29 février 2012

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La campagne du cancre

Marketing à la Morano, idées à la Chuck Norris: telle est la dynamique de campagne de notre président-candidat.

Au programme du jour, attention accroche-toi au pinceau je retire l'échelle, il propose aux enseignants de "travailler plus pour gagner plus".

Si la "valeur travail" est bafouée dans ce pays, la "valeur photocopieuse", elle, se porte sans honte. 

Notre souverain en opération "tout doit disparaître" sur le bilan propose donc 45% d’augmentation de travail aux enseignants pour 25% d’augmentation de leurs revenus: note l’équité du deal représentant une baisse de moitié du tarif horaire. S'il y une telle demande et tant de pognon à redistribuer, on se demande alors pourquoi a-t-il liquidé 80.000 postes dans le secteur en 5 ans et supprimé un tiers du réseau d'aide aux élèves en difficulté ? 

Prend-il les enseignants pour des truffes? Sa proposition pas même chiffrée (estimation basse 6 milliards d'euros) ne tient pas compte de la formation, de la géographie sociale, ni de la pénibilité du métier d'enseignant (14% se déclarent en situation de burn-out professionnel, 24% en état de tension au travail) et encore moins des enfants (rappelons que la France a le taux d'encadrement scolaire le plus faible des pays de l'OCDE avec 6,1 enseignants pour 100 enfants). 

Tirée de sa bible se faire réélire par les nuls, ouverte en catastrophe au premier trimestre, la pipeau-proposition ne s’adresse même pas aux enseignants dont les études d’opinion indiquent qu’ils sont trois fois plus nombreux à soutenir François Hollande. Les professeurs et instituteurs savent par ailleurs très bien à quoi s’en tenir avec un président n’ayant en ligne de mire que le dynamitage pur et simple de l’éducation nationale, histoire de la redistribuer au privé, morceau par morceau et classe sociale par classe sociale. A ce titre, comme dans toute casse cyniquement programmée de secteur public, l'échec scolaire sert même d’argument pour opérer la bascule dans le privé en distillant dans les consciences que "public = déclassement".

Non, une fois encore en visant la saturation de l'espace médiatique selon la technique ABC (Agenda-Bourrage-Clash : 1/ Lancer une proposition bidon ou mensonge pour faire les titres. 2/ Générer du débat sur les chaines infos de la TNT et les talk-radios et alimenter le clivage en dressant les uns contre les autres. 3/ Recommencer le lendemain), il s’agit de s’adresser en priorité à ceux qui vouent aux gémonies l’éducation nationale (bastion fantasmé de hordes molasses, incultes et syndiquées ne sachant plus inculquer la discipline), bref à ceux qui n’ont plus rien à voir avec l'école ni de près ni de loin depuis minimum 40 ans. Si au passage les profs s'insurgent, c'est tout bénef: cela permettra aux premiers, confortés dans leur croyance, de réaffirmer que les seconds sont des feignants.

Au-delà d'être désespérée, la tentative est désespérante, c'est un signe extérieur flagrant d'un patinage dans le vide du candidat-président. Faut-il être à ce point à court d’arguments pour chercher à ressouder son électorat fétiche autour d'une position qui fait déjà consensus chez lui: la détestation de l’école publique? 

Illustration: Cameron Diaz dans Bad teacher (2011)

5 comments:

Anonyme a dit…

Dans le camp d'en face, on peut constater que Hollande reprend un peu la même stratégie que Sarko en 2007:
1-balancer une proposition bien, bien clivante, qui met la droite sur la défensive, dans le registre du gémissement de protestation (la fameuse tranche d'impôts à 75%);
2-laisser les médias reprendre le débat et regarder la mousse qui se forme à la surface du bain médiatique ;-)
3-Quelques jours plus tard, recommencer. Même si personne ne se fait d'illusions sur ces promesses.

Il avait déjà un peu amorcé la manoeuvre en mettant en avant le droit de vote des étrangers et le remplacement du quotient familial par un système plus équitable, ce qui a bien fait piailler la droite, qui se voyait revenue aux zheures- les-plus-sombres-de-notre-histouère-gaucho-eugéniste. Il confirme avec la tranche à 75%, comme Sarko en 2007 avec son ministère de l'Immigration.

Que va-t-il nous sortir la prochaine fois ? Un audit avec remise en cause de tous les allègements de charges consentis aux entreprise depuis 1994 ? La fermeture administrative du Fouquets ? Une remise en cause du régime fiscal des fondations ?

Vazy Françouééé ! Ksss ! Ksss ! Morzy l'oeil !

(Je vous laisse, je retourne faire ma réserve de pop-corn :-)

sivergues a dit…

Professeur : C'est celui que les élèves supportent ensemble, qu'il ne faut surtout pas subir en tête à tête. Mépris des lycéens pour les fayots des la classe, lécher le raté, c'est en être un.On à rien compris, aux petits magrébins qui fréquentent à regret notre école laïque et notre enseignement. Les élèves ne se mettront plus debout, et ne se rangeront plus au sifflet et sans tant mieux. L'école est désormais cosmopolite, et les cybers-profs arrivent à galop.j'ai moi aussi failli marcher dedans avec mes rêves de cogestion avec des syndicalistes arrivistes peu scrupuleux, malsains. Ce que nos enfants doivent s'ennuyer !u

Axel a dit…

J'aime bien le point de vue. Espérons en effet que ce soit une manoeuvre désespérée (et désespérante, l'un n'empêche pas l'autre dans ce cas précis).

Fernand Bloch-Ladurie a dit…

Sarkozy risque de plus en plus d'entraîner la droite dans une dérive fascisante, à vouloir ramasser tous les soutiens, même les plus odieux. Dieu merci, le peuple de Bayonne a su le remettre à sa place.

Anonyme a dit…

En plus tu mets des illustrations sympathiques à l'occasion. Tu t'améliores encore toi. Te manque plus qu'une hache sur l'épaule et je fais ma demande. *_*

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