6 mars 2025

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Quoi qu’il en coûte 2 : le retour de la peur qui tue

Vous vouliez des hôpitaux où l’on ne vous laisse pas mourir dans les couloirs, des écoles à proximité où vos gamins ne se font pas poignarder sous le regard d’auxiliaires de sécurité payés un demi-SMIC, ou plus simplement des augmentations de salaire ? Niet. Vous aurez la peur et la guerre. Il faut combattre le nouvel Hitler.  C’est, en substance, l’allocution télévisée d’Emmanuel Macron hier, justifiant la version 2 du « quoi qu’il en coûte », sous-titrée : « cette fois, c’est la lutte finale contre l’Empire du Mal ». 

Pas besoin de regarder cette prise de parole exceptionnelle de notre chef de la résistance contre les moulins à vent pour comprendre que le guignolo nous refait le coup du Covid. Tel Colin Powell agitant sa fausse fiole d’anthrax devant le Conseil de sécurité de l’ONU en 2003 pour justifier l’intervention militaire américaine  en Irak, Macron fait trembler les boomers : 

« La Russie est devenue une menace pour la France et l’Europe, et son agressivité ne semble pas connaître de frontières (...) Face à ce monde de dangers, rester spectateur serait une folie  » 

Alors que, après son petit coup de calgon de vendredi dernier, Zelensky publie sa lettre d’excuses à Donald Trump pour négocier un deal à l’amiable qui permettrait la paix pour son pays (un détail sans importance), la coalition des autocrates européens en déliquescence trouve dans la figure du méchant Poutine l’opportunité de regagner quelques galons de légitimité. Rien de tel qu’une cause va-t-en-guerre pour étouffer, sous un patriotisme de pacotille, les bisbilles locales, qu’elles concernent l’économie, la précarité grandissante des peuples ou, plus vulgairement, quelques considérations démocratiques. Le tout est acclamé à l’unisson par la presse de Palais, qui déploie son génie de la propagande et du suce-boulisme contorsionniste dans ce genre d’épisodes de délire collectif. Un délire qui a le mérite d'insuffler à une nation, au moral et à l'économie à zéro, de nostalgiques réminiscences d’empire colonial planétaire. 

Sortons du fantasme. 

Avons-nous des problèmes à régler chez nous avant tout ? Oui. 
Que nous apporte la résolution ou pas de ce conflit ? Rien.

Avons-nous les moyens de nos ambitions ? Évidemment non. 

Trois bonnes raisons, donc, pour Macron de s’y engouffrer, la fleur au fusil. 
Juste au niveau français, on approche les 4 000 milliards de dettes, et déjà, on nous annonce 100 milliards d’euros supplémentaires par an pour notre « réarmement », destiné à compenser le désengagement américain en Ukraine. Pas grave : en puisant dans l’épargne des Français et en détruisant encore un peu plus le service public, on pourra acheter de nouvelles armes (américaines, c’est ça qui est rigolo) afin de soutenir un pays classé 104e sur 180 en matière de corruption. Le tout, bien sûr, en arrosant les intermédiaires les plus obscurs à coups de « fonds européens » et de rétro-commissions opaques (une spécialité bien française). Résultat : un appauvrissement supplémentaire pour les peuples d’Europe, au nom de la Grande Cause, tandis que les États-Unis et la Russie, déjà passés à autre chose, se partageront l’Ukraine et ses ressources. 

Pendant que nous financerons ce rêve d’Europe militaire par une dégradation sans précédent des conditions de vie des pays endettés et la séquestration de notre épargne, n’espérez pas que cet « effort de guerre » s’applique à nos menaces locales : islamistes, terroristes, ou encore le « simple » OQTF de proximité qui poignarde des enfants à l’école ou roule au camion sur des familles entières, désormais sur une base quasi quotidienne. Non ce n’est pas une priorité. D'ailleurs ça n'existe pas.

C’est toujours fascinant de constater à quel point le biais d’investissement (à savoir la détestation, à ce stade irrationnelle, de Trump et de Poutine), combiné à une propagande à l'enclume (comme pour le Covid : si les médias ne rabâchaient pas cette histoire ukrainienne H24, alors qu’elle a commencé bien avant 2022, on ne s'en apercevrait même pas), peut modeler l’opinion publique

Aujourd’hui, presque toutes les informations sont accessibles, les angles d'analyse aussi. Peut-on même seulement en vouloir aux dirigeants de manipuler les masses, ou faut-il plutôt questionner l’aptitude des masses à se faire manipuler à répétition ? Un seul ennemi, c'est plus simple. Poutine, c’est l'unique méchant, Volodymyr, c’est le seul résistant. Le vaccin, c’est la santé et Macron, la sécurité. Dormez bien et préparez le porte-monnaie.



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