29 octobre 2010

[video] 28 octobre, ne pas baisser la tête

par

A 300 mètres devant le cortège, un type se défait de tout ce qui peut le faire ressembler... à un policier. Ayant aperçu son relooking, une dame rejoignant la manifestation l'interpelle en souriant:

LA MANIFESTANTE
"- Allez y mollo cette fois... ouais bon, je sais que c'est pas vous. Vous êtes des policiers bien vous..."

14h00. Malgré la désinformation, l'intoxication, les cargaisons de centenaires hyperactifs qui nous sont promis pour 2030, les raffineries ouvertes mais fermées et, malgré les vacances et la loi sur la réforme des retraites votée par nos "représentants": vous êtes toujours là.

ailleurs, ça ne veut pas faiblir.

A Paris, ne disposant que d'une poignée d'heures, ce coup-ci, je me joins à la CGT en tête de la manifestation, de République à St-Augustin. Cortège dense, poings levés, des chants , des tambours et de moins en moins de slogans. De la fatigue sûrement, mais pas de résignation. En revanche, le sentiment qu'il faut aller bien plus loin, que le blocage est la seule parade face à laquelle le Monarque reste sans voix. Constatons également que le désintéressé Guillaume de Malakoff a désormais autant de popularité que la politique sociale de son Monarque de frère.

A notre approche, les ouvriers sur les chantiers de restauration des immeubles haussmaniens (quelque chose me dit que ce n'est pas pour faire du HLM) s'arrêtent de bosser et expriment leur soutien en tapant avec leurs casques contre les échafaudages.

Après avoir traversé le quartier des banques, Place St-Augustin, deux syndiqués CGT d'une cinquantaine d'années discutent. L'un travaille dans le secteur bancaire, l'autre dans l'industrie. La militante de la banque est en colère contre les syndicats qui n'appellent pas à aller jusqu'au bout de la "grève générale".

LE SYNDIQUE
"- Ça dépend des salariés du privé maintenant.

Les deux reparlent de la triste capitulation de Chèreque chez Calvi et sont sans pitié envers les directions syndicales, même la leur. Seul Solidaires trouve grâce à leurs yeux.

LE SYNDIQUE
"- Mais qu'est-ce que tu veux... J'y crois encore, sinon je ne serais pas là."

LA SYNDIQUE
"- C'est tellement gros ce que l'on a en face de nous. Je n'ai jamais vu une telle manipulation. Il leur a juste fallu trois casseurs pour nous discréditer.... Ça me fait mal au cœur toute cette énergie méprisée. Et qu'est-ce qu'on fait maintenant ? "

LE SYNDIQUE
"- 2012. Il faudrait peut-être se mettre à voter, l'escroc et sa clique faut les foutre dehors. Point barre."


C'est à ce moment-là que le Mojito de la Cégèt (rapport qualité / prix imbattable sur Paris) commence à me taper sur la tête. Je remonte le cortège vers les grands magasins dont les vitrines sont protégées par des cordons de CRS. On y prépare déjà les décos de Noël (de ce côté là non plus, la mobilisation ne faiblit pas). Un ami syndiqué m'avoue qu'il en a plein les pattes de ce mois de marche dans la capitale et que les jours de grève commencent sérieusement à faire mal au porte-monnaie. Et non, la grève n'est pas une partie de plaisir. Ce que ne semble pas saisir une dame distinguée qui, voyant ma caméra, m'interpelle.

LA DAME PROUT-PROUT
"- Vous êtes journaliste ?"

SEB MUSSET
"- Non blogueur. C'est comme journaliste mais sans carte, sans paye et sans ordinateur volé."

LA DAME PROUT-PROUT
- Non parce qu'il y en a ras-le-bol des grèves ! Vous les journalistes, vous montrez toujours la même chose, les gauchistes et les manifestants. J'ai 68 ans et je travaille [à 16h00 avec un sac Lancel devant les Galeries Lafayette, et vu qu'elle en parait 55 ans, j'ai des doutes]. On est 65 millions contre tout ça ! Y en a assez de ces gens ! On a fait une pétition en ligne contre la grève, on est déjà 500.000 à l'avoir signée. Vous n'en parlez jamais !"

Injustice réparée Madame.

La charmante représentante de la minorité opprimée qui dirige ce pays repart vers son shopping, prenant bien garde de ne pas se frotter aux métallos hurlant. Derrière moi, deux types d'une soixantaine d'années discutent économie avec une justesse d'analyse que l'on n'entend plus sur aucun plateau télé. Il est question de la destruction de la retraite par répartition et de l'avènement programmé des complémentaires (avec argent placé sur les marchés, ça c'est de la retraite garantie... de se crasher).

UN DES DEUX EXPERTS ANONYMES
"- Tout cet argent qui va être investi sur des produits foireux, ça va encore accélérer les licenciements, alors qu'il faudrait même pas le dixième de cette somme pour régler leur soi-disant problème des retraites. C'est la dernière ligne droite. Y a plus qu'une seule logique chez eux : ils veulent se gaver jusqu'au bout avant le grand chaos."

Il est 16h30, j'apprends que la CFDT n'a toujours pas quitté la place de la République. C'est loin d'être le fiasco annoncé sur la home-page du Figaro, très loin. C'est à dire qu'à force de faire 3 millions tous les 3 jours, on se blase vite dès que l'on ne rassemble dans la rue QUE 2 millions de manifestants.

La tension est loin d'être retombée, rien ne sera oublié et, vu d'en-bas, aucune loi n'est définitive.

Quelques images - No comment - :

28 octobre 2010

La réunion du 28

par

De : Dylan Latouche, responsable Nord, Nord-Est de la coordination réseau.
A :
Managers du secteur B-14.
Objet :
réunion inter-régions du 28 octobre 2010 à Paris.

Bayonne, le 24 octobre 2010.


"Bonjour à Tous,

Vous le savez, notre pays traverse des moments compliqués mettant en péril les finances de la compagnie, déjà hautement aléatoires. Comme vous avez pu le constater, nous avons du réduire les effectifs de 30% dans les entrepôts. Malgré la hausse de notre chiffre d'affaires, nous avons préféré être prévoyant car la crise ne nous a pas épargné.

Mais ne nous laissons pas abattre! La réunion réseau de nos managers France est d'ailleurs là pour ça ! Elle aura lieu le Jeudi 28 octobre à Paris. Elle est maintenue et ce, malgré les incertitudes liées aux mouvements terroristes et sociaux.

Nous y ferons le point sur vos mauvais résultats et les optimisations de postes. Vous arriverez donc la veille à Paris. La plupart d’entre vous avez des amis, de la famille que vous visitez à chacun de vos déplacements à Paris. Allez dormir chez eux. Pour ceux qui ne sont pas dans ce cas me contacter en privé pour trouver une solution personnalisée. Le Picasso d'entreprise peut contenir jusqu'à trois places allongées.

Si les "perturbations" persistent jusqu'à la veille et que votre ville est reliée à Paris, par une fréquence TGV importante, vous prendrez le 1° train du 27 matin.

Le trajet pouvant durer de 3 à 12 heures, vous en profiterez pour réviser les nouvelles modifications du règlement intérieur de l'entreprise. Certains mots sont désormais interdits sur nos surfaces de vente : "wesh", "la vache" et "revendication".


Pour les autres managers, vous pouvez monter dans le train que vous voulez quel que soit l’horaire indiqué sur votre billet, les contrôleurs sont très conciliants. Dites-leur que vous êtes grévistes. Ça marche toujours.


Vous aurez un billet imprimé classique, retiré à la borne le jour même (pas électronique, ni @billet) que vous ne composterez pas à quai, mais à bord, auprès du contrôleur. En effet, si vous montez dans le train, que vous compostez votre billet et que le train ne part pas ou arrive avec plus de 30m de retard, nous ne vous rembourserons pas le trajet.

Nous vous conseillons d'ailleurs, pour un remboursement sous 60 jours, de prendre une photo de vous avec le contrôleur au moment où il oblitère votre billet.


Une fois à Paris, le 28, évitez le secteur République-Saint Augustin. N'adressez pas la parole à ces groupes d'individus au milieu de la chaussée brandissant banderoles, calicots et vuvuzelas.
Ils sont dangereux pour la productivité. Et de plus vous risqueriez de vous faire taper par la Police. Nos services nierons alors avoir eu connaissance de vos activités.

Je rappelle qu'à la dernière réunion qui a eu lieu
le 24 juin 2010, vous étiez tous présents. Et ce malgré les odieux lancés d'œufs pourris sur les vitrines du siège par les licenciés.

Ce n'est qu'en faisant bloc, unis avec l'entreprise dans le dos, que nous ferons face à l'adversité des forces rétrogrades des nantis de la contestation.

Cordialement, Dylan Latouche
Responsable réseau Nord, Nord-Est

P.S : Suite à un mouvement de grève du service comptabilité, nous ne serons pas en mesure d'assurer un plat chaud pour tous. Merci de faire le nécessaire et d'apporter un panier repas."

27 octobre 2010

Tu es au courant ?

par

Les vacances sont des périodes propices, choisies par le gouvernement du pouvoir d'achat et des bras cassés, pour te planter un nouveau couteau fiscal dans le dos.

Au hit-parade des réjouissances d'automne, François Baroin confirme ce matin la nouvelle augmentation des tarifs de l'électricité[1], la dernière datant (seulement) du 15 aout 2010. Et là je dis chapeau Harry Potter. Dans le pataquès de la réforme des retraites, le premier lundi des vacances de La Toussaint, la promesse d'une hausse de 3% à partir de janvier 2011 passe comme une lettre à la poste (pas privatisée bien sur).

(ci-dessus : François Baroin annonce la hausse des tarifs de l'EDF dans les studios d'Europe1)

Rappelons que le site Actuchomage estime à 3.4 millions le nombre de foyers français touchés par la précarité énergétique, et que les coupures de gaz pour impayés (autre joli secteur qui s'est pris une bonne augmentation de 15%[2] en 2 ans) ont été multipliées par 30 entre 2008 et 2010.

Le plus intéressant de la nouvelle hausse d'EDF reste l'argumentaire : une "contribution au service public de l'électricité" (je croyais que l'abonnement se chargeait de cela, mais bon j'ai du mal lire) pour rembourser le rachat de l'énergie photovoltaïque.

En gros, l'énergie solaire, censée être la plus économique à titre individuel, va augmenter la facture de tout le monde. C'est bizarre, je ne suis que moyennement étonné...

Résumons. En plus du crédit d'impôt (50% réduit à 25%) pour pousser le propriétaire un peu thuné, ou l'entreprise, à l'installation de panneaux solaires pour alimenter en courant son pavillon ou ses locaux, EDF s'engage (par la loi) à racheter le surplus de Kwh bien plus cher (entre 0.27 et 0.58 euro / kwh) que le tarif de vente (0.09 euro kwh).

On aurait voulu pousser les gens (euh... pas les 3.4 millions de foyers mentionnés plus haut) à acheter du panneau solaire en masse (non seulement pour économiser, défiscaliser, mais surtout gagner de l'argent) qu'on ne s'y serait pas pris autrement. Le souci écologique là-dedans ? WTF, c'est de "la croissance verte". Économiser les ressources génère du pognon et permet au politique de s'offrir une virginité, faudrait être con pour ne pas en profiter. (Rappelle-toi le Grenelle de l'environnement et toussa, on allait voir la vie en vert...)


Je suis perplexe...

- soit le photovoltaïque est un foutage de gueule qui a permis à certains marchands bien organisés, en surfant sur l'air du temps, de vendre des installations coûteuses à moitié payée par un état, pipant les dés via une facturation avantageuse dont il demande aujourd'hui à tous les français de régler l'ardoise.

- soit, c'est un moyen efficace de produire de l'énergie propre et pas chère. A ce moment-là, pourquoi les particuliers l'ayant installé devraient-ils gagner de l'argent avec le transfert de leur surplus d'électricité vers EDF ? L'entreprise éviterait ainsi de refacturer ce prix (venu du ciel) aux autres clients qui n'ont pas les moyens de s'installer de l'énergie propre, rapport qu'ils ont déjà à peine les moyens de régler leurs factures ?

Ce serait là une vraie contribution au service public de l'électricité.


[1] pour Lagarde, c'est de la faute à Borloo. Pour Baroin, c'est de la faute à Hulot.

[2] tu aimerais que ton salaire bondisse de la sorte. Mais chut, c'est "populiste" de dire ça.

26 octobre 2010

Enfer mécanique

par

Panique en Citropeine au premier jour des vacances de la Toussaint 2010.
BRUNO« - B#rdel de m@rde ! Quelle c&nnerie ce pays ! »

Au début, ça l’a amusé cette histoire de grèves et de blocages. Mais là, faut pas déconner.

10h45. Bruno tourne et tourne encore au volant de sa voiture, à la recherche d’une station-service. C'est la cinquième de la matinée qui affiche:

Désolé, nous ne sommes pas en pénurie, on n’a juste pas d’essence.

Il a beau lui rester 3/4 d’essence dans la Citropeine, Bruno stresse. Même si un réservoir rempli ne lui suffira pas pour l’aller-retour des vacances, il le lui faut: c'est son droit de citoyen. Dans la nuit, il doit prendre la route avec Bibou, sa compagne, et Boudjou, leur gamin, pour rallier la Moselle et passer une semaine dans un gîte avec les beaux-parents, à 666 kilomètres de là.

« La Moselle en octobre, c’est pas cher et c’est eux qui payent » fut l’argument massue qui acheva de convaincre Bruno d’accepter une cohabitation avec les golden retraités dans un 42m2. Il a tout prévu, a pris 40 DVD de Jet li et un couteau de survie. Ça devrait bien se passer.

Bruno sillonne la banlieue d’une station vide à l’autre, au gré des centres-commerciaux où bouchonnent en auto d'autres comme lui, vidant lentement leur réservoir dans l’espoir de le remplir.

A l’arrière de la Citropeine, Boudjou, 5 ans, fait comme sa maman quand elle est au travail : il apprend par cœur à les articles et les promotions du catalogue Intersection.

BOUDJOU à voix haute
"- Yaourts Bifikus par paquet de 12, avec 3 points fidélités et une figurine articulée « mon premier Estrosi » offerte : 4.85 euros."

BRUNO
"- Boudjou tu vas la fermer un peu, j'entends plus RMC !"

RMC
" - De l'essence il y en a ! Dans les cuves des syndicats !"

Le manque de carburant commence sérieusement à lui ronger la raison.
On peut faire endurer beaucoup à Bruno, lui rajouter des heures supplémentaires non payées, lui repousser l'âge de la retraite, lui augmenter pour la 3e fois en 2 ans son électricité mais y a des limites à l'abus : faut pas toucher à la Citropeine sinon… sinon… euh bah sinon… ça va chier.

Tout au long de la matinée, Bibou au boulot est alertée en temps réel des mésaventures de l'avide d'essence, d’une file d’attente à une autre. 78 SMS échangés en 2 heures.

12h30. Direction le Mac Daube. La petit a besoin de s’alimenter. Pas mieux.

13h30. Reprise de la route dans ce monde post-apocalyptique qui survit comme il peut à la pire des catastrophes humaines : la terrifiante perspective d'être, peut-être, un jour, qui sait, privé de sa voiture.

BOUDJOU
" - Oh papa un "Intersection"! Si tu te dépêches: avant 15 heures, 3 paillassons "Grolitude" sont offerts pour toute pré-commande de 6 bricks de Beaujolais nouveau avec la carte "Poisse". Vite, vite !"

BRUNO
"- Mais la ferme ! Tu vois pas que tu me fais gourer ! On ira après !"

RMC
" - Et cette image désastreuse qu'ont de nous les touristes !"

14h00. Sur SMS de Bibou, Bruno a enfin « l’idée ». Il va acheter l’application Heil-phone pour trouver une pompe fiable. Ils en ont parlé au JT.

14.30. Pause goûter au Mac Daube. Et oui, les frites ça creuse.

BOUDJOU
" - Prends deux Api-Mille papa. Avant 17 heures, y a un simulateur de coût quotidien de la grève « Toys are Lagarde » offert en prime."

15h30. Le numéro de carte bleue a juste le temps de passer avant que l’Heil-Phone ne tombe en carafe sur le parking du Mac Daube. Pas cool. Moralité : ne pas jouer au sabre laser avec son Heil-Phone toute la journée au taf', ça use la batterie.

La panique est à son comble vers 17h, lorsque la jauge est presque à zéro. Au bord du désespoir, Bruno pense sérieusement à la défenestration par la porte avant gauche de la Citropeine.

Le gamin en est à son troisième Milk-shake vanille et le sucre ça énerve:

BOUDJOU
" - J’exige ma maman ! ...des rollers bleus, Couilles of Duty 4 et un scooter."

Bruno est au bout du rouleau et de sa réserve.

BRUNO
" - P#tµin de B*rd&l de ch#er de m?rde de c@ns de grévistes !

Heureusement, il se souvient qu'il lui reste dans la boîte à gants, un deuxième téléphone mobile, résidu d’un ancien abonnement impossible à résilier. Au téléphone, Bibou lui remonte une information en provenance directe du réseau de résistance qui s’est organisé contre la barbarie de l’oppresseur syndicaliste, dans le maquis climatisé de son service comptabilité.

BIBOU
" - A la ZAC de Planète Caddie, les pompes sont pleines ! Je répète : A la ZAC de Planète Caddie, les pompes sont pleines. Fonce, Bruno, fonce !"

17h10. C’était moins une. Après quelques dizaines de minutes d’attente, Bruno peut enfin gorger le réservoir du précieux liquide libérateur à 1.35 euro le litre.

RMC
" - Victoire ! Le mouvement de contestation essouffle, la démocratie a triomphé !"

Bruno est soulagé. Après la bataille, il se grille une cigarette sur le capot de la Citropeine.

LE MANAGER DE LA STATION SERVICE
" - Hep Monsieur ! On n’a pas le droit de fumer dans une station service !"

BRUNO
" - Oh mais je rêve ou quoi, et ma liberté alors ! Ce pays devient vraiment débile !"

Sur le chemin du retour, Bruno culpabilise un peu. Boudjou a passé son premier jour de vacances en ludospace à lire des catalogues Intersection. Pas sympa.

Pour se faire pardonner, direction le King Joujou où il achète à Boudjou une récompense, symbolisant sa confiance dans les fondements d'un modèle qui est là pour durer : une belle voiture télécommandée.


22 octobre 2010

Nous, le peuple.

par

On m'a demandé une fois "Pourquoi faudrait-il être fier d'être français ?", je ne savais que dire, considérant que la question contenait déjà la réponse.

Mais, il faut bien avouer que, jour après jour depuis mai 2007 constatant la politique, les propos et les méthodes du Monarque et de son gouvernement de compagnie, leur suffisance et leur mépris du peuple, chacun pourra éprouver au sujet de la nationalité figurant sur sa carte d'identité une certaine...

...honte.

Une énième étape a été franchie le 21 octobre avec le discours monarchique de Bonneval, à l'architecture directement pompée sur "la libre-antenne" d'RMC, réduisant la lutte sociale des derniers mois à quelques casseurs des dernières heures - au sujet desquels quelques doutes commencent à poindre - et le manque d'essence à la veille des vacances (enfin pour ceux qui peuvent s'en offrir).

(UMP: un programme profond et visionnaire directement puisé à la source des plus grands intellectuels hexagonaux.)

A court d'éléments de langage, le Monarque a même donne dans le sempiternel et poignant "prise d'otages" des français (curieusement renommés pour l'occasion des "gens qui n'y sont pour rien") par les syndicalistes (qu'il finira bien par assimiler à Al-Qaida).

Pour son information, voilà des otages :

Le Monarque osa même un "et c'est encore une fois les petits qui vont trinquer pour les autres!" (définissant ainsi par la même occasion les effets à escompter de sa réforme des retraites).

Avec l'entrée dans la danse de "casseurs" providentiels et la multiplication des blocages sur fond du soutien populaire de la mobilisation, le discours de l'autocrate suit la ligne éditoriale des émissions de radios périphériques (caressant dans le sens du poil le "golden retraité" à fort pouvoir d'achat, se trouvant souvent être un électeur UMP) qui, entre deux spots pour Carmignac Gestion ou Malakoff-Méderic, cantonnent la question de la réforme des retraites et le massif mouvement s'y opposant à "La France peut-elle se permettre un tel mouvement social ?" (avec invité unique : Michel Godet. Jacques Marseille n'ayant pas pu lui donner la réplique pour cause de décès) ou encore "Que pensez de la désastreuse image que La France donne à l'étranger?"

A ces deux questions, répondons par deux autres:

- Doit-on attendre, comme en 1945, la destruction complète de l'économie et du pays pour assurer la défense des intérêts du peuple ? Ce à quoi, pour la déconne, on peut ajouter : en plein budget de rigueur, Le Monarque peut-il se permettre un avion à 140 millions d'euros ? (Mais attention dans ce cas, je pourrais être traité d'irresponsable ou de populiste.)

- Qui, excepté les nigauds de service, s'interrogeait sur "l'image de La France dans le monde" lorsqu'en 2004 elle s'opposait à l'invasion de l'Irak ? Si je me rappelle bien, même à droite, les tee-shirts " fuck Bush !" étaient" so trendy" à Paris ce Printemps-là.

J'ai croisé plusieurs américains cette semaine, jeunes et moins jeunes: ils soutiennent ce mouvement qu'ils regardent les yeux ronds en lâchant un : "si seulement les gens étaient aussi réveillés chez nous !" suivi d'un "ne lâchez pas, tout le monde vous regarde !". [mode mixbeat on] On a même aperçu un David Lynch à la terrasse d'une crêperie parnassienne réjoui par les cortèges et leur étrange alchimie de colère et de bonne humeur ! [mode mixbeat off]

A cette honte républicaine, système d'exploitation de classe qui tourne en tâche de fond avec ses mises à jour de plus en plus buguées, répond pour ma part depuis quelques semaines un sentiment auquel j'étais moins habitué au sujet des français :

...la fierté d'en être.

Ce pays n'a pas renoncé. Cette succession de manifestations hétéroclites partout en France et l'accélération des derniers jours me redonnent de l'espoir dans nos capacités de résistance.

Cette jonction entre plusieurs couches de la société, redoutée par tout gouvernement dès lors qu'il représente la convergence des animosités, est en passe de s'accomplir.

Syndiqués ou non, militants ou pas, familles, jeunes qui reparlent politique, partis de gauche mêlés, métallos et secrétaires, mômes bardés de
stickers de tous les partis et décryptant les prospectus de propositions de sauvetage des retraites[1] en demandant "c'est quoi la démocratie?", retraités, infirmières, pompiers, personnel de crèche, éducateurs, même Gérard Depardieu qui ne s'est pas fait casser la gueule[2] (preuve qu'on n'est que des gentils) et surtout, les bataillons de nouveaux venus de la contestation qui, il y a juste un an, regardaient les cortèges d'un œil distrait chez Pujadas avant de zapper sur plus belle la vie : ils défendent la survie des retraites par répartition et, à travers ce combat contre une réforme au débat escamoté symbolisant à la perfection sa façon de gérer le pays, contestent l'action de destruction généralisée du Monarque[3].

Chaque manifestant, quel que soit son milieu social, sa profession, son âge, sait désormais que les vautours visent en coulisses le cadavre de la solidarité intergénérationnelle que ce gouvernement d'entre-menteurs leur a promis.[4]

Nous vivons un moment exceptionnel, difficile d'analyser à chaud, dont le mutisme, puis leur précipitation à le minimiser et à le conspuer, des spadassins à mono-neurone du Palais et leur néo-libérateur en chef, prouve la puissance.

Et les manifestations ne sont que les flammes les plus visibles du brasier. Partout, en France, les piquets, les grèves et les blocages s'intensifient (le gouvernement pédalant dans sa communication à ce sujet depuis une semaine, assurant qu'il va débloquer ce qu'il refuse de considérer bloqué). C'est ainsi qu'au moment où la réforme est votée dans un espace capitonné où la contradiction est anti démocratiquement réduite à peau de chagrin, les poubelles s'entassent contre le mur du Sénat suite à une "légère" grève !

(vendredi 22 octobre 2010 : devant le Sénat au moment du "vote bloqué" sur la réforme des retraites)

On comprends aisément pour un gouvernement (qui, étrangement, ne s'appuie sur les sondages d'opinion[5] comme il le fait traditionnellement pour passer une loi après n'importe quel fait-divers) l'intérêt de passer en force quitte à s'essuyer les pieds sur la procédure, en humiliant les contestataires et les décourager. Son crédo est simple : tuer l'espoir des français avant la Toussaint pour satisfaire les marchés. (dans l'espoir qu'une femme voilée en mini-moto ou un rom conduisant sans permis lui permette de passer à autre chose.)

(le trône de Napoléon, dans le Sénat)

Pour notre Monarque, ce mauvais rêve collectif d'"une autre société" auquel il ne comprend rien (le pauvre, il a déjà raté Mai 68) doit s'estomper au plus vite. Il souhaitait son peuple docile et stupide, nous lui prouvons l'inverse.

Ne lâchons pas la bataille. Ne nous laissons pas impressionner par une machine médiatique dans le sillage d'un gouvernement autiste prouvant par le plus raide des exemples, sa vision du progrès (travailler jusqu'à la mort) et de la démocratie (fermer sa gueule).

Oui, le monde nous regarde nous opposer à la politique des néo-cons[6] afin de préserver le meilleur d'un modèle français. Il ne fut pas conquis en restant les bras croisés

Cet automne 2010, les français ont compris que chaque "progrès", chacune des "avancées" de ce gouvernement, les ramènent un peu plus vers le moyen-âge. Il n'est jamais trop tard pour bien défaire. Être mobilisé contre la politique inique de ce gouvernement est, ce jour, le premier facteur d'identité nationale.

(pièce rare, Sénat.)

* * *


[1] Bizarrement, ils sont de plus en plus nombreux, partis, associations et syndicats, à proposer des plans chiffrés de financement de la réforme. Bientôt, seul le gouvernement n'aura pas de plan de réforme sans déficit.

[2] Alors que son interprétation d'Obélix, à elle seule, méritait au minimum une baffe.

[3] Rappelons-nous que Le Monarque est l'enfant de nos basses aspirations et de la réduction de la pensée collective au "chacun pour soi". Crédo qu'il reprend à son compte dans la gestion de la "bataille des retraites". Il se concocte une image de marque pour ses années post-présidence (celles où il fera de l'argent). Il vise à incarner "l'homme ayant réussi à ramener les français dans le camp de la raison du plus riche".


[4] A défaut de repenser son modèle et d'appliquer une vraie taxation sur le capital et les flux financiers, le gouvernement se paye sur la bête en assénant aux français les français les moins fortunés (mais avec encore un peu de rentrées) à coups de matraque démocratique (modèle télescopique : un coup le pays, un coup l'Europe) une violente cure de rigueur dont les seules vues sont celles d'un enrichissement à court-terme des courtisans. François Fillon l'a encore répété dimanche soir sur TF1 : la taxation du capital est "une escroquerie". les choses sont claires. On ne pouvait mieux remettre au grand jour la guerre des classes.

[5] Lire la page 3 du sondage BVA / Canal+ du 22 octobre et l'analyse de Gael Sliman en page 3 :"le soutien aux grèves ne faiblit pas malgré la pénurie d'essence et les débordements des casseurs".

[6] Les médias étrangers qui ridiculisent le mouvement français sont les mêmes types de média qu'ici. Ils vont juste encore un peu plus à fond puisqu'il n'y a plus de répondant en face.



Illustrations : C.Platiau, RSF, France-soir, S.Musset.

20 octobre 2010

[video] 19 octobre : "Jusqu'au bout !"

par

De Place d'Italie à Invalides ce Mardi 19 octobre, ça déboule par paquet de mille sur le pavé parisien pour protester contre la réforme des retraites ("réforme" étant le nom politiquement correct pour "privatisation du machin et redistribution des pièces détachées à mes copains, voire à mon frère").

Ce qui paraissait inimaginable il y a à peine un an devient aujourd'hui, grâce au Monarque, une presque routine. Deux fois par semaine, nous sommes désormais 3,5 Millions dans la rue.

Les sens s'agitent, le gouverne ment, les Français s'inquiètent.

Une majorité de lycéens nous entoure dans cette partie de défilé. De la corne de brume, des mégaphones, de la bonne humeur colorant l'angoisse : l'autre monde[1] n'est pas fait pour le jeune homme. Le matin, une pluie fine et ambiance électrique de Nanterre à République faisait craindre l'incendie. Finalement, le ciel s'est dégagé et, hormis une intrusion violente dans un cortège de lycéens (immobilisé pour cause de bouchon de caméras au niveau du camion du PS), les casseurs de l'inutile n'ont pas fait le jeu du Monarque à Paris.

A notre arrivée aux Invalides, une délégation ministérielle nous attendait...
"Et maintenant, jusqu' allons-nous ?"

Au fil de notre déambulation, et de la vidéo "No Comment" du jour, nous avons posé la question à plusieurs représentants politiques opposés à la réforme :

- Cécile Duflot (EE)
- Jean-Luc Mélenchon (PG)
- Arlette Laguiller (LO)
- Gérard Filoche (PS)
- Jean-Paul Huchon (PS) :





18h00. Esplanade des invalides quadrillée par les CRS. De la mêlée des corps fatigués par les jours de marche, de cris et de colère, monte une voix qui ne blague pas : "la prochaine fois c'est L'Élysée !".


[1] "je rêvais d'un autre monde", Jean-Louis Aubert, Téléphone. Jadis musique de manifestation, aujourd'hui reprise comme illustration musicale du spot publicitaire de Malakoff-Médéric.



18 octobre 2010

Rioufolike

par

Je récuse la représentativité des éditocrates qui se joignent, depuis des semaines, aux manifestations de déni et de blocage du gouvernement. La vision de ces jeunes de 40 à 80 ans, mobilisés contre la révolte du peuple, suffit à me convaincre de leur embrigadement. Ces petits vieux sans âge, fruits des endoctrinements de la droite et de l'ultra-libéralisme qui compose le collectif de serviles "La retraite, mon Monarque on va t'aider à la rentrer dans leurs crânes de cons", délégitiment la spontanéité de leurs éructations réactionnaires, régulièrement erronées, sans idéaux ni slogans novateurs.

Je sais: il convient de répéter que ceux qui défilent en continu d’un plateau télé à un studio de radio, en menaçant l’économie de tous les maux si les grèves sont reconduites, ont le soutien des Français excédés. Mais ceux-là voient bien que la droite, qui prend souvent chez les moins fortunés la forme d'une taxe en plus ou d'un coup de matraque dans la gueule, tente ici un passage en force en abusant de la démocratie et en attisant les braises. Quand Ségolène Royal appelle les jeunes à "descendre dans la rue" tandis que Martine Aubry évoque "un affrontement entre le pays et le gouvernement", elles illustrent la réalité de ce qu'inspire au peuple l'Union pour le Mouvement Populaire.

Le dressage subi par ces éditocrates est tel qu'ils défendent un système par capitalisation, dont tout le monde sait déjà qu'il sera sans conséquence pour eux. Ils sont les plumeurs de dindons d'une farce qu'ils ne perçoivent même plus. La seule raison qu'ils auraient de râler à longueur d'articles et de chroniques serait de le faire contre ceux qui les instrumentalisent et leur cachent la vérité. Mais ce sont ces faussaires, qui sévissent depuis des lustres, que soutiennent ces journalistes à la bonne foi abusée par une trop forte proximité idéologique.

Leur combat est d'autant plus risible qu'un récent sondage de l'Ilfaut fait ressortir chez 90% des chroniqueurs de droite une perte de confiance dans le système de retraite par répartition, au profit de l'épargne. On y apprend aussi que 73% d'entre eux souhaiteraient défiscaliser plus pour gagner plus, contre seulement 12% à faire des émissions de service public digne de ce nom et 23% à "faire des ménages" dans des grandes entreprises privées. Ces analystes obsolètes qui se la jouent branchés, se pensant "insoumis", en rupture avec des millions de travailleurs et de futurs travailleurs bien trop conscients des acquis de leurs ainés, sont assurément les plus lénifiants.

(...)

Mazette, Vogelsong a raison : comme il est simple et reposant d'écrire comme Ivan Rioufol.

16 octobre 2010

[video] 16 octobre, no comment

par

Colère et détermination. Ils sont toujours là à braver le froid et la pluie pour faire du bruit.

Vidéo sans commentaires (autres que musicaux) de la journée de mobilisation du samedi 16 octobre 2010 contre la réforme des retraites à Paris.





Vous noterez une légère interruption du film entre Bastille et Nation pour cause de ravitaillement et débat en bistrot avec quelques camarades blogueurs il fut question de la tournure des évènements :

- La réduction du débat médiatique ces derniers jours à la seule personne du Monarque sous l'angle du "cédera-t-il ou non ?" avec son complément immédiat "bien sûr que non il ne cédera pas".

- Le mutisme d'un gouvernement[1] pourtant si prompt à l'ouvrir à tort et à travers au moindre sujet.

- Sa possible stratégie du pourrissement, à savoir attendre le débordement et la casse pour nous rejouer la partition de l'ordre et de la sécurité (alors que les seuls vrais débordements actuels sont plutôt du côté policier) et retisser du "lien" avec l'électorat déçu de droite.

- L'énorme pas en avant accompli en six mois dans la connaissance de la problématique des retraites par l'ensemble des français, y compris les plus jeunes.[2]

- La nécessité du blocage pour passer à la vitesse supérieure et régler le destin de cette réforme au plus vite (parce que c'est pas tout ça mais ca caille sévère en hiver).


Tandis que les derniers cortèges déboulaient Place de la Nation, nous apprenions (pas une surprise à vrai dire) le discret rejet à l'assemblée nationale, début septembre, de l'amendement Rugy, Mamère, Cochet et Poursinoff qui visait à aligner les retraites de nos élus sur le régime général et ce à la quasi unanimité des votes des députés présents ce jour-là ! Preuve qu'un référendum[3] sur les retraites, ça a du bon...

* * *

[1] Enfin je veux dire à part la septième compagnie des Yade, Lancar et Morano...

|2] Comme on a mal compris, l'UMP via la bouche à bêtises de son porte-parole de choc, nous promet un supplément de pédagogie.

[3] Oui mais alors un referendumounet entre potes.

15 octobre 2010

Les libéraux et le monde pétrifié (double picture show)

par
Actuellement en plein travail à la chaîne, publions un double billet pour :

1. répondre à une question de blogueur.
2. faire le point sur ce curieux effet climatique français voulant que, sous l'effet de la hausse de la température dans la rue, la banquise gouvernementale s'épaississe.

* * *

1. / Le libéral est un loup pour le libéral.


Un brillant blogueur me demande de lui trouver une raison supplémentaire de se moquer des libéraux. Pourquoi ? Ils se débrouillent très bien seuls. Je lui, et vous, ai donc fait une capture du message publicitaire d'un fonds privé tournant en boucle ces jours-ci sur une radio périphérique et qui vaut plus que 1000 mots.

Attention c'est un bijou. J'ai appelé cette performance d'art contemporain qui, n'en doutons point, finira exposée au château de Versailles, "le libéral ça ose tout" :







Pour en terminer des libéraux, précisons qu'il y a encore plus de fractions et de tendances chez eux que dans l'extrême-gauche. Contre-effet de l'esprit de concurrence et de libre-entreprise poussée à son paroxysme : mettez 3 libéraux à table et dans la demi-heure vous aurez 5 courants opposés les uns aux autres. Dans le projet politique l'individualisme du vrai libéral joue donc contre lui.[1] C'est en cela qu'ils sont tous plus ou moins d'accord pour affirmer que Le Monarque n'est pas un libéral puisqu'il privilégie sa caste et une frange bien précise de la société, les méga-thunés. Comme quoi, parfois, nous pouvons accorder nos violons.


2 / La France (des élites) a peur :

Si j'en crois Dominique Bussereau, Ministre des transports, interviewé hier sur BFM-TV et confortablement calé dans son canapé : il n'y a aucune manifestation en France, pas de raffineries bloquées et un peuple globalement satisfait par une réforme des retraites qui doit se faire parce que... parce que bon.

Si j'en crois Yvan Rioufol[2] reprenant à son tour le flambeau de la bonne parole réactionnaire qui chauffe nos oreilles en trois huit sur les ondes depuis la rentrée : les manifestations actuelles sont "anti-démocratiques"[3]. L'éditorialiste du Quotidien de Serge Dassault émet d'ailleurs des doutes sur "la solidarité apparente des français".

Et, last but very last, si j'en crois Rama Yade : "la jeunesse ce n'est pas une question d'âge."[4]

Puisque nous sommes dans le registre de la croyance et que ce billet n'a décidément aucune structure, je ne résiste pas au plaisir de vous livrer quelques lignes de l'éditorial de Catherine Nay publié dans le "Valeurs Actuelles" du 30 septembre dernier. Il est intitulé "De la difficulté de radicaliser" :

"Mais les jeunes auront-ils envie de se joindre à des aînés qui refusent de travailler un peu plus, alors que ce sont eux qui devront payer leurs retraites. Trouver un travail, et vite, et avec un bon salaire, ils y pensent plus qu'à la retraite..."

Et dire qu'elle est grassement payée pour ça et que moi pas du tout.

Bref, la classe politico-médiatique est sonnée par la montée de la contestation et son approbation massive par les français, n'ayant vu venir ni l'une ni l'autre, persuadée qu'elle était que la réforme s'enfilerait comme une pantoufle à force de rabâchages des sbires UMP le tout badigeonné d'une bonne dose de Duhamel matin, midi et soir.

Les médias font donc de la contestation ce qu'ils ont l'habitude de faire : du feuilleton (bon, on n'en est pas encore au live type "mineurs chiliens" et pour l'analyse c'est toujours largement Medefo-compatible mais, constatons un progrès par rapport aux précédents mouvements qui furent globalement minimisés).

Le gouvernement, lui, se cogne contre les murs de son impasse. Tantôt dans le déni, tentant parfois d'infantiliser des jeunes qu'il n'a eu de cesse le reste du temps de vouloir rendre légalement responsables de tout dès 12 ans.

Le Monarque, lui, se terre dans son bunker. Il attend, entouré de quelques conseillers de l'extrême, comme à chaque passe compliquée de son quinquennat, le fait divers qui fera son affaire.

Prévisible politique d'un triste commercial en panne d'inspiration pour nous refourguer sa camelote : une réforme faite avec les pieds visant simplement à accélérer (mais après 2017) la privatisation des biens collectifs pour les Carmignac de son entourage. L'ego-centré est capable de nous sacrifier jusqu'au dernier pour ne pas perdre la face et son triple A, prosterné devant cette grande finance qu'il veut épater.

Gouvernement suffisant et déconnecté de la plus simple des réalités de ceux qu’il accuse de tous les maux à longueur de journées. Les Français n'en ont pas assez "d'être pris pour des cons", ils en ont assez de ça et de souffrir en plus. C’est à notre tour de ne pas céder. Jeunes, vieux, lycéens, fonctionnaires, salariés du privé, chômeurs, glandeurs professionnels, blogueurs ou précaires... si nous reculons, c'en est fini de nos espoirs.[6]


(L'UMP vous présente sa collection automne-hiver 2010 "Négociation et gestion courante des affaires sociales.") capture : Salam93 / Lepost.


[1] oui, à terme, suivant sa logique, le libéral tue le libéral d'en face (c'est un peu l'angle mort du raisonnement.)

[2] même Lady Gaga en promo n'a pas autant de temps d'antenne.

[3] RTL, 12/10/2010. 19h15.

[4] France 2, A vous de Juger, 14/10/2010.

[5] Attention : le libéral te dira que l'on est beaucoup plus heureux qu'il y a 100 ans, que l'on vit en meilleure santé et que le système nous enrichit tous. Réponds-lui : "Ah ouais... est-ce que tu peux me garantir la même chose pour dans 10 ans.", ça devrait l'occuper.

[6] Si jamais tu manques de motivation, le spot Carmignac est à ta disposition sur ce site en 24/24.

11 octobre 2010

[video] Le Parti Communiste en examen

par

Dur de marcher dans les pas de Georges. La semaine passée, quelques blogueurs dont ma pomme rencontraient au siège mythique du Parti Communiste, Place du Colonel Fabien, son nouveau secrétaire : le relativement discret Pierre Laurent.

Je ne partais avec aucun à priori, le connaissant mal et ne sachant trop si nous allions parler au présent, au passé ou au futur. L'ancien directeur de l'Humanité livre avec précaution, soupesant chaque mot, sa version des faits relative à la [mode euphémisme on] petite baisse de tonus décimant le PCF depuis une dizaine d'années, acceptant (un peu) l'autocritique...


"L'idée communiste a de l'avenir dans le XXIe siècle
[...] La question du XXIe siècle va être de d'inventer un autre mode de développement pour les civilisations que le système capitaliste [...] et l'idée communiste a quelque chose à dire sur cette invention là, peut-être pas seule."
C'est ce que P.Laurent répond à notre sympathique entrée en matière à base de "est-ce que vous ne serez pas le dernier secrétaire national du PCF ?", "le PCF est-il toujours un parti antisystème ou un parti coco-démocrate ?" et autres "le Parti n'a t-il pas perdu sa part d'utopie ?"

P.Laurent se sait légataire d'une histoire mais déclare ne pas être en poste pour "entretenir un patrimoine" et répète vouloir "se tourner vers l'après" insistant à plusieurs reprises sur le rôle du Front de Gauche : "un cadre ouvert de débat pour dépasser le seul stade des militants", "le front de gauche correspond à quelque chose qui existe dans la société bien plus que ne le laisse voir notre résultat électoral.", "sur la bataille des retraites, ce que l'on porte ne fait pas que 2% de la société française."

Même s'il ne minimise pas les responsabilités du Parti, les mauvais résultats électoraux du PCF s'inscrivent à son sens dans une suprématie idéologique du capitalisme : "[cet] horizon du monde qui règne depuis 20 ans est allé jusqu'à imprégner la gauche, même le PC a été un peu victime de cela. Reconnaissons qu'une partie du PC a un peu trop été sur la défensive face à un idéal que des générations de militants voyaient s'écrouler à l'Est. [...] il y a des périodes ou la société est portée par des utopies et d'autres ou la société intègre un peu trop son impuissance."

La baisse de popularité du PC s'inscrit également pour lui dans un rejet plus global des figures politiques actuelles, en total décalage avec la société. Dans ce domaine, il tape à plusieurs reprises sur le Parti Socialiste pas assez en rupture, voire plus, avec "les forces de l'argent" :

"Des gens s'écartent de la politique mais beaucoup sont en attente. On l'a vu en 2005. lors du referendum. [...] Sur les retraites, c'est là même chose qui se passe. Le gouvernement martèle mais progressivement [...] les gens étudient le problème, regardent les conséquences du projet de loi et se font une opinion. "

Il dénonce un débat politique figé auquel le traitement médiatique, notamment du service public, n'arrange rien :

"- Je pense que si les millions de gens qui sont dans la rue en ce moment sur la question des retraites s'investissaient autant dans le débat politique, je suis sûr que [...] le centre de gravité de la gauche ne se déplacerait pas à droite, mais à gauche."

Ci-dessous, la dernière partie de l'entretien relatif aux retraites (intégralité de l'interview en fin de billet) :

1er extrait : La poursuite de la mobilisation


2e extrait :
Les femmes et la réforme des retraites, une question spécifique ?


3e extrait : L'impasse gouvernementale, les propositions du PCF sur le financement des retraites.


* * *

"Le cadre ouvert" a tout de même ses limites. Lorsqu'on lui parle d'une éventuelle inscription du candidat du Front de Gauche dans les primaires socialistes en vue de la présidentielle, il botte en touche redoutant une concertation uniquement axée autour de la question du candidat le plus apte à détrôner Le Monarque, remplaçant le débat d'idées par une politique de l'opinion :

"La question en 2012, ce n'est pas quel président on va élire, mais à quelle majorité politique on va donner le pays."

Il reste en revanche relativement évasif sur la vague de départs des "refondateurs" du PC (Patrick Braouezec, Patrick Jarry, François Asensi, Stéphane Gatignon... ) en juin dernier, évoquant une question de timing. Certains, comme l'historien Roger Martelli, dénonçaient alors une "structure fossilisée" [...] "malgré la richesse inestimable de ses militants et de ses élus."

Pierre Laurent, lui, confirme que "le débat existentiel" qui a animé le PCF durant 15 ans est derrière lui : "j'ai été élu pour continuer ce parti et le transformer profondément."

Transition de la direction ou dernier état des lieux avant remise des clefs ? Je quitte la place avec encore moins de certitudes qu'à mon arrivée, même si mon interrogation grammaticale du début est résolue : nous avons majoritairement discuté au présent et au futur.


Articles associés :
-Article de Piratages
-Article de reversus
-Article d'intox2007
-Article de Zeyesnidzeno

...et l'intégralité de l'interview vidéo de Pierre Laurent(La candidature d'André Chassaigne, les inspirations intellectuelles aujourd'hui, le Front de Gauche, le PC et les quartiers populaires... durée : 50 mns) :

Top Ad 728x90