5 juillet 2010

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La rigueur : Cet obscur objet du désir

Éloignez les enfants, le plaidoyer pour une fessée nationale intitulé "on veut notre plan de rigueur !" signé Agnès Verdier-Molinié, publié en page 27 du dernier Valeurs Actuelles (l'hebdo des droites libérales, réactionnaires et décomplexées avec une page culture sur De Gaulle aussi) sonne plutôt SM.

Ça tombe bien, ce sont mes initiales préférées.

Initions-nous à "cette France en retrait par rapport à ses partenaires" ce qui, vous en conviendrez, empêche tout plaisir.

D'entrée de texte, prenant exemple sur le plan de 80 milliards d'économie adopté par l'émoustillante Allemagne, un pays où, en guise de préliminaires, "rappelons que les agents publics n'ont pas le droit de grève et sont pour 60% d'entre eux, employés sous contrat de droit privé", la directrice du think thank libéral Ifrap (fort) rage de notre réluctance nationale à entrer de plein pied dans la rigueur assumée, à coups de mandales dans la fonction publique et de planche à clous dans les aides sociales.

L'auteur apprécie toutefois la qualité de certains gels (gel des dépenses de l'état sur trois ans et des dotations aux collectivités locales). Mais attention aux effets indésirables : "En parallèle, la révision générale des politiques publiques continue avec 100.000 postes non renouvelés au niveau de l'État mais, dans le même temps, les collectivités risquent d'embaucher autant d'effectifs." Ces rustauds de fonctionnaires avec leurs flasques paluches ankylosées par l'inactivité mollasse ne connaissent rien à la sophistication érotique des libéraux.

Tout bon désir est teinté de peur, comme celle fondamentale de "perdre la notation triple AAA à cause des dettes publiques". Le Triple AAA au triquomètre de la finance d'état, c'est le calibre minimum. Conseil pour toi le peine-à-gagner : si tu veux partager un moment complice avec l'élite réformatrice, raide Agnès ou Sorman courbettes, avec le vocabulaire tu seras prudent.

Avant d'entamer la parade amoureuse potasse le lexique de leur libido mâtiné de "couper les prestations", "réduire les subventions", "baisser les salaires et les pensions" et éventuellement d'"augmenter les impôts". Apprends toutefois à connaitre ton partenaire avant de lui soumettre cette dernière pratique : elle est encore injustement considérée un poil fist-fuckesque par certains d'entre eux.

Même si l'auteur reconnait qu'il subsiste certains étalons du haut-fonctionnariat tel Jean-Pierre Jouyet qui "sent que le vent de la dépense tourne et propose systématiquement de réduire son salaire", ce pays reste entaché de tue-l'amour nommés salariés du secteur public probablement pas payés le dixième de ce que le président sus-nommé de l'autorité des marchés financier doit toucher !

Heureusement, pour redresser la barre, la dévouée laborantine des dominants te propose sa médecine en deux temps :

1er temps, t'apprendre les bonnes manières :
"Alors, pourquoi ne pas dire que nous n'avons pas de recette magique et que nous devons, comme les autres, trouver des viviers d'économies au-delà des traditionnels boucs émissaires que sont les niches fiscales ? "

Pas touche au pognon des grands. La rigueur c'est hot et les niches c'est plein de riches, si c'est toi qui prend la torgnole ça les fait se sentir mieux. Le SML (sado-masochisme-libéral) est une pratique d'esthètes. Comme on dit : ça fait mal la première fois, la deuxième aussi mais faut y aller à fond pour être au top.

Lecteur, je sens chez toi monter l'excitation. Lis-donc la suite...

"A court terme, le plan de rigueur devrait comprendre, comme chez nos voisins européens [chez nos partenaires grecs par exemple qui en connaissent un rayon sur le raffinement des techniques de baise], le gel, voire la baisse [pour que les fantasmes se réalisent, brisons tous les tabous], des salaires des agents publics et de tous les personnels rémunérés sur fonds publics [ils vous ruinent toujours l'ambiance dans la partouze ces cons], ainsi que le gel des embauches publiques."
2eme temps, une fois que t'as compris qui est le maître et où est l'esclave : le coup de poing américain.
"Dans un second temps, des réformes de fond mériteraient d'être envisagées : fixer un pourcentage maximal d'agents publics par rapport à la population active à 15%, supprimer le statut public pour les fonctions non-régaliennes de l'état, [bref, tout ce qui n'est pas la justice, l'armée ou la police. Et je vous le demande messieurs : Quoi de plus stimulant qu'une thérapie foirée du cancer de la prostate facturée 19.250 euros ?] mettre en place un système de retraites universel et égal pour tous [reste à savoir si on le plafonne au niveau de Liliane Bettencourt ou de Patrick Tempspartiel] ainsi qu'un bouclier social qui fixerait un maximum de prestations par foyer fiscal [faut pas déconner non plus : tout ce flouze injustement détourné du marché-roi au nom du bien être et de la survie des individus - accessoirement consommateurs -, c'est scandaleux ! Notons au passage la perversion, façon gode ceinture, du terme "bouclier social".]

T'as moins envie hein ?

Même si on te dit que ça va te faire du bien : tu n'es probablement pas assez ouvert d'esprit ou alors bien trop pauvre pour apprécier ce type de littérature olé-olé.

Tout bon texte SML s'oriente vers un bouquet final bétonné à base de "les études économiques les plus sérieuses" établissant que "au-delà de 90% de PIB, la dette devient un frein à la croissance" pour conclure que "Accepter la rigueur ou survivre sans croissance, sans créations d'emploi, sous des monceaux de dettes, voilà le dilemme de la France."

Concernant cette croyance que la réduction des dépenses publiques (donc la désintégration progressive des administrations, des aides, du service, du lien, et son corollaire, la progression de la sphère concurrentielle dans le domaine de la santé, de l'éducation, des infrastructures, le tout dans un contexte de large chômage avec stagnation voire régression des salaires dans le secteur privé, parallèlement aux explosions des charges foncières ou locatives et donc des impayés, de nouvelles taxes, une chute de la consommation - solvable -, une baisse du moral sans précédent et des situations de sur-endettement en pagaille) provoquerait une croissance de niveau 9.1 sur l'échelle Lagardienne de Riche-très[3], mon expert personnel en logique mathématique, Jean-Gonzague du CM2[4], est formel :

L'EXPERT
- Faut arrêter d'avoir la tête dans le cul !

Le raisonnement est simple et tu vas l'entendre ad-nauséum dans les semaines à venir : A défaut de croissance, distillons d'abord la croyance en la souffrance indispensable pour avoir de la croissance. Puisque je te rappelle que tu ne souffres pas assez, appauvris-toi donc un peu plus dans un état qui te laisse tomber, paye tout trois fois plus cher et jouis plus tard... au paradis du capitalisme où tu retrouveras pour une belle partie fine, arrosée d'une douche dorée aux lingots, tes copains de classe Bernard Arnault, Mamy Nonchépuouestlasuisse et Serge Dassault.

Prochainement... nous reviendrons sur le cas Challenges (le magazine qui enfile les perles idéologiques sur le macramé des réformes qui puent et caresse dans le sens du pelage le petit cadre qui se pense PDG) et son dossier de juillet intitulé : "les bienfaits de la rigueur".

Prends ton gel, ton fouet et ta rilance : tu vas déguster !

Post-scriptum.

Illustration : affiche de "Atamé" film de P.Almodovar (1990)


* * *

[1] Mais je te conseille plutôt d'acheter le dernier numéro de Fakir qui, en page 10, te décrypte le rôle publicitaire des agences de notation.

[2] Institut français pour la recherche sur les administrations et les politiques publiques.

[3] sans évoquer, mais ce n'est pas le sujet, la pertinence révolutionnaire, et pas du tout destructrice, du concept.

[4] son nom a été changé pour pas que l'on découvre qu'il se nomme Jules. Il officie également dans la prospective économique en argent de poche, le catch et plaide, en alternance avec son frère, comme avocat de la nuit blanche au barreau de son lit.

9 comments:

Anonyme a dit…

Je me demande pourquoi est-ce que la finance accorde encore de la crédibilité aux agences de notation. Après tout, elles ont pendant des années donné la note maximale aux emprunts subprimes avant de se rétracter. Elles sont donc en grande partie responsables de la crise financière de 2008.

cdg a dit…

ce qu on oublie souvent, c est que si on paye nettement moins les fonctionnaires, ceux ci vont chercher une deuxieme source de revenu (comme en grece ou dans le tiers monde). Et bienvenue dans un mode ou rien n est possible sans la petite enveloppe qui va bien

Et en restant sur le plan purement économique, un pays corrompu est rarement un pays economiquement puissant (ne serais se uniquement car il est plus interessant pour les agents economique de magouiller que de creer quelque chose d utile.)

Unknown a dit…

Oui à tout sauf sur un point, toute cette rhétorique n'est pas libérale du tout, elle est basée sur une fausse conception de la monnaie, de la propriété, et du libéralisme.

Je rappelle ici que ce qu'on devrait appeler dans ce post "plancher social" a été proposé par Milton Friedman lui même sous le terme de "revenu permanent, et est défendu notamment par Alternative Libérale : http://www.alternative-liberale.fr/index.php/index.php/programme/nouvelle-donne-sociale.html

On a pas obligé d'être libéral, on peut être contre les libertés, mais on ne peut pas admettre de nommer Libéral des mesures prises par des partis politique OUVERTEMENT ANTILIBERAUX dans l'ensemble de leurs mesures coercitives !

De plus je trouve qu'on ne met pas assez l'accent sur le contre-argument de POIDS à opposer à tout ce BORDEL :QUI EST PROPRIETAIRE DE LA NATION nom d'un Citoyen ???

Quand est-ce qu'un mouvement de CITOYENS CONSCIENTS DE LEUR CO-PROPRIETE commune va se faire jour ?

La Nation est à nous. Alors si on est capable QUE de gueuler c'est qu'on assume pas notre co-propriété.

Je propose l'impôt proportionnel sur le Patrimoine, et l'arrêt de la mascarade de l'impôt sur le revenu qui est une vaste arnaque.

BA a dit…

Mardi 6 juillet 2010 :
L'ex-comptable des Bettencourt accuse : des enveloppes d'argent à Woerth et à Sarkozy.
L'ex-comptable de Liliane et André Bettencourt révèle, dans un témoignage explosif à Mediapart, comment le couple de milliardaires a régulièrement financé, via des enveloppes contenant des espèces, des personnalités de la droite française, dont Nicolas Sarkozy.

Elle a notamment relaté un épisode – qu'elle a également rapporté lundi 5 juillet aux policiers – situé en mars 2007 et mettant en scène Eric Woerth. Ce dernier se serait vu remettre, via le gestionnaire de fortune Patrice de Maistre, une somme de 150.000 euros pour la campagne présidentielle de M. Sarkozy.

http://www.mediapart.fr/journal/france/060710/lex-comptable-des-bettencourt-accuse-des-enveloppes-dargent-woerth-et-sarkozy#comment-571471

BA a dit…

Bettencourt : l'ex-comptable accuse Woerth et Sarkozy.

« Nicolas Sarkozy recevait aussi son enveloppe ».

« Les visiteurs les plus assidus étaient des responsables du Parti républicain », précise la comptable, qui cite Edouard Balladur dont « Dédé » aurait financé la campagne présidentielle de 1995. Pour celle de Jacques Chirac, elle n'est pas sûre, mais « comme il était généreux », ça ne « l'étonnerait pas ».

Il y en a un en revanche dont Claire T. est sûre, c'est l'actuel président de la République et maire de Neuilly de 1983 à 2002 : « Nicolas Sarkozy recevait aussi son enveloppe, ça se passait dans l'un des petits salons situés au rez-de-chaussée (…) C'était un habitué. Le jour où il venait, lui comme les autres d'ailleurs, on me demandait juste avant le repas d'apporter une enveloppe kraft demi-format, avec laquelle il repartait ».

http://www.lefigaro.fr/politique/2010/07/06/01002-20100706ARTFIG00285-bettencourt-l-ex-comptable-accuse-woerth-et-sarkozy.php

Seb Musset a dit…

@cdg > exact, double effet kiss cool.

@stéphaneLaborde > Par delà la définition entrepreneuriale que l'on a généralement en tête, le libéralisme est d'abord une vision individualiste (rien de méprisant ou de méprisable là-dedans).

La perversion est d'avoir érigé une philosophie de l'être unique face aux autres comme modèle de société.

Cette logique est vite incompatible avec la notion de bien commun.

Anonyme a dit…

Pour se faire élire, il faut créer du l'illusion du bonheur. Dans nos sociétés marchandes le Bonheur est lié au pouvoir d’achat,le pouvoir d'acheté plutot, comme dirait Seb . Nos politiques doivent donc arroser toujours plus de liquidités pour remporter leur ’marché politique’.

Les sociétés occidentales, autrefois appelées pays industrialisés, se sont désindustrialisés au profit des pays asiatiques. Elle ne peut donc plus créer ces liquidités à partir du travail, il leur faut donc les créer par le capital. D'où la nécéssité des Banques.

Le moyen de plus efficace de créer ces liquidités est de garder les taux d’intérêts à zéro en termes réels. Le problème, c’est que ces taux d’intérêts sont uniformes qu’ils soient destinés à la consommation ou à l’investissement. L’affflux de liquidités sur les marchés mobiliers et immobiliers créent des bulles qui profitent aux possédants (ancienne génération) mais rendent l’accès à la propriété impossible pour les jeunes générations. De plus, dans un monde fini, la demande de matière première induite par ces liquidités crée des tensions sur le marché des matières première. On arrive alors à la limite de la politique keynesiennes, l’inflation par la demande venant assécher les liquidités et la demande sur l’immobilier se tarit. Les prix, dans un marché libre, chutent et les liquidités disparaissent, laissant les individus et les banques insolvables. L'état fait alors marché la planche à billet, ce qui est reculé pour mieux sauter.

Le politicien ne pouvant être élu sur un programme de rigueur. Le père fouettard n’est pas des plus sympathiques. Il faut donc, pour garder le pouvoir, sauver l’effet richesse du capital et intervenir par des mesures fiscales incitatricces pour garder les valorisations mobilières et immobilières au dessus de leur prix d’équilibre.

Système injuste puisqu’il rigidifie la structure des classes possédantes. Les populations les plus âgées prospèrent de ces bulles alors que les plus jeunes doivent payer une rente de plus en plus lourde avec des opportunités de plus en plus rares.

Mais dans des sociétés vieillissantes, favoriser les rentes assure un rente politique, puisque la majorité vit de son travail passé (capital).

Voilà pourquoi nos hommes politiques ont le regard fixé sur les courbes des prix immobiliers et des marchés actions. Leur pérennité dépend entièrement de la bonne santé des ces marchés. Il faut sans cesse créer plus de richesse capitalistique à défaut de pouvoir la créer par le travail.

Anonyme a dit…

Pour se faire élire, il faut créer du l'illusion du bonheur. Dans nos sociétés marchandes le Bonheur est lié au pouvoir d’achat, d'acheté plutot, comme dirait Seb Musset. Nos politiques doivent donc arroser toujours plus de liquidités pour remporter leur ’marché politique’.

Les sociétés occidentales, autrefois appelées pays industrialisés, se sont désindustrialisés au profit des pays asiatiques. Elle ne peut donc plus créer ces liquidités à partir du travail, il leur faut donc les créer par le capital. D'où la nécéssité des Banques.

Le moyen de plus efficace de créer ces liquidités est de garder les taux d’intérêts à zéro en termes réels. Le problème, c’est que ces taux d’intérêts sont uniformes qu’ils soient destinés à la consommation ou à l’investissement. L’affflux de liquidités sur les marchés mobiliers et immobiliers créent des bulles qui profitent aux possédants (ancienne génération) mais rendent l’accès à la propriété impossible pour les jeunes générations. De plus, dans un monde fini, la demande de matière première induite par ces liquidités crée des tensions sur le marché des matières première. On arrive alors à la limite de la politique keynesiennes, l’inflation par la demande venant assécher les liquidités et la demande sur l’immobilier se tarit. Les prix, dans un marché libre, chutent et les liquidités disparaissent, laissant les individus et les banques insolvables. L'état fait alors marché la planche à billet, ce qui est reculé pour mieux sauter.

Le politicien ne pouvant être élu sur un programme de rigueur. Le père fouettard n’est pas des plus sympathiques. Il faut donc, pour garder le pouvoir, sauver l’effet richesse du capital et intervenir par des mesures fiscales incitatricces pour garder les valorisations mobilières et immobilières au dessus de leur prix d’équilibre.

Système injuste puisqu’il rigidifie la structure des classes possédantes. Les populations les plus âgées prospèrent de ces bulles alors que les plus jeunes doivent payer une rente de plus en plus lourde avec des opportunités de plus en plus rares.

Mais dans des sociétés vieillissantes, favoriser les rentes assure un rente politique, puisque la majorité vit de son travail passé (capital).

Voilà pourquoi nos hommes politiques ont le regard fixé sur les courbes des prix immobiliers et des marchés actions. Leur pérennité dépend entièrement de la bonne santé des ces marchés. Il faut sans cesse créer plus de richesse capitalistique à défaut de pouvoir la créer par le travail.

Baillergeau a dit…

Il est logique que les pouvoirs en place et leurs valets fassent porter sur plus faibles qu'eux, le poids des conséquences de leurs errements.

Ce qui l'est moins, c'est que les forces de gauche soient incapables de croire et de faire partager la nécessité absolue de construire une puissance fédérale européenne seule capable d'organiser la lutte contre les structures internationales qui dominent le monde.

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