés trahis, serait fortuite ou involontaire.

Annonçons tout de suite la couleur de l'hypothétique remboursement des efforts certains : un gros coup de pied au cul avec, au mieux, une boite de chocolats Lidl dédicacés « work harder sucker » et pour les plus de 50 ans, une carte platine Pole emploi, membre donné.

Mais retournons au Monde :

"Pas question de réduire les effectifs, ni d'accepter des baisses de salaire brut, dans une usine où "les gens sont plutôt correctement payés", selon le syndicat [CFDT]. L'idée est plutôt de rogner sur différents avantages, comme l'intéressement, les cotisations patronales à la mutuelle de santé, les subventions au restaurant d'entreprise, ou sur les journées de RTT, dont sept ou huit (sur dix-sept par an) disparaîtraient."

Ah bah ça va alors. S'il n'est question QUE de faire une croix supplémentaire sur des acquis sociaux, on ne va pas se plaindre non plus.

Le projet de reprise est soumis ce jour à l'ensemble des syndicats, seule la CGT a appelé à voter non.

Au-delà du cas GM : il est bien sur question ici de l'exemple donné aux autres salariés.


* * *

S
ous réserve que tout ceci ne soit pas une gigantesque entourloupe pour préparer le terrain à un joli LBO...


[Edit 20.07.2010 - 12.00 - Les salariés de General Motors Strasbourg ont approuvé à plus de 70 % le plan de reprise de leur employeur, conditionné à un gel des salaires sur deux ans et à une renonciation des jours de RTT. ]

6 comments:

Denis a dit…

Bonjour,

C'est drôle ça me rappel les ouvriers continental : ils avaient rogner les 35 heures et en échange la direction promis d'investir et de ne pas licencier ... et environ 2 ans après vous connaissez la suite!

Anonyme a dit…

Pour avoir une idée de ce que pense le MEDEF des indemnités versées lors des licenciements économiques , voir ce site d'une organisation d'intérêt patronal :

http://www.ifrap.org/Indemnites-de-licenciement-toujours-plus-haut-avec-Continental,1263.html

ZapPow a dit…

@ Set

Les quelques commentaires, au moins, font preuve de plus de bon sens, et de sens des réalités, que l'article.

Anonyme a dit…

je découvre ce blog... bien cinglant cet article...
hélas au petit matin, il semble que l'opération "vaseline contre chimichanga" se soit bien déroulée comme prévue...

Anonyme a dit…

Article dont le fond est bien triste. Etant Strasbourgeois, avec une mère qui a fait sa "carrière" chez GM pendant presque 30 ans, cela interpelle. Mais ce "fait divers", car il y en a tellement, décrit bien dans quel état d'esprit ce trouve notre pays, avec une plèbe aux ordres des grands conglomérats, prêts à se prostituer pour garder l'illusion, que tout va encore bien, que l'on peut encore payer les traites de sa maison hors de prix, et continuer à faire ses courses au Lidl sans faire de coupes franches sur la viande....

Unknown a dit…

et on s'étonne après d'entendre des slogans délicieusement désuets, dans les manifs... " a bas les socio-traîtres.." ras le bol de ce chantage au chômage... trop facile

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