16 juillet 2008

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POUR QUI SONNE LE GLAS ?


9.2 % de hausse sur un an. Avec une telle inflation, la bataille américaine pour "le pouvoir d’achat", c’est dépassé.

Non, aux États-Unis désormais la grosse question, la "big issue", c'est "le pouvoir d’habiter".

Ce soir dans son célèbre talk-show sur CNN, Larry King reçoit Barbara de Santa Barbara (ça ne s'invente pas). En duplex californien, Barbara est la star de la soirée. Un nouveau people surgi de l'espace ? Non, une femme du peuple qui survit dans un monospace. Depuis son expropriation par la banque il y a deux mois, son mini-van est parqué dans un de ces bivouacs pour néo-indigents aménagés par les municipalités à leurs périphéries. A l'arrière du van, la sexagénaire enlace ses deux labradors tandis que Larry lui demande comment elle en est arrivée là :

- Je n'ai pas fait attention, je n'ai pas assez lu, je pensais que tout irait bien.

Souriante, la déshéritée de la middle-class comme il y en a des millions déclare que l’être humain est ainsi fait par Le divin qu’il peut s’habituer à tout. Elle passe bien à l’image et vend bien son baratin, ça devait être une commerciale.


Depuis deux mois, Barbara a rejoint les parking perdus de ces américains qui ne se pensaient pas si pauvres ou s’imaginaient moyennement riches, chassés de leurs maisons pour cause de banqueroute personnelle. On en compte 6 pour 1000 américains selon CNN.

Rivée à son gros véhicule, "thank god!" déjà remboursé, une main sur le bible l'autre sur ses baveux cerbères, l'américaine fidèle en un demain éternellement mieux patiente sereine que les temps changent.

- Ça va pour l'instant Larry, c'est l'été, il fait chaud.
Sur le plateau de Larry, 4 experts en économie et immobilier, les mêmes qui ont poussé Barbara à acheter six ans plus tôt, saluent son témoignage positif, la preuve d’un caractère constructif qui ne se laisse pas abattre, une "true american". L’une d’eux, presque humaine, lui donne des leçons de vie dans la plus pure tradition du "coaching" de téléréalité histoire que la pauvresse, quémandant désormais sa pitance à l’assistance sociale, vive plus dignement son quotidien.

Après la page de publicité, Les experts-Washington répondent à Larry que, "oui, le rebond sera plus long que prévu mais que tout rentrera dans l’ordre". Après le marché, on ne sait pas ce qu’il y a, vraisemblablement rien donc il faut le sauver coûte que coûte. Les anciens dévots du capitalisme à la dure et autres pyromanes de la spéculation immobilière saluent l’action de l’état qui, avec l’argent du contribuable*, va renflouer les caisses des banquiers spécialisés dans le crédit immobilier véreux, Freddie Mac et Fannie Mae. Ça s’appelle du communisme appliqué aux banques, j’en ai déjà parlé ici.
Après cinquante ans de propagande médiatique passée à terroriser des générations d’américains, de La chasse aux sorcières à Rocky IV , au sujet d'un communisme qui sonnerait la fin de l’american-way-of-life, l'Armaggeddon conjoint du marché et de l’idéologie bourgeoise, voilà qu'on explique aujourd'hui sur CNN comment le communisme (spécifiquement) appliqué aux banques va sauver l'économie.

Barbara attend l'hiver attachée à son pays, soudée à son histoire, à ses valeurs et à ses grands entrepreneurs : Rockefeller, Al Capone et Disney. Licenciée économique d’un poste qui lui laissait peu de temps pour elle, Barbara va désormais pouvoir lire. Gatsby Le Magnifique par exemple, un classique. Dans cette fable sur l’opulence des nantis rédigée dix ans avant la grande dépression, Francis Scott Fitzgerald gravait en prose la tendance du capitalisme à venir, gestion virtuelle en perpétuelle crise dans lequel le pays s’engouffrait pour, tôt ou tard, en sortir perdant. Le poète écrivait :

« There are no second acts in the american dream »

On ne lit pas assez les poètes. Sensibilisés aux effets plus qu’aux causes dont au fond ils se moquent bien, leurs analyses économiques sont souvent plus justes que celles des experts qui, eux, sont intéressés.

Et La France me direz-vous ? Tout va bien. Pour l’instant, le combat c’est encore "le pouvoir d’achat". Question immobilier, "nous devrions être moins touchés". C’est ma muse à moi, Christine Lagarde**, qui me l’a soufflé.


Deux conseils de poète pour la route :
- Oubliez la saison 4 de Lost (SPOILER : L’île va disparaître). L’action cet été c’est sur Bloomberg Tv que ça va se passer (SPOILER : les illusions vont s’évaporer)

- Pour conserver votre argent : favorisez votre poche plus que votre banquier.


* Ce type qu’on taxe du berceau à la pierre tombale, qu’entre temps on a fait trimer avant de le jeter à la rue sans soins ni armure.

** Ce ministre des finances qui, tous les 3 mois, use jusqu’à la corde toutes les ficelles du media-training pour annoncer au peuple, sourire crispé, qu’elle réévalue à la baisse la taux de croissance français.
Selon ses savantes corrections, ce chiffre devrait rejoindre celui quasi nul que je prévoyais il y a un an du fond marécageux de mon amateurisme de "déclinologue".

4 comments:

Anonyme a dit…

ce qui est énervant c'est de voir qu'il va se passer des choses décisives cet été, dans les prochains jours, qui vont probablement influer énormément sur notre avenir, et que les rédactions des chaines info sont toutes en vacance depuis le 14 Juillet, et qu'on aura droit qu'à des explications minimales.

Unknown a dit…

Pour l'instant, on s'apitoye sur le sort de ces ex-contribuables, preuves vivantes que le Dow Jones peut prendre des valeurs négatives.

Il n'est pas dit que dans quelques mois, quand ils deviendront très envahissants, on ne vote quelque loi leur interdisant tout un tas de trucs. Ou tout simplement appliquer les inévitables lois sur le "vagabondage" qui font des marginaux des coupables.

Anonyme a dit…

On est dans la merde, avec des oeillères et un pince-nez sur la tête...Et on s'enfonce tranquilos jusqu'à ce que l'on est la bouche dedans...

Anonyme a dit…

Et ce sera trop tard pour crier au secours arriver là...

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